Par Pierre Schill
Né le 2 juillet 1890 à Sarreguemines (Lorraine annexée), mort le 31 juillet 1952 à Sarreguemines (Moselle) ; facteur aux écritures à la Société des chemins de fer d’Alsace-Lorraine ; délégué du personnel ; membre du syndicat unitaire des cheminots de Sarreguemines ; président du syndicat CGT des retraités et veuves de la SNCF du secteur de Sarreguemines ; militant communiste puis socialiste SFIO ; conseiller municipal de Sarreguemines (1927- ?).
Fils d’un ouvrier faïencier et d’une ouvrière d’usine, Philippe Christ naquit dans une famille de neuf enfants dont il était le sixième. Il participa à la Première Guerre mondiale au cours de laquelle il fut blessé, probablement en portant l’uniforme allemand comme la plupart des Alsaciens-Lorrains alors sujets du Reich. Il était invalide de guerre.
Facteur aux écritures à la Société des chemins de fer d’Alsace-Lorraine, Philippe Christ anima au début du mois de mars 1920 la grève des cheminots à Sarreguemines. Il lutta notamment pour la libération de Jean Höhnel arrêté au cours de la grève pour entrave à la liberté du travail. En avril 1921 il était présenté par les services de police de Sarreguemines comme l’un des « membres influents » du PC et du syndicat unitaire des cheminots de la ville.
Il fut candidat aux élections municipales complémentaires du 4 février 1923 à Sarreguemines sur la liste communiste et obtint au premier tour 647 voix sur 1 892 suffrages exprimés. Au second tour il rassembla voix 772 sur 1 855 suffrages exprimés et ne fut pas élu. Il se représenta aux élections municipales du 3 mai 1925 sur la liste communiste opposée à celle du maire sortant Henri Nominé. Il obtint au premier tour 770 voix sur 2 615 suffrages exprimés et ne fut pas élu. Le 27 novembre 1927, il se présenta aux élections municipales complémentaires sur la liste communiste. Il obtint au premier tour 823 voix sur 1 950 suffrages exprimés. Au second tour, il rassembla 928 voix sur 2 187 suffrages exprimés et fit son entrée au conseil municipal.
Au début du mois de septembre 1928 il organisa à Sarreguemines une fête de propagande de la Fédération sportive du Travail de Lorraine. Des manifestations sportives et musicales devaient se dérouler dans la ville et populariser ces organisations communistes. En novembre 1922, il présidait déjà L’Arbeiter Radfahrerverein (Association des cyclistes ouvriers) de Sarreguemines. Les services de police le considéraient alors comme un militant « communiste modéré ». Il était aussi l’un des dirigeants de la chorale « Humanité ».
Philippe Christ était, au moins depuis 1928, délégué du personnel à la Société des chemins de fer d’Alsace-Lorraine. Il était particulièrement actif pour dénoncer la multiplication des accidents du travail. En février 1929 il aurait été sanctionné par la direction des chemins de fer en étant muté à Château-Salins (Moselle). Il se fit porter malade et déclara préférer démissionner des chemins de fer plutôt que d’accepter cette mutation-sanction. Cela est possible dans la mesure où en novembre 1929 il était présenté comme « ancien » employé des chemins de fer.
En mai 1929 il se présenta à nouveau aux élections municipales à Sarreguemines. Il obtint au premier tour 1 164 voix sur 2 585 suffrages exprimés. Au second tour il obtint 1 156 voix sur 2 415 suffrages exprimés et fut réélu. Il se présentait sur une liste d’opposition rassemblant « ouvriers et bourgeois ». Philippe Christ fut exclu du PC pour s’être présenté sur une liste comportant des « bourgeois ». Cette exclusion lui valut d’être écarté de la direction de la section communiste de Sarreguemines qui rassemblait les cheminots. Il fut remplacé à ce poste par Philippe Killian. Philippe Christ conserva, un temps au moins, ses idées communistes et continua à fréquenter et animer des réunions communistes. Sans que nous sachions s’il fut officiellement réintégré au PC, il fut candidat du Parti communiste aux élections cantonales des 18 et 25 octobre 1931 dans le canton de Sarreguemines. Il obtint au premier tour 519 voix pour 6 046 votants et 9 015 électeurs inscrits. Arrivé en dernière position il ne maintint pas sa candidature au second tour.
