ANGOT Michel (Michel Laszlo)

Par Jean-Paul Salles

Né le 31 janvier 1947 à Paris  ; militant du PC (1966-68), puis de la Ligue communiste de sa fondation en 1969 à 2009, membre du CC et de la CNO, de la CTS du SO jusqu’en 1978  ; membre du comité de rédaction de Rouge, rubrique Culture, spécialiste du cinéma et de la BD  ; fonctionnaire territorial à la Ville de Paris puis dans le Val-de-Marne, dirigeant syndical à la CFDT puis à la FSU à partir de 2004.

Michel Angot était le fils de Lucien Angot (1918-1988), ajusteur-outilleur aux établissements Le Las, à Paris (XVe arr.). Sa mère Paulina Sergijenko, née en 1921, était étudiante à Poltava (Ukraine), quand elle fut déportée comme travailleuse forcée à l’usine Wintel à Göttingen en Allemagne en 1942. C’est là qu’elle connut celui qui allait devenir son mari, Lucien Angot, prisonnier de guerre, affecté dans la même usine après une tentative d’évasion de son stalag. Ses grands-parents paternels français étaient plombier et infirmière, ses grands-parents maternels ukrainiens d’URSS, mineur et ouvrière. Michel Angot a un frère, Daniel, né en 1954, lui aussi militant à la LCR puis au NPA.

Michel Angot fit toutes ses études secondaires au lycée Buffon (Paris, XVe arrondissement) de 1958 à 1965. Il fut fortement marqué par son professeur d’histoire et géographie, Louis-Paul Letonturier, dirigeant de la FEN, de même que par son professeur de philosophie Maurice Clavel (1920-1979). Ce dernier, agrégé de philosophie et également journaliste (à Combat et au Nouvel Observateur), marqua les esprits quand il décida de quitter le plateau de télévision, en décembre 1971, lançant aux producteurs « Messieurs les censeurs, bonsoir ». Ancien résistant, il n’avait pas apprécié qu’une de ses remarques sur « l’aversion » du Président de la République Georges Pompidou envers la Résistance soit coupée au montage.

Ayant obtenu le bac en 1965, Michel Angot fut employé de banque au Crédit lyonnais. En parallèle, il fit un stage de monteur cinéma au Musée de l’Homme, spécialisé dans les films ethnographiques, sous la direction de Jean Rouch* puis de Max-Yves Brandily. Cette passion pour l’audiovisuel lui permit de faire son service militaire dans la Marine nationale comme responsable du studio de télévision sur le croiseur Amiral de Grasse présent en Polynésie lors des tirs nucléaires à Mururoa en 1968-69. Libéré après 16 mois de service militaire, il fut documentaliste à la Cinémathèque française de 1969 à 1971, ayant eu la chance de côtoyer son directeur Henri Langlois. Il fut ensuite, en 1971 et jusqu’au début de l’année 1972, chargé de production à l’ORTF pour le Journal du Cinéma, sur Antenne 2, l’émission hebdomadaire de Georges de Caunes.

À la fin de l’année 1972, il se maria avec Marie-Claude Cros, née en 1946, professeure d’histoire et géographie (certifiée puis agrégée), ensuite directrice du CDDP (Centre départemental de documentation pédagogique) du Val-de-Marne. Membre du groupe Histoire de la Sorbonne, elle militait avec l’UNEF et la JCR dans cette université avant 1968. Elle fut militante de la LC/LCR jusqu’en 1975. Elle fut également vice-présidente de la FFCU (Fédération française des Clubs Unesco). Le couple eut deux enfants, Nicolas né en 1979 et Caroline née en 1981.

