AONO Suekichi

Né le 24 février 1890 à Sado ; mort le 23 juin 1961. Critique littéraire prolétarien.

AONO Suekichi naquit à Sawane (aujourd’hui rattaché à Sawada) dans le district de Sado (île de Sado), département de Niigata, au sein d’une famille vivant de la terre, de la fabrication du sake (vin de riz japonais) et du transport maritime. La fortune familiale commença à décliner vers 1890 au moment de la naissance de Suekichi. Il entra en 1902 à l’école secondaire de Sado. Il s’initia bientôt à la pensée socialiste, à travers les œuvres de KŌTOKU Shūsui, et manifesta un intérêt marqué pour la littérature naturaliste japonaise, qui était à l’époque en plein épanouissement. Entré en 1910 à la Faculté de lettres de l’Université Waseda, il en sortit diplômé d’anglais en 1915 et fut employé, dès septembre de la même année, au Yomiuri Shinbun (Journal Yomiuri). En 1918, alors que le Japon se préparait à intervenir contre la Révolution soviétique, AONO Suekichi lança, en signe de protestation, avec plusieurs collègues, dont ICHIKAWA Shōichi, un mouvement de grève. Ce fut un échec et AONO perdit sa place au Yomiuri. Grâce à ICHIKAWA Shōichi, il fit la connaissance de HIRABAYASHI Hatsunosuke, et les trois amis entrèrent à peu près en même temps à l’agence de presse Kokusai. Ils se livrèrent alors à l’étude approfondie de la théorie marxiste. Leur collaboration fut concrétisée par la fondation, en mars 1922, d’une revue de critique marxiste, Musan kaikyū (La Classe prolétarienne). Leur activité s’étendit au domaine de la critique socio-politique aussi bien qu’à celui de la critique littéraire. Vers la fin de l’année 1922, AONO Suekichi adhéra au Parti communiste japonais (Nihon kyōsan tō), qui s’était constitué en juillet. Il entra, en janvier 1923, à la Société des Semailles (Tanemaki sha), organisme qui était à cette époque le pivot du mouvement littéraire prolétarien. En mars 1923, Musan kaikyū fusionna avec les deux revues de YAMAKAWA Hitoshi, Shakaishugi kenkyū (Recherches sur le socialisme) et Zen’ei (Avant-garde), pour former Sekki (Drapeau rouge), l’organe du Parti communiste. Au mois de juin, à la suite de la première arrestation générale des membres du Parti communiste, AONO Suekichi fut renvoyé de l’agence Kokusai et entra à la rédaction de Sekki, qui avait pris entre-temps le nom de Kaikyū sen (Lutte de classes). Vers la fin de l’année, il fonda, avec SHIMANAKA Yūzō et plusieurs autres, le Groupe de recherches sur les problèmes politiques (Seiji mondai kenkyū kai). En mars 1924, il fut chargé des affaires courantes au sein du Bureau maintenu par le Parti communiste (Kyōsan tō), qui avait entre-temps décidé de se dissoudre. Quelque temps plus tard, AONO Suekichi apporta son concours à la rédaction de Marukusushugi (Marxisme), revue fondée en mai de la même année et qui devait jouer par la suite le rôle d’organe théorique du Parti communiste. Parallèlement, en juin, il fonda avec d’anciens compagnons la Société du front littéraire (Bungei sensen sha), destinée à remplacer la Société des Semailles (Tanemaki sha), virtuellement dissoute à la suite du Grand tremblement de terre du Kantō. Le même mois, il participa à la création du Groupe de recherches sur la politique (Seiji kenkyū kai), lequel procédait directe­ ment du Groupe de recherches sur les problèmes politiques (Seiji mondai kenkyū kai). En janvier 1925, AONO Suekichi se rendit avec ARAHATA Kanson à Changhai, en vue de la reconstitution du Parti communiste. Il y participa, sous la direction de Voitinsky, délégué du Comintern, à la rédaction des « Thèses de Changhai », De retour au Japon, il se retira cependant du Bureau du Parti. Par la suite, AONO Suekichi publia dans Bungei sensen (Le Front littéraire) des articles qui firent date dans l’histoire du mouvement littéraire prolétarien. Parmi ces articles, « L’art mis en question », (Shirabeta geijutsu) et « Croissance naturelle et conscience