Né le 26 décembre 1859, dans le département d’Okayama ; mort le 5 novembre 1933 à Moscou. Dirigeant de la première heure des mouvements ouvrier et révolutionnaire du Japon, pionnier du socialisme, fondateur du P.C.J., leader communiste international ; membre du praesidium de l’Exécutif du Comintern.
Né dans les dernières années du shogunat des TOKUGAWA, KATAYAMA Sen était le second fils d’une famille paysanne qui assumait traditionnellement les fonctions de chef du village, à Yuge, dans le district de Kume, département d’Okayama. Il s’appelait alors YABUKI Yasutarō, nom qu’il conserva jusqu’à l’âge de dix-neuf ans, époque à laquelle, ayant été adopté par un ami de sa famille qui lui évitait par ce moyen d’être enrôlé dans l’armée, il devint KATAYAMA Sei pour, finalement, opter plus tard pour le prénom de Sen.
Alors qu’il était encore enfant, ses parents divorcèrent et ce fut sa mère qui l’éleva. C’est ainsi que durant sa prime adolescence, à l’époque où il commençait à montrer un vif intérêt pour les études, il dut surtout aider cette dernière dans les travaux agricoles et le brûlage du charbon de bois ; souffrant de la dureté du travail des champs, il prit la ferme résolution de ne pas rester paysan et de faire les études qui lui permettraient d’échapper à cette condition. Il entra en 1880 à l’École normale d’Okayama, mais désireux d’atteindre un niveau supérieur, il se rendit dès l’année suivante dans la capitale où, tout en gagnant sa vie comme ouvrier imprimeur ou comme répétiteur dans des cours préparatoires, il se mit à étudier les classiques chinois dans l’Institut privé Oka. Il y fit des progrès remarquables ; cependant, conscient du manque d’actualité de cette spécialité et encouragé par l’invitation de son ami IWASAKI Seishichi, il s’embarqua pour les États-Unis en novembre 1884. Travaillant comme laveur de vaisselle, cuisinier, homme à tout faire, il y poursuivit ses études dans diverses institutions : la Hopkin’s Academy, l’école préparatoire de l’Université de Maryville, le Grinnel College, où il suivit également les cours d’études supérieures, le Séminaire théologique d’Andover, la section de théologie de l’Université de Yale ; quand il retourna au Japon, en décembre 1895, il était titulaire du diplôme d’études supérieures en lettres de Grinnel College et de la licence en théologie de Yale.
Ce premier séjour de onze années aux États-Unis devait le marquer profondément ; d’une part, alors qu’il était malade, il se convertit au christianisme ; d’autre part ;son expérience personnelle d’une vie de labeur lui fit prendre une conscience aiguë des problèmes du monde du travail et de la misère. Ses lectures d’alors étaient Les Aspects sociaux du christianisme (Social aspects of christianity) de Ely et la Biographie de Lassalle. De plus, un voyage en Angleterre, qu’il fit dans le courant de l’été 1894, le mit en contact avec la réalité de l’action sociale et du mouvement socialiste dans ce pays ; il fut, en particulier, très impressionné par l’activité de dirigeants du mouvement ouvrier comme Tom Mann, J. Keir Hardie et John Burns.
