DUPONT Pierre, Jules

Par Madeleine Singer

Né le 6 janvier 1922 à Ronchin (Nord), mort le 1er juin 2005 à Lille (Nord) ; professeur d’enseignement général ; secrétaire national du Syndicat national des centres publics d’apprentissage (SNCPA-CFTC) de 1955 à 1959, membre du comité national du SGEN (1962-1970).

Pierre Dupont était le dernier des trois enfants de Jules Dupont, expert à l’Intendance militaire, qui avait épousé Marie-Thérèse Desmons. Il fit ses études secondaires à Lille (Nord), d’abord à l’école libre Jeanne d’Arc, puis au lycée Faidherbe où il obtint le baccalauréat A (philosophie) en 1939-1940. Il résida alors avec ses parents dans le Maine-et-Loire et fut réfractaire au STO (service du travail obligatoire) jusqu’à la Libération. Rentrant dans le Nord, il fut nommé le 1er octobre 1944 moniteur d’enseignement général au centre d’apprentissage de Lille (annexe de Fives) ; il y fut titularisé PEG sciences quand le personnel des centres fut reclassé en 1946. Lorsque les centres d’apprentissage devinrent collèges d’enseignement technique (CET) en 1959, Pierre Dupont demeura à Lille-Fives et fut muté en 1970 au CET La Mouchonnière à Seclin (Nord). Il prit sa retraite en 1982 dans ce CET devenu entre-temps lycée d’enseignement professionnel (LEP). Il avait épousé en 1943 Élisabeth Leclerc qui était assistante sociale dans l’Éducation nationale. Ils eurent deux filles, l’une infirmière-chef dans une maison de repos ; l’autre mère au foyer, élevant ses quatre enfants.
Pierre Dupont avait été scout de France pendant ses études secondaires. Quelques mois après son entrée en fonction au centre d’apprentissage de Fives, il adhéra au Syndicat libre des centres de formation professionnelle qui faisait partie de la Fédération des employés CFTC ; il passa au Syndicat national des centres publics d’apprentissage (SNCPA), créé en 1946 qui, à partir de 1959, s’appela Syndicat national des collèges d’enseignement technique (SNCET) ; celui-ci s’intégra dans le SGEN en 1962. À Fives, Pierre Dupont partageait avec Claude Bonvin la responsabilité de la section et devint en 1947 secrétaire académique du SNCPA ; il eut dès lors une demi-décharge de service car la tâche d’un secrétaire académique était lourde. Il siégeait en cette qualité au comité national du SNCPA et devait donc aller à Paris pour les assemblées trimestrielles de cet organisme ainsi que pour le congrès national annuel ; toutes ces réunions avaient lieu alors pendant les vacances scolaires. Il lui fallait à Lille assurer les réunions du secrétariat académique qui se tenaient le soir, préparer les congrès académiques, rédiger les circulaires d’information, aller en audience à l’Inspection de l’enseignement technique.
Après avoir effectué ce travail pendant huit ans, Pierre Dupont devint en 1955 secrétaire national du SNCPA. Il avait accepté cette fonction en prévenant que c’était pour quatre ans car il pensait qu’après ce temps, on perdait le contact avec la base. Il eut donc jusqu’en 1959 une décharge complète de service, sa femme étant alors nommée assistante sociale au lycée du Perreux (Seine, Val-de-Marne). Ses obligations étaient multiples : il lui fallait défendre éventuellement les adhérents auprès de la direction de l’enseignement technique (DET), représenter le bureau national dans presque tous les congrès académiques, se soucier du Lien des centres, l’hebdomadaire du syndicat qui était tapé par le secrétariat, mais auquel il se substituait lorsque celui-ci était défaillant. Pierre Dupont devait relire les textes proposés ou en rédiger, songer à mettre toutes les informations qui pouvaient intéresser les syndiqués, annoncer les réunions à la DET pour les promotions, les mutations, les affectations. Il visitait dès la rentrée chaque école nationale normale d’apprentissage (ENNA). Enfin, il assurait les relations du SNCPA avec le SGEN ; on le retrouva aux côtés de Paul Vignaux* lors de l’audience que le SGEN eut le 17 février 1956 avec le ministre de l’Éducation nationale, René Billères : il y exposa les problèmes de l’Enseignement technique, « parent pauvre de l’Éducation nationale ».
À cette époque les relations s’intensifièrent entre les deux organisations qui tinrent leur congrès en même temps à Metz (Moselle) en avril 1958, avec des réunions communes pour les problèmes généraux. Déjà en cours d’année, plusieurs séances de travail avaient réuni des membres du secrétariat des deux syndicats, qui avaient étudié les problèmes techniques posés par une fusion éventuelle. Dans son rapport moral, Pierre Dupont signala que depuis le 1er janvier 1958, on intercalait Syndicalisme universitaire dans l’envoi aux adhérents du Lien des centres. Aussi put-il se référer aux rapports parus dans Syndicalisme universitaire en ce qui concernait la situation politique, économique et sociale ; il se consacra par conséquent aux mouvements revendicatifs menés dans les centres d’apprentissage pendant l’année écoulée.
