DUCOL Robert

Par Jacques Girault, Jean-Claude Guillon

Né le 16 juin 1920 à Paris (XIIe arr.), mort le 17 janvier 2012 à Vernou-sur-Brenne (Indre-et-Loire) ; instituteur ; militant syndicaliste du SNI et de la FEN ; militant communiste d’Indre-et-Loire.

Fils d’un employé de banque et d’une employée au ministère des Finances, Robert Ducol fut baptisé mais élevé dans un milieu athée. Il fut élève à l’école primaire supérieure Lavoisier (1932-1937) de Paris, puis entra en 1937 à l’École normale d’instituteurs de Loches (Indre-et-Loire), dont il sortit en 1940 et fut nommé instituteur à Draché (1940-1941) puis à Montbazon (1941-1942). Il épousa à l’église en juillet 1942, à Saint-Symphorien, Solange Laumaillé, institutrice. Le couple eut trois enfants qui furent élevés « à la rude mais fructueuse école de la rigueur et de l’exigence », selon leurs témoignages.

Instituteur en poste double avec son épouse à Parçay-Meslay (1942-1956) puis à Saint-Pierre-des-Corps (1956-1964), Robert Ducol était un « maître craint, un peu sévère, mais respecté et aimé parce qu’il était juste ». Il finit sa carrière, détaché à la Fédération des œuvres laïques en 1964 (UFOLEP) jusqu’à sa retraite en 1975, tout en habitant Vernou-sur-Brenne.

Lors de la formation du Front populaire, Robert Ducol participa aux manifestations parisiennes et à celles du 14 juillet à Sainte-Florine (Haute-Loire), d’où sa mère était originaire, aux côtés des mineurs et des paysans. Partisan des accords de Munich, il fut hostile au pacte germano-soviétique. Dans la discussion lors de la réunion du bureau national du SNI, le 11 octobre 1956, il expliqua avoir été « influencé par la presse et la radio, trompé par sa jeunesse et son horreur des violences ».

Pendant la Résistance, adhérent du Front national, responsable avec son épouse du groupe de Parçay-Meslay de Francs-tireurs et partisans, il adhéra au Parti communiste français en août 1944. À la Libération, il participa, en juillet 1945, à la caserne Dujardin à Angers, au rassemblement des jeunes gens diplômés nés en 1920 pour former les futurs officiers de l’armée française.

Robert Ducol participa, après Robert Boureau à la reconstitution du SNI dans le département autour de Paul Delanoue, avec lequel il reprit contact en septembre 1944 à Paris. Membre du conseil syndical de la section départementale du SNI à la Libération, il devint secrétaire de cette section, pourtant dominée par les anciens « majoritaires » du syndicat. Parallèlement, il était secrétaire-adjoint de l’Union départementale CGT depuis mai 1946. Mis à la disposition de l’Union départementale des syndicats CGT d’Indre-et-Loire, par arrêté ministériel, le 1er novembre 1947, il participa à l’organisation des luttes ouvrières dans le département ; les renseignements généraux notaient, en décembre 1947 : « continue à percevoir son traitement d’instituteur pour s’adonner à son activité d’agitateur promoteur de troubles ». À cette époque, lors de sa venue dans l’usine Schmid pour soutenir les ouvriers grévistes, après une altercation avec un membre de la direction, il fut assigné en février 1948 devant le tribunal correctionnel. Les travailleurs se mobilisèrent et il fut relaxé en mars. Sa mise à disposition cessa et il reprit un poste d’instituteur à Parçay-Meslay en janvier 1948.

Robert Ducol participa, dès la Libération, à la vie du SNI sur le plan national. Lors du congrès, le 28 décembre 1945, il intervint sur les questions des rapports entre le syndicalisme, la politique et les revendications ouvrières. Le 24 juillet 1946, au congrès de Grenoble, il analysa le contenu de la publication enfantine Francs-jeux dont il regretta la « neutralité fâcheuse ». Secrétaire de la section syndicale d’Indre-et-Loire depuis le 31 janvier 1946, il fut désigné pour faire partie d’une commission extraordinaire à mandat limité. Il participait aussi à la commission des jeunes du SNI. Lors de sa réunion, l’assemblée générale du SNI, le 23 septembre 1947, décida de ne pas soutenir la grève lancée par la section du SNI de la Seine. Ayant pris part aux mouvements de grève de la fin de l’année 1947, lors d’une réunion du conseil national du SNI, le 18 décembre 1947, il présenta une motion commune à plusieurs sections départementales, réclamant une grève enseignante et un soutien appuyé aux instituteurs de la Seine en grève, motion qui fut battue par celle de Denis Forestier conseillant à la section de la Seine d’interrompre sa grève, en attendant une décision de la Fédération de l’Éducation nationale et de l’Union générale des fédérations de fonctionnaires. Lors de la réunion du conseil national, le 28 décembre 1947, il vota la motion de soutien à la grève, qui ne fut pas adoptée, et présenta une motion pour le maintien des statuts du SNI jusqu’au prochain congrès et « la convocation d’un congrès extraordinaire pour la modification éventuelle des statuts avec toutes les garanties d’une préparation démocratique ». Elle recueillit 373 mandats sur plus d’un millier. Aussi, lors de la réunion du conseil syndical et de l’assemblée générale, le 18 décembre, l’opposition au soutien à la grève fut-elle confirmée (13 voix contre, 12 pour, puis 46 voix contre).

