RAMNOUX Clémence, Augustine, Pauline, Marie

Par Alain Dalançon

Née le 22 novembre 1905 à Langeais (Indre-et-Loire), morte le 27 mai 1997 à Lyon (IVe arr.) ; professeur de lycée puis d’université ; militante intellectuelle catholique, membre suppléante du CESD (1946).

Clémence Ramnoux
Clémence Ramnoux

Fille de Léonard Ramnoux, notaire, et de Clémence Bonamy, sans profession, Clémence Ramnoux obtint le baccalauréat en 1924 et fut élève en classe de première supérieure au lycée de jeunes filles de Versailles (Seine-et-Oise/Yvelines) puis au lycée de garçons Condorcet à Paris. Elle appartint au trio des premières jeunes femmes qui intégrèrent en 1927 l’École normale supérieurs de garçons de la rue d’Ulm dans la section lettres, avec Suzanne Roubaud née Molino (angliciste), Simone Pétrement (philosophe), et qui furent rejointes l’année suivante par Simone Weil. Licenciée de philosophie en 1928, elle fut reçue en 1931 à l’agrégation mixte de philosophie en même temps que ses deux camarades femmes de l’ENS dont elle était l’amie.

Professeure au lycée de jeunes filles de Besançon (Doubs), elle fut inscrite à la rentrée 1936 sur la liste d’aptitude pour une nomination dans le cadre parisien. À la Libération elle était en poste au lycée Victor-Duruy à Paris et fut élue en juin 1946 suppléante au Conseil de l’enseignement du second degré, probablement sur la liste du SGEN-CFTC (Syndicat général de l’Education nationale).

Détachée au CNRS, angliciste, elle fut la première femme française invitée à l’Université de Princeton en 1955 par Harold F. Cherniss, spécialiste de la philosophie grecque. Elle enseignait aussi la philosophie en classe de lettres supérieures dans les lycées Fénelon et Camille Sée à Paris, puis obtint sa réintégration dans l’enseignement secondaire à la rentrée 1957 en classes préparatoires. Cependant, dès le mois de décembre 1957, à sa demande, elle partit enseigner à la faculté des lettres d’Alger où elle resta jusqu’en 1963. Elle soutint sa thèse en 1959, Vocabulaire et structures de la pensée archaïque chez Héraclite, accompagnée d’une thèse complémentaire, La nuit et les enfants de la nuit. En Algérie, elle fit partie des universitaires qui, comme André Mandouze, manifestaient leur sympathie pour le peuple algérien ; elle était très informée du monde et de la culture kabyle dont elle avait commencé à apprendre la langue.

Clémence Ramnoux était en effet une intellectuelle catholique progressiste, proche des couples Georgette et Paul Vignaux et Renée et François Bédarida. Elle apporta ainsi sa contribution au Cercle catholique des intellectuels français (une douzaine de conférences et des articles), depuis sa création après la Libération jusqu’au milieu des années 1970, quand il était présidé par René Rémond.

Revenue en métropole, elle fut nommée à la faculté des lettres et sciences humaines de Poitiers (Vienne) en 1963 puis professeure, en 1965, à celle de Nanterre, participant aux côtés de Paul Ricoeur et François Lyotard à l’ouverture du département de philosophie. Elle opta pour le Syndicat autonome après mai 1968 et enseigna à l’Université Paris X jusqu’à sa prise de retraite en 1975. En 1985, elle présida encore dans cette université un jury de thèse consacré à « Mythe et philosophie chez Platon ».

Spécialiste de la philosophie et de la mythologie grecque et de leur histoire, son œuvre est reconnue comme participant au renouveau des études présocratiques, au souci d’interroger les sources de l’ontologie et les mutations décisives d’une culture lorsque celle-ci se défait de ses dieux. Elève de Gaston Bachelard et amie de Georges Dumézil, elle s’engagea très tôt dans la pluridisciplinarité en mobilisant aux cotés de l’histoire de la philosophie, phénoménologie, sociologie des religions, anthropologie, iconographie et psychanalyse. Après son décès, dans le « carnet » du journal Le Monde, Hélène Monsacré évoquait une « femme libre » d’une « rare honnêteté », dont l’œuvre foisonnante se situe « hors des sentiers battus ».

Personnalité « unissant une rigueur et une érudition extrêmes à une profonde sensibilité » (Jean-Michel Palmier), elle initia plusieurs générations d’étudiants à la philosophie grecque et son nom fut donné à un bâtiment de l’Université Paris X.

Elle fut inhumée à la suite d’une cérémonie religieuse en l’église Saint-Bruno à Lyon (1er arr.).

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article233207, notice RAMNOUX Clémence, Augustine, Pauline, Marie par Alain Dalançon, version mise en ligne le 21 octobre 2020, dernière modification le 6 août 2021.

Par Alain Dalançon

Clémence Ramnoux
Clémence Ramnoux

ŒUVRE : La fichier de la BNF comprenait en 2019, 13 références d’ouvrages entre 1959 et 1989 dont plusieurs furent réédités.

SOURCES : Arch. Nat., AJ/16/6132, F/17/11795. — Arch. Dép. Indre-et-Loire, état civil. — JO, Lois et décrets, 9 septembre 1936. — L’Archicube, n°17bis, 2015. — Danièle Delhome, Michèle Sinapi, notice de Clémence Ramnoux, Encyclopédia universalis. — Claire Toupin-Guyot, Modernité et christianisme. Le Centre catholique des intellectuels français, thèse Lyon, donnant Les intellectuels catholiques dans la société française. Le centre catholique des intellectuels français (1945-1976), PUR, 2002. — Maurice de Candillac, Le siècle traversé, A. Michel, 1998, p. 113. — Marie-Anne Lescourret, Pierre Bourdieu, Vers une économie du Bonheur, Flammarion, 2008. — Jean-Michel Palmier « Notes de lecture : Parménide de C. Ramnoux ». — Hélène Monsacré, Le Monde,10 juin 1997, rubrique « carnet ».— Notes de Jacques Girault.

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