Après son retour au Japon, c’est en socialiste chrétien que KATAYAMA Sen se lança dans l’action sociale et religieuse ; en mars 1897, il fonda à Misaki, dans le quartier de Kanda à Tōkyō, un centre d’entraide sociale, le « Foyer Kingsley », qui servit d’abri à des cours du soir, et un jardin d’enfants, destinés aux ouvriers et aux pauvres. Collaborant à diverses publications, comme la Rikugo zasshi (Revue rikugo), organe mensuel de l’Église unitarienne dans lequel il fit paraître en feuilleton la biographie de Lassalle, il se consacra en priorité à toute activité pratique susceptible d’avoir une impact sur la société de son temps. Or, c’est précisément en 1897 que, dans le contexte des bouleversements sociaux et économiques survenus après la guerre sino-japonaise, commençait à s’organiser pour la première fois, dans l’histoire du Japon le mouvement syndicaliste ouvrier. En avril 1897, des militants japonais revenus des États-Unis, comme JŌ Tsunetarō, TAKANO Fusatarō et SAWADA Hannosuke, avaient fondé la Société amicale des ouvriers (Shokkō giyūkai) ; cette dernière s’était transformée, au mois de juillet, en Association pour la constitution de syndicats ouvriers (Rōdō kumiai kisei kai) destinée à susciter la prise de conscience et l’union des ouvriers. KATAYAMA Sen, ayant pris une part très active au mouvement, fut élu secrétaire de l’organisation et devint rédacteur en chef de Rōdō sekai (Le Monde du travail), organe de l’Association, lancé en décembre 1897. C’est ainsi qu’il joua un rôle déterminant dans la création et la direction des syndicats qui se formèrent bientôt ; en 1898 existaient déjà le Syndicat des ouvriers métallurgistes (Tekkō kumiai), l’Association pour l’amélioration des chemins de fers nationaux (Nittetsu kyōseikai) et la Société des camarades typographes (Kappankō dōshikai). Tout en poursuivant cette action syndicale, KATAYAMA Sen contribua à l’instauration du mouvement des coopératives de consommation qui se développa parallèlement : il lutta pour la fondation de la « Forteresse des ouvriers » (Rōdōsha no jōkaku), un magasin de vente basé sur le système coopératif ; cette première réalisation (1898) fut suivie de la mise sur pied en deux ans d’une vingtaine de lieux de vente du même type qui s’installèrent au Japon tant dans la région de Tōkyō-Yokohama que dans le Tōhoku et l’île de Hokkaidō.
Cependant, le mouvement syndical, qui avait connu un développement spectaculaire, devait entrer très vite dans une période de déclin à partir de 1899, d’une part à cause du manque de maturité de la classe ouvrière japonaise, d’autre part, du fait de la promulgation en 1900 de la Loi de police sur la sécurité publique qui justifiait la répression des autorités envers toute tentative d’organisation.
C’est dans ce contexte que fut créé, en octobre 1898, le Groupe d’études sur le socialisme (Shakaishugi kenkyūkai) dont l’objectif était de favoriser toute recherche systématique concernant cette doctrine ; les fondateurs en étaient, outre KATAYAMA Sen, MURAI Chikei, ABE Isoo, KOTOKU Shūsui, KAWAKAMI Kiyoshi, NISHIKAWA Jōtarō et TAKAGI Masayoshi ; en 1900, lorsque ce groupe d’études se transforma en Association socialiste (Shakaishugi kyōkai), KATAYAMA Sen devait offrir pour abriter le secrétariat le « Foyer Kingsley » et en devenir le responsable de fait. Il travailla par ailleurs avec acharnement à la fondation du mouvement pour le suffrage universel qui unifiait la cause du mouvement ouvrier et celle de la représentation parlementaire ; et c’est en tant que secrétaire qu il continua d’y collaborer.
