PREAU Georges, Louis, Germain, Lucien

Par Odile Beillouin

Né le 11 mai 1931 au Thoureil (Maine-et-Loire), mort le 20 mars 2018 à Saint-Rémy-la-Varenne (Maine-et-Loire) ; ouvrier champignonniste ; militant CFTC puis CFDT , secrétaire du Syndicat des travailleurs du champignon de Maine-et-Loire puis du Syndicat CFDT de la Transformation agro-alimentaire du Saumurois, membre du Conseil de la FGA CFDT ; conseiller prud’homal dans la section Agriculture à Saumur (Maine-et-Loire), administrateur CFDT à la Chambre d’Agriculture de Maine-et-Loire.

Son père, Lucien Préau, né le 19 novembre 1894 au Thoureil (Maine-et-Loire) fut agriculteur dans cette commune, il décéda le 11 janvier 1986 à Fontenay-le-Comte (Vendée). Sa mère, Germaine Blain, née le 12 juillet 1895 à Noyant-la-Plaine (Maine-et-Loire) décéda le 30 janvier 1983 à Saint-Rémy-la-Varenne. Leur mariage fut célébré le 20 avril 1920. Georges Préau fut le quatrième d’une fratrie de six enfants (quatre garçons et deux filles) : Robert né en 1922, Lucien en 1924, Maurice en 1928, Georges en 1931, Christiane en 1933 et Sidonie en 1934.

Leur père abandonna le foyer et laissa la maman élever seule les enfants. Pour subvenir aux besoins de la famille, elle dut faire des travaux saisonniers en agriculture, principalement l’épilage des lapins « angora ». Elle fit également des travaux de couture chez les particuliers. Dès qu’elle le put, elle acheta une maison à Saint-Rémy-la-Varenne, au lieu-dit « Fontaine », où elle demeura jusqu’à sa mort. Georges Préau, resté célibataire, habita avec sa mère et, après son décès, racheta la maison où il vécut jusqu’à la fin de ses jours.

Georges Préau fut scolarisé à l’école publique du Thoureil. Dès l’obtention de son Certificat d’études primaires (CEP) en mai 1944, à l’âge de treize ans, il partit travailler dans des fermes de communes avoisinantes (chez Camus à Chemellier, chez Gouzit à Saint-Georges-des Sept-Voies), puis il effectua son service militaire à Laval (Mayenne). À son retour de l’armée en 1952, il alla se présenter à la cave de Saint-Jean à Chenehutte (Maine-et-Loire), un site de production de champignons qui recherchait des ouvriers. Cette cave comptait vingt salariés et appartenait à l’entreprise Blanchaud. Embauché comme ouvrier champignonniste, il passa toute sa vie professionnelle au même endroit, jusqu’à sa retraite en 1991.

Très vite après son embauche, Georges Préau créa une section CFTC. Dès qu’une injustice apparaissait, il soutenait ses collègues devant l’employeur sans aucune hésitation. L’amélioration des conditions de travail et d’emploi des ouvriers fut pour lui un combat permanent. Il devint le délégué syndical au niveau de toute l’entreprise qui comptait environ mille salariés, répartis dans huit caves de production dans le Saumurois plus une unité industrielle à Saint-Cyr-en-Bourg (Maine-et-Loire) produisant du fumier et employant une centaine de personnes.

Georges Préau acquit rapidement les compétences nécessaires à son mandat et devint un redoutable négociateur dans toute la région, discret mais « ne lâchant rien ». Sa connaissance des dossiers et des situations en fit un délégué CFTC puis CFDT hors-pair, reconnu et respecté de tous, même des employeurs. Il organisa de multiples rencontres pour permettre aux ouvriers du champignon de connaître leurs droits et d’améliorer leurs conditions de travail. N’hésitant pas pour cela à faire des kilomètres, souvent après ses heures de travail, notamment en Indre-et-Loire, dans la Vienne et dans le Loir-et-Cher.