objective » (Shizen seichō to mokuteki ishiki) sont les plus connus. AONO Suekichi joua en fait, en sa qualité de critique, le rôle de leader du mouvement littéraire prolétarien pour la période postérieure au Grand tremblement de terre. Après la dissociation, en juin 1927, de la Ligue japonaise de littérature prolétarienne (Puroren), qui devait plus tard devenir la Ligue japonaise d’art prolétarien (Purogei), AONO Suekichi fonda la Ligue des artistes ouvriers et paysans (Rōgei), dont la doctrine s’articulait autour des « Thèses de 1927 » adoptées par le Parti communiste japonais. Six mois plus tard, en novembre 1927, la Ligue des artistes ouvriers et paysans se dissociait, mais AONO Suekichi resta fidèle à la vieille garde qui continuait à soutenir YAMAKAWA Hitoshi. Il entra à la revue Rōnō (Ouvriers et paysans), fondée en décembre par YAMAKAWA et ses amis. AONO Suekichi déborda alors d’activité : il était en effet l’unique critique littéraire de la Ligue des artistes ouvriers et paysans (Rōgei), qui s’opposait à la Ligue pan-japonaise d’art prolétarien (NAPF) et au Parti communiste (Kyōsan tō). Cependant, au printemps 1931, AONO Suekichi s’écarta de ses camarades de la Ligue des artistes ouvriers et paysans. Il s’éloigna par ailleurs graduellement du mouvement communiste. En mai 1932, la Ligue des artistes ouvriers et paysans (Rōgei) se dispersa. AONO Suekichi fonda la Fédération littéraire des ouvriers et des paysans (Rōnō bungaku dōmei), qui ne tarda pas à éclater à son tour. Il constitua alors en compagnie de KANEKO Yōbun et de plusieurs autres, la Ligue des artistes de gauche (Sayoku geijut­ suka renmei), qui fusionna en février 1934 avec le Club des auteurs prolétariens (Puroretaria sakka kurabu) de HAYAMA Yoshiki, un de ses anciens camarades de la société du Front littéraire (Bungei sensen sha). Ensuite, AONO Suekichi tenta de relancer la Ligue des artistes ouvriers et paysans (Rōgei), mais celle-ci disparut dès la fin de l’année (1934). Dans la période de régime quasi militaire, AONO Suekichi chercha à se démarquer du socialisme. En avril 1937, il entra à Bungei kai (Le Monde littéraire). En février 1938, il fut arrêté pour avoir fait partie du groupe des écrivains de l’ancienne revue Rōnō (Affaire du front populaire, cf. Historique).
Libéré sous caution en mai 1939, il continua à exercer ses activités de critique littéraire, et renia publiquement son ancienne position socialiste. Mais à partir de la deuxième moitié de l’année 1944, il lui fut impossible d’écrire.
Après la défaite, en septembre 1945, AONO Suekichi reprit toutefois ses activités littéraires et entreprit de reconstituer le Pen-club japonais, dont il devint le vice-président en avril 1948. En mars 1951, il assuma la présidence de l’Association des écrivains (Bungeika kyōkai), puis, en 1952, il fut promu à la fois président et rédacteur en chef du Shakai taimuzu (Le « Times » social), journal lié au Parti socialiste (Shakai tō). Devenu en mars 1956 membre de l’Académie japonaise des Beaux­arts, AONO Suekichi se rendit en Chine en mars de la même année, puis en Union soviétique en 1958. II s’engagea en 1960 dans la lutte contre le pacte de sécurité nippo-américain.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article237002, notice AONO Suekichi, version mise en ligne le 29 juillet 2022, dernière modification le 3 février 2021.

ŒUVRE : Musan seitō to shakai undō (Les Partis prolétariens et le mouvement socialiste), 1925. — Kaihō geijutsu (L’Art libéré), 1926. — Tenkanki no bungaku (La Littérature à une époque de transition), 1927. — Bungei to shakai (Littérature et société), 1936. — Hitotsu no ishi (Une Pierre), récit autobiographique, 1943. — Gendai bungaku ron (Essai sur la littérature contemporaine), 1949. — Bungaku gojū nen (Cin­quante ans de littérature), autobiographie, 1957.

SOURCES : SOFUE Shōji, AONO Suekichi, 1960.

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