Enfin, c’est au printemps 1901 que vit le jour le premier parti socialiste japonais, le Parti social-démocrate (Shakai minshu tō) à l’organisation duquel avaient pris part, avec KATAYAMA Sen, KOTOKU Shūsui, KINOSHITA Naoe, NISHIKAWA Jōtarō, KAWAKAMI Kiyoshi et ABE Isoo ; le programme en fut rendu public le 20 mai 1901 et le nouveau parti fut immédiatement interdit en vertu de la Loi de police sur la sécurité publique ; sa brève existence n’en avait pas moins marqué profondément la société japonaise. A la suite de cette interdiction, KATAYAMA Sen consacra toute son énergie à développer le mouvement socialiste, organisant par exemple des meetings ouvriers ou des voyages de propagande. Son ouvrage Waga shakaishugi (Mon Socialisme) publié en juillet 1903, témoigne de l’évolution de sa pensée à cette époque : il y énonce que seul un processus révolutionnaire peut permettre le passage du capitalisme au socialisme, c’est-à-dire la prise du pouvoir politique par la classe ouvrière ; son exposé porte certes la marque d’une approche uniquement intellectuelle et idéaliste : ainsi, il ne va pas jusqu’à envisager une confrontation avec le système impérial ; cependant, ayant largement dépassé ses options réformistes, il s’est déjà rapproché du socialisme scientifique. Si ce développement de la pensée de KATAYAMA Sen a été fortement influencé par le marxisme tel qu’il a été interprété par le Parti social-démocrate allemand, il est également certain que c’est surtout l’aggravation de la répression gouvernementale qui a précipité l’évolution rapide du mouvement ouvrier japonais plutôt marqué par une tradition d’harmonisation des rapports entre le capital et le travail et un certain réformisme. Après l’interdiction du Parti social-démocrate, le mouvement socialiste se regroupa pour la seconde fois autour de l’Association socialiste (Shakaishugi kyōkai) jusqu’à la constitution en novembre 1903 de la Société de l’homme du peuple (Heiminsha) : celle-ci fut, en effet, fondée par KOTOKU Shūsui et SAKAI Toshihiko qui avaient quitté le Yorozu chōhō (Informations diverses du matin), à la veille de la guerre russo-japonaise, pour adopter résolument une attitude antibelliciste ; désormais, le nouveau centre du mouvement socialiste japonais sera la Société de l’homme du peuple et son organe de presse, le Heimin shimbun hebdomadaire (Le Journal de l’homme du peuple). KATAYAMA Sen, renonçant alors à son poste de secrétaire de l’Association socialiste, décida de se rendre aux États-Unis et en Europe et s’embarqua à la fin de la même année. Ses objectifs étaient, d’une part, la participation au VIe congrès socialiste international de la Deuxième Internationale qui devait s’ouvrir dans le courant de l’été 1904 à Amsterdam et, d’autre part, l’organisation des travailleurs japonais résidant aux États-Unis. Son voyage le mena d’abord en Amérique où, tout en travaillant pour gagner sa vie, il eut une activité militante débordante : en janvier et février 1904, il parcourut le pays et organisa, en liaison avec le Parti socialiste américain, des meetings dans différentes villes comme Seattle, Portland, Sacramento, San Francisco, Oakland et Los Angeles ; il réussit par ailleurs à organiser à Seattle et San Francisco un Parti socialiste des Japonais (Nihon jin shakai tō) ; il fut enfin invité par le Parti socialiste américain et prit part au congrès du Parti qui se tint à Chicago au mois de mai. La guerre russo-japonaise avait éclaté en février 1904 ; KATAYAMA Sen se rendit cependant au congrès socialiste international qui se déroula en août à Amsterdam, en tant que représentant des socialistes japonais ; il y fut élu coprésident de la séance d’ouverture avec G.V. Plekhanov, le chef de la délégation du Parti ouvrier social-démocrate de Russie ; et les deux représentants des puissances belligérantes échangèrent alors sur le podium une poignée de mains devenue historique ; leurs proclamations dénonçant la guerre impérialiste menée par les classes dominantes et faisant appel à l’union des prolétariats des deux pays connurent un très grand retentissement dans le monde entier.
