DUBOUCHET Pierre, Antonin, Jean, Marie

Par Jean Lorcin

Né le 9 mars 1888 à Saint-Étienne (Loire), mort le 26 avril 1956 à Saint-Étienne ; passementier à Saint-Étienne ; conseiller prud’homal ; militant socialiste ; membre de la loge maçonnique « Les Élus » ; président de l’amicale laïque du quartier de Tardy et membre de la Société « L’Églantine » du quartier Raspail, vice-président des Œuvres postscolaires de la Loire ; conseiller municipal de Saint-Étienne.

Fils de Jacques et de Marie née Béal, il se maria le 26 avril 1913 avec Henriette Coulange et en eut deux filles. Il fut mobilisé pendant la guerre 1914-1918.
Ce maître artisan était membre de la Chambre des métiers. Il était président de la société compagnonnique « Les Ferrandiniers » et passait pour appartenir à la Franc-Maçonnerie. Membre du Syndicat général des tisseurs de la Loire, il fut présenté aux élections prud’homales du 13 novembre 1938. Membre du Conseil supérieur du travail, où il représentait le tissage du Sud-Est depuis 1922, il ne fut pas réélu en 1938 par suite de l’opposition des « syndicats à tendance communiste ». En revanche, il fut nommé membre ouvrier du Comité départemental des salaires le 16 décembre 1938.

Secrétaire de la section stéphanoise du Parti communiste depuis 1920, Dubouchet suivit Vital Descos*, Ferdinand Faure* et Ernest Lafont* dans leur dissidence à la suite du IVe congrès de l’Internationale communiste en 1922 : il fut accusé par les communistes restés fidèles à l’Internationale d’avoir emporté à ce moment les archives et la trésorerie de la section dont il était secrétaire, fort qu’il était, sans doute, de l’appui de la majorité des militants du canton Sud-Ouest de Saint-Étienne.

Dubouchet, conseiller de Saint-Étienne depuis 1919, fut présenté par l’USC dont il était trésorier fédéral en 1925, aux élections municipales de Saint-Étienne et aux élections cantonales pour le renouvellement du conseil d’arrondissement dans le canton sud-ouest de Saint-Étienne en 1925 : il se retira avant le second tour par discipline républicaine.

Après son ralliement au Parti socialiste SFIO, il fut candidat de ce parti au conseil d’arrondissement dans le canton Sud-Est de Saint-Étienne en 1928. Il n’obtint au premier tour que 441 voix sur 7 501 suffrages exprimés, contre 699 au communiste Barthélémy Ramier*, 2 842 au radical-socialiste Laroux et 3 387 au candidat de l’URD, Pierre Doron. Il se retira avant le second tour.
Candidat SFIO au premier tour des élections municipales des 20 et 27 juillet 1930 à Saint-Étienne, il obtint 1 662 suffrages sur 28 794 votants. Il était alors membre du Conseil supérieur du Travail.

Candidat SFIO aux élections cantonales partielles de février 1932 dans le canton Sud-Est de Saint-Étienne pour le conseil général, il n’obtint au premier tour que 269 voix contre 212 au communiste Munier, 389 au républicain socialiste Staron et 635 au républicain socialiste Mossé, 879 au radical-socialiste Lambert et 1 737 au candidat de l’URD, Aulagnier, qui fut élu au deuxième tour avec 1 823 voix contre 1 568 à Lambert. Les candidats socialistes SFIO et républicains-socialistes s’étaient retirés.

Candidat SFIO dans la deuxième circonscription de Saint-Étienne aux élections législatives de 1932, Dubouchet obtint 1 149 voix sur 25 977 inscrits et 17 143 votants.

Élu conseiller municipal SFIO dans la municipalité du Front populaire de Saint-Étienne en 1935, il fut adjoint au maire. Il se présenta aux élections législatives de 1936 dans la deuxième circonscription de Saint-Étienne. Il obtint au premier tour 1 262 voix sur 17 037 votants, contre 1 818 au républicain de gauche Aulagnier, 3 118 à l’USR Mossé, 4 904 au communiste Ramier et 5 601 au candidat de l’URD, Magnan. Il se désista en faveur du candidat de Front populaire le mieux placé au premier tour, le communiste Barthélemy Ramier, qui fut néanmoins battu par Magnan au deuxième tour, la discipline républicaine n’ayant pas joué pleinement par suite de la défection d’une partie de l’électorat radical.

