Par Éric Belouet
Né le 5 février 1930 à Tunis (Tunisie) ; dessinateur calqueur en Tunisie, chef de bureau de dessin, puis chef du bureau des informations techniques au centre de distribution EDF de Quimper (Finistère) ; militant jociste en Tunisie, permanent de la JOC nord-africaine (1953-1956) ; syndicaliste CFTC puis CFDT ; militant de la Convention des institutions républicaines (CIR) (1970-1971) puis du PS (depuis 1971) ; militant associatif (loisirs, tourisme social, logement social) ; administrateur de la CAF de Quimper (1971-1996) ; conseiller municipal de Pluguffan (Finistère) de 1977 à 1996.
Son père, Pierre Adragna, né en 1901 en Tunisie d’une famille d’émigrants siciliens, était employé aux Chemins de fer tunisiens où il termina sa carrière comme conducteur de locomotive. Naturalisé français en 1905, il n’avait pas d’engagement syndical. Sa mère, née Louise Lo Monaco en 1907 en Tunisie, elle aussi d’une famille d’émigrants siciliens, était sans profession. Elle obtint la nationalité française à la suite de son mariage le 12 juin 1928 à Tunis. Tous deux catholiques convaincus et pratiquants irréguliers, ils eurent quatre enfants (trois fils et une fille) dont Gilbert Adragna était l’aîné. Comme lui, tous ses frères firent partie des Cœurs Vaillants et de la JOC et sa sœur participa aux Âmes Vaillantes et à la JOCF.
Gilbert Adragna fréquenta l’école primaire publique Mégrine (1937-1942), puis le collège technique Émile-Loubet (1943-1947) à Tunis. Le décés de son père, le 22 mars 1945, le mit dans l’obligation d’écourter ses études et de participer à l’économie familiale en allant travailler. Les efforts des autres membres de sa famille lui permirent néanmoins d’aller jusqu’au bout de la quatrième année du collège technique et d’obtenir le BEPC et le certificat de fin de troisième année du collège technique. Il entra au travail en juillet 1947 à la Compagnie du gaz et des eaux de Tunis (CGET) qui distribuait également de l’électricité pour la seule ville de Tunis. Affecté comme dessinateur calqueur au bureau d’études du secteur « distribution de l’électricité », où il milita à la CFTC, il démissionna en août 1953 pour devenir permanent jociste.
Sa participation à la chorale paroissiale de Cité-Lescure avait permis à Gilbert Adragna de connaître la JEC, par laquelle il fut mis en relation avec le mouvement des Coeurs Vaillants dont il devint un dirigeant. Devenus trop âgés pour demeurer au sein de ce mouvement, ses camarades et lui formèrent, par souci de continuité, une section jociste vers 1948. Gilbert Adragna fut rapidement amené à suivre plusieurs sections de la banlieue sud de Tunis, puis intégra l’équipe de responsables fédéraux suivie par le permanent Sauveur Maltèse*. Ce dernier le sollicita en 1953 pour le remplacer comme permanent au sein de la JOC nord-africaine dont les autres membres étaient alors José Blasco*, responsable de l’Algérois, André Varga*, responsable de l’Oranais, Pierre Clément* et Henri Larvor. Gilbert Adragna assuma cette responsabilité de permanent pour la Tunisie jusqu’en mars 1956. Il se maria le 24 septembre 1956 au Consulat de France à Tunis avec Jeanne Boullet, elle-même ancienne permanente de la JOCF dans le Nord-Pas-de-Calais puis en Tunisie, et quatre enfants naquirent de cette union : Bruno (1957), Mériem (1959, décédée en 1964), Véronique (1961) et Frédéric (1963). Le couple adhéra à l’ACO (Gilbert Adragna en était toujours membre en 2007).
Le directeur de la CGET accepta de le reprendre au sein de l’entreprise en avril 1956 ; peu après, la loi du 4 août 1956 et la convention du 12 avril 1957 garantirent un emploi dans une entreprise française à tous les agents français fonctionnaires ou assimilés. En 1959, la Tunisie nationalisa toutes les entreprises privées qui distribuaient de l’énergie. La CGET devint la Société tunisienne de l’électricité et du gaz (STEG) et Gilbert Adragna continua à y travailler sous contrat annuel renouvelable. En 1968, la Tunisie ayant décidé de limiter à trois ans les contrats des coopérants français, il se retrouva ipso facto intégré à l’EDF. Avec sa famille, il quitta la Tunisie en décembre 1968 et prit ses fonctions comme chef de bureau de dessin au centre de distribution EDF de Quimper le 2 janvier 1969. En plus de cette responsabilité, on lui confia rapidement la fonction de conducteur de travaux sur la ZUP quimpéroise. Il fut ensuite nommé chef du bureau des informations techniques (BIT) et partit à la retraite en février 1988.