En janvier 1906, KATAYAMA Sen regagna son pays. Pendant son absence qui avait duré deux ans, le mouvement pacifiste dont le centre était la Société de l’homme du peuple (Heiminsha), avait été victime de la répression policière : ses militants, tels KOTOKU Shūsui avaient été emprisonnés, ses publications interdites ; la lutte acharnée des socialistes ne pouvait avoir d’autre issue que l’écrasement et c’est ainsi que le retour de KATAYAMA coïncida avec la dissolution de la Société de l’homme du peuple. Mais en février, le cabinet SAIONJI ne s’opposa pas à la constitution du Parti socialiste japonais (Nihon shakai tō) dont KATAYAMA Sen devint conseiller avec SAKAI Toshihiko et NISHIKAWA Mitsujirō. Si, dans les premiers temps, la politique du jeune parti était axée sur la revendication de l’instauration du suffrage universel et donc, en conformité avec la position de KATAYAMA, la réalisation du socialisme par la voie parlementaire, bientôt, cette orientation se modifia sous l’effet d’une répression ininterrompue et de plus en plus nombreux furent les socialistes qui se tournèrent vers le radicalisme. Lorsque à partir de juillet 1906, KOTOKU Shūsui, adoptant ouvertement la cause de l’anarchisme, commença à prôner l’action directe, son influence s’accrut spectaculairement. C’est ainsi que le IIe congrès du Parti socialiste japonais tenu en février 1907 fut le cadre de vives discussions sur le thème de la révision des règlements du parti et des directives du mouvement : les défenseurs de la politique parlementaire groupés autour de TAZOE Tetsuji s’opposèrent violemment aux partisans de l’action directe dont KOTOKU Shūsui était le dirigeant ; ces affrontements devaient mener à une scission, suivie de rivalités interminables, et finalement à l’interdiction du parti par le gouvernement. Tandis que se déroulait ce congrès, KATAYAMA Sen effectuait son troisième séjour aux États-Unis, mais il retourna au Japon peu après et se mit immédiatement à défendre la politique parlementaire ; il fit paraître avec TAZOE Tetsuji et NISHIKAWA Mitsujirō l’hebdomadaire Shakai shinbun (Le Journal social), constitua en août 1907 la Société socialiste des camarades (Shakai shugi dōshikai) et publia Bankoku shakai tō (Partis socialistes de tous les pays). Défenseur de l’action par la représentation parlementaire, il disait représenter ainsi le courant marxiste de la IIe Internationale par opposition aux conceptions purement anarchistes de KOTOKU. Dénonçant la doctrine de ce dernier comme fondamentalement différente du socialisme, il allait pro clamer officiellement en novembre sa rupture avec KOTOKU Shūsui, SAKAI Toshihiko et les anarchistes pour divergences idéologiques. Cette attitude où n’intervenait aucune dissension d’ordre personnel, mais uniquement politique, suscita certains remous au sein même de la Société des camarades (Dōshikai), en particulier parmi les membres les plus jeunes, notamment chez NISHIKAWA Mitsujirō ; elle aboutit à des scissions et la tendance de KATAYAMA Sen ne regroupa bientôt plus que TAZOE Tetsuji, SUZUKI Tateo et quelques ouvriers dont l’histoire n’a pas conservé les noms. Mais, proclamant la nécessité de l’union des ouvriers, KATAYAMA Sen se consacrait déjà exclusivement à la reconstitution du mouvement d’organisation des travailleurs fondé sur la défense des revendications concernant la vie quotidienne ; il effectua alors de nombreux voyages de propagande dans toutes les provinces du Japon. Cependant, à la suite de l’Affaire du drapeau rouge de juin 1908, la répression gouvernementale se fit encore plus implacable et s’attaqua même au mouvement dirigé par KATAYAMA Sen qui prônait pourtant l’action dans la légalité : les autorisations d’organiser des meetings lui furent comptées, ses activités