GONINET Marcel

Par Jean-Michel Steiner

Né le 4 mai 1913 à La Prugne (Allier), mort le 18 septembre 1992 à Roanne (Loire) ; instituteur, professeur puis proviseur ; résistant, membre du Comité des intellectuels et du Comité de Libération de la Loire ; militant du Front National et du PCF ; conseiller municipal PCF de Saint-Étienne (1945-1952).

Le 14 juillet 1947, place Fourneyron
Le 14 juillet 1947, place Fourneyron
Marcel Goninet, Claudius Buard, le maire Henri Muller, le préfet Lucien Monjauvis et Marius Patinaud (de gauche à droite). AMSE - 5 Fi 324, détail.

Né dans le hameau de Charrier, commune de La Prugne, (Allier), Marcel Goninet était le fils de Roch Gonninet, 28 ans, ouvrier mineur, et de Couturier Sylvie, 20 ans. Les parents s’étaient mariés le 22 novembre 1910 à Saint-Nicolas-des-Biefs (Allier). Dans les cantons montagneux et pauvres des confins des départements de l’Allier et de la Loire, Roch Gonninet, migrant saisonnier, travaillait dans les champs lorsque les mines débauchaient. Ainsi la famille se déplaçait d’une commune à l’autre.

Mobilisé le 2 août 1914, Roch Gonninet mourut au combat, le 16 mars 1916 à Marre (Meuse), et, par jugement du Tribunal civil de Saint-Étienne daté du 28 mai 1919, Marcel Goninet fut "adopté par la Nation", avec modification de l’écriture du nom. Le 22 août 1917, sa mère se remaria au Chambon-Feugerolles avec Jean-Marie Borne, mineur, né le 13 septembre 1891 à Roche-la-Molière. Plusieurs enfants naquirent de cette seconde union, dont Jean-Marie Borne (15 octobre 1923 au Chambon-Feugerolles) qui fut assassiné par les soldats de la Wehrmacht lors de la liquidation du maquis au lieu-dit Les loges de Montheux de la commune de La Versanne (Loire) le 20 juillet 1944.

Élève maître à l’École normale d’instituteurs de Montbrison (1929-1932), Marcel Goninet se présenta le 23 février 1933 à l’examen des Aspirants au CAP. Il obtint les notes de 13 aux épreuves pratiques et de 14 aux épreuves orales. Admis le 14 novembre, il effectua son stage à Roche-la-Molière. Devenu instituteur, il occupa divers postes dans la région stéphanoise. Selon sa fiche de registre de matricule, il épousa Constance Pipet, le 26 décembre 1932. Le 3 décembre 1934, naquit leur fils Michel, Jean, Léonce, à Saint-Étienne.

Pendant la Seconde Guerre mondiale, Marcel Goninet participa au Comité des intellectuels, diffusa des publications clandestines dans la Loire et la Haute Loire. Membre du comité directeur clandestin du Front national, il entra au Comité départemental de la Libération où il prépara notamment la réunion des États généraux.

À la Libération, tout en poursuivant son métier d’enseignant, il devint journaliste et administrateur du quotidien stéphanois du Front National Le Patriote, dans lequel il tint une rubrique régulière. Élu conseiller municipal de Saint-Étienne le 13 mai 1945, sur la liste commune d’unité républicaine conduite par le communiste Claudius Buard, il fut élu 5e adjoint, chargé de l’instruction publique, le 18 mai. En septembre 1945, il fut candidat sous l’étiquette des Mouvements unis de résistance, soutenu par le PCF, dans le canton de Saint-Étienne Sud-Est. Arrivé en tête au premier tour avec 7 732 voix pour 20 337 suffrages exprimés, il fut devancé au second tour par le socialiste Joseph Masson (UDSR) qui bénéficia du désistement du MRP Lucien Carlen (11 091 voix contre 8 666 voix pour 23 776 suffrages exprimés). Après cet échec, il se consacra à son activité municipale.

Durant son premier mandat (mai 1945 - octobre 1947), au cours duquel la minorité communiste était associée à la municipalité, Marcel Goninet présenta le 30 novembre 1945 un vœu « pour l’application intégral du programme du CNR » et exigeant « un État résolument laïc, défendant énergiquement son école, mais se refusant expressément à accorder toutes subventions, sous quelque forme que ce soit, aux écoles libres, à leurs maîtres et à leurs élèves ». Réélu conseiller municipal le 19 octobre 1947, il figura désormais dans l’opposition communiste au maire RPF, Alexandre de Fraissinette. Ses interventions devinrent plus nombreuses et plus régulières. Il se manifesta régulièrement lors des débats consacrés aux questions scolaires. Le 26 janvier 1948 il s’éleva contre l’insuffisance des crédits alloués aux établissements scolaires publics de la ville. Le 31 mai 1948, lors d’un débat sur les subventions attribuées au comité local et familial de parents d’élèves il affirma : « j’ai la certitude totale que si nous acceptons de voter des subventions à des associations de parents d’élèves fréquentant les écoles privées, demain il faudra, aux mêmes associations, accorder d’autres subventions en faveur des élèves indigents qui fréquentent les écoles privées parce qu’ils n’ont pas de livres, parce qu’ils n’ont pas de galoches. Après-demain il faudra leur ouvrir les cantines scolaires … ». Le 4 octobre 1948, il s’opposa à une proposition de subvention à l’orphelinat de Cottolengo en raison de son caractère confessionnel. Le 31 janvier 1949, il protesta contre la "lenteur calculée" mise par la majorité centre droit du conseil à engager la construction d’écoles maternelles publiques, la suspectant de vouloir favoriser l’enseignement confessionnel, il critiqua la carence de l’État en matière d’investissements pour l’enseignement professionnel (2 février 1951 et 15 février 1952). Le 2 août 1948, Marcel Goninet défendit une motion de protestation contre la reparution du quotidien La Tribune suspendu en septembre 1944.

