Par Jean Maitron, Maurice Moissonnier
Né le 20 juillet 1900 à Grenoble (Isère), mort le 29 juin 1963 à Paris (XVIIIe arr.) ; typographe à Lyon (Rhône) ; syndicaliste CGT du Livre, membre du secrétariat de l’UD du Rhône à la Libération, secrétaire général de la Fédération française des travailleurs du Livre ; membre du Conseil économique et social.
Fils naturel de Marie-Louise Barraz, ménagère, Édouard Ehni fut légitimé par le mariage de ses parents (son père était Gustave Charles Ehni) le 4 août 1900 à Grenoble. Il commença sa vie professionnelle dans l’imprimerie à l’âge de quatorze ans. Secrétaire adjoint du syndicat du Livre CGT de Lyon en 1928, il accéda bientôt aux fonctions de secrétaire général et délégué régional. Conseiller prud’homme, il fut sans succès, en 1935, candidat au conseil d’administration de la Bourse du Travail de Lyon. C’était un dirigeant écouté de l’Union départementale CGT du Rhône qu’il représenta à de nombreux congrès nationaux : XXIe (Paris, septembre 1931), XXIIe (Paris, septembre 1933), XXIIIe (Paris, septembre 1935). Au congrès d’Unité de Toulouse (mars 1936), il s’abstint au moment du vote des nouveaux statuts mais rejoignit la majorité confédérale sur la motion concernant l’incompatibilité des mandats syndicaux et politiques et sur l’adhésion à la Fédération syndicale internationale.
Son activité pratique lors des grandes grèves de juin 1936 fut assez discrète mais, en 1937, l’Union départementale CGT le délégua à la commission départementale du coût de la vie et à la commission de conciliation ; en 1939, il fut élu membre de la commission administrative de l’Office départemental et municipal de la main-d’œuvre. Délégué au XXVe congrès de la CGT (Nantes, novembre 1938), il vota avec la majorité les motions Vivier-Merle sur l’indépendance syndicale et la paix, contre les motions Delmas qui exprimaient le point de vue des « pacifistes intégraux » opposés à la direction de la confédération.
Lors de la crise de 1939-1940, il modela son attitude sur celle du secrétaire de l’Union départementale Marius Vivier-Merle. Contacté par Yvon Morandat, il entra dans la Résistance au sein du mouvement Libération-Sud. En raison de sa connaissance du milieu de l’imprimerie, il prit en main le service de diffusion du journal Libération dont plus de dix numéros furent composés sous son égide. À l’été 1942, après la mise en résidence surveillée de Vivier-Merle, il exerça aux côtés de Chazeaud* la fonction de secrétaire général au sein des bureaux « légaux » de l’UD. Arrêté à Lyon en septembre 1942, il fut incarcéré à la prison Saint-Paul jusqu’en octobre 1943 puis interné à Aiguebelle (Haute-Savoie) jusqu’en 1944. Il participa à la reconstitution de la CGT clandestine, aussi, à la Libération, lui confia-t-on le secrétariat de l’Union départementale du Rhône. Nommé maire adjoint de Lyon, il ne chercha pas à conserver ce mandat, pour mieux se consacrer au poste de secrétaire général de la Fédération française des travailleurs du Livre qu’il occupait depuis août 1944. À la fin de 1944, il quitta le poste de secrétaire général de l’UD. Il participa activement, en 1947, aux grandes grèves des ouvriers du Livre qui privèrent le pays de journaux pendant plus d’un mois, et, aux négociations qui s’engagèrent alors. Refusant les sollicitations de la tendance Force ouvrière, Ehni réussit à maintenir l’unité de sa Fédération lors de la scission de décembre 1947. Il occupa ensuite les fonctions suivantes : administrateur de la Société nationale des entreprises de presse, membre du Conseil économique et social de 1959 à sa mort (travailleurs CGT), vice-président de l’Institut national des industries et arts graphiques, membre de la commission administrative de la CGT. Sa participation à la Résistance lui avait valu la Légion d’honneur et la croix de guerre 1939-1945. Il occupait toujours le secrétariat général de la Fédération du Livre au moment de son décès à Paris fin juin 1963. Sa dépouille mortelle fut exposée au siège de la fédération puis transportée à la Bourse du Travail de Lyon et enterrée au cimetière de la Croix-Rousse.
La Vie ouvrière du 10 juillet 1963 signala son décès en le présentant comme : « Membre de la Résistance, il obtint la Croix de Guerre 1939-1945 et fut Chevalier de la Légion d´Honneur ».
Édouard Ehni s’était marié le 28 juillet 1923 à Lyon (VIIe arr.) avec Élise André, il divorcé en novembre 1960 et se remaria le 15 avril 1961 à Paris (XVIIIe arr.) avec Marie-Yvonne Chabert.
Par Jean Maitron, Maurice Moissonnier
SOURCES : Arch. de la Bourse du Travail de Lyon. — Comptes rendus des congrès nationaux de la CGT. — Le Monde, 2 juillet 1963. — La Vie ouvrière, nº 984, 10 juillet 1963, p. 8. — Fernand Rude, La Libération de Lyon. — Témoignages de militants lyonnais recueillis par Maurice Moissonnier. — Notes d’Aude Le Goupil. — État civil de Grenoble.