quotidiennes étaient surveillées, enfin son ouvrage Waga shakaishugi (Mon Socialisme), paru quelques années plus tôt, fut interdit. Puis ce fut en 1910 l’Affaire du complot de lèse-majesté ; bien qu’il ait proclamé sa rupture avec KOTOKU Shūsui et les anarchistes, KATAYAMA Sen adopta une attitude solidaire et informa dans les délais les plus rapides les camarades de l’étranger, comme Jean Longuet, le rédacteur de l’Humanité, de la répression à laquelle se livraient les autorités japonaises ; il décrivit l’Affaire de lèse-majesté comme « le sommet atteint par la réaction dans sa lutte contre la liberté de pensée » et lança un appel pour que des manifestations de protestation soient organisées à l’étranger : c’est ainsi que cette affaire connut un très grand retentissement dans le monde. KATAYAMA Sen publia, par ailleurs, dans le Shakai shimbun (Le Journal social), une critique de l’ouvrage posthume de KOTOKU Shūsui, Kirisuto massatsu ron (Le Christ supprimé), ce qui lui valut une lourde amende ; et il dut même cesser la publication de son hebdomadaire. Confrontés à la répression impitoyable de l’« Ère d’hiver », socialistes et anarchistes avaient alors suspendu toute activité ; seul KATAYAMA poursuivait sans relâche son action en milieu ouvrier. Il dirigea la grève des tramways de Tōkyō de décembre 1911 et mena les grévistes jusqu’à la victoire, mais, arrêté pour infraction à la Loi de police sur la sécurité publique et inculpé d’incitation à la grève, il fut condamné en avril 1912 à une peine de cinq mois de prison ferme. Pas plus que la succession des différentes actions revendicatives, la lutte dans la légalité, qui avait constamment été la préoccupation de KATAYAMA, n’avait réussi à ébranler le pouvoir de l’État ; ces constatations devaient avoir une influence déterminante sur la pensée de ce dernier dans sa démarche ultérieure. Après sa sortie de prison, KATAYAMA Sen continua d’être soumis à une surveillance constante qui entravait toute liberté d’action ; il était de plus dépourvu de moyens d’existence : c’est pourquoi en septembre 1914, immédiatement après le déclenchement de la Première Guerre mondiale, il s’embarqua pour les États-Unis en quête de liberté politique et de nouvelles bases d’existence : c’était son quatrième voyage, il ne devait plus revenir au Japon. Il avait cinquante-cinq ans.
Dans les premiers temps, KATAYAMA Sen s’installa à San Francisco où, tout en travaillant comme journalier, il se consacra activement à l’organisation des ouvriers japonais, ce qui manqua pas de susciter la surveillance et diverses pressions de la part des autorités consulaires japonaises de la ville ; en décembre 1916, sur l’invitation de S.-J. Rutgers, KATAYAMA Sen se rendit à New York pour prendre part au mouvement pacifiste organisé par les socialistes de la Fraction internationaliste : c’est ainsi qu’il devint membre du mouvement international de gauche. La Révolution russe de 1917 allait profondément influencer KATAYAMA Sen et déterminer son orientation : il prit alors conscience de la véritable nature du pouvoir et de l’État et effectua un brusque virage vers le communisme. Il s’engagea dans le mouvement d’opposition à la guerre et de soutien à la Révolution russe qui s’était regroupé autour de l’organe de la gauche, Class struggle (Lutte des classes), publia en 1918 un ouvrage en anglais, The labor movement in Japan (Le Mouvement ouvrier japonais) et des articles de soutien aux émeutes du riz qui éclataient alors dans tout le Japon ; il organisa par ailleurs le Groupe des socialistes japonais résidant aux Etats-Unis (Zaibei nihon jin shakaishugisha dan) et mit sur pied un système de liaison avec le Japon. En septembre 1919, KATAYAMA Sen participa à la fondation du Parti communiste américain et