Alors que se discutait l’attitude à observer lors de la scission syndicale, il écrivit un article dans L’Ecole libératrice, le 22 janvier 1948, sous le titre « Pas d’unité réelle et efficace sans la classe ouvrière ». Mais l’assemblée générale départementale entérina les résultats du référendum, le 8 mars 1948, repoussant le maintien dans la CGT (198 pour, 353 contre) et Ducol, lors du congrès national extraordinaire de mars 1948, se prononça à nouveau pour le maintien dans la CGT. Par la suite, il ne cessa pas de dénoncer les « scissionnistes » qui avaient créé la CGT-FO. Aussi, les membres du conseil syndical, le 8 avril, furent-ils saisis d’une demande de Roger Ballon de démission du bureau de la section, qui fut adoptée par 14 voix contre 12. Il cessa d’être le responsable de la section tout en faisant partie du conseil syndical pendant le reste de sa carrière enseignante.

Avant la tenue du congrès du SNI de mars 1948 qui choisit l’autonomie en votant la motion Bonissel-Valière, Ducol participa avec Delanoue à une réunion avec les membres du Bureau politique du PCF, au cours de laquelle Maurice Thorez conseilla aux instituteurs communistes de ne pas se couper de la masse des instituteurs qui s’étaient ralliés majoritairement à l’autonomie, et Benoît Frachon recommanda de prendre une décision après un débat approfondi avec tous les « cégétistes ». Au soir du premier jour du congrès du SNI, une telle réunion eut lieu et trancha pour l’acceptation de l’autonomie avec possibilité de la double affiliation.

Pour la première fois, l’élection du bureau national du SNI se fit à la proportionnelle. Ducol figurait en cinquième position sur la liste B de 20 candidats « pour un syndicalisme indépendant démocratique et efficace » conduite par Delanoue. Les membres du conseil national, le 28 décembre 1947, la placèrent avec 464 voix en deuxième position sur la liste, qui eut cinq élus. Désormais, il devait être reconduit régulièrement dans cette responsabilité sur les listes dites « cégétistes ». À la fin de 1949, il figurait en deuxième position sur la liste B, « Par l’unité et l’action, nous œuvrerons à la sauvegarde de l’école, de la liberté et de la paix ». Le conseil national, le 27 décembre 1949, le réélut avec 695 voix. Il devint membre des commissions d’éducation sociale, des affaires internationales, des jeunes et de la propagande, de l’Union française. Candidat au bureau national en deuxième position sur la liste « Pour la défense de l’école laïque, de l’indépendance nationale, de la démocratie et de la paix » conduite par Pierre Clauzet, il fut élu par le conseil national du 27 décembre 1951 avec 955 voix, (troisième position). Il fut désigné pour participer aux commissions des questions sociales et internationales, de l’action laïque et de l’éducation populaire, de l’Union française. En 1953, il conduisait la liste « Pour renforcer l’unité et l’efficacité du SNI », mais le conseil national du 26 décembre l’élut avec trois autres candidats, seulement en deuxième position. En 1955, troisième sur la liste « Pour renforcer l’unité et l’efficacité du SNI. Liste d’action laïque et de défense de l’Education nationale », conduite par Georges Fournial , réélu, il fit partie des commissions sociale, internationale, corporative et d’action laïque. Il en fut de même en décembre 1957 sur la liste « Pour l’unité, la démocratie et l’efficacité du SNI », mais cette année-là, il fut le deuxième élu de la liste. Il fut réélu en bureau national en décembre 1959 sur une liste analogue. En décembre 1961, renouvelé au bureau national, en deuxième position sur la liste « Le prestige du SNI dépend d’une orientation correcte et ferme et de la vraie démocratie syndicale », il devint membre des commissions administrative, laïque, des finances et des relations internationales. Il figurait parmi les huit élus de la liste en 1964. Aux commissions habituelles, s’ajouta en janvier 1965 une nouvelle commission de propagande présidée par André Ouliac dans laquelle il joua un rôle important. Il ne fut pas candidat au BN en 1967.

