FILLION Isidore, Jean, Marie [pseudonyme Alain FAUCHE]

Par Jean-Marie Guillon

Né le 11 avril 1909 à Trans-la-Forêt (Ille-et-Vilaine), disparu le 12 juillet 1944 à Pont-Saint-Esprit (Gard) ; officier d’active ; agent P2 des services spéciaux d’Alger (réseau S.S.M.F./T.R.).

Fils d’Isidore, François Fillion, cultivateur, et de Françoise, Anne Roussel, né au hameau du Hellay de la commune de Trans-la-Forêt, il s’engagea dans l’armée en février 1928. Selon la notice qui lui est consacrée par l’Association des anciens des services spéciaux de la défense nationale (AASSDN), nommé sergent en 1930, il fut affecté à Meknès (Maroc) et participa aux opérations dites de pacification dans le territoire de Tadla (au centre du pays, entre le haut et le moyen Atlas) jusqu’à son rapatriement en métropole en 1934. Marié avec Alice Bouvier à Sougéal (Ille-et-Vilaine) le 22 septembre 1931, admis dans le corps des sous-officiers de carrière le 20 février 1932, il fut nommé sergent-chef en mai 1936. Ayant obtenu son brevet de parachutiste en 1937, il fut affecté à la 602e compagnie d’infanterie de l’Air à Baraki (Algérie) en qualité de moniteur parachutiste. Il fut blessé à trois reprises au cours de descentes en parachute. Passé adjudant, il fut dirigé vers Clermont-Ferrand en novembre 1940, puis envoyé à l’École de tir et d’armement de Cazaux (Gironde) où il obtint le brevet de mitrailleur d’avion, ce qui lui permit de devenir instructeur. Intégré à la 34e escadre de bombardement, il fut cité à l’ordre de l’escadre aérienne : " Adjudant mitrailleur et bombardier de grande valeur qui contribue pour une part au succès des missions auxquelles il participe. S’est distingué, le 3 juin 1940, par son courage et son sang-froid, au cours d’une mission où l’avion était violemment pris à partie par la DCA ennemie." Affecté à la base aérienne de Salon-de-Provence (Bouches-du-Rhône), il rejoignit l’état-major de défense aérienne du Sud-Ouest en décembre 1940, en tant qu’adjoint au commandant du quartier général. Il fut envoyé en Afrique occidentale française en 1941 en qualité de mitrailleur et se trouvait, en novembre 1943, à la direction de la Sécurité Militaire au Maroc. Il totalisait 367 heures de vol, dont 33 heures en missions de guerre. Il s’engagea alors dans les services spéciaux (réseau du capitaine Goeury) d’Alger. Volontaire pour une mission en France occupée, Il fut débarqué sur la côte méditerranéenne début juin 1944 et par sous-marin d’après la citation qui lui fut attribuée à titre posthume, ce qui est étonnant puisque les liaisons maritimes clandestines se faisaient à l’époque à partir de la Corse et par vedette rapide. On peut supposer qu’il a eu lieu sur la côte provençale, or, ce débarquement, peut-être à l’aveugle, n’a laissé aucune trace à notre connaissance. Toujours d’après sa citation, Isidore Fillion devait être l’adjoint d’un chef de poste du contre-espionnage, mais son nom n’apparaît pas dans les récits qui ont été consacrés à ce service (Pierre Nord, Paul Paillole), ni dans les tableaux publiés sur le site de l’AASSDN. Il a été arrêté probablement le 12 juillet 1944, date de sa disparition, mais on ne sait pas où, ni dans quelles circonstances. Le surprenant dans l’affaire est que son cas n’ait pas été traité par le KdS (Sipo-SD) de Marseille qui a arrêté plusieurs éléments importants du contre-espionnage dans la même période. Sans doute n’a-t-il pas été pris dans la région marseillaise. Sa citation affirme qu’il a été arrêté par la Gestapo, or son incarcération à la citadelle de Pont-Saint-Esprit (Gard) laisse planer le doute là dessus. La citadelle était la principale prison de la 8e compagnie du 3e régiment de la division Brandebourg, qui était liée à l’Abwehr et dépendait de l’état-major de la Wehrmacht. Il est possible aussi qu’il n’ait pas été identifié en tant qu’élément du contre-espionnage. Son nom n’apparaît pas non plus dans les dossiers des tortionnaires de Pont-Saint-Esprit jugés par une cour de justice ou un tribunal militaire. Quoi qu’il en soit, les méthodes que ces individus pratiquaient ne laissent aucun doute sur les sévices qu’il a subis, ni sur sa fin puisqu’il aurait été abattu sur le pont ou sur les bords du Rhône selon le témoignage d’un codétenu à son épouse. C’est ce qui advint à plus d’une vingtaine de prisonniers de la citadelle dont les corps ont été jetés ensuite dans le fleuve. Le sien ne fut pas retrouvé. La date officielle de son décès fut fixée au 12 juillet 1944 par le tribunal civil d’Alger du 6 juin 1947
Promu lieutenant à titre posthume, déclaré "Mort pour la France", Isidore Fillion a été fait chevalier de la Légion d’Honneur. Il a été décoré de la Croix de guerre 1939-1945 avec étoile de bronze et étoile de vermeil et, tardivement, le 17 décembre 1968, de la Médaille de la Résistance. Il était déjà titulaire de la Médaille militaire (janvier 1940), de la Médaille coloniale avec agrafe "Maroc" et de la Croix du combattant.
Son nom figure sur le mémorial des anciens des services spéciaux de la défense nationale inauguré le 3 mai 1959 à Ramatuelle (Var) à l’initiative du colonel Paillole.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article230436, notice FILLION Isidore, Jean, Marie [pseudonyme Alain FAUCHE] par Jean-Marie Guillon, version mise en ligne le 21 juillet 2020, dernière modification le 22 juillet 2020.

Par Jean-Marie Guillon

SOURCES : site internet Mémoire des hommes SHD Caen AC 21 P 450070 et Vincennes GR 16 P 224069 (à consulter). ⎯ notices biographiques des noms gravés sur le Mémorial national de l’AASSDN (www.aassdn.org). ⎯ Bulletin de l’A.A.S.S.D.N. n°1, p.27, n°24, p.52. ⎯ état civil.

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