MIJOIN André, Émile

Par Daniel Grason

Né le 3 février 1908, mort le 3 mars 2007 à Courpalay (Seine-et-Marne ; ajusteur, chauffeur de taxi ; militant communiste ; déporté à Mauthausen (Autriche).

André Mijoin avec ses parents
André Mijoin avec ses parents

Fils d’Émile Jean maréchal ferrant, vingt-sept ans et de Germaine Lanneau Léontine, vingt-et-un-ans, sans profession, les deux témoins de sa naissance étaient un charpentier et un menuisier. Le père d’André Mijoin fut tué lors d’un bombardement le 8 décembre 1915 au nord d’Arras dans le Pas-de-Calais, il fut déclaré « tué à l’ennemi » et « Mort pour la France. »
André travailla avec son grand-père maréchal-ferrant. Il fut élevé par sa mère, échoua au certificat d’études, les cinq fautes à la dictée étant éliminatoires. Il eut une jeunesse heureuse, allait au bal musette avec une petite midinette. Il devait entrer en apprentissage comme ajusteur, mais la forge familiale attendait, il travailla chez Schneider. Il devait se sentir à l’étroit à Courpalay, découvrit la rue de Lappe près de la Bastille et ses bals musettes. Il devint apprenti boulanger rue Julien-Lacroix dans le XXe arrondissement. Les courtes nuits étaient incompatibles avec le fournil il travailla chez un graveur sur métaux, fit son service militaire à vingt ans à Trêves en Allemagne.
Il épousa le 10 novembre 1930 Louise Riglet en mairie de Meaux (Seine-et-Marne). André Mijoin s’éveilla à la politique, participa à la manifestation de février 1934 contre le fascisme. Selon ses mémoires, Le Petit Parisien annonça : « Mijoin André balle dans la tête ». Vérification faite, le nom d’André Mijoin n’a pas été porté ni parmi les morts ni parmi des blessés du 6 février 1934 dans ce quotidien ni dans Le Matin. Il adhéra au Parti communiste en 1935, participa à une école élémentaire de l’organisation, il fit grève en 1936.
En 1937 il entra comme ajusteur chez Lioré-Olivier une entreprise de l’aéronautique à Clichy-la-Garenne qui nationalisée deviendra la Société Nationale de Constructions Aéronautique du Sud-Est. En 1938 il participa à un voyage en Union Soviétique avec France URSS. Il participa à la grève du 30 novembre 1938 contre les décrets Daladier-Reynaud, ce fut un échec, il fut licencié.
Il vivait avec Adèle Nemirowski au 3, square Louis-Gentil à Paris (XIIe arr.), tous deux furent interpellés le 4 octobre 1940 par le commissaire Saint-Royre de Boulogne-Billancourt pour distribution de tracts communistes. Quatre autres militants furent interpellés : Raoul Scheuer, Georges Labbé et Désiré Navez, et Marie Melisson. André Mijoin a été condamné par le 2ème Tribunal militaire de Paris à cinq ans de prison, 2000 francs d’amende et cinq ans de privation des droits civiques et politiques. Chez le couple Mijoin les policiers saisirent 2 500 exemplaires de La Vie ouvrière n° 7 du 21 septembre 1940. Cette feuille ronéotypée recto-verso appelait à ce que « Les véritables dirigeants syndicaux reprennent leur place. » Étaient dénoncés ceux qui faisaient « chorus avec les ennemis de la classe ouvrière : [Marceau] Delobelle ex-Secrétaire de la Fédération du Textile. [Marcel] Brout ex-président de la Fédération du Bâtiment. Jugnien ex-secrétaire de la Fédération des Coiffeurs. Denys ex-secrétaire de l’Union du Réseau Est Cheminots. Delval ex-secrétaire de la Marine Fluviale. [Arthur] Pommier ex-secrétaire du syndicat des Municipaux. »
« Partout où vous les rencontrerez, recevez-les comme il convient. »