Candidat socialiste SFIO au conseil général en 1937, dans le canton Nord-Ouest de Saint-Étienne, Dubouchet n’eut, au premier tour, que 743 voix sur 6 407 suffrages exprimés, contre 3 059 au candidat de droite, Beynet, 1 405 au communiste Dolmazon* et 1 200 au radical Petit.

Dubouchet représentait le Parti socialiste SFIO et la Fédération des Œuvres laïques au meeting de solidarité pour « la défense des 40 heures » en septembre 1938 (La Tribune, 4 septembre 1938).
Il refusa de se rallier au gouvernement de Vichy et fut révoqué dans le cadre de la dissolution du conseil municipal de Saint-Étienne en application d’un décret du 30 octobre 1940, notifié à l’intéressé le 20 novembre 1940. Pierre Dubouchet fut également déchu de son mandat de membre de la Chambre des Métiers de Saint-Étienne et Montbrison comme membre de la SFIC par un arrêté du 3 janvier 1941. Dès la notification de cet arrêté, le 25 janvier 1941, il s’inscrivit en faux, dans une lettre adressée au Maréchal Pétain, Chef de l’État français, contre les motifs invoqués pour constater cette déchéance. En effet, faisait-il observer, loin d’avoir appartenu à la SFIC, il avait milité, depuis de très nombreuses années, dans les rangs du PS-SFIO qui l’avait présenté plus de dix fois à des élections municipales, cantonales ou législatives où il avait « toujours eu comme concurrents des candidats du Parti communiste ». Il appartenait, faisait-il encore valoir, à la fraction socialiste SFIO du conseil municipal de Saint-Étienne qui avait refusé toute collaboration avec la fraction communiste après la signature du Pacte germano-soviétique et, lors de l’application de la loi du 20 janvier 1940, le Préfet de la Loire d’alors ne l’avait nullement confondu avec les élus communistes dont il prononçait la déchéance : Dubouchet a continué à exercer son mandat jusqu’à la suspension du conseil municipal en novembre 1940. Il s’était souvent heurté au Parti communiste et que, s’il avait perdu, au bout de seize ans, le mandat de membre du Conseil supérieur du Travail, c’était à cause de la « coalition contre lui » des « syndicats à tendance communiste » (Arch. Dép. Loire, 85 W 154. Lettre de Pierre Dubouchet, Saint-Étienne, au Maréchal Pétain, Chef de l’État français, Vichy). De son côté, le Syndicat général des tisseurs de la Loire faisait part de sa vive émotion devant cette déchéance au Ministre, Secrétaire d’État à la Production Industrielle et au Travail, arguant également du fait que Pierre Dubouchet s’était heurté à la concurrence des syndicats à tendance communiste, dissous depuis en application du décret du 26 septembre 1939, tant aux élections prud’homales du 13 novembre 1938 qu’au dernier renouvellement du Conseil Supérieur du Travail. Cette déchéance semble néanmoins avoir été maintenue : les pouvoirs publics semblent avoir retenu pour ce faire les charges d’appartenance à la Franc-Maçonnerie et de participation au « Front Populaire » qui n’entraient pourtant pas dans le cadre de la loi du 20 janvier 1940 à laquelle il était fait référence. En outre, faisait observer le commissaire central de Saint-Étienne, si Dubouchet avait eu des adversaires aux élections de la Chambre des Métiers, « ceux-ci n’étaient pas connus pour appartenir officiellement au Parti communiste » (Arch. Dép. Loire, 85 W 154. CC, Saint-Étienne, 12 mars 1941).

Il participa activement à l’action clandestine du Parti socialiste. Il fit partie des mouvements de résistance « Le Coq enchaîné » et « Libération », dont il constitua le GF de Saint-Étienne, en liaison avec le réseau britannique « Spruce », représenté par le commandant Allan Jickell. Il participa activement aux premiers parachutages de la région stéphanoise et a caché les armes de guerre pour les mettre à la disposition de la Résistance. Il a fait l’objet d’un mandat d’arrêt du juge d’instruction de Lyon pour « détention d’armes et d’explosifs, menées antinationales, rapports avec des parachutistes anglais » le 16 décembre 1942 et fut arrêté le 17 décembre 1942 à Saint-Étienne, puis transféré à Lyon. Jugé par le tribunal de première instance de Lyon le 7 avril 1943, il fut déporté. Libéré le 7 février 1944, Dubouchet fut placé en résidence surveillée à Panissières (Loire), d’où il est revenu à Saint-Étienne le 17 août 1944, lors de la Libération.