Sur le plan militant, Gilbert Adragna, dès son retour à la CGET en 1956, avait repris son engagement syndical à la CFTC (puis à la CFDT à partir de 1964). Il eut notamment à s’occuper du reclassement des dessinateurs, puis participa au maintien sur place d’une vingtaine d’employés lors de la nationalisation de l’entreprise et obtint la garantie de leur intégration ultérieure à EDF. Dans la cité où ils habitaient à Tunis, Gilbert Adragna et son épouse créèrent une association de loisirs regroupant chrétiens et musulmans. Cette activité fut interrompue par l’affaire de Bizerte qui devait porter un rude coup aux relations entre Français et Tunisiens. Leur situation de Français de Tunisie rendait d’ailleurs le couple Adragna extrêmement sensible à tout ce qui pouvait détériorer les relations franco-tunisiennes. C’est pourquoi son épouse et lui signèrent une lettre qu’un groupe de chrétiens adressa au gouvernement français suite au bombardement de Sakiet Sidi Youssef par l’aviation française (1958), ainsi qu’une autre lettre que des chrétiens de Tunisie envoyèrent aux évêques de France pour protester contre l’emploi de la force lors de l’affaire de Bizerte.
Dès son arrivée en France, Gilbert Adragna intégra l’équipe de responsables CFDT du centre de ditribution EDF de Quimper. Il fut ensuite élu au conseil d’administration de la Caisse mutuelle complémentaire d’action sociale (CMCAS), représenta le syndicat à l’union locale de Quimper et fut désigné par la CFDT au poste d’administrateur de la Caisse d’allocations familiales (CAF) de Quimper en novembre 1971, responsabilité qu’il conserva jusqu’en 1996, date à laquelle il quitta la Bretagne. En tant qu’administrateur de la CAF, il eut à exercer d’autres responsabilités : administrateur des offices d’HLM de Douarnenez, départementaux et de Quimper ; administrateur de l’Association des foyers de jeunes travailleurs de Quimper (il en devint par la suite un responsable actif, indépendant de la CAF et le resta jusqu’en 1996) ; membre de la commission d’action sociale, de la commission de secours et des cas particuliers ; gestion de plusieurs centres sociaux. Dans les dernières années avant son départ de Bretagne, il siégea aussi au sein de la commission d’aide aux impayés de loyers (le Fonds de solidarité logement, FSL) et fut membre du conseil d’administration de la Fédération bretonne des caisses, regroupant les cinq caisses bretonnes, et de commissions régionales mises en place pour harmoniser les politiques sociales et les montants des aides. En 1989, à la suite d’une enquête menée par les FJT de Quimper, un Comité pour l’habitat des jeunes vit le jour et il en fut le secrétaire jusqu’en 1996.
Parallèlement à ces divers engagements, Gilbert Adragna s’investit dans le tourisme social. Il fut sollicité en 1980 pour mettre sur pied une association afin d’acquérir et de gérer un centre de vacances privé, situé à Riec-sur-Belon dans un domaine de 7 ha sur les rives du Belon, qui avait fait faillite et dont les équipements se trouvaient à l’abandon depuis plus de dix ans. L’association « Ker Belen » vit ainsi le jour et il la présida de 1980 à 1998, date à laquelle elle fusionna avec l’association Vacances tourisme famille (VTF). Entre-temps, « Ker Belen » avait adhéré à la fédération Loisirs vacances tourisme (LVT) et à Invitation aux vancances (INVAC). Gilbert Adragna siégea au conseil de l’INVAC de 1987 à 1993 et au conseil de la région LVT de l’Ouest. En 1987, il fut élu au comité local de la Banque française de crédit coopératif (BFCC) en tant que représentant local du tourisme social.
Sur le plan politique, Gilbert Adragna s’était inscrit, dès son arrivée à Quimper, au Club socialiste et démocratique dont les membres rejoignirent la Convention des institutions républicaines (CIR) en 1970, puis, l’année suivante au lendemain du congrès Épinay, le Parti socialiste. En 1977, il fut élu conseiller municipal de Pluguffan avec un autre militant du PS. Constamment réélu par la suite, il siégea au conseil municipal jusqu’en 1996.
En 1996, Gilbert Adragna s’installa avec son épouse à Saint-Cyr-sur-Mer (Var). Il continua à assumer des responsabilités syndicales à la CFDT : membre du conseil du Syndicat de l’énergie et de la chimie Alpes Méditerranée (SECAM), représentant les agents retraités des industries électrique et gazière ; membre du conseil et du bureau de l’Union territoriale des travailleurs retraités du Var (UTR 83), de l’Union régionale des retraités PACA et de l’Union fédérale des retraités (UFR) de la Fédération chimie Énergie (FCE) de 1999 à 2006.
Membre de la section socialiste de Saint-Cyr-sur-Mer depuis son arrivée dans le Var, il fut également trésorier, puis président (jusqu’en 2006) de l’association « Azur accueil » gérant un petit équipement de vacances dans le village du Castellet.
Sur le plan religieux, Gilbert Adragna, en plus de son engagement à l’ACO, fut membre du comité diocésain de Quimper pendant quatre ans, puis faisait partie d’un conseil paroissial dans le Var.
Son épouse, assistante familiale, décédée le 8 janvier 2004, avait eu un fort engagement syndical à Quimper.
Par Éric Belouet
SOURCES : Arch. JOC (Arch. Dép. Hauts-de-Seine), 44J 1134A, listes d’anciens permanents. — Témoignage de Gilbert Adragna, 30 juillet 2007.