Il intervint régulièrement aussi sur les questions internationales. Peu avant la conférence de Moscou, le 28 février 1947, il fit voter en séance un vœu par lequel le Conseil déclarait faire « confiance au Gouvernement français pour mettre tout en œuvre pour obtenir de nos Alliés les importations de la Ruhr nécessaires à la renaissance de notre pays, gage de sa grandeur et de son indépendance ». Le 26 novembre 1948, il intervint pour présenter au nom du groupe communiste un vœu demandant au Gouvernement « de revenir dans le cadre de nos alliances actuelles à une politique d’entente avec toutes les démocraties victorieuses du nazisme et d’exiger l’internationalisation de la Ruhr sous le contrôle des quatre Grands ». Le 24 février 1950, il tenta vainement de faire voter "l’interdiction de l’arme atomique" par le conseil. Il le proposa à nouveau le 31 mai 1950. Alors que le 18 avril 1947, une discussion s’engagea autour d’un vœu « pour l’union et la vigilance de tous les démocrates pour la défense de la République, de la paix et de l’indépendance de la France », il déclara que « le général de Gaulle est dangereux et constitue une menace ».

Reçu au professorat, Marcel Goninet enseigna à l’école primaire supérieure de la rue des frères Chappe, qu’il dirigea quand elle devint le collège moderne. En 1952, il fut muté sur un poste de principal à Uzerche (Corrèze). C’est à ce moment qu’il démissionna de son mandat pour se consacrer entièrement à sa carrière. Son successeur fut installé dans la séance du 28 novembre 1952.
Après avoir occupé des directions de lycée à Charlieu (Loire), Tarare (Loire) et Saint-Dié (Vosges), Marcel Goninet fut muté en 1969 au lycée Jean Puy de Roanne. Il entreprit alors la rédaction de son ‘Histoire de Roanne et de sa région, publiée aux éditions Horvath.

Il termina sa carrière de proviseur au lycée Fauriel de Saint-Étienne (1973-1975).

Commandeur des palmes Académiques en septembre 1977, Marcel Goninet mourut accidentellement et fut inhumé le 22 septembre 1992 au cimetière d’Yssingeaux (Haute-Loire).

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article238218, notice GONINET Marcel par Jean-Michel Steiner, version mise en ligne le 10 février 2021, dernière modification le 10 mars 2021.

Par Jean-Michel Steiner

Le 14 juillet 1947, place Fourneyron
Le 14 juillet 1947, place Fourneyron
Marcel Goninet, Claudius Buard, le maire Henri Muller, le préfet Lucien Monjauvis et Marius Patinaud (de gauche à droite). AMSE - 5 Fi 324, détail.

ŒUVRE : Marcel Goninet, Histoire de Roanne et de sa région, Roanne, Horvath, vol 1, 1975, 277p , vol 2, 1976, 515 p.

SOURCES : Arch. Nat., F17 27352 (dossier Fouilleron). — Arch. Dép. Allier : État-civil de la commune de La Prugne : naissances 1913. 2E252 11, État-civil de la commune de Saint - Nicolas - les - Biefs, mariages (1903-1912). — Arch. Dép. Loire : 3E44-28, État-civil de la commune du Chambon-Feugerolles, naissances (1918-1925), 1R1535, registre des matricules 1905/Roanne n°648, 1R1953 et 1R1944, registres des matricules 1933/Saint-Étienne n°157 ; La Tribuneî- Le Progrès, PER 338 52 (août 1973) et PER 338 53 (septembre 1973), PER 338 75 (juillet 1975) — Arch. Mun. de Saint-Étienne, 9C2 66 à 73, bulletins du conseil municipal de la ville de Saint-Étienne (1945 à 1952) , 1F56 et 1F57, recensement Saint-Étienne sud est 1946, 3E 164, mariages 1932, 9K12, élections cantonales de septembre 1945. Le Cri du Peuple, 21 septembre 1945, La Tribune - Le Progrès, 20 septembre 1992, Le Pays Roannais, 25 septembre 1992, Le Patriote de Saint-Étienne, 1944 à 1952. — Note de Jacques Girault.
BIBLIOGRAPHIE : Monique Luirard, La région stéphanoise dans la guerre et la paix (1936-1951), Saint-Etienne, Centre d’études foréziennes (C.I.E.R.S.R.), 1980 - Jean-Michel Steiner, Métallos, mineurs, manuchards : Ouvriers et communistes à Saint-Étienne (1944-1958), Saint-Étienne, PUSE, 2015

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