FÉRAUD Joseph, Antoine, Louis

Par Antoine Olivesi

Né le 4 septembre 1894 à Marseille (Bouches-du-Rhône), mort le 6 juin 1970 à Marseille ; contrôleur des contributions indirectes ; syndicaliste et militant socialiste des Bouches-du-Rhône ; conseiller municipal et adjoint au maire de Marseille (1953-1965).

Joseph Féraud, dans une profession de foi électorale, en 1937, rappelait qu’il était issu de la classe ouvrière et qu’il avait été pacifiste en 1914. Il était né en fait dans la banlieue semi-rurale, à l’époque, des Camoins où son père Louis Joseph, Marius, transporteur de chevaux de son état, contribua en avril 1914 à l’élection du radical-socialiste Frédéric Chevillon. Sa mère, née Marie, Augustine Long, était sans profession.

Lorsque la guerre éclata, Joseph Féraud partit au front où sa conduite lui valut d’être décoré de la Croix de guerre. Après sa démobilisation, il fit carrière dans l’administration des contributions indirectes à Marseille. Des promotions successives le portèrent au poste de contrôleur principal à la veille de la Seconde Guerre mondiale. Il s’occupait notamment des minoteries du département des Bouches-du-Rhône.

À l’issue de la Première Guerre mondiale, Joseph Féraud avait adhéré au Parti socialiste SFIO. Après le congrès de Tours, il convoqua le 7 janvier 1921, une réunion de la 9e section de Marseille et il se prononça pour le maintien dans la SFIO. Face à un accueil hésitant, il préféra s’orienter plutôt vers le syndicalisme. Membre du syndicat autonome, avant l’unité de 1936, Joseph Feraud était signalé, en 1925, parmi les militants actifs du syndicat de sa corporation dont il devint ensuite le secrétaire. Il joua aussi un rôle important au niveau du syndicat des fonctionnaires. En 1932, il participa à de nombreux meetings avec les unitaires, notamment Matton et Mayoux, et se montra favorable, contre l’avis de l’UD-CGT et de son secrétaire Chauffard, à une action unie de tous les syndicats pour défendre les intérêts des employés des services publics en matière de traitement et de retraites. De même, en 1933-1934. Joseph Féraud multiplia les interventions à l’occasion des congrès régionaux des Services publics. Il parla par exemple avec Jean Cristofol le 27 mai 1933 et en décembre durant la réunion du Cartel. Il lança un appel en faveur de la grève du 12 février 1934 en tant que secrétaire général de son syndicat, manifesta de nouveau le 15 mars puis le 25 mai et fut parmi ceux qui n’hésitèrent pas à lutter en commun contre des arrestations arbitraires et au sein du Cartel élargi des services publics. En août , au nom des autonomes, il appela à la réunification syndicale.

Depuis 1931, devant la montée de la crise et face développement du sabianisme, Joseph Féraud avait repris une activité politique plus grande en harmonie avec son action syndicale. Il était secrétaire de la 4e section SFIO de Marseille, section qui correspondait au canton dont Simon Sabiani était le conseiller général. En octobre 1931, la SFIO le désigna comme candidat pour affronter Sabiani dont le siège était renouvelable. Joseph Féraud mena une campagne difficile pour « épurer le 4e canton des volte-face sabianistes ». En effet, du fait des bandes armées de son rival et de leurs provocations, Joseph Féraud dut supprimer toutes ses réunions publiques. Il obtint 913 voix au premier tour et se retira au second, pour laisser la place à Pierre Ferri-Pisani, également SFIO mais plus habitué à ce type de luttes.