Dans la plupart des congrès nationaux du SNI, les interventions de Robert Ducol, qui faisait partie des commissions des résolutions, indiquaient les choix de la minorité. Par exemple, lors du congrès de Pau, le 17 juillet 1953, il refusait de voter le rapport moral au terme d’un long plaidoyer pour l’unité d’action et pour que la direction du SNI s’engage dans cette voie. Au congrès du SNI de Saint-Malo, après le rapport de Clément Durand sur les luttes laïques, son intervention analysait les responsabilités de l’Etat qui devait respecter les droits de l’enfant. Il présida la cinquième séance du congrès national du SNI, le 18 juillet 1952, consacrée aux questions pédagogiques. La veille, dans son intervention sur les luttes laïques, il préconisait l’organisation des actions à partir des écoles. Souvent dans L’École libératrice, il écrivait des articles complétant les thèmes de ses interventions, avant tout l’unité d’action et les luttes pour défendre la laïcité. Lors du congrès de Bordeaux en juillet 1955, il annonça un vote positif du rapport tout en insistant, dans les luttes laïques, sur l’unité d’action estimant, « l’anticommunisme forcené fait le jeu du cléricalisme ». Puis il laissa à d’autres dirigeants de la liste minoritaire la charge d’annoncer la position sur les rapports de la majorité « autonome ». Pour le congrès de juillet 1962, il fut signataire de l’appel des cinq élus au BN publié, comme les années précédentes, demandant de « clarifier » les problèmes « au lieu de les obscurcir et de participer plus ou moins directement aux mystifications gaullistes ». Au congrès de 1963, il s’exprima en qualité de poste parole de ses amis pour annoncer le vote du rapport moral pour que dans l’unité le syndicat s’oppose mieux au pouvoir. Déjà lors de la réunion du BN, le 6 mars 1963, dans la discussion du rapport de la commission spéciale des structures, après ses remarques sur le vote par correspondance, qualifié de « gaullisme syndical », auquel il préférait les assemblées cantonales, Forestier, le secrétaire général, avait imposé des modifications sérieuses au projet.

Robert Ducol fut élu, le plus souvent en quatrième position, sur les listes présentées par le SNI pour les commissions administratives paritaires centrales, les 5 novembre 1948, 29 avril 1952, le 5 novembre 1954, le 4 mars 1958, le 14 mars 1961 (cinquième sur la liste « Pour la défense et la promotion de l’école laïque »), le 6 avril 1965. En juin 1954 et en novembre 1958, il était élu, sur la liste du SNI, comme suppléant au conseil d’établissement du premier degré dans le collège des chargés d’écoles primaires.

Parallèlement, il faisait partie de la commission administrative nationale de la Fédération de l’Education nationale entre 1948 et 1967. Il participait aux commissions d’éducation sociale (1948), puis de la jeunesse (1948-1955), de la défense laïque (1949 à la fin des années 1950).

Au congrès du SNI des 22-24 mars 1948, une motion permettant la double affiliation fut adoptée. À la réunion du bureau national qui suivit, fut discutée la question de la compatibilité avec des responsabilités à la FEN-CGT. Secrétaire de son union départementale CGT, il déclara qu’il entendait « le rester ». Finalement, il resta membre du bureau de l’UD jusqu’en 1953. Par la suite, co-rédacteur en chef du bulletin régional Unité et Action « Organe mensuel du centre de liaison des instituteurs luttant pour le retour du Syndicat national à la CGT », lancé en juillet 1948, il fut un des membres du bureau national de la FEN-CGT jusqu’en 1954.

Ducol était un des porte-parole de la minorité « cégétiste » du SNI sur les questions internationales. Lors du congrès du SNI, le 21 juillet 1950, après le rapport de Marie-Louise Cavalier sur les relations internationales, il intervint pour refuser la domination américaine sur le syndicalisme mais sa motion fut repoussée. Il signa, le 9 février 1950, un article de deux pages réclamant la « Paix au Vietnam ». Il prit part aux réunions syndicales internationales. Lors du congrès d’Amsterdam de la Fédération internationale des associations d’instituteurs (31 juillet-4 août 1950), fut discuté le projet d’organiser internationalement la profession enseignante et d’engager des discussions avec les associations internationales, FIPESO et CMOPE ou WOTP (World Organization of Teaching Profession) et d’adhérer à cette dernière. Le délégué de l’Australie, membre du Parti communiste australien, proposa d’élargir aux autres organisations internationales d’enseignants sans limites, donc avec la Fédération internationale des syndicats enseignants, représentée par Delanoue à titre d’observateur. Devant le refus des participants, ce dernier quitta la salle avec Ducol qui revint en séance plénière. Interrogé, il expliqua, lors d’une réunion du bureau national du SNI, que ce projet de confédération internationale avait pour effet de « supprimer la FIAI et la FIPESO qui militaient pour la paix ». Lors du congrès national du SNI à Bordeaux, en juillet 1950, tout en approuvant le rapport moral, il critiqua l’action internationale de la direction du syndicat.