Il était membre du comité de Libération de la Loire.
Avec les socialistes SFIO Jean Robert, ancien secrétaire fédéral, et Ducros qui, comme lui, avaient fait de la Résistance, Dubouchet reconstitua les cellules et réorganisa les cadres de la SFIO. Il constitua en outre une fédération des Jeunes socialistes.

Il fut rétabli dans ses fonctions de conseiller municipal et élu adjoint (Police, Défense passive) le 24 août 1944. Il a participé, aux côtés de Jean Robert, aux négociations avec le Parti communiste en vue d’une fusion des deux listes socialiste et communiste au deuxième tour des élections municipales de mai 1945, mais sa présence, à la place de Christophe Alexandre*, partisan de l’unité, a sans doute contribué à faire pencher la balance en faveur de la division, les socialistes faisant alliance avec le MRP, face à la liste soutenue par le Parti communiste. En revanche, Christophe Alexandre choisit l’unité avec le Parti communiste. Réélu conseiller municipal de Saint-Étienne le 13 mai 1945 avec 38 321 voix, Pierre Dubouchet fut élu 12e adjoint par 19 voix contre 14 au socialiste unitaire Christophe Alexandre, présenté par le Parti communiste. Le 18 octobre 1946, il contribua à faire élire, pour remplacer Jean Robert dans son poste d’adjoint, le socialiste Masson au lieu de Christophe Alexandre, désormais membre du Parti communiste. Dubouchet se présenta de nouveau à l’élection municipale du 19 octobre 1947 dans le canton de Saint-Étienne Sud-Est.

Il fut proposé par le PS-SFIO pour être conseiller général du canton de Saint-Étienne Nord-Ouest en février 1945. Il représenta l’UDSR au 1er tour des élections cantonales du 23 septembre 1945, où il obtint 4 007 voix sur 23 015 inscrits et 13 242 suffrages exprimés, contre 4 678 à la communiste Denise Bastide* et 4 555 au MRP Henri Bergeret. Pierre Dubouchet s’étant retiré entre les deux tours, Bergeret l’emporta au 2e tour par 7 954 voix contre 6 894 à Denise Bastide.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article23086, notice DUBOUCHET Pierre, Antonin, Jean, Marie par Jean Lorcin, version mise en ligne le 25 octobre 2008, dernière modification le 9 décembre 2011.

Par Jean Lorcin

SOURCES : Arch. Nat., F7/13035, rapports mensuels, Loire, 4 mai 1932. — Arch. Dép. Loire, 3 M 68, 3 M 73, 3 M 75, 4 M 125, 4 M 127, 4 M 129, 10 M 187, 2 W 22, 2 W 34, 2 W 76, 2 W 80, 2 W 119, 2 W 124, 85 W 94, 85 W 133, 85 W 154. — État civil de Saint-Étienne. — Bulletin municipal de la Ville de Saint-Étienne, 24 août 1944, 18 mai 1945 et 18 octobre 1946. La Loire républicaine, 31 décembre 1922 (« Le PC de la Loire contre les décisions de Moscou »). — La Tribune républicaine, 18 janvier 1923 (« La section communiste unitaire se constitue »), 19 janvier 1923, 3 juillet 1925, (« Le Congrès de l’USC de la Loire »), 18 juillet 1925, (« Un rappel de l’Unité socialiste ouvrière (USC) »), 23 juillet 1925 (« L’attitude de l’USC »), 12 juillet et 22 juillet 1930, 8 février 1932, 23 janvier 1935, 1er et 8 octobre 1937, 4 septembre 1938. — Lyon républicain, 14 octobre 1932. — La République du Soir, 25 août 1944. — Le Cri du Peuple, 12 janvier, 5-6 et 17 mai 1945. —. Aperçu des luttes de tendances dans les syndicats ouvriers de la Loire entre les deux Guerres mondiales, mémoire de maîtrise. — Histoire, Saint-Étienne, 1971. — Monique Luirard, La Région stéphanoise dans la guerre et dans la paix (1936-1951), Centre d’études foréziennes/Centre interdisciplinaire d’études et de recherches sur les structures régionales, 1980. — René Gentgen, La Résistance civile dans la Loire : de sa naissance à la Libération, préface de Lucien Neuwirth, Lyon, Éditions lyonnaises d’art et d’histoire, 1996.

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