Par ce rapport, nous avons également une idée de l’action de Pierre Dupont sur le plan confédéral. Sur demande de la CFTC, il avait assisté aux journées sur l’éducation professionnelle qui s’étaient tenues à Rome (Italie) sous l’égide du Bureau européen de la jeunesse et de l’enfance (BEJE) en avril 1957. Il avait fait partie également de la représentation officielle française, à la demande du gouvernement, comme représentant l’ensemble des syndicats français à une réunion sur la formation professionnelle au Bureau international du travail (BIT) à Genève : cette délégation comprenait deux membres du ministère de l’Éducation nationale, deux membres du ministère du Travail, un représentant des syndicats patronaux, un représentant des syndicats ouvriers. Depuis lors il avait été chargé par la Confédération internationale des syndicats chrétiens (CISC) de la représenter à l’Institut européen de formation professionnelle.
Participant au congrès confédéral de juin 1957, il y présenta avec Roger Tarnaud le rapport de la commission de formation professionnelle et prit position, avec le SGEN, contre le rapport moral du secrétaire général Georges Levard* qui avait répondu « de façon plus qu’insuffisante » à l’intervention de Paul Caspard*. Celui-ci avait critiqué le discours d’ouverture du président confédéral qui avait opposé le socialisme démocratique à la morale sociale chrétienne, alors que « les deux notions ne se situent pas sur le même plan » : « C’est dans les pays où s’est précisée la notion antitotalitaire de socialisme démocratique que le mouvement ouvrier socialiste a été et demeure le plus respectueux des diverses confessions chrétiennes », déclara Paul Caspard.
En 1959 Pierre Dupont reprit son poste au CET de Fives, laissant la charge de secrétaire académique à Claude Bonvin qui lui avait succédé en 1955. Mais il demeura membre du bureau national du SNCET, effectuant donc à peu près une fois par mois le trajet Lille-Paris. En outre élu depuis le 4 décembre 1959 à la commission administrative paritaire nationale (CAPN) des PEG sur la liste d’entente intersyndicale des quatre organisations des CET, il fut réélu en 1962 sur une liste commune CFTC-FO car la CGT et les autonomes n’avaient pas reconduit l’accord de 1959. Réélu de la même manière les fois suivantes, Pierre Dupont siégea à la CAPN jusqu’en 1972, étant alternativement titulaire et suppléant selon l’accord passé avec FO. Il rédigeait donc pour le bulletin syndical les comptes rendus des séances de la CAPN. Il fut aussi candidat lors des élections du 16 mars 1966 au Conseil de l’enseignement général et technique (CEGT). Présenté comme titulaire par le SGEN et le syndicat national des lycées et collèges (FO), il ne fut pas élu car le scrutin, encore majoritaire à cette époque, permit à la FEN de l’emporter avec 2 067 voix, la CGT arrivant derrière avec 1 784 voix et le SGEN-FO avec 1 703, tout en ayant acquis un supplément de 192 voix entre les deux tours de scrutin.
Pendant cette période, Pierre Dupont suivit également avec Jean Rossigneux*, professeur d’enseignement technique théorique (PETT), l’application de la circulaire du 28 novembre 1966, qui avait ramené à 23 heures l’horaire des PEG et PETT. Il incitait les intéressés à ne pas accepter d’heures supplémentaires car, disait-il dans le bulletin syndical, « accepter des heures supplémentaires, c’est accepter que les créations de postes indispensables ne soient pas effectuées ; c’est aller à l’encontre de l’intérêt des élèves ; c’est participer à la dévalorisation de l’enseignement technique public ». Toute cette phrase était soulignée dans le texte afin d’attirer davantage l’attention des collègues.
En 1970 il quitta le bureau national et le comité national car il allait assumer des responsabilités politiques. Déjà lors des élections législatives de mars 1967, il avait été candidat pour le Centre démocrate. En 1971, à la demande du maire de Ronchin (Nord), il se présenta sur la liste du Parti socialiste (PS) lors des élections municipales. Il adhéra au PS l’année suivante car le Centre démocrate, d’abord orienté à gauche, s’était dissous dans un Mouvement réformateur qui basculait peu à peu vers la droite. Dans la municipalité élue en 1971, Pierre Dupont fut délégué aux sports et devint en 1983 premier adjoint avec la même fonction, poste qu’il conserva jusqu’en 1995. À cette date, ne se représentant plus, il fut nommé maire adjoint honoraire. En 1999 il était toujours président de l’Office municipal du sport, après avoir quitté l’année précédente la présidence du Conseil régional des offices municipaux du sport Nord-Pas-de-Calais, présidence qu’il avait assumée pendant une quinzaine d’années, tout en étant également membre du conseil d’administration de la Fédération nationale des offices municipaux du sport.
Titulaire de la carte de réfractaire, Pierre Dupont était devenu président de la section de Lille et environs du Groupement national des réfractaires et maquisards et l’était toujours en 1999. Il avait la médaille de réfractaire et celle de la clandestinité, ainsi que de nombreuses autres médailles telles que la médaille d’or de la Jeunesse et des sports, la médaille d’argent de l’enseignement technique. Il était également chevalier dans l’ordre des Palmes académiques.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article23396, notice DUPONT Pierre, Jules par Madeleine Singer, version mise en ligne le 25 octobre 2008, dernière modification le 2 février 2022.

Par Madeleine Singer

SOURCES : Madeleine Singer, Histoire du SGEN, Presses universitaires de Lille, 1987. — Syndicalisme universitaire (1956-1972). — Lettres de Pierre Dupont à Madeleine Singer, avril 1995, mai 1997, octobre 1998, 8 décembre 1998 ; entretiens des 16 et 23 novembre 1998 (arch. privées).

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