A partir de 1933, Joseph Féraud se rapprocha du combat mené par les communistes contre la guerre et le fascisme, prenant en particulier la parole en octobre dans un meeting contre le procès de Leipzig. En juillet, au congrès fédéral de Miramas, il avait voté pour la motion Paul Faure*. Dans les congrès suivants, celui de Septèmes, le 4 février 1934, et surtout celui d’Istres, le 13 mai, il intervint en faveur des fonctionnaires, critiqua le bureau fédéral ainsi que les élus SFIO du conseil général et préconisa l’unité d’action avec le PC. Lorsque le pacte fut conclu, Joseph Féraud, dans la dynamique du Front populaire, fut présent lors des grands meetings contre la guerre, le 31 juillet par exemple. De même, le 28 octobre, il représenta son syndicat au grand rassemblement antifasciste de Marseille où Jacques Duclos* et Jean Zyromski* prirent la parole.

Dans les mois qui suivirent, Joseph Féraud accentua, par des discours prononcés lors de réunions de Front commun, sa position en faveur de l’unité syndicale dans le cadre d’une CGT unique. Il contribua ainsi au succès du congrès de fusion de janvier 1936, congrès au cours duquel il fut élu à une très forte majorité membre de la CA de la nouvelle UL de Marseille et de la nouvelle UD.

Joseph Féraud confirma son attitude favorable à l’alliance avec le PC à l’occasion du congrès fédéral d’avril 1936. Il y préconisa en effet l’adhésion des socialistes aux Comités de Front populaire proposés par les communistes. « Il faut être présent partout », déclara-t-il, malgré la réserve de Canavelli et d’autres leaders SFIO. Il écrivait des articles dans le même sens, à la même époque, dans Marseille socialiste et, l’année suivante, pour une action commune au sein de Radio-Liberté qu’il présidait dans les Bouches-du-Rhône, et où se trouvaient plusieurs représentants des partis et mouvements de gauche.

Lors des municipales de 1935, Joseph Féraud, candidat dans le 4e secteur sur la liste SFIO toujours contre Sabiani, recueillit au second tour, 6 015 suffrages sur 24 336 inscrits. Il échoua mais protesta auprès des services préfectoraux contre l’élection de son rival qu’il jugeait frauduleuse. En octobre 1937, il affronta de nouveau Sabiani à l’occasion des cantonales après le désistement du PC. Il dénonça de nouveau, officiellement mais vainement, les fraudes et les violences sabianistes.

Joseph Féraud continua à batailler aux côtés des communistes pour la liberté d’information dans le cadre de la Fédération provençale – donc élargie – de Radio-Liberté, dont il resta le président jusqu’en 1939. Il protesta dans un article : « Vive la Liberté du micro », contre la censure gouvernementale après la grève du 30 novembre 1938. Le 30 juin 1939, Joseph Féraud invita les militants de son parti, selon les directives du congrès national SFIO, à adhérer à Radio-Liberté afin d’éviter que l’État ne dipose d’un monopole d’information au travers de la TSF. Il était également actif au sein du conseil d’administration et de gérance de la station Marseille-Provence où il fut réélu en avril 1939. Bien que continuant à collaborer sur cette question avec les délégués du PC, Joseph Féraud réagit face à la main-mise exercée par les communistes au sein de l’UD-CGT réunifiée. Au congrès fédéral de juin 1938, bien qu’élu en tête de tous les candidats à la CA avec 130 724 mandats, contre 110 000 seulement à Charles Nédelec, il préféra démissionner, estimant que l’indépendance syndicale n’était plus respectée.

Les positions de Joseph Féraud commencèrent à évoluer également après Munich sur le plan de la politique extérieure. Au nom de sa section, il se prononça avec réserves, lors du congrès fédéral SFIO d’Aix du 18 décembre 1938, en faveur de la motion Blum. C’était l’amorce d’une prochaine attitude « résistante » chez ce pacifiste convaincu, comme ce fut le cas de Félix Gouin et d’autres militants « Paulfauristes ». Lorsque la guerre éclata, Joseph Féraud fut de nouveau confronté à des problèmes syndicaux. En novembre 1939, après l’exclusion des communistes, il fut élu secrétaire administratif de l’UD-CGT des Bouches-du-Rhône. Une notice le concernant, à cette époque, indique qu’il ne fut pas mobilisé et qu’on avait sur lui de « bons renseignements à tous les points de vue ». La nouvelle UD, dont le secrétaire général était Louis Armand, fut reconstituée le 5 novembre au cours d’une assemblée générale avec « des délégués des syndicats s’étant dégagés de la tutelle stalinienne ».

