CHAUVILLE René

Par Jacques Girault

Né le 8 mai 1916 à Lyon IIe arr. (Rhône), mort le 29 mars 2016 à Manosque (Alpes-de-Haute-Provence) ; instituteur ; syndicaliste et militant communiste de l’Ain ; conseiller municipal (1945-1959, 1977-1983) de Bourg-en-Bresse (Ain).

Son père, cheminot, employé au PLM, débuta à Villefranche-sur-Saône, puis à Lyon, avant d’être muté à Bourg-en-Bresse (Ain) après la Première Guerre mondiale.
Sympathisant communiste, il présidait la Mutuelle des cheminots de l’Ain. Il habitait Viriat, commune rurale proche de la préfecture.

René Chauville fut seulement baptisé. Élève de l’école primaire supérieure Carriat à Bourg, il entra à l’École normale d’instituteurs de Bourg en 1932. Très tôt, devenu pacifiste et antimilitariste, il refusa de suivre les cours de préparation militaire et prépara l’examen pour être affecté dans la météorologie. En 1935, il commença sa carrière d’instituteur à Villars-les-Dombes.

René Chauville, membre du Parti et des Jeunesses socialistes de 1932 à 1937 (tendance « Gauche révolutionnaire »), participa à toutes les manifestations et actions du Front populaire et interrompit son adhésion lors de son départ sous les drapeaux.

Il effectua son service militaire à partir d’octobre 1937. Après un stage de formation au fort de Saint-Cyr, il fut nommé secrétaire du directeur national de la Météorologie à Paris. Il en profita pour découvrir certains aspects de la vie culturelle, notamment le théâtre. Affecté dans la météo à Bron (Rhône), il y resta jusqu’à sa démobilisation en juillet 1940.

René Chauville reprit son poste d’instituteur à Viriat jusqu’en 1942. Puis il fut détaché comme instituteur de 6e à l’EPS Carriat, futur collège.

Pendant la guerre, en contact avec la Résistance (aide au ravitaillement), il participa en septembre 1943 à un stage d’un mois dans un centre de formation de cadres de la Résistance près de Grenoble. En mai 1944, recherché par les Allemands, clandestin, il participa, le mois suivant, avec le groupe Robespierre de Saint-André-sur-Vieux-Jonc, à la surveillance d’un dépôt d’obus dans la forêt de Seillon organisé par le Mouvement de Libération populaire. Jusqu’alors anticlérical virulent, il établit des contacts avec des séminaristes du maquis. Il se lia d’amitié par la suite avec une conseillère municipale de Bourg, catholique et devint plus tolérant tout en conservant son athéisme profond.

Il se maria en juin 1944 à Saint-André-sur-Vieux (Ain) avec une institutrice, fille d’instituteurs. Le couple eut deux enfants.

Dans les années 1950, il devint maître puis professeur d’enseignement général (français-histoire) dans le premier cycle du lycée Lalande à Bourg jusqu’à sa retraite en 1971. Par la suite, il dirigea une colonie de vacances d’adolescents puis une maison familiale aux Houches (Haute-Savoie).

Membre du Syndicat national des instituteurs depuis 1935, René Chauville fut secrétaire de la section départementale du SNI du 8 novembre 1945 à 1947. Lors de la réunion du Conseil national du SNI, le 26 décembre 1945, il intervint sur la question du logement des instituteurs. Par la suite, minoritaire, il demeura secrétaire adjoint, puis redevint secrétaire général en 1961-1962. Secrétaire départemental de la FEN-CGT depuis 1948, il participa au stage syndical organisé par la CGT à Gif-sur-Yvette en 1954. Il devint secrétaire adjoint de la section départementale de la Fédération de l’éducation nationale en 1956, puis secrétaire de 1964 à 1966. Il militait dans le courant "Unité et Action". Il avait été le trésorier de l’Union départementale CGT à titre provisoire à la fin de 1947 et au début de 1948.

René Chauville participa à la création de la section départementale de la Mutuelle générale de l’éducation nationale, en devint administrateur et dans les années 1970, il présida la section départementale pendant quelques années.

