DUPERRAY Jean, Antoine [Dictionnaire des anarchistes]

Par Jean Lorcin, Jean Maitron, revu par Rolf Dupuy et Marianne Enckell

Né le 9 avril 1910 à Coutouvres (Loire), mort le 23 septembre 1993 à Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône) ; instituteur ; militant syndicaliste du SNI, puis de la CNT révolutionnaire de Saint-Étienne (Loire).

Fils d’un instituteur et d’une couturière, Jean Duperray fit ses études à l’École normale.

Après des lectures de Proudhon et de Sébastien Faure, il entra en rapport avec le communiste Albert Dolmazon et, par lui, avec les écrits de Barbusse et de Romain Rolland. En 1928, pendant ses vacances d’été, il travailla dans le Bâtiment et prit une carte de sympathisant communiste.

À sa sortie de l’École normale, il fit, avec sa promotion, un voyage en Allemagne préhitlérienne. En 1931-1932, il accomplit son service militaire à Clermont-Ferrand, lut beaucoup et trouva dans les doctrines syndicalistes révolutionnaires l’équilibre qu’il cherchait entre communisme et anarchisme.

Nommé en 1932 instituteur à La Talaudière (Loire), il adhéra au SNI de la Loire et à la LICP, se lia aux libertaires, aux syndicalistes ; il s’abonna à la Révolution prolétarienne, milita à l’Union locale et à l’Union départementale CGT de la Loire.

De 1932 à 1934, il fut un proche de Simone Weil qui donna des conférences dans la région et participa à des manifestations et des réunions syndicalistes. Il garda toute sa vie une sorte de fascination pour elle, écrivant plusieurs articles de souvenirs, s’inspirant d’elle pour des œuvres romancées.

Actif sympathisant de l’Espagne républicaine et du syndicalisme CNT-FAI et UGT, membre de la SIA (Solidarité internationale antifasciste), il milita en tant que syndicaliste minoritaire oppositionnel et défendit en particulier ses positions lors du IIIe congrès départemental CGT. Jusqu’à la déclaration de guerre de 1939, il participa aux actions de toutes les tendances syndicales qui tentaient de concilier le pacifisme ouvrier et la lutte contre la guerre avec le soutien de l’Espagne antifranquiste, la lutte antifasciste et la lutte antihitlérienne.

Membre du conseil syndical, de la CE du SNI de la Loire, de la CE de la Fédération générale de l’enseignement, Jean Duperray fit, entre autres, la grève le 30 novembre 1938 et fut sanctionné.

Mobilisé en septembre 1939, il connut les premières lignes, la retraite par Dunkerque, l’Angleterre, le retour par Cherbourg, la débâcle en direction du Sud. Il entra en 1942 dans la Résistance à l’Insurgé de Lyon avec des militants du PSOP, des syndicalistes révolutionnaires de l’enseignement et de la CGT-SR, des membres de l’équipe de la Révolution prolétarienne mais aussi des syndicalistes de la majorité CGT de l’enseignement et des Centristes CGT. À un congrès clandestin tenu à Villeurbanne en octobre 1943, les délégués de la Loire adoptèrent « la thèse du socialisme technicien à base syndicaliste ouvrière et paysanne, inspirée par certains éléments du POUM (Parti ouvrier d’unification marxiste) ».

Dès la Libération, il œuvra à la reconstruction des sections SNI, dont il était secrétaire adjoint, et FEN de la Loire, où il animait la tendance École émancipée, après avoir participé à leur vie clandestine sous l’Occupation.

En janvier 1948, il lançait l’appel « Pour l’unité par la démocratie » et continuait à œuvrer pour l’unité d’action entre les différentes composantes du mouvement syndical dans la Loire. Dans les années 1950 il était membre de la CNT et en 1953 présidait le bureau de la 17e Union Régionale du syndicat des instituteurs. Il collabora à l’Alliance Ouvrière (Grenoble, 30 numéros, du 15 janvier 1953 à décembre 1955) qui cherchait à créer un regroupement syndical de type syndicaliste révolutionnaire, à l’organe de la Fédération Anarchiste Le Monde Libertaire et à Liberté de Louis Lecoin*.