Ayant été licencié de l’ORTF à la suite de sa dissolution, Michel Angot occupa divers emplois, dont celui d’OS à l’usine CGCT (Compagnie générale de construction téléphonique) de Massy-Palaiseau (Essonne) pendant huit mois en 1972. Adhérent à la CGT, il fut licencié après une grève avec occupation. Membre du PC de 1966 à 1968, il rejoignit la Ligue communiste à sa création en avril 1969. En 1973, il passa avec succès le concours d’entrée à la Ville de Paris et il fut de 1973 à 1989 gérant d’immeubles à l’Office public des HLM (OPHLM) de la Ville de Paris. Dans le cadre de la formation permanente, en 1975-1976, il suivit les cours de l’École des travaux publics de la Ville de Paris et ceux de l’École nationale des travaux publics de Cachan (Val-de-Marne). Dès son entrée à l’OPHLM, il se syndiqua à la CFDT, devint secrétaire de la section syndicale de l’Office, puis en 1978, secrétaire général-adjoint du syndicat SPP-CFDT (Services publics parisiens). Jacques Chirac, maire de Paris, ayant transformé l’OPHLM en OPAC (Office public d’aménagement et de construction) sous statut privé d’EPIC (Établissement public à caractère industriel et commercial), il confia sa direction à Georges Pérol et à Henry de Lesquen du Plessis-Casso. À la suite d’un violent accrochage survenu avec ce dernier au Comité technique paritaire (CTP), il fut « mis au placard » avec d’autres délégués syndicaux. Ils continuaient à être payés, affectés dans un lieu contraint, sans qu’on leur donne de travail. À la suite d’une action juridique engagée par les syndicats, ils furent mutés, lui et trois autres délégués CFDT, au Conseil général du Val-de-Marne en 1989. Il y poursuivit son militantisme syndical, adhérent à la section CFDT du Conseil général puis au syndicat Interco-CFDT du Val-de-Marne. Il était responsable des travaux et de la sécurité de l’Hôtel du département-Préfecture à Créteil (Val-de-Marne), ainsi que des équipements mobiliers des collèges, comme technicien puis ingénieur territorial.
Cet engagement dans le syndicat se doublait d’un engagement important à la LC/LCR. Il fut membre du comité central (CC) de la LCR jusqu’en 2009 et membre de la Commission nationale ouvrière (CNO) chargée de coordonner et de centraliser l’activité syndicale des militants dans les entreprises. Il fut également pendant une longue période membre du Comité de rédaction de Rouge, l’hebdomadaire de la LC/LCR, un temps quotidien (du 15 mars 1976 au 2 février 1979). Plus particulièrement chargé de la rubrique Culture, où il côtoya Michel Lequenne, on lui doit de nombreux articles, écrits sous son pseudonyme de Michel Laszlo. Très intéressé par le cinéma, il écrivit de nombreux articles de critique de films. Ainsi, dans Rouge quotidien n°538 (31 décembre-1er janvier 1978), il faisait le point sur « Le cinéma soviétique 50 ans après le Cuirassé Potemkine », et dans Rouge quotidien n°612 (29 mars 1978), il commentait « À la recherche de Mister Goodbar », un film de Richard Brooks, réalisateur américain (1912-92). Un autre de ses domaines de prédilection fut la BD. Par exemple, dans Rouge quotidien n°793 (7 novembre 1978), il rendit compte de l’ouvrage d’Hugo Pratt, Les Éthiopiques. Quatre aventures de Corto Maltese. Les œuvres du milanais Guido Crepax ne le laissaient pas non plus indifférent, d’autant plus que ce dernier était sympathisant trotskyste (Rouge quotidien n°490, 2 novembre 1977, lui consacra une double page). Il fit également des critiques de livres pour Rouge, ainsi Les Bienveillantes de Jonathan Littel. Enfin, il tint la rubrique télé et donna de nombreux brefs billets d’humeur autour de l’actualité.

Comme beaucoup de jeunes militants de la Ligue, sportifs, courageux jusqu’à la témérité, il participa aussi aux tâches du Service d’ordre et même, avec une dizaine de ses camarades, à sa direction appelée la Commission très spéciale (CTS) jusqu’en 1978. Sous la direction de Xavier Langlade, qui créa le SO de la JCR avant 68 et la CTS du SO de la LC, puis d’Henri Weber ou de Michel Recanati, ils alternaient entraînements en forêt, protection des meetings ou des manifestations de la Ligue, ou même des distributions de tracts quand elles se faisaient en milieu hostile. Ils organisaient aussi parfois des actions spectaculaires exigeant sang-froid et audace. Ainsi, dans le cadre de la solidarité avec la lutte du FNL vietnamien contre l’intervention militaire américaine, il fit partie du groupe qui hissa un immense drapeau vietnamien sur une des tours de Notre-Dame à Paris (Nick, 2002, p.91). Il fut également de la manifestation du 21 juin 1973 qui tenta d’interdire un meeting d’Ordre Nouveau (ON), l’ancêtre du Front national (FN), à la Mutualité. Il s’agissait d’empêcher qu’une parole raciste décomplexée s’exprime en plein Paris, le principal slogan d’ON étant à l’époque : « Trois millions d’immigrés = trois millions de chômeurs ». La manifestation ayant entraîné de nombreux blessés autant parmi les forces de l’ordre que parmi les militants mobilisés, la LC fut dissoute, de même qu’Ordre nouveau, le 27 juin 1973.

