DROESCH Maurice, Léon

Par André Caudron, Nathalie Viet-Depaule

Né le 29 août 1910 à Reims (Marne), mort le 11 avril 1979 à Paris (XVIIe arr.) ; prêtre diocésain (1938), résistant du réseau Possum, affecté à la Mission de Paris (1949), prêtre-ouvrier au Kremlin-Bicêtre et à Gentilly (Seine, Val-de-Marne), insoumis (1954) ; ouvrier dans l’industrie pharmaceutique ; secrétaire de section CGT, militant du Mouvement de la paix à Ivry-sur-Seine (Seine, Val-de-Marne).

Fils d’un balancier – « celui qui fabrique et vend des balances », selon le Robert –, Maurice Droesch consacra ses loisirs d’adolescent aux Scouts de France et fonda la troupe appelée « 7e Reims » avant d’entrer au grand séminaire. Il fut ordonné prêtre de son diocèse le 16 avril 1938 et nommé vicaire de la paroisse rémoise de Saint-Benoît, dans un quartier populaire, celui de la Verrerie, ainsi nommé parce qu’on y fabriquait des bouteilles de champagne. Il était en même temps aumônier jociste. «  Il a un très beau passé de vicaire d’avant-garde », dira de lui, en 1953, le père Hollande, supérieur de la Mission de Paris. Pendant la Seconde Guerre mondiale, l’abbé Droesch, affilié au réseau Possum avec l’abbé Lundy, autre vicaire, cacha des publications du Témoignage chrétien sous l’autel de l’église, prêta des soutanes aux aviateurs alliés en cavale et assura leur hébergement.

L’influence de son compatriote et ami François Laporte*, membre de la Mission de Paris et responsable de la Mission de France féminine, orienta Maurice Droesch vers la Mission de France. Il fit un séjour au séminaire de Lisieux (Calvados), au cours de l’année 1949-1950, comme « petit père », appellation donnée à ceux qui, déjà engagés dans la vie sacerdotale, venaient chercher un complément de formation. L’évêque de Reims, Mgr Marmotin, avait bien voulu le « prêter » à la Mission de France « pour quelques années ». Fin 1949, Maurice Droesch fut accepté à la Mission de Paris en remplacement de Jean Desailly, parti du Kremlin-Bicêtre (Seine, Val-de-Marne) afin de renforcer l’équipe du Masgoulet à Limoges (Haute-Vienne). Il fut ainsi, avec Jean Gray* et Bernard Mercier, l’un des trois prêtres que le cardinal Suhard, archevêque, admit in extremis dans l’équipe à la veille de sa mort.

Maurice Droesch fut embauché comme ouvrier aux établissements Pierre Byla, laboratoire de produits biologiques de Gentilly (Seine, Val-de-Marne). Entré à la CGT Chimie, il se retrouva rapidement secrétaire de sa section syndicale et secrétaire du comité d’entreprise. D’esprit très organisateur, observant en même temps une grande méfiance vis-à-vis des communistes, il s’engagea néanmoins au Mouvement de la paix. Par la suite, il se lia d’amitié avec Charles Frérot, maire communiste de Gentilly. Maurice Droesch siégeait par ailleurs au bureau de la Fédération nationale des déportés et internés, résistants et patriotes dont il fut délégué auprès des ouvriers allemands contre le réarmement.

Le 15 juillet 1951, à Paris, il prit part à l’Assemblée nationale pour le pacte de paix, parmi les trente-cinq prêtres-ouvriers présents. Vice-président du Conseil de la paix d’Ivry-sur-Seine (Seine, Val-de-Marne), il signa en 1952, à ce titre, un appel à la population de cette ville contre le général Ridgway, et l’année suivante une lettre demandant la grâce des époux Rosenberg et un appel en faveur d’Henri Martin*. En septembre 1952, il revint enthousiaste d’un voyage en Hongrie où il avait accompagné des camarades ouvriers ; il fit une conférence à l’Institut hongrois de Paris sur les institutions sociales de ce pays. Ces prises de position lui valurent l’hostilité du syndicat des produits pharmaceutiques CFTC qui engagea des démarches à son sujet auprès de l’archevêché de Paris. Il n’en signa pas moins, en avril 1953, l’appel de militants ouvriers chrétiens, dénonçant l’attitude des dirigeants de la CFTC à propos d’une grève.

Lors de l’interdiction faite aux prêtres-ouvriers de travailler en usine, Maurice Droesch parut d’abord hésitant sur la conduite à tenir. Un rapport de police du 2 février 1954 signalait toutefois qu’il « manifesterait toujours la même activité et, notamment au cours de la journée revendicative du 29 janvier, il aurait joué un rôle actif en entraînant le personnel des établissements Byla à débrayer, et en prenant la tête d’une délégation des ouvriers se rendant auprès des pouvoirs publics ». En fin de compte, il signa le 10 mars 1954 la lettre où vingt-deux prêtres de la région parisienne informaient le cardinal Feltin de leur décision de rester au travail.

Il fit ensuite partie, avec Jean Desailly, Jean Gray et Paul Guéry, de l’équipe des insoumis du secteur d’Ivry-Malakoff (Seine, Hauts-de-Seine). En septembre 1956, il manifestait encore, dans une lettre, son amitié au père Hollande : «  Soyez assuré que je n’ai rien oublié de ce qui nous a unis et qui demeure malgré tout. Croyez aussi que de tout cela je vis encore [...] Oui, ce n’est pas facile de voir clair, de savoir ce qui est le meilleur, ce qui est vrai ». On le retrouva peu après au Maroc où il était parti avec un autre insoumis, Francis Laval*, de Montceau-les-Mines (Saône-et-Loire). Recruté comme conseiller dans le monde des affaires, il avait changé d’orientation. En mars 1957, dans une carte au père Hollande, il écrivait : « Pour des tas de raisons, j’ai quitté la France pour venir travailler au Maroc. Le recul, la distance, le changement me seront, je l’espère, bienfaisants. »

Rentré plus tard à Paris, installé dans le Marais, il se maria le 6 juin 1970, à l’âge de soixante ans, avec Jeanne Barentin, sélectionnée parmi cent réponses à une petite annonce. Le couple eut un enfant. Maurice Droesch, depuis son départ au Maroc, avait apparemment renoncé à toute activité militante et aux contacts avec ses anciennes relations. Il eut des obsèques religieuses.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article22980, notice DROESCH Maurice, Léon par André Caudron, Nathalie Viet-Depaule, version mise en ligne le 25 octobre 2008, dernière modification le 27 octobre 2009.

Par André Caudron, Nathalie Viet-Depaule

SOURCES : Centre des archives du monde du travail, Roubaix, 1993002/0004, 0008. — Archives historiques de l’archevêché de Paris, fonds Feltin, IDXV 33-1. — Arch. Ppo, rapports 21 décembre 1953, P 13 pièce 675 ; 2 février 1954, P 13, dossier 306 805. — Jean-Pierre Husson, La Marne et les Marnais à l’épreuve de la Seconde Guerre mondiale, Presses universitaires de Reims, tome 1, 2e édition, 1998. — Pierre Beuvelet, Un quart de siècle... Une tranche de vie ! t. 1, Nice, 1989, http://war.megabaze.com. — Le Travailleur, Ivry, 14 mai 1952, 20 juin 1953. — L’Humanité, 3 avril 1953. — Témoignage de Jean Desailly, octobre 1996, février 1997.

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