René Chauville adhéra au Parti communiste français en novembre 1947 pour réagir contre les orientations du ministre de l’Intérieur, Jules Moch, vis-à-vis des grévistes. Membre du comité de la section communiste de Bourg en 1951, il devint membre du comité de la fédération communiste en 1954. Lors de la conférence fédérale de la fin 1956, il émit des hésitations que traduisit le secrétaire fédéral dans son rapport du 14 novembre, « assez ébranlé lors du 20e congrès et actuellement avec les évènements de Hongrie sur lesquels il n’a pas défendu une position juste notamment à la FEN et à la Ligue des droits de l’Homme ». Lors de la conférence dans son intervention, il constata la « rupture entre le Parti des travailleurs hongrois et la population » et estima qu’ « une partie de la classe ouvrière a été abusée et la masse du peuple est restée en dehors de la lutte ». Aussi concluait-il ainsi « il est pénible qu’une armée étrangère intervienne dans un pays même s’il y a risque de fascisme ». Finalement il s’abstint dans le vote de la résolution qui approuvait l’intervention soviétique et de celle condamnant l’attitude de Roger Vailland. Toutefois il critiquait l’activité fractionnelle de certains communistes et se déclarait « d’accord pour défendre et assurer l’unité du Parti ». Malgré ce désaccord, il fut réélu au comité fédéral. Mais la fédération l’ayant proposé pour suivre le stage central pour instituteurs communistes, le secrétariat du Parti refusa de l’admettre en 1957. Il n’approuva pas la thèse de la paupérisation absolue de la classe ouvrière. Lors de la conférence fédérale de 1964, il souhaita que la presse communiste fasse connaître les positions des autres partis communistes. En 1970, il critiqua le centralisme démocratique tel que le pratiquait la direction du PCF. Il souhaita une discussion sur le seul terrain politique des analyses de Roger Garaudy et appelait le Parti à la « sérénité ».

René Chauville, élu conseiller municipal de Bourg en octobre 1947, reconduit jusqu’en 1959, fut candidat sur la liste de gauche en 1965. Membre de la commission des travaux lors de ses premiers mandats, il s’opposa au député communiste Bourbon qui ne voulait pas que les minoritaires communistes votent les crédits nécessaires pour la construction du futur lycée technique. Finalement les élus communistes les votèrent. Lors des élections municipales de 1977, il figurait parmi les candidats de la liste d’Union de la Gauche à direction socialiste qui l’emporta. Il devint adjoint, délégué aux affaires sociales et au jumelage. Il démissionna au début des années 1980 tout en demeurant conseiller municipal.

Candidat pour le conseil général en 1951, René Chauville vit sa candidature en 1957 proposée mais non ratifiée. Il n’avait pas accepté, lors de la campagne précédente, le contenu d’affiches dont le texte lui était attribué. Il fut proposé comme suppléant pour l’élection au Conseil de la République en 1955, proposition non ratifiée. Considéré comme un « homme de masse », il fut présenté comme candidat au conseil général à Bourg en 1958 (sur 10 059 suffrages exprimés, 2 555 voix puis 2 559 voix pour Chauville), en 1964 et en 1970 (deuxième position avec 2 711 voix). Il fut proposé pour être candidat aux élections législatives de novembre 1958 mais il refusa pour des raisons familiales et à cause de ses tâches au SNI. Suppléant aux élections législatives de juin 1968, il fut à nouveau proposé en 1973, mais fut remplacé à sa demande.

Chauville, en outre, membre de la Libre pensée, la représentait au Comité départemental d’action directe. La Fédération du PCF lui demanda en décembre 1963 de moins y militer afin de ne pas « entraîner la confusion chez les membres du Parti ». Il devait en démissionner par la suite, opposé à « certaines attitudes que je jugeais puériles ou sectaires (tel le repas du vendredi saint), mais ce ne fut pas à la demande du PC » indiquait-il en 2006. Il fut en outre administrateur de la caisse départementale de Sécurité sociale, de l’hôpital, de l’hôpital psychiatrique Saint-Georges et vice-président du Foyer des jeunes travailleurs et de la Fédération des œuvres laïques.

En 1981, sa cellule du PCF ayant été dissoute, Chauville ne demanda pas sa réintégration. Il demeura fortement ancré dans les valeurs de la gauche et du communisme critique par la suite.

Après avoir abandonné toutes ses responsabilités au début des années 1980, veuf, Chauville se retira dans les Alpes-de-Haute-Provence. Sa compagne, originaire de la Savoie, avait terminé sa carrière d’enseignante à l’Institut universitaire de technologie d’Aix-en-Provence. Il mourut centenaire à Manosque.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article23843, notice CHAUVILLE René par Jacques Girault, version mise en ligne le 8 décembre 2008, dernière modification le 13 août 2021.

Par Jacques Girault

SOURCES : Arch. comité national du PCF. — Presse syndicale. — Renseignements fournis par l’intéressé.

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