Mais une grande partie de son activité militante était consacrée au syndicat. Une fois installé dans le Val-de-Marne à partir de 1989, il fut longtemps délégué du personnel du Conseil général, puis délégué du personnel CAP (Commission administrative paritaire) au Centre Interdépartemental de Gestion de la petite couronne Ile de France. En 1995, il fut élu secrétaire général du syndicat Interco- CFDT du Val-de-Marne. Le ralliement de la direction de la CFDT à un syndicalisme de concertation sinon d’acceptation des réformes, à la fois sous Nicole Notat, secrétaire générale depuis 1992, puis à partir de 2002 sous son successeur François Chérèque, l’amena, avec d’autres, à structurer une opposition interne, des Cahiers syndicaux à CFDT en Lutte puis à Tous Ensemble. Partisans d’une lutte unitaire et intransigeante pour s’opposer notamment à la réforme des retraites que les gouvernements (Juppé puis Raffarin) tentèrent d’engager, ils ne parvinrent pas à convaincre la direction confédérale, malgré la puissance des grèves et des manifestations en 1995, puis de nouveau en 2003. Donc, en 2003, avec plusieurs milliers d’adhérents de sa Fédération Interco-CFDT, ils décidèrent de quitter la CFDT pour créer un nouveau syndicat. Désireux de s’affilier à une nouvelle confédération, ils décidèrent à une forte majorité de rejoindre la Fédération syndicale unitaire (FSU) qui venait de réformer ses statuts pour accueillir également des non-enseignants. Bien accueillis par le secrétaire général de la FSU Gérard Aschieri, Michel Angot et deux de ses camarades furent invités au congrès de la FSU à Perpignan en février 2004. Peu après, au congrès constitutif de leur syndicat, le Syndicat national unitaire des collectivités locales, de l’intérieur et des affaires sociales (SNUCLIAS), tenu à Paris en 2005, il devint son premier secrétaire général. Puis en 2005 il entra au bureau délibératif national (BDFN) puis au secrétariat national de la FSU. Ayant pris sa retraite en 2010, il resta membre des organes dirigeants, (BDFN) et conseil délibératif national (CDFN) de la FSU. Il fut de 2017 à 2020 co-secrétaire national des retraité.e.s FSU (SFR-FSU). Il eut la satisfaction d’assister, les 3 et 4 décembre 2015 au congrès de fusion de son syndicat, le SNUCLIAS avec le SNUACTE (Syndicat national unitaire des agents des collectivités territoriales et de l’État) et à la création du Syndicat national unifié de la territoriale (SNUTER), désormais avec plus de 11000 membres, le troisième syndicat de la FSU, derrière le SNES et le SNUIPP.
Juste après son départ à la retraite, le Président du Conseil général du Val-de-Marne, Christian Favier, le nomma au CA de Valophis-Habitat, l’Office départemental HLM. Il y siègeait régulièrement depuis 2010, ainsi qu’à la Commission d’attribution des logements.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article231414, notice ANGOT Michel (Michel Laszlo) par Jean-Paul Salles, version mise en ligne le 24 août 2020, dernière modification le 17 mars 2022.

Par Jean-Paul Salles

ŒUVRE : Nombreux articles dans Rouge hebdomadaire et quotidien, dans la rubrique Culture (sur le cinéma, mais aussi sur la littérature, la bande dessinée) et plusieurs centaines de brefs billets d’humeur autour de l’actualité ainsi que ses rubriques télé ; Articles dans la presse syndicale : Champ libre, journal du syndicat CFDT-Interco du Val-de-Marne, Syndicalement vôtre, journal du SNUCLIAS puis du SNUTER-FSU, bulletin de l’opposition CFDT (Tous ensemble), Pour, journal de la FSU, Enjeux, journal du courant U&A de la FSU.

SOURCES : Hebdomadaire et Quotidien Rouge. — Christophe Nick, Les Trotskistes, Fayard, 2002. — Jean-Paul Salles, La Ligue communiste révolutionnaire (1968-1981). Instrument du Grand Soir ou lieu d’apprentissage ?, Presses Universitaires de Rennes, 2005. — Jean-Guillaume Lanuque, Jean-Paul Salles, « Terrorisme et trotskisme. Trotsky et les trotskystes face au terrorisme et à la violence minoritaire », in Dissidences n° 1, 2005, L’Harmattan, p.193-208. — Christian Beuvain, Jean-Guillaume Lanuque, Jean-Paul Salles, « Violence révolutionnaire », in La France des années 68, Syllepse, 2008, p.818-829. — Franck Georgi, L’invention de la CFDT, 1957-1970, Éditions de l’Atelier/Éditions ouvrières, 1995. — Nicolas Defaud, La CFDT (1968-1995). De l’autogestion au syndicalisme de proposition, Presses de Sciences-po, 2009. — Paule Masson, coord., Syndicalistes ! De la CFDT à la CGT, Syllepse, 2008. — Documents fournis par Michel Angot, été 2020.

rebonds ?
Les rebonds proposent trois biographies choisies aléatoirement en fonction de similarités thématiques (dictionnaires), chronologiques (périodes), géographiques (département) et socioprofessionnelles.
Version imprimable