Dans les années 1970, le secteur du champignon connut de nombreuses restructurations. Georges Préau fut particulièrement actif dans le conflit Blanchaud en 1975-1976. A la mi-juin 1975, les journaux locaux firent état des difficultés de l’entreprise qui avait racheté de nombreux sites les années précédentes. Aussitôt, les militants CFDT du groupe Blanchaud se réunirent. Des actions furent déci-dées : conférence de presse, pétition, demandes d’information dans tous les sites, demandes d’entrevue au député de la circonscription, M. Rigault, au maire de Saumur, M. Méhel, ainsi qu’aux ministres de l’Agriculture et du Travail. Le 15 juillet, une délégation de la Fédération CFDT de l’Agriculture fut reçue au ministère de l’Agriculture qui confirma les restructurations dans le secteur du champignon en ces termes « Pas question d’abandonner Blanchaud mais on ne peut pas éviter les licenciements ».

Effectivement, dès le 16 juillet 1975, neuf sociétés du groupe Blanchaud déposèrent le bilan. Le 23 juillet, la CFDT rencontra le préfet de Maine-et-Loire qui refusa de donner plus d’informations selon ses dires « dans l’intérêt de la négociation ». Une conférence de presse se tint aussitôt ainsi qu’une réunion d’information à Loches (Indre-et-Loire) avec 130 personnes, suivie d’une visite le soir-même chez le sous-préfet qui reçut la délégation … en pyjama. En septembre 1975, des actions de débrayages et des manifestations eurent lieu à Saumur, Loches et Vendôme (Loir-et-Cher). Mais, au total, près de 300 salariés furent licenciés à cette période.

En octobre, les 127 salariés du site du Clos du Verdet à Vendôme reçurent une lettre leur annonçant la fermeture du site. Ils décidèrent de ne pas se laisser faire : débrayage le jour-même, blocage de la Nationale 10 durant une demi-heure, manifestations auprès de la préfecture et du conseil municipal, occupation des locaux de l’entreprise. Au bout de 48 heures d’action, la direction et le mandataire acceptèrent de geler les licenciements et de réexaminer la situation fin décembre. Cette première victoire permit de disposer de quelques mois de répit et de préparer la suite, car la menace de fermeture n’était pas écartée. En effet, après la nouvelle annonce de fermeture du site, les actions reprirent en février 1976 et durèrent jusqu’au 18 mars, date à laquelle l’avocat de Blanchaud fit part de l’annulation des licenciements. L’action syndicale avait payé ! Le travail reprit le 1° avril 1976 au Clos du Verdet, avec la désignation d’un délégué syndical CFDT et d’un représentant syndical au comité d’entreprise.

Par la suite, Blanchaud fut racheté par Royal Champignon, lui-même repris par les coopératives de production. Ces dernières s’étant énormément endettées furent rachetées ensuite par le groupe Saint-Louis (sucre). Mais le décès en 1995 des deux dirigeants de Saint-Louis dans un accident d’avion provoqua à nouveau un rachat par le groupe France-Champignon lui-même revendu plus tard à Bonduelle qui poursuivit la fermeture des sites de production.

Par son action inlassable, Georges Préau permit à de nombreuses femmes et hommes travaillant dans les caves, dont beaucoup d’immigré-e-s, de trouver ou retrouver leur dignité. Grâce à son action militante des avancées significatives furent obtenues : treizième mois, amélioration des grilles de salaires, congés spéciaux, etc...