Le PCF contrôlait ses adhérents militant dans les organisations syndicales à des postes responsables. Aussi, avant tout renouvellement par élections, donnait-il son accord pour que Ducol puisse figurer parmi les candidats. Dans les années 1950, ce dernier était souvent consulté par la direction du PCF sur les questions scolaires et avant les congrès du SNI. En 1959, il fut désigné comme membre de la commission laïque auprès du comité central du PCF. L’année suivante, se constitua un collectif de six militants, dont Ducol, pour élaborer, avec d’autres dirigeants, le travail à mener parmi les instituteurs. Par la suite, il fit partie des groupes chargés par la direction du PCF de suivre les questions enseignantes sous la responsabilité de Roland Leroy. Il avait participé au stage central organisé par le PCF pour les instituteurs communistes en septembre 1955.

Dans la fédération communiste d’Indre-et-Loire, Ducol, depuis 1946, était membre du comité fédéral, responsable à la fin des années 1950 du travail parmi les instituteurs, de la diffusion de L’Ecole et la Nation et de la commission laïque créée au milieu des années 1960. À plusieurs reprises, fut évoquée sa possible intégration dans le bureau fédéral. Chaque fois, pour ne pas gêner son militantisme syndical, intervint la décision, au lieu de l’élire, de l’inviter, notamment « quand les questions touchant la laïcité seront à l’ordre du jour » (secrétariat du PCF, 22 novembre 1960) aux réunions. En 1976, secrétaire de la section communiste de Vouvray, il fut candidat communiste au conseil général. Lors de la conférence fédérale en février 1982, avec la section unanime, il s’opposa à la motion présentée par la direction fédérale qui reprenait la ligne de la direction du PCF. Il signa en 1986 l’appel initié par Daniel Karlin* et Tony Lainé pour la rénovation du PCF et adhéra par la suite au manifeste des Refondateurs. À deux reprises, dans La Nouvelle République, il exprima les raisons de sa contestation de la ligne du PCF et en 2007, s’opposa au maintien de la candidature de Marie-George Buffet à la Présidence de la République. L’amicale des Vétérans du PCF, dont il faisait partie, se félicita, lors de son décès, de sa participation à l’ouvrage Communistes en Touraine publié en 2000.

Secrétaire du comité départemental d’action laïque à sa formation en 1948, de 1951 à 1971, il fut le secrétaire de l’Association départementale des conseils de parents d’élèves dont il avait impulsé la création. Il en devint le président sur le plan départemental. Membre du conseil d’administration de la Fédération des œuvres laïques de 1964 à 1992, vice-président de 1970 à 1979, il la présida de 1979 à 1992. Il en demeura par la suite président d’honneur. Il fut aussi responsable de l’UFOLEP en Indre-et-Loire.

Robert Ducol, en outre, avait eu des activités à l’Union sportive de Saint-Pierre-des-Corps, dans la section de basket-ball de 1956 à 1964. Habitant Vernou-sur-Brenne, il fut trésorier puis président de l’Union sportive de Vernou.

Toujours membre du PCF, il restait syndiqué au SNUipp-FSU en 2008.

Le 19 janvier 2012, l’Humanité annonçait ses obsèques, le 20 janvier, au crématorium d’Esvres (Indre-et-Loire).

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article23166, notice DUCOL Robert par Jacques Girault, Jean-Claude Guillon, version mise en ligne le 25 octobre 2008, dernière modification le 24 juin 2022.

Par Jacques Girault, Jean-Claude Guillon

SOURCES : Arch. Nat. F1a 3377. — Arch. comité national du PCF. — Arch. FEN (L. Frajerman). — Arch. P. Delanoue, Centre d’Histoire du XXe siècle, Université de Paris I. — Souvenirs de sa vie militante dans 1920-2000. Communistes en Touraine. 80 ans de témoignages et de récits, Tours, Amicale des vétérans communistes d’Indre-et-Loire, 2000. — Témoignage recueilli par Alain Dalançon, Points de Repères, février 2000. — Renseignements fournis par l’intéressé et sa famille. — Notes d’André Lainé.

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