Pendant la Seconde Guerre mondiale, Joseph Féraud fit partie des socialistes résistants. À la Libération, il fut l’un des membres de l’équipe des fondateurs du journal Le Provençal dans la société duquel il détenait dix actions. Le 11 décembre 1944, il fit un rapport sur l’épuration administrative professionnelle et politique au congrès départemental des CDL à Marseille.

En décembre 1946, Joseph Féraud fut candidat socialiste au Conseil de la République. En 1948-1949, il exerça les fonctions de secrétaire de la Fédération SFIO des Bouches-du-Rhône. Il fut réélu le 10 avril 1949 au congrès administratif de Marseille. En 1951, il figura en quatrième position sur la liste socialiste Defferre – Leenhardt dans la première circonscription des Bouches-du-Rhône.

Aux municipales de 1953, Joseph Féraud fut élu sur la liste conduite par Gaston Defferre* et devint délégué à l’Instruction publique. Réélu en 1959, il fut chargé des oeuvres sociales en tant que 15e adjoint du maire. Il a laissé le souvenir d’un édile efficace. En 1965, iJospeh Féraud ne se représenta pas et se retira de la vie politique active. Il avait terminé sa carrière professionnelle comme inspecteur central des contributions indirectes et administrait, encore, avant sa mort, la Mutuelle de garantie des fonctionnaires.

Joseph Féraud fut inhumé sans cérémonies ni discours dans le cimetière des Camoins, une banlieue rurale de Marseille. Au moment de sa mort, il demeurait au 13 rue Rodocanichi dans le VIIIe arr. de Marseille. Il était marié à Émilie, Pauline Bossano.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article23732, notice FÉRAUD Joseph, Antoine, Louis par Antoine Olivesi, version mise en ligne le 24 novembre 2008, dernière modification le 30 mai 2009.

Par Antoine Olivesi

SOURCES : Arch. Dép. Bouches-du-Rhône, III M/53 et 56 ; V M2/282, 289 et 290 ; M 6/10823, notice du 21 mars 1940 ; XIV M 24/61, rapport de décembre 1925, et 62, rapport des 10 et 31 octobre 1932. — Le Petit provençal, 7 janvier 1921, 11 octobre 1931 et jours suivants, 18 et 28 mai, 9 octobre 1933, 14 mai, 1er août, 29 octobre 1934, 2 mai 1935 (photo), 5 octobre 1937 (photo), 26 juin et 19 décembre 1938, 25 janvier 1939 (photo), 2 et 11 février, 1er octobre, 4 et 6 novembre 1939. — Provence socialiste, 16 décembre 1938, 20 janvier, 7 avril et 30 juin 1939. — Rouge-Midi, 3 février, 24 mars, 31 juillet, 4 août, 3 novembre 1934 ; 12 décembre 1944. — Le Midi syndicaliste, 15 janvier 1936, 20 juillet 1938. — Le Provençal, 8 et 10 décembre 1946, 11 avril 1949, 17 juin 1951 (photo), 10 juin 1970 (nécrologie et photo). — N. Lagier, Rouge-Midi en 1935-1936, cité. — H. Coston, Dictionnaire de la politique française..., op. cit. , p. 892. — Indicateur marseillais, notamment en 1959. — Renseignements fournis par M. Armand Béret et par les services d’état civil de la mairie de Marseille.

rebonds ?
Les rebonds proposent trois biographies choisies aléatoirement en fonction de similarités thématiques (dictionnaires), chronologiques (périodes), géographiques (département) et socioprofessionnelles.
Version imprimable