MOUNARD Marcel Lucien

Par Jean-Paul Martin

Né le 15 septembre 1922 à Saint-Étienne (Loire), mort à Saint-Étienne, le 20 juillet 2010 ; ouvrier de jour aux Houillères ; militant des Jeunesses Socialistes, de la Nouvelle Gauche, de l’UGS et du PSU dans la Loire.

1967-Marcel Mounard candidat aux élections législatives
1967-Marcel Mounard candidat aux élections législatives

Marcel Mounard est né dans une cité pour familles nombreuses du quartier de Bel-Air. Son père, Adrien Joseph Noël, fut mobilisé pendant la Grande Guerre et reçut deux citations pour son courage en 1918. Artisan à l’Étrat puis ajusteur à la MAS (Manufacture d’Armes de Saint-Étienne), il militait entre les deux guerres à la SFIO et fut, après la Seconde Guerre mondiale, adhérent du syndicat FO de la MAS. Du coté de sa mère, Aimée, née Mourier, la tradition familiale était également plutôt de gauche. Fille d’un bronzeur et d’une ourdisseuse, elle était elle-même ourdisseuse au moment de son mariage.

Marcel Mounard alla à l’école primaire jusqu’au certificat d’études à l’Étrat, avant de passer quatre années à l’ENP (Ecole Nationale Professionnelle, devenu lycée Technique et professionnel Étienne Mimard) de Saint-Étienne jusqu’au brevet de fin d’études.

Embauché à la SNCF en 1940, il fut limogé deux mois plus tard après l’arrivée des troupes allemandes. Il entra peu après à la mine comme ouvrier de jour ; il y travaillait à l’entretien des camions. À l’âge de 20 ans, il fut appelé aux Chantiers de Jeunesse, dans le Puy de Dôme, et y effectua un stage pour devenir infirmier. Au bout de huit mois il fit partie avec sa promotion d’un contingent envoyé en Silésie sur ordre des Allemands, où il passa vingt-deux mois. À son retour en 1945, il retrouva son emploi à la Mine, où il fit toute sa carrière professionnelle à l’atelier auto de Basses Villes jusqu’à sa retraite en 1978. Lors des grèves des Houillères de 1947-1948, il ne s’engagea pas, car il était écœuré par l’attitude du PC et de la CGT, notamment en ce qui concerne la distribution des secours aux grévistes. Lors de la grande grève de 1963, il participa aux manifestations et à l’organisation des collectes en faveur des grévistes.

Sensibilisé au socialisme par son père dès l’âge de 14 ans dans l’ambiance du Front populaire, Marcel Mounard s’inscrivit à la Libération aux Jeunesses Socialistes et devint secrétaire de la section stéphanoise et trésorier fédéral. C’est à une réunion nationale des Jeunesses Socialistes à Soisy sous Montmorency, qu’il rencontra sa future femme, Yolande Dupuch, née le 27 avril 1921 à Bordeaux. Il l’épousa le 25 octobre 1947 à Soulom (Hautes Pyrénées). Il milita aux JS jusqu’à leur dissolution en 1947 pour influence trotskyste et prise de position hostile à la politique de la SFIO en Indochine.

Marcel Mounard fréquenta ensuite la mouvance politique minoritaire qui refusait aussi bien l’influence communiste sur le mouvement ouvrier que celle de la direction de la SFIO, dont il désapprouvait la politique coloniale. Il assista à une conférence de Gilles Martinet à Saint-Étienne au moment de la naissance de L’Observateur, auquel il s’abonna. Il fut ensuite jusqu’au bout un lecteur attentif de cet hebdomadaire à travers ses différents changements de titre. En septembre 1955, il figura parmi les fondateurs de la Nouvelle Gauche dans la Loire, et en devint secrétaire fédéral. Dans une lettre du 13 septembre 1955, il invitait d’anciens des JS à rejoindre le nouveau groupement, dont il vantait les mérites en ces termes : « il est plus à gauche que l’actuelle SFIO, mène une lutte acharnée contre le colonialisme … ; défend la laïcité, lutte contre le pluralisme syndical, est pour un Front populaire … il est neutraliste … ». Il laissa des Cahiers, très utiles pour la connaissance de cette organisation, qui vécut un peu plus de deux ans, à Saint-Étienne et dans la région. À cette époque il reçut plusieurs fois à son domicile Claude Bourdet, responsable national de la Nouvelle Gauche, venu à Saint-Étienne pour des congrès ou des meetings. Le 28 octobre 1956, Mounard présenta le rapport moral au 1er congrès fédéral, présidé justement par Claude Bourdet. Il représenta la Loire au congrès national de la Nouvelle Gauche de décembre 1956 et au congrès interrégional de Lyon en avril 1957. Le groupe de la Loire semble avoir été particulièrement dynamique. En 1956, la section de Saint-Étienne comptait 35 adhérents, parmi lesquels Jean Dasté. L’année suivante, la fédération comptait une cinquantaine de membres, ouvriers et enseignants surtout. Quatre sections étaient présentes sur Saint-Étienne : une au Centre (16 membres), une à Beaulieu-le Rond-Point (13), une à Montaud Carnot (10), une à Terrenoire (2) ; 10 adhérents “isolés” étaient par ailleurs dénombrés dans le reste du département. Cette formation a œuvré à un rapprochement entre deux comités locaux pour la paix en Algérie, l’un de sympathie plutôt anarcho-syndicaliste, l’autre proche du PCF.