Le 5 avril 1942 la 15e Chambre le condamna à deux ans de prison qu’il purgea à la prison de Fresnes (Seine, Val-de-Marne). Pendant sa détention, il épousa sa compagne Adèle Nemirowski en mairie de Fresnes le 21 octobre 1941. Libéré de prison le 5 avril 1942, il était interné le jour même, puis transféré à Voves en Eure-et-Loir le 5 juin 1942. En appel il fut condamné à huit ans de travaux forcés.
Il quitta Fresnes pour le camp d’internement à l’abbaye de Fontevrault, il travailla à la fabrication de chaises. Il participa à une action pour que les politiques soient séparés des droits communs. Soupçonné, la brochure « Comment se défendre ? aurait été une mise en garde à son encontre, son contenu allait bien au-delà de sa personne. Il aurait été entendu par Raymond Aubrun et Henri Jourdain. Le 17 octobre 1943, il fut transféré à la prison de Blois (Loir-et-Cher).
Le 22 mars 1944 il était dans le convoi de 1218 hommes à destination de Mauthausen en Autriche, il fut envoyé au kommando de travail de Linz. Matricule 60306 il survécut aux épreuves de la déportation, plus de la moitié des déportés de ce convoi, 622 hommes moururent dont 66 furent gazés au château d’Hartheim.
Le commissaire Saint-Royre et son adjoint Rouchy qui arrêtèrent notamment André et Adèle Mijoin furent condamnés après parution devant la commission d’épuration de la police, le premier à vingt ans de travaux forcés, à l’indignité nationale, et à la radiation de l’Ordre de la Légion d’Honneur ; le second à cinq ans de travaux forcés. Dans son ouvrage Jean-Marc Berlière observait : « Saint-Royre a oublié que lutter contre les communistes revenait, à partir de l’été 1941, à servir l’ennemi : un comble pour un ancien combattant au patriotisme ombrageux. »
Rapatrié, il travailla à la SNCASO à Argenteuil, le couple Mijoin habita Saint-Mandé (Seine, Val-de-Marne). Il participa ainsi que son épouse Adèle aux manifestations de la guerre froide. Il travailla chez Jourdain Monneret dans le XIIe arrondissement. Licencié à la suite d’une action, il devint démarcheur de publicité pour la presse communiste, puis chauffeur de taxi. Il continua à participer à toutes les campagnes pour la paix en Indochine et en Algérie, pour la libération d’Henri Martin, il était à Charonne. La guerre des six jours l’ébranla.
André Mijoin participa aux manifestations de mai et juin 1968, fut ébranlé par l’intervention Soviétique en août 1968 en Tchécoslovaquie, devint militant du programme commun. En 1971 à soixante-trois ans, après avoir sillonné pendant une vingtaine d’années les rues de Paris, il prenait sa retraite. Le couple alla vivre à Courpalay, où avec son épouse il continua de militer, diffusa L’Humanité dimanche.
Il y mourut le 3 mars 2007 à l’âge de quatre-vingt-dix-neuf ans.
André Mijoin était homologué au titre de la Résistance intérieure française (RIF).

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article230994, notice MIJOIN André, Émile par Daniel Grason, version mise en ligne le 7 août 2020, dernière modification le 10 août 2020.

Par Daniel Grason

André Mijoin avec ses parents
André Mijoin avec ses parents
Au service militaire
Au service militaire
André et Adèle lors d'une fête
André et Adèle lors d’une fête

SOURCES : Arch. PPo. CB 83.23 main courante du commissariat de Boulogne-Billancourt, BA 2056, PCF carton 13 rapport des Renseignements généraux du 21 juillet 1942, KB 95, BA 1849. – André Mijoin, Une vie militante, à compte d’auteur. – Livre-Mémorial, FMD, Éd. Tirésias, 2004. – Site BNF Le Petit Parisien , – Le Matin des 7 et 8 février 1934, BNF La Vie Ouvrière du 21 septembre 1940. – AD Seine-et-Marne 6 E140/17 1907-1914 acte n° 2. – Site internet Match ID. AD Seine-et-Marne 6 E140/17 1907-1914 acte n° 2. – Site internet Match ID.

Photographies : {Une vie militante}

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