Durant toute cette période, Georges Préau participa également aux rencontres nationales de branches pour porter la réalité locale, échanger avec d’autres militants du même secteur d’activité, et ainsi contribuer à enrichir les revendications et faire avancer les négociations. Car sa vision militante ne s’arrêtait pas aux champignonnières et c’est tous les travailleurs des secteurs de l’agriculture et de l’agroalimentaire qu’il représenta dans ses différents mandats. À partir de 1988, en tant que défenseur syndical CFDT, il assista de nombreux salariés dans leur défense devant le Conseil des Prud’hommes du Saumurois. En décembre 1997, il fut élu conseiller prud’homal dans le collège Salarié de la section Agriculture. Il prêta serment le 5 janvier 1998 et fut régulièrement Président et Vice-Président de la section Agriculture. Après la fin de son mandat, il poursuivit pendant de nombreuses années l’information et la défense des salariés en tenant régulièrement des permanences juridiques à l’Union locale CFDT de Saumur. À la Chambre d’Agriculture de Maine et Loire, il fut également élu CFDT dans le collège des salariés agricoles de 1970 à 1976. Il fut aussi secrétaire du Syndicat CFDT des travailleurs du champignon et cultures spécialisées de Maine-et-Loire puis du Syndicat de la transformation agroalimentaire du Saumurois où il accompagna de nombreux élus dans leurs négociations locales. Il fut le coordinateur de l’Union départementale Agriculture puis Agroalimentaire (UDA) de Maine-et-Loire, de 1968 à la fin des années 1980. Il participa aussi à des voyages d’études, notamment en Russie. En septembre 1981, il partit en délégation horticole CFDT découvrir en Hollande, l’organisation de ce secteur, sa modernisation, rencontrer les responsables syndicaux, et ainsi affiner les positionnements et faire encore plus de propositions devant un patronat local qui ne cessait de se lamenter (la crise, l’énergie, la fiscalité....), sans anticiper la réorganisation nécessaire de la profession. Il fut enfin élu au Conseil de la Fédération générale de l’agriculture (FGA) au congrès de Guidel (Morbihan) en 1977 et reconduit au congrès de Vertou (Loire-Atlantique) en 1980, où les deux fédérations de l’Agriculture et de l’Alimentation se regroupèrent pour former la Fédération Générale Agroalimentaire. Lors du congrès de Bombanne (Gironde) en novembre 1983, il ne souhaita pas se représenter au Conseil fédéral.

Georges Préau fut adhérent au Parti socialiste (PS) et élu municipal à Saint-Rémy-la-Varenne durant deux mandats, de 1983 à 1995, participant plus particulièrement à la commission voirie rurale. Toujours disponible, animé par un vrai sens de l’humour, il fut le trésorier du comité des fêtes durant de nombreuses années.

Ayant découvert la musique au service militaire, il poursuivit sa passion au sein de la fanfare de Saint-Georges-des-Sept-Voies dans laquelle il jouait du bugl (instrument à vent), participant de ce fait à de nombreuses fêtes locales. Il reçut même en 1994, la médaille de la « confédération musicale de France », distinction qui récompensait trente ans d’activité dans des sociétés musicales. Georges Préau fut aussi décoré en 1982 de la médaille de l’Association nationale des industries agroalimentaires (ANIA) et en 1986 de la médaille du Travail.

À la retraite, tout en poursuivant son adhésion à la CFDT Retraités, il fut militant actif du club des aînés de sa commune, ayant toujours une histoire à raconter, jouant aux cartes tous les mardis. « Je fais le quatrième » disait-il avec malice !

Toutes ses activités syndicales ne l’empêchèrent pas de s’investir là où il vivait. Il s’intéressait aux gens et il aimait se retrouver entre amis. Ainsi fut la vie de Georges Préau, celle d’un vrai militant, dévoué aux autres, un rural bien ancré dans son milieu, mais sachant voir plus loin et plus haut que la routine du quotidien.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article234884, notice PREAU Georges, Louis, Germain, Lucien par Odile Beillouin, version mise en ligne le 1er décembre 2020, dernière modification le 1er décembre 2020.

Par Odile Beillouin

SOURCES : Mairie de Saint-Rémy-la-Varenne. — Chambre d’agriculture de Maine-et-Loire. — Arch. de la Fédération générale de l’Agroalimentaire (FGA-CFDT), Arch. Interfédérales CFDT. — Arch. du Conseil des Prud’hommes de Saumur. — Informations recueillies par Louis Allard et Odile Beillouin en 2018 auprès d’André David, militant CFDT du saumurois et de la famille de Georges Préau.

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