DUMONT Yvonne, Jeanne

Par Claude Willard

Née le 3 septembre 1911 à Paris (XIXe arr.), morte le 13 mars 2002 à Mantes-Gassicourt (Yvelines) ; postière puis institutrice ; syndicaliste et communiste de Seine-Inférieure [Seine-Maritime] ; secrétaire (1945-1950), secrétaire générale (1957-1968), puis vice-présidente de l’UFF, membre du comité central du PCF (1947-1968) ; sénatrice de la Seine (1946-1959).

[Sénat]

Née à Paris, Yvonne Dumont était en fait havraise d’origine et d’enfance. Issue d’une famille ouvrière, son père, triporteur, devint après-guerre conducteur de camions à la Compagnie générale transatlantique. Il était « radicalisant ». Sa mère, née Jeanne Le Disez, fut ouvrière d’usine, gérante de coopérative, puis gérante d’une auberge de jeunesse. Elle était sympathisante communiste. Elle eut deux sœurs : une institutrice et une dactylo.

Yvonne Dumont passa avec succès le concours des Bourses et le brevet élémentaire. Obligée de chercher du travail, elle en trouva d’abord, dès août 1927, au Central intertéléphonique du Havre, puis, titulaire du brevet, elle décrocha en 1929 une suppléance dans l’enseignement primaire. Reçue au certificat d’aptitude pédagogique, elle fut titularisée en 1934. De 1929 à 1938, Yvonne Dumont exerça le métier d’institutrice, faisant souvent fonction de secrétaire de mairie dans plusieurs villages de Seine-Inférieure. Elle adhéra au Syndicat national des instituteurs (SNI) en février 1934 ; et, après avoir eu une carte de sympathisante, elle devint membre du PC au début de 1935. Elle participa activement, comme secrétaire de la section communiste d’Yvetot (1936-1938), à la campagne électorale de 1936, au cours de laquelle elle fut plusieurs fois menacée par les Dorgéristes dont c’était un des fiefs. Membre du comité régional, Yvonne Dumont fut déléguée au IXe congrès national du PC à Arles (25-29 décembre 1937). En octobre 1938, sur sa demande, elle fut mutée à Petit-Quevilly ; dès lors, elle milita sur Rouen et sa banlieue, plus spécialement chargée de l’éducation dans les cellules.

Yvonne Dumont participa dans son département à la reconstruction et à la propagande du PCF illégal, au niveau régional, pendant la « drôle de guerre », les principaux dirigeants étant à l’armée. Elle dirigea l’appareil technique régional. Rentrée de l’exode fin août 1940, elle retrouva André Pican et Georges Déziré, s’occupa de la répartition du matériel de propagande dans la région rouennaise. Le 20 juin 1941, elle échappa de justesse à l’arrestation dans son école, prévenue par sa directrice, et plongea dans la clandestinité, sillonnant toujours la région. Elle fut condamnée par contumace à dix ans de travaux forcés par la Cour spéciale de Rouen.

En décembre 1941, elle fut appelée à Paris par la direction du PC. Danielle Casanova lui confia l’Interrégion femmes de Normandie (pseudonyme : Jeannette). Tour à tour interrégionale dans l’est (mars 1942, pseudonyme : Annick), dans le sud-ouest (novembre 1942, pseudonyme : Arlette), où elle rencontra son compagnon Robert Vonet (fusillé le 25 janvier 1944), puis dans l’ouest (de mars à novembre 1943).

Yvonne Dumont « monta » à Paris en novembre 1943 ; après avoir un bref moment assuré les liaisons de Maria Rabaté, elle accoucha dans des conditions évidemment périlleuses de sa fille Catherine. Elle participa ensuite à la mise sur pied de l’Union des femmes françaises (UFF) et fut plus spécialement chargée de l’Assistance française (pour secourir les prisonniers et les familles des victimes de la répression, souvent dans le dénuement). En juillet 1944, Yvonne Dumont fut envoyée dans le Nord et le Pas-de-Calais structurer régionalement l’UFF (voir Julie Darras*). Revenue à Paris le 21 août, elle dirigea le poste de commandement de l’UFF sur la rive droite pendant les combats de la Libération.

Son abnégation et son efficacité pendant la Résistance lui valurent, en 1983, la Légion d’honneur.

