FISCHER Marie, épouse TILLMANS.

Par Jean Puissant

Schaerbeek (pr. Brabant, arr. Bruxelles ; aujourd’hui Région de Bruxelles-Capitale), 4 septembre 1869 – Anderlecht (Bruxelles), 28 janvier 1936. Ouvrière, directrice de cantine scolaire, responsable des Femmes socialistes, conseillère communale socialiste à Anderlecht.

Marie Fischer est la fille d’Adrien Fischer (1840-1894), ouvrier ferblantier d’origine hollandaise, militant de l’Association internationale du travail (AIT) puis au Parti ouvrier belge (POB), affilié à la Ligue ouvrière de Schaerbeek en 1885 et de Marie Viskeno. Marie Fischer exerce divers métiers, ouvrière de la cordonnerie, éjarreuse de poils… Elle se marie à l’âge de vingt ans avec Théodore Tillmans, ouvrier. Le couple a quatre enfants dont deux naissent à Lille (département du Nord, France) en 1895 et 1897, où s’est exilé Théodore, inquiété pour la vigoureuse propagande antimilitariste qu’il mène au sein de la Jeune garde socialiste (JGS).

En 1910, Marie Fischer devient directrice de la cantine scolaire qui vient d’être créée à Anderlecht, où les socialistes siègent au collège. Elle exerce cette fonction, à l’exception de quelques années durant la Première Guerre en raison de la fermeture des cantines communales, jusqu’à sa retraite en 1932, Son mari dirige la section locale du Parti ouvrier belge.
Durant la Première Guerre mondiale, Marie Fischer est active au sein du comité de secours et d’alimentation local qui distribue des repas. Son mari, volontaire de guerre en 1914, décède prématurément en 1923.

Marie Fischer apparaît dans l’action politique comme déléguée au Congrès annuel du POB en 1901 qui crée la Fédération des femmes socialistes. Elle en devient la secrétaire de cette organisation féminine en 1902, aux côtés d’Isabelle Gatti de Gamond*, qu’elle remplace ex officio à sa mort en 1905, comme déléguée au Conseil général du POB.
En 1903, Marie Fischer devient administratrice de l’organe de la Fédération, la Femme socialiste, dont elle est une des principales rédactrices (éducation et syndicalisation en sont deux axes majeurs). Elle défend ardemment la place des femmes au sein du parti ouvrier qu’elle critique vivement pour son manque d’attention à la question féminine, mais se prononce en faveur du rôle traditionnel des femmes. « L’esclavage actuel des femmes est inhérent au capitalisme…C’est par sa transformation, comme le veut le socialisme que la femme se retrouvera dans son rôle naturel, celui d’épouse et de mère. Nul ne peut contester que c’est là, le véritable rôle de la femme. Pour nous, femmes ouvrières, l’idéal n’est-il pas d’être femme dans toute l’acceptation (sic) du mot, la femme, non l’esclave de l’homme, mais la compagne aimée et aimante de l’homme, la mère des enfants ? », écrit-elle. Néanmoins, elle défend avec vigueur la place des femmes au sein du parti (congrès nationaux de 1904, 1907,1910) et dénonce le manque d’intérêt pour l’organisation des femmes, pour l’éducation politique comme pour l’éducation ménagère des femmes. Elle plaide en faveur de syndicats de travailleuses, de la création d’un corps de propagandistes… Malgré cela, le Congrès de 1911 se prononce contre les organisations syndicales de femmes. Pour le parti, la question féminine n’est pas une priorité.

En août 1907, Marie Fischer participe au premier Congrès international des femmes socialistes à Stuggart (Bade-Wurtemberg, Allemagne) où elle présente le rapport sur la Belgique. L’assemblée se prononce en faveur du suffrage des femmes. Lors du congrès national de 1911, Marie Fischer ne veut pas que le POB se démarque des autres partis européens en la matière. Elle espère « que le POB saura se conformer aux décisions de Stuttgart et qu’il mettra tout en œuvre pour activer l’éducation sociale et politique des ouvrières de notre pays. »
L’instauration du vote des femmes au scrutin communal en 1920 va changer la donne. Sur proposition du Conseil général, se tient un Congrès national des femmes socialistes : il décide de créer un Comité national d’action féminine qui aura notamment pour tâche d’organiser la campagne électorale pour les femmes. Marie Fischer, qui y représente le Brabant, y défend ses propositions antérieures. Au Congrès national du POB de 1920, elle radicalise son propos en défendant le suffrage des femmes aux élections provinciales et en critiquant l’attitude du parti à l’égard des femmes. « Nous n’avons pas à envisager la question au pont de vue électoral comme les autres partis, mais du point de vue de l’égalité et des principes de justice... Mais faites votre mea culpa. C’est vous qui êtes responsables de la situation médiocre des femmes au sein du parti ». En 1920, elle représente les Femmes socialistes au Congrès international des femmes de Christiana (Danemark). Elle intervient une dernière fois au Congrès annuel du POB en 1922.

Entretemps, Marie Tillmans-Fischer adhère aux Femmes prévoyantes socialistes (FPS), mouvement créé au sein des Mutualités socialistes. En tant que secrétaire de la section féminine d’une mutuelle d’Anderlecht, elle siège à la direction des FPS du Brabant, mais n’y apparait plus en 1926. En revanche ; élue au conseil communal d’Anderlecht en avril 1921, réélue en 1926 et 1932, elle participe activement à la vie de sa commune, jusqu’au moment où la maladie devient trop forte en janvier 1935. Membre de diverses commissions en matière sociale, elle siège dans divers comités dont le Conseil du perfectionnement de l’enseignement pour filles de l’école professionnelle Marius Renard, etc… Elle intervient sur les questions intéressant les ménages ouvriers, les mères, les vieillards…, en faveur des œuvres d’assistance (Orphelinat rationaliste, Mères débiles, Vestiaire scolaire). Elle plaide en faveur d’une subvention communale pour les malades affiliés à des sociétés de secours mutuels, de la lutte contre l’alcoolisme…

Après sa retraite, Marie Tillmans-Fischer prend en charge l’économat de l’Œuvre royale de la Crèche et la Goutte de lait d’Anderlecht. Elle est touchée dans sa vie familiale par la disparition de son mari en 1923 et de deux de ses enfants en 1926 et 1929. Son frère, Franz Fischer* (1875-1945), journaliste au Peuple, a été échevin à Schaerbeek et député socialiste de l’arrondissement de Bruxelles.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article239078, notice FISCHER Marie, épouse TILLMANS. par Jean Puissant, version mise en ligne le 2 mars 2021, dernière modification le 2 mars 2021.

Par Jean Puissant

SOURCE : JACQUES C., MARISSAL C., « Marie Tillmans-Fischer (1869-1936), une femme dans les cadres du parti », dans GUBIN E., VAN MOLLE M. (dir.), Parcours singuliers. Portraits de dix élues en 1921, Bruxelles, 1994, p. 35-43.

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