Par Loïc Le Bars
Né le 15 mai 1905 à Toulouse (Haute-Garonne), mort le 15 septembre 1982 à Montpellier (Hérault) ; professeur de philosophie ; résistant ; militant syndicaliste de la FUE, du SNES et de la FEN de l’Hérault, militant national de la tendance « École émancipée ».
Fils d’un négociant, Henri Féraud, après avoir terminé sa scolarité au lycée de Carcassonne (Aude), entreprit des études de philosophie à la faculté des Lettres de Montpellier. Il y fonda un Cercle des étudiants révolutionnaires et y anima l’un des premiers ciné-clubs créés en France. Il adhéra au Parti communiste mais n’y resta que peu de temps. En mai 1934, il organisa un meeting contre la mesure d’expulsion frappant Léon Trotsky. Il rencontra à cette occasion Marcel Valière, l’un des dirigeants de la Fédération unitaire de l’enseignement. Ce fut le début d’une longue amitié qui ne devait prendre fin qu’à la mort de ce dernier, en 1974. Il rejoignit à cette époque la Ligue communiste et devint son responsable pour l’Hérault. Cet engagement politique ne dura que quelques mois.
Titulaire d’une licence et d’un diplôme d’études supérieures de philosophie, Henri Féraud obtint un poste de maître d’internat au lycée de Perpignan. Il adhéra aussitôt à la FUE où il milita dans les rangs de la majorité fédérale dont les principaux dirigeants avaient rompu avec les communistes en 1929-1930. Il publia de nombreux articles, sous le pseudonyme d’Henri Legrand, dans L’École émancipée, l’hebdomadaire de la FUE. Après la réunification syndicale de 1935, il fut l’un des principaux responsables de la tendance des « Amis de l’École émancipée » qui, dans le Syndicat national des instituteurs principalement, entendait rester fidèle à l’héritage syndicaliste révolutionnaire de la FUE. Il enseigna la philosophie en tant qu’adjoint d’enseignement dans plusieurs établissements languedociens. Henri Féraud s’était marié en juillet 1933 à Montpellier.
Nommé professeur titulaire au collège de La Châtre (Indre) au début de la Seconde Guerre mondiale, Henri Féraud s’engagea dans la Résistance, contrairement à d’autres militants de l’École émancipée, et devint l’un des responsables des FFI de ce département. Il regagna l’Hérault peu de temps après la Libération et continua à enseigner la philosophie au collège d’Agde puis au lycée de Sète (Hérault). Il participa activement à la reconstitution de la tendance « École émancipée » et fut le responsable de L’École émancipée à sa reparution. Parmi ses nombreux articles, en 1946, il critiqua le statut général de la Fonction publique. En 1949, alors qu’il était secrétaire départemental de la FEN de l’Hérault, il s’opposait à la double affiliation qui mettait selon lui l’unité fédérale en péril, notamment dans un article de L’Université syndicaliste (25 mars 1949). Il signa un article dans L’US du 15 mars 1952 contre le rapport d’activité d’Albert-Claude Bay (critique du Comité d’action universitaire et de la défense de la hiérarchie) et figura en quatrième position sur la liste C (École émancipée) en mai 1949, après Robert Chéramy, Charles Cordier et Louis-Paul Letonturier, quand sa tendance rompit un temps avec les militants de la majorité « autonome » du Syndicat national de l’enseignement secondaire. En 1952, il proposa, au nom de sa tendance, une modification des statuts du SNES visant à instaurer une homogénéité stricte dans le bureau national, qui n’aurait dû être qu’un simple exécutif, et à limiter à trois ans le mandat des secrétaires des sections départementales (S2), académiques (S3) et des membres du bureau national, avec cependant la possibilité de leur confier de nouveau ces responsabilités au bout de deux années.
Henri Féraud fut, pour la tendance « École émancipée », membre suppléant, puis titulaire à la commission administrative nationale de la FEN de 1950 à 1953, membre pendant la même période des commissions de la laïcité et d’éducation sociale. Il devint l’un des principaux porte-parole de sa tendance dans les congrès de la Fédération de l’éducation nationale. Il signa dans Socialisme ou barbarie en 1956 un article sur l’unité syndicale. La même année, en juin, il fut le principal rédacteur d’un numéro spécial de L’Ecole émancipée consacré à l’Algérie, intitulé "Un peuple en lutte contre l’impérialisme", où était notamment affirmé l’existence d’un "fait national algérien" et dénoncé la "politique du mensonge" et de "l’hypocrisie".
Il joua un rôle sans doute déterminant, aux côtés de Valière, dans la crise qui secoua sa tendance en 1968 et qui se termina par l’exclusion des militants et des sympathisants de l’Organisation communiste internationaliste. Il dénonça, dans plusieurs articles consacrés à la grève générale de mai-juin, la prétention de cette organisation à détenir et à vouloir imposer aux autres composantes de la tendance une prétendue « vérité révolutionnaire » conforme à « l’orthodoxie marxiste ».
Henri Féraud prit sa retraite en 1969. La maladie l’empêcha de continuer à militer activement. Il fit pourtant encore partie de la liste « École émancipée » présentée aux élections à la CA nationale du SNES en 1971 en tant que retraité et candidat au secrétariat de catégorie des retraités. Il rédigea aussi en 1975, avec Henri Vidalenche, une brochure en hommage à Valière disparu l’année précédente.
Par Loïc Le Bars
ŒUVRE : Histoire de la Commune à Narbonne, Châteauroux, 1946. — Histoire de L’École émancipée 3, n° spécial, 1976, par Louis et Gabrielle Bouët, Maurice Dommanget, Henri Féraud. 28 p. — L’URSS et le socialisme, Cahiers de culture prolétarienne, 1971. — Notre ami Marcel Valière, militant syndicaliste révolutionnaire lutte de classe, supplément à L’École émancipée, 1975 (avec H. Vidalenche).
SOURCES : Arch. IRHSES. — Notice DBMOF par Jean Maitron et Claude Pennetier. — L’Ecole émancipée, L’Université syndicaliste, L’Enseignement public. — Notes d’Alain Dalançon, de Laurent Frajerman et de Jacques Girault.