Au congrès constitutif de l’UFF (légale), à Paris, du 17 au 20 juin 1945, elle fut nommée secrétaire à l’organisation. Elle suivit peu après la première école centrale de quatre mois que le PCF organisa après la guerre (Arcueil, novembre 1945-février 1946). En 1946, Yvonne Dumont - toujours membre du secrétariat national de l’UFF - fut secrétaire départementale de la Seine de l’UFF et membre du bureau de la fédération de la Seine du PCF. Un moment envisagée comme candidate sur la liste du 2e secteur de la Seine aux législatives de l’automne 1946, elle fut retirée après un arbitrage de Jeannette Vermeersch*.

En décembre 1946, elle fut désignée par l’Assemblée nationale comme membre du nouveau Conseil de la République, siégeant surtout à la commission des Affaires étrangères. Elle devint membre suppléante du comité central au XIe congrès national du PCF (Strasbourg, 25-28 juin 1947) et membre (jusqu’en 1950) de la Commission de contrôle politique.

En 1950, Yvonne Dumont abandonna le secrétariat fédéral et le secrétariat national de l’UFF (tout en restant membre de son bureau directeur) pour entrer au secrétariat fédéral du PCF de la Seine, chargée du travail parmi les femmes. Au printemps 1952, nouvelle affectation : Yvonne Dumont devint l’adjointe de Laurent Casanova au Mouvement national de la paix, Toujours cependant conseillère de la République de la Seine, élue le 19 décembre 1946, elle fut réélue en 1948, en 1952, en 1958 et ne se représenta pas comme candidate au Sénat le 26 avril 1959.

Élue secrétaire générale de l’UFF en 1957, elle déploya une activité internationale de plus en plus régulière. Au nom de l’UFF, elle fut membre du conseil, puis du bureau de la Fédération démocratique internationale des femmes (FDIF) et participa à de nombreux congrès internationaux. Cette activité la conduisit dans de nombreuses capitales européennes, à New York (observatrice à la commission de la condition de la femme de l’ONU). Envoyée en délégation à Hanoï en 1961, elle eut un entretien avec Hô Chi Minh et séjourna une semaine en Chine. En 1967, la FDIF ayant retrouvé son statut consultatif d’ONG à l’Unesco, Yvonne Dumont en fut la représentante jusqu’en 1975.

Au congrès de l’UFF de Nîmes (mai 1968), Yvonne Dumont quitta le poste de secrétaire générale et devint une des vice-présidentes de cette association. Deux ans plus tard, en février 1970, au XIXe congrès du PCF, elle demanda à ne plus être candidate au comité central. Ce renoncement à des responsabilités de haut niveau fut motivé par la volonté d’assurer à temps la relève dans un mouvement féminin auquel les événements de 1968 devaient donner un nouvel essor, exigeant des activités appropriées au niveau de conscience atteint par les femmes. Après avoir siégé vingt-trois ans au comité central, faire place à des cadres plus jeunes constituait son autre motivation.

Yvonne Dumont continua d’apporter sa contribution à la commission centrale du travail du PCF parmi les femmes jusqu’en 1979. Elle participa au lancement d’un journal spécifique du PCF, Femmes aujourd’hui, demain, et, sur la base d’une étude collective de cette commission, Yvonne Dumont rédigea Les communistes et la condition de la femme (Éditions sociales, 1970). Elle collabora aussi, comme membre du comité de rédaction, aux Cahiers du Communisme (à partir de 1966) dans lesquels elle publia de nombreux articles.

En tant que vice-présidente de l’UFF, Yvonne Dumont agit surtout dans le secteur « Paix et solidarité internationale » et prit une part importante, sur le plan international, à la préparation et à la réalisation de l’« Année internationale de la Femme » (1975). Elle effectua encore de nombreux voyages, rencontra Fidel Castro à Cuba, Kim Il-Song en Corée du Nord. Après 1975, elle laissa son poste de représentante de l’UFF à la FDIF, mais continua de participer au bureau national de l’UFF et à sa Commission de la Paix. Depuis 1981, elle est au bureau parisien de l’ANACR.

Yvonne Dumont était la compagne d’André Souquière. Leur fille, Michelle, est née en avril 1953.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article23342, notice DUMONT Yvonne, Jeanne par Claude Willard, version mise en ligne le 25 octobre 2008, dernière modification le 26 août 2022.

Par Claude Willard

[Sénat]
Yvonne Dumont
Yvonne Dumont
XVIe congrès du PCF, 1961

SOURCES : Fonds Yvonne Dumont, Arch. dép. de Seine-Saint-Denis (294 J), inventaire en ligne. —RGASPI, 517, 1, 1896. — Arch. comité national du PCF. — Témoignage d’Yvonne Dumont.

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