Aux élections législatives de 1956, Mounard était en troisième position sur la liste d’action républicaine socialiste pour l’union des gauches, présentée par le Mouvement pour la Libération des Peuples et la Nouvelle Gauche conduite par Louis Alvergnat. La liste ne parvint pas à s’accorder avec la Jeune République pour former une liste commune. Le Mouvement pour la Libération des Peuples et la Nouvelle Gauche fusionnèrent à la fin de l’année 1957, donnant naissance à l’Union de la Gauche Socialiste à laquelle Mounard adhéra aussitôt. Il rejoignit en 1960 le PSU, prenant à chaque fois des responsabilités au niveau fédéral. Il était aussi l’un des piliers de la section de Montaud du PSU, participant de manière assidue aux activités. En 1974, il ne rejoignit pas le PS et continua d’être inscrit au PSU.

Il fut à plusieurs reprises candidat à des fonctions électorales, sans jamais être élu. Il figura en 1959 sur la liste de l’Union des Forces Démocratiques conduite par André Garnier aux municipales à Saint-Étienne ; en 1965 sur la liste d’Union Démocratique (PCF-PSU) conduite par Michel Olagnier ; en 1971 sur la liste d’Union des Forces populaires (PSU et alliés) conduite par Huguette Bouchardeau. Il fut candidat du PSU aux cantonales de 1964 dans le canton de Saint-Étienne Nord-ouest. Aux législatives, outre sa candidature en 1956 (au scrutin de liste), il fut en 1967 le suppléant de Marcel Pierre dans la première circonscription de la Loire (Saint-Étienne Nord).

Marcel Mounard eut également une activité de militant laïque (à l’Amicale Chapelon, dans le quartier Jacquard) et surtout aux parents d’élèves : il fut membre du bureau départemental de la FCPE. Sur le plan syndical il ne s’engagea que très tardivement, à la CGT, prenant après 1968 des responsabilités au Comité d’Entreprise des Houillères.

Après sa retraite, il quitta Saint-Étienne, vers 1980, pour résider avec son épouse à Soulom, bourg pyrénéen dont elle était originaire. Il devint en 2007 « adhérent à vingt euros » du PS en 2007 pour soutenir Ségolène Royal, et fréquenta la section socialiste locale pendant quelque temps.

Yolande Mounard a été employée de bureau et a fait la plus grande partie de sa carrière à la Sécurité Sociale. Syndiquée à la CGT, elle a milité à la JOC, aux JS, à l’UGS et au PSU. Elle est décédée le 3 juin 2005. Le couple eut trois enfants. Marcel Mounard revint à Lyon puis à Saint-Étienne après le décès de sa femme. Ils ont été incinérés tous deux à Soulom.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article239329, notice MOUNARD Marcel Lucien par Jean-Paul Martin, version mise en ligne le 15 mars 2021, dernière modification le 16 mars 2021.

Par Jean-Paul Martin

1967-Marcel Mounard candidat aux élections législatives
1967-Marcel Mounard candidat aux élections législatives

SOURCES : Entretien réalisé en 2008 par Jean-Paul Martin et Jean-Michel Steiner - Archives privées, Cahiers de la Nouvelle Gauche dans la Loire. — Arch. Dép. Loire : 208 J, Fonds Louis Nicolas, Fédération de la Loire du PSU ; 1 R 1719, Classe 1917, matricule 2230, Mounard Adrien Joseph Noël ; 6 M 735, L’Étrat, recensement de 1931 – Arch. Mun. Saint-Étienne : 3 E 103, 2 E 123, 2 E 131, 3 E 148, 2 E 174 ; 1 K 46 ; 1 F 60. — Notes de Jean-Michel Steiner.
BIBLIOGRAPHIE : Jean-Michel Steiner, « Un parti neuf face à un mouvement ouvrier aux fortes traditions. Prémices et débuts de la fédération PSU de la Loire (1955-1971) » in T Kernalegenn et alii, Le PSU vu d’en bas. Réseaux sociaux, mouvement politique, laboratoire d’idées (années 1950-années 1980), Presses universitaires de Rennes, 2009, p 247-257 - Steiner Jean-Michel, Le PCF dans la vie stéphanoise (1944-1958). Communisme et anticommunisme dans une grande ville ouvrière sous la IV° République, Université J. Monnet Saint-Étienne, décembre 2005. 832 p.

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