Par Jacques Girault
Né le 21 septembre 1894 à La Chapelle–Agnon (Puy-de-Dôme), mort le 6 mars 1984 à Chamalières (Puy-de-Dôme) ; instituteur puis professeur de l’enseignement supérieur ; syndicaliste SNI et militant socialiste du Puy-de-Dôme ; écrivain ruraliste.
Fils d’un chef-cantonnier radical-socialiste et anticlérical qui cultivait quelques terres alors que sa mère appartenait à une famille catholique, Lucien Gachon reçut les premiers sacrements catholiques. Élève du cours complémentaire de Cunlhat, il entra à l’École normale d’instituteurs de Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme) en 1911. Après avoir été répétiteur délégué au collège de Riom (1914-1915), nommé instituteur à Fournols (1915-1916), à Clermont Châteaudun (1916-1917, à Marsac (1917-1919), à Cunlhat (1919-1921), il devint directeur du cours complémentaire de Saint-Dier d’Auvergne (1921-1931). Parallèlement, il commença des études à la Faculté des Lettres de Clermont-Ferrand et obtint cinq certificats de licence entre 1924 et 1931 (géographie en 1924, géographie régionale en 1930, pédagogie et histoire en 1931). Il fut alors nommé instituteur puis professeur adjoint à l’école primaire supérieure d’Issoire (1931-1933), puis professeur dans cet établissement de 1934 à 1937. Pendant ses vacances, il participait aux travaux agricoles de sa famille. Réformé, il n’effectua pas de service militaire.
Titulaire d’un diplôme d’études supérieures de géographie, Lucien Gachon poursuivit ses études. Il fut chargé d’une heure de cous de cartographie à la faculté de 1932 à 1939. Il commença des recherches pour une thèse en 1931. En congé d’études comme boursier du CNRS (1937-1938), il devint docteur ès lettres (Géographie) en mai 1939 avec une thèse principale sur « Les limagnes du Sud et leurs bordures montagneuses » et une thèse complémentaire sur « Une commune rurale d’Auvergne du XVIIIe au XXe siècles ». Il fut alors nommé professeur à l’École normale d’instituteurs de Clermont-Ferrand (1938-1946), dont l’Institut de formation professionnelle d’instituteurs à partir d’octobre 1941. Il fut détaché au CNRS, en 1946-1947, comme maître de recherches.
Lucien Gachon devint chargé d’enseignement (1947-1948) puis maître de conférences (1948-1950), enfin professeur sans chaire (1951-1952) à la faculté des lettres de Besançon. En 1950, la maîtrise de conférences se libérant à Clermont-Ferrand, il fut candidat mais Max Derruau, son ancien étudiant, lui fut préféré car il n’était pas agrégé, selon les motifs officiellement évoqués. Son épouse étant toujours institutrice dans le Puy-de-Dôme, il ne résidait pas à Besançon en dépit de diverses pressions. Finalement sa chaire fut transférée à la Faculté de Clermont-Ferrand en 1953. Il termina sa carrière comme professeur en 1964.
Réformé, Lucien Gachon se maria religieusement en septembre 1917 à Orsonnette (Puy-de-Dôme) avec une institutrice. Le couple eut deux enfants qui reçurent les premiers sacrements catholiques.
Militant du Syndicat national des instituteurs (SNI), Lucien Gachon décrivit sa méthode pédagogique dans trois ouvrages Henri Gouttebel instituteur, La première année et La petite fille de Maria. Il milita par la suite dans le syndicalisme de l’enseignement primaire supérieur. Il collaborait avec le SNI, publiant des articles dans sa presse nationale et départementale. Il prononça une conférence sur la lecture au Congrès international de l’enseignement primaire et de l’éducation populaire organisé par le SNI à Paris, salle de la Mutualité (23-31 juillet 1937). Il fut gréviste le 30 novembre 1938. Plus tard, à la demande des dirigeants de Sudel, il fit des démarches auprès du gouvernement à Vichy pour qu’il lève l’interdit sur les manuels de géographie. Membre du Parti socialiste SFIO, secrétaire de la section d’Issoire sous le Front populaire, Gachon la représentait lors de la venue de Léon Blum, président du Conseil, à Clermont-Ferrand.
Lucien Gachon poursuivait ses publications et entretenait des liens amicaux avec Daniel Halévy, Léon Émery, Henry Poulaille* et Henri Pourrat, avec qui il entretint une abondante correspondance qui fut publiée dans les années 1990. Après un premier article dans la Revue de géographie alpine en 1921 et des ouvrages (à partir de 1924), il écrivait des romans ou des études sur le monde rural, parfois avec Henri Pourrat*. Pendant la Seconde Guerre mondiale, son apport sur le monde rural fut très apprécié par les partisans de la Révolution nationale qui préconisait le retour à la terre et exaltait le monde des campagnes. Le recteur en 1946 le soulignait : « Gachon en raison de ses tendances régionalistes avait un peu trop adhéré à la politique du maréchal. Il s’est dangereusement aventuré et a collaboré à L’Effort. Son allure sympathique cependant lui a permis d’être oublié et de ne pas être traduit devant le Conseil académique d’enquête comme il aurait dû l’être ». Toutefois suspect, il eut des difficultés pour pouvoir être élu professeur à la Faculté des lettres de Clermont-Ferrand. Après la guerre, ses publications entraient aussi dans son activité de professeur de faculté. S’ajoutaient de nombreux romans terriens. Chez Sudel, il signa avec Jean Sénèze, responsable du SNI, des manuels de géographie pour les classes primaires et d’autres manuels scolaires Notre commune.
Lucien Gachon, retraité, habitait Chamalières.
Par Jacques Girault
ŒUVRE : Parmi ses nombreux ouvrages, outre les études géographiques, citons : Maria, Paris, Éditeurs associés, 1925, réédité chez Ramsay, 1982. — Jean-Marie homme de la terre, Paris, Valois, 1932. — L’écrivain paysan, Paris, Valois, 1932. — Les Écoles du paysan, Paris, PUF, 1942. — Villages d’Auvergne (avec Henri Pourrat), 1943. — L’Auvergne et le Velay, Paris, Gallimard, 1948. — Henri Gouttebel instituteur, Clermont-Ferrand, G. de Bussac, 1971. — La première année, Clermont-Ferrand, Volcans, 1973. — La petite fille de Maria, Clermont-Ferrand, Volcans, 1974.
SOURCES : Arch. Nat., F/17 28302. – Notice DBMOF, par Jean Prugnot. — Presse syndicale. — Renseignements fournis par l’intéressé en 1975.