Il prit sa retraite en 1965 et consacra ses loisirs à écrire de façon très éclectique : études sociales, études sur le roman populaire, films, chansons etc. En 1972, de graves accidents oculaires l’obligèrent à limiter beaucoup ses activités

Jean Duperray était marié et père d’un fils.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article153907, notice DUPERRAY Jean, Antoine [Dictionnaire des anarchistes] par Jean Lorcin, Jean Maitron, revu par Rolf Dupuy et Marianne Enckell, version mise en ligne le 5 avril 2014, dernière modification le 7 août 2021.

Par Jean Lorcin, Jean Maitron, revu par Rolf Dupuy et Marianne Enckell

ŒUVRE : Histoire fantastique et merveilleuse de Dora Providence, Club français du Livre, 1951. — Harengs frits au sang, Gallimard, 1954 (rééd. 2010). Prix de l’humour noir. — Quand Simone Weil passa chez nous, récit, présenté par Eric Dussert, Mille et une nuits, 2010. Duperray écrivit aussi des nouvelles et collabora à la Voix syndicaliste, à la Révolution prolétarienne, puis à l’Insurgé de Lyon clandestin, au Mercure de France, à Europe, aux Lettres Nouvelles, etc.

SOURCES : Arch. Dép. Loire, 85 W 94, 85 W 206, 97 VT 49, 20 J 32, 20 J 35, 20 J 38, 20 J 44, 20 J 51-52, 20 J 61, 342 VT 1. — La Tribune républicaine, 13 octobre et 13 novembre 1938, 9 et 16 mars, 18 avril 1939. — Le Cri du Peuple, 20 avril 1939. — La Voix syndicaliste, n° 7, août 1937, n° 16, mai 1938. — L’Insurgé. — « Six ans de liaisons intersyndicales dans la Loire... », dans La Révolution prolétarienne, n° 397 (96 de la nouvelle série). — R. Fiat, « L’Insurgé », in : Aspects de la Résistance française, n° spécial de la Revue d’histoire de la Seconde Guerre mondiale, n° 47, juillet 1962, p. 61-78. — Jean Duperray, « L’équipe de « L’Insurgé » », in Mémorial de l’Insurgé, édité par Marie-Gabriel Fugère, Lyon, Imprimerie Nouvelle Lyonnaise, 1968, 116 p., p. 39-52. — Michelle et Gérard Raffaelli, Introduction bibliographique, méthodologique et biographique à l’étude de l’évolution économique et sociale du département de la Loire, 1914-1920. Le Mouvement ouvrier contre la guerre, mémoire de maîtrise d’histoire, Paris X Nanterre, 1969. — Henry Destour, Les syndicalistes révolutionnaires et le mouvement syndical dans le département de la Loire entre les deux guerres mondiales. Aperçu des luttes de tendances dans les syndicats ouvriers de la Loire entre les deux Guerres mondiales, mémoire de maîtrise d’Histoire, Saint-Étienne, 1971. — Simone Pétrement, La vie de Simone Weil, Fayard, 1973, 1. 1909-1934 ; 2. 1934-1943. — Hervé Blettery, Le mouvement ouvrier dans la Loire sous la IVe République. Pluralisme syndical et unité d’action dans la région stéphanoise (1944-1948), mémoire de maîtrise, Saint-Étienne, 1985 (Arch. Dép. Loire, 37 J 98). — Notes de J. Duperray et de M. Moissonnier, Jean-Michel Steiner. — Fichier des décès INSEE.

rebonds ?
Les rebonds proposent trois biographies choisies aléatoirement en fonction de similarités thématiques (dictionnaires), chronologiques (périodes), géographiques (département) et socioprofessionnelles.
fiches auteur-e-s
Version imprimable