Philippe Christ fut à nouveau candidat aux élections municipales de Sarreguemines (Moselle) en mai 1935 sur la liste de gauche « antifasciste » rassemblant socialistes et communistes, opposée à celle du député-maire sortant Henri Nominé. À la surprise générale, la liste du maire sortant fut mise en ballottage. Philippe Christ obtint, au premier tour, 1 328 voix sur 2 969 suffrages exprimés. Il fut élu au second tour en obtenant 1 651 voix pour 3 077 suffrages exprimés. Le 19 mai Nicolas Nicklaus fut élu maire socialiste SFIO de la ville et Philippe Christ fut élu premier adjoint. Il était alors présenté comme « représentant ».
Il participa le 29 juillet 1935 à Sarreguemines à une réunion publique de quatre à cinq cents personnes contre les décrets-lois du gouvernement de Pierre Laval. Il souhaita la réunification syndicale et demanda la constitution d’un « front unique » des députés contre les décrets-lois. Il représentait à ce rassemblement unitaire de la gauche les retraités des chemins de fer et le syndicat des invalides de guerre.
Animateur du Front populaire, il fut candidat SFIO aux élections législatives des 26 avril et 3 mai 1936 dans la circonscription de Sarreguemines ; il s’opposa à la candidature du maire socialiste de Sarreguemines. Philippe Christ avait mené une intense activité de propagande en Moselle de l’Est depuis le début de l’année 1936. Il avait mené une campagne électorale « orthodoxe » en demandant la semaine de quarante heures, la nationalisation des chemins de fer et des industries. Il s’était violemment opposé au cours de la campagne au maire de Sarreguemines qui fut aussi candidat sous l’étiquette « indépendant » tout en restant dans la mouvance du Front populaire. Philippe Christ affronta aussi le candidat communiste Édouard Meyer et le député sortant, Henri Nominé candidat URD (droite). Philippe Christ obtint au premier tour 516 voix, le plus mauvais résultat, alors qu’Henri Nominé totalisait 5 130 voix et Édouard Meyer 2 862 voix. Au second tour Édouard Meyer obtint 2 739 voix et fut devancé par Henri Nominé, 6 894 voix, et Arthur-Jean Heid qui remporta l’élection avec 7 535 voix. Philippe Christ avait soutenu au second tour la candidature d’Édouard Meyer.
En septembre 1939, Philippe Christ fut évacué comme la plupart des Sarregueminois en Charente. En tant qu’élu municipal, il tenta, tant bien que mal, d’organiser au mieux l’installation de ses administrés dans une région où rien n’avait été prévu pour accueillir une vague aussi importante de réfugiés.
À la Libération, il fut l’un des artisans de la reconstitution de la SFIO à Sarreguemines. Il intégra le comité provisoire de la section et défendait alors l’union avec le PC lors des prochaines échéances électorales.
Il fut candidat aux élections municipales des 23 et 30 septembre 1945 sur la liste de l’Union républicaine antifasciste. Il obtint au premier tour 1 893 voix sur 5 028 suffrages exprimés et ne fut pas élu. Il se présenta à l’élection municipale d’octobre 1947 sur la Liste d’intérêt communal opposée notamment à la liste d’Union républicaine et résistante présentée par le Parti communiste. Il obtint 859 voix sur 5 249 suffrages exprimés et ne fut pas élu. Il était alors président des retraités de la SNCF et vice-président du GERAL.
Il s’était marié le 29 décembre 1923 avec Anne-Marie Klein.
Par Pierre Schill
SOURCES : Arch. Dép. Moselle, 301 M 77 et 83 ; 303 M 58, 77 et 150 ; 151 W 189 ; 26 Z 15, 16 et 33. — Arch. Com. Sarreguemines, 11 K 2. — L’Humanité d’Alsace-Lorraine, 19 janvier 1929. — Forbacher Neueste Nachrichten, 7, 14 et 21 mai 1935 ; 27 avril et 4 mai 1936. — Le Républicain lorrain, 1er août 1952 (édition de Sarreguemines). — E.L. Baudon, Les élections en Moselle, 1919-1956, Metz, 1956, 94 p. — Didier Kompa, La formation du Front populaire en Moselle, 1934-1936, Mémoire de maîtrise d’histoire sous la direction d’Alfred Wahl, Université de Metz, 1985, 173 p. — Christine Ciavarella, Les élections législatives de 1936 en Moselle, Mémoire de maîtrise d’histoire sous la direction de Jean-Claude Delbreil, Université de Metz, 1989, 220 p. — Gérard Diwo, Les formations politiques en Moselle (21 octobre 1945-17 juin 1951), thèse de doctorat d’histoire sous la direction d’Alfred Wahl, Université de Metz, 1992, 2 tomes, 423 et 157 p. — Renseignements fournis par Didier Hemmert, archiviste municipal de Sarreguemines, et par Madeleine Rohr. — État-civil de la commune de Sarreguemines.