GELAS Michel

Par Alain Belmont

Né en 1814 à Luzinay (Isère), mort en 1880 à Villeurbanne ; instituteur puis géomètre ; maire républicain et communard de Villeurbanne (Rhône) de novembre 1870 à mai 1871.

Michel Gelas était un homme d’origine modeste, né en 1814 dans une famille de paysans de Luzinay, près de Vienne. Après de brillantes études à l’École normale de Grenoble, il devint en 1835 instituteur dans un village du nord-Isère, Châtonnay. Très vite le sous-préfet de Vienne remarqua sa popularité et la qualité de son travail, au point qu’en 1843 il recommanda chaudement sa candidature au maire de Villeurbanne. Hélas, celui qu’il considérait comme « l’élite des instituteurs » fit de l’ombre au curé de la paroisse, l’abbé Déléon. Gelas attirait dans son école des Charpennes dix fois plus d’enfants qu’une institutrice amie du curé : 112, contre moins d’une dizaine ! L’abbé diffusa alors des calomnies contre son concurrent, lui fit un procès et finit par obtenir son renvoi par le recteur en 1845, malgré le soutien appuyé de la municipalité. À partir de ce moment-là Gelas apparut comme un paria aux yeux de l’administration, qui le harcelait. En réaction l’ancien instituteur glissa dans l’opposition à Napoléon III. Reconverti en géomètre, il s’investit dans l’aide aux plus démunis, devenant entre autres président de la Société de Secours Mutuels de Villeurbanne et vice-président d’une chorale populaire. Ses engagements le menèrent jusque sur le devant de la scène politique, ces jours de septembre 1870.

Le 6 septembre 1870, une petite troupe força les portes de l’Hôtel de ville de Villeurbanne puis expulsa la municipalité en place, pourtant fraîchement réélue. Le maire, Claude-Antoine Berger, protesta pour la forme puis s’inclina. Villeurbanne tournait la page du Second Empire. Comme à Lyon, où le drapeau rouge flottait sur le beffroi de la place des Terreaux, et où un Comité de Salut Public remplaça le Conseil municipal. Les conquérants de la mairie s’autoproclamèrent membres d’une « Commission provisoire administrative », puis élurent à leur tête « monsieur Michel Gelas, expert géomètre ».
Michel Gelas se battit sur tous les fronts. Il aida sans relâche l’armée à défendre Villeurbanne contre le danger imminent d’une invasion prussienne, et veilla en même temps « aux intérêts des travailleurs surtout des ouvriers », mis au chômage par la guerre. Pour leur procurer du travail il entama l’aménagement de nouvelles avenues bouleversant l’urbanisme de Villeurbanne. Dans le même temps Gelas suivit les consignes du Comité de Salut Public de Lyon, dont la politique se durcissait : depuis quelques jours le Russe Michel Bakounine, prêchait l’insurrection générale et l’avènement d’un gouvernement ouvrier. Le « grand soir » arriva le 28 septembre 1870 lorsque 8000 personnes envahirent la place des Terreaux et capturèrent le préfet du Rhône. Mais la tentative de Bakounine échou et le révolutionnaire s’enfuit.
Revenu aux commandes du département, le préfet plaça à Villeurbanne une municipalité parallèle et cessa de correspondre avec Gelas. Puis son attitude varia au gré des aléas politiques locaux ou nationaux. En novembre 1870, il remit Gelas en selle en le nommant officiellement maire de Villeurbanne et prit à nouveau ses distances en décembre, après qu’un officier de la Garde Nationale de Villeurbanne ait été tué en pleine rue par un ouvrier métallo, « le nommé Morteau ». La population prit peur, d’autant plus qu’en janvier 1871 Gelas tenta de rallier des troupes à sa cause. Deux mois plus tard, en mars 1871, les Parisiens se rebellèrent contre le gouvernement et proclamèrent la Commune de Paris. En mai 1871, alors que les soldats gouvernementaux écrasaient la Commune de Paris, une nouvelle municipalité composée de patrons et de marchands reprit le contrôle de Villeurbanne. Gelas et son équipe d’ouvriers n’en faisaient plus partie. Michel Gelas mourut en 1880 dans sa maison de la route de Genas, semble-t-il oublié de ses concitoyens.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article232599, notice GELAS Michel par Alain Belmont, version mise en ligne le 3 octobre 2020, dernière modification le 3 octobre 2020.

Par Alain Belmont

SOURCES : Archives de l’Isère, cote 19 T 277. Bibliothèque Municipale de Grenoble, U 602-603, O 7005. — Archives de Villeurbanne (Le Rize), 1 D 264 à 266.

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