devint membre de son bureau oriental ; menacé par la « chasse aux rouges » déclenchée par le gouvernement américain en janvier 1920, il dut se réfugier dans la clandestinité. En novembre de la même année, il fut nommé responsable du Bureau américain du Comintern et alla s’installer à Mexico en mars 1921. Il se rendit à Moscou à la fin de 1921 pour participer au Congrès des organisations révolutionnaires des peuples d’Extrême-Orient qui se tint en janvier 1922 et dont il fut l’un des organisateurs : il devait y faire des rapports sur la situation politique et la conjoncture économique japonaises ainsi que sur le mouvement ouvrier dans son pays. Il reçut un accueil extrêmement chaleureux à son arrivée en Russie soviétique et décida d’y demeurer après la fin du congrès. Entre mai et juillet 1922, il séjourna à Chita, en Sibérie, pour animer le mouvement pacifiste destiné aux divisions de l’armée japonaise chargées de l’intervention dans cette région ; de retour à Moscou, il participa au IVe congrès du Comintern qui se tint en novembre, au cours duquel fut consacrée la fondation du Parti communiste japonais inter venue quatre mois plus tôt ; KATAYAMA Sen prit une part active aux discussions concernant la rédaction du projet de programme du jeune parti qui fut alors reconnu comme section japonaise du Comintern. Au cours de ce congrès, KATAYAMA Sen devint membre du praesidium de l’exécutif du Comintern ; ce poste devait lui être confié de nouveau lors des Ve (1924) et VIe congrès (1928) ; c’est ainsi que KATAYAMA devait être, jusqu’à sa disparition, un des dirigeants du Comintern au niveau le plus élevé. Pendant toute cette période, il eut des contacts particulièrement étroits avec le mouvement communiste japonais ; c’est ainsi qu’il participa à la rédaction des Thèses de 27 et des Thèses de 32 du Parti communiste japonais. Dirigeant de l’étranger les luttes contre l’invasion de la Chine et l’impérialisme japonais, il fut l’un des organisateurs de la Ligue internationale anti-impérialiste. Malgré son grand âge et la maladie, il prit part aux congrès de la Ligue anti-impérialiste, le premier qui se tint à Bruxelles en 1927, le second à Francfort en 1929, et enfin au congrès d’Amsterdam contre la guerre en 1932. Avocat infatigable du mouvement pour la paix dans le monde, il visita l’Europe, l’Asie Centrale et la Chine, et se mit également au service du Secours rouge international (M.O.P.R. ou Kokusai sekishoku kyūenkai) dont il fut le vice-président. Jusqu’à la veille de sa mort qui devait survenir le 5 mai 1933, KATAYAMA Sen participa activement aux travaux du Comintern. Il mourut à Moscou d’une septicémie et ses restes furent déposés dans le mur du Kremlin.
ŒUVRE : KATAYAMA Sen chosaku shū (Recueil des œuvres de KATAYAMA Sen), publié par l’Association du centenaire de la naissance de KATAYAMA Sen, en trois volumes, 1959-1960. — Waga kaisō (Réminiscences), écrit en 1929-1932, publié en japonais en 1967. — The Labour movement in Japon, Chicago, 1918.
SOURCES : KISHIMOTO Eitarō, WATANABE Haruo, KOYAMA Kōken, KATAYAMA Sen, première partie publiée en 1959, deuxième partie publiée en 1960. — KATAYAMA Sen, seitan hyakunenkinen tokushūgo (Numéro spécial pour le centenaire de la naissance de KATAYAMA Sen), Rōdō undō shi kenkyū., numéro 18, 1959. — SUMITANI Mikio, KATAYAMA Sen, 1960. —OHARA Kei, « Nihon no shakaishugi » (Le Socialisme japonais), première partie « ATAYAMA Sen no shisō keisei » (La Formation de la pensée de KATAYAMA Sen), Tōkyō keidaigakukaishi, numéro 62, 1969. — Hyman KUBLIN, Asian revolutionary, the life of Sen KAT AYAMA (Un révolutionnaire asiatique, la vie de KATAYAMA Sen), Princeton U. P., 1964. — Georges Haupt et Madeleine Rebérioux, La Deuxième Internationale et l’Orient, Paris, Cujas, 1967.