Né le 17 janvier 1864 ; mort en 1913 ou 1914. Leader du mouvement des mineurs durant l’ère Meiji. Pionnier du socialisme.
Apprenti mineur, dès l’âge de seize ans, aux mines de Munehi, district de Yoshino, département de Nara, NAGAOKA Tsuruzō s’affilia à la Fédération fraternelle des apprentis (Yūshi dōmei) qui était un groupe autonome de secours mutuel. Puis, pendant plusieurs années, il travailla dans les mines de métaux du pays, dans les départements de Wakayama, Hyōgo, Ehime, Niigata et Akita, se perfectionnant ainsi dans son métier. On dit qu’à l’époque, il aimait plus que tout les jeux d’argent et les bagarres, et qu’il se livrait au proxénétisme.
Cependant, alors qu’il avait vingt-cinq ans environ, NAGAOKA Tsuruzō fut évangélisé par un missionnaire étranger. Le cours de sa vie en fut bouleversé : devenu humanitariste, il renia son passé et se rendit à Tōkyō en 1890 pour étudier le christianisme. II retourna ensuite travailler aux mines d’Arakawa dans le département d’Akita pour y propager la foi parmi ses camarades. II fut alors en butte aux persécutions aussi bien de son employeur que des mineurs, tous hostiles au christianisme et se fit détester même de ses proches et de sa famille. Loin de perdre courage, il organisa une société de loisirs pour les ouvriers, puis quand il fut embauché aux mines d’argent d’Innai il réussit à rassembler des travailleurs dans un groupe de recherches sur la réglementation du travail dans les mines. En février 1893, il dirigea une grève de trois jours pour le respect des normes de travail dans les mines d’Innai. Cette action qui fut un succès à soixante-dix pour cent marqua le début de son activité d’organisation du mouvement ouvrier. Puis il lança dans le département d’Akita, en 1894, une lutte pour s’opposer aux taxes qui étaient prélevées par le patronat sur les salaires des mineurs ; menant une campagne d’agitation dans tout le département, il réussit à former la Fédération des mineurs japonais (Nihon kōzan dōmeikai) et obtint la suppression de ces taxes par des négociations qu’il mena au nom de l’association, avec le préfet et les membres du conseil général du département.
A la suite de l’échec de la grève qu’il dirigea, en 1897, à Innai contre la baisse des salaires, NAGAOKA Tsuruzō partit avec quatre-vingts camarades pour les houillères de Yūbari en Hokkaidō. Là-bas, il conjugua ses efforts avec ceux de MINAMI Sukematsu qui était porteur ; en 1902, ils créèrent la Société loyale des ouvriers du Grand Japon (Dainihon rōdō shiseikai) qui, d’une sorte de groupement pour l’amitié et la culture à l’origine, se transforma dans la lutte en syndicat ouvrier. Ils travaillèrent en relation avec le journal Rōdō sekai (Le Monde du travail) de KATAYAMA Sen. En novembre 1903, NAGAOKA Tsuruzō décida à la suite d’une discussion de toute une nuit avec KATAYAMA Sen venu le voir à Yūbari, de mettre sur pied une organisation nationale des mineurs. Laissant sa femme et leurs six enfants en Hokkaidō, il partit faire une tournée dans tout le pays pour réaliser ce projet. Le premier endroit où il alla fut Ashio, qui était alors le centre minier le plus célèbre de l’Extrême-Orient. Tout en travaillant comme mineur, NAGAOKA Tsuruzō propageait l’idée du caractère sacré et inviolable du travail et de la nécessité de s’unir. En mars 1904, il fonda la section d’Ashio de la Société des camarades du Grand Japon (Dainihon dōshikai) qui tint des réunions où étaient lus les écrits de socialistes comme NISHIKAWA Mitsujirō et organisa des séances de projection. L’association jouait aussi le rôle de Société de secours mutuel et elle rassembla jusqu’à six cents membres. Mais, subissant la répression conjuguée du patronat et de la police, elle connut une situation financière de plus en plus difficile et finit par disparaître.
En octobre 1906, MINAMI Sukematsu, venu le seconder, fonda la section d’Ashio de la Société loyale des ouvriers du Grand Japon (Dainihon rōdō shiseikai) dont les effectifs s’accrurent rapidement grâce au mouvement dynamique qu’elle mena pour revendiquer une hausse des salaires. Quatre mois plus tard, un conflit ayant éclaté entre les mineurs et l’administration, NAGAOKA Tsuruzō s’efforça de persuader les deux parties qu’il fallait négocier, mais il fut arrêté et l’incident finit par une véritable émeute. NAGAOKA Tsuruzō et MINAMI Sukematsu, accusés d’être les leaders de la révolte, furent cependant déclarés innocents lors du procès qui suivit.
NAGAOKA Tsuruzō devint membre du Parti socialiste japonais à sa fondation en 1906 ; après que cette organisation ait été frappée par l’interdiction d’association, il mena des actions communes avec KATAYAMA Sen, et travailla quelque temps au Shakai shimbun (Journal social). Par la suite, il vécut de la vente de jouets qu’il faisait lui même mais, accusé d’être un faussaire pour avoir fabriqué des médailles qui avaient l’air d’être en argent, il fut condamné à trois ans de prison. II semble qu’il mourut de maladie à la maison d’arrêt.
SOURCES : « Kōfu no shōgai »(La Vie du mineur) dans Rōdō undōshi kenkyū, no 20 (Recherches sur l’histoire du mouvement ouvrier). — MURAKAMI Yasumasa, « NAGAOKA Tsuruzō ron » (Essai sur NAGAOKA Tsuruzō) dans Shisō no kagaku (Science de la pensée), numéro de février 1960.