SAURY Pierre, Germain

Par André Balent

Né le 20 juin 1906 à Serdinya (Pyrénées-Orientales), mort le 8 décembre 1973 à Nevers (Nièvre) ; instituteur, commissaire de police, ami et collaborateur de René Bousquet, administrateur civil dans l’Allemagne occupée ; chargé de mission auprès de François Mitterrand, ministre de la France d’Outre-Mer ; administrateur (secrétaire) de la Fédération nationale des promoteurs-constructeurs. De 1929 (au moins) à 1939, militant du Parti socialiste SFIO ; intègre les rangs de l’UDSR dans les années 1950. Dans les années 1960, milite à la CIR, à la FGDS et devient un proche collaborateur de François Mitterrand ; adhère au Parti socialiste au congrès d’Épinay (1972) ; député suppléant de la Nièvre, élu en 1967 ; conseiller général de Châtillon-en-Bazois (Nièvre) de 1970 à sa mort.

Pierre Saury à la mairie de Nevers en 1973
Pierre Saury à la mairie de Nevers en 1973
À gauche Pierre Saury, lors d’un jumelage avec une ville allemande (La Montagne).

Pierre Saury naquit à Serdinya (Pyrénées-Orientales), dans un milieu modeste. Sa commune natale, dans le Conflent, était non seulement agricole, mais aussi ouvrière, car les deux gares situées sur son territoire permettaient le transbordement du minerai de fer extrait dans les concessions des villages limitrophes, Escaro notamment. L’état civil de la commune nous dit que son père, André Saury, était « cultivateur ». Sa mère se nommait Germaine Frechinos. Pierre Saury eut un frère cadet, prénommé André, né le 14 mars 1914 qui fut instituteur puis professeur de mathématiques au lycée de Prades (Pyrénées-Orientales). Son cursus scolaire fut celui d’un bon élève. Après la « communale », il fréquenta l’école primaire supérieure de Prades, chef-lieu du 3e arrondissement des Pyrénées-Orientales, puis l’école normale de Perpignan. Sa première carrière professionnelle fut donc celle d’instituteur. Pierre Saury débuta, alors qu’il avait dix-neuf ans, le 1e octobre 1925 à Ayguatébia, où il avait été nommé « maître stagiaire ». Après son service militaire, il fut successivement instituteur adjoint à Saint-Laurent-de-Cerdans, le centre ouvrier du haut Vallespir, où les travailleurs avaient su édifier, dès la fin du XIXe siècle, un mouvement aussi puissant qu’original. Le 1e octobre 1928, il prit possession du poste de directeur de l’école à deux classes de l’école d’Err, un village de Cerdagne, région de montagne de l’ouest du département, aux confins de l’Espagne. Entre-temps, il avait épousé une institutrice, Anna Aspero, originaire de La Llagonne, village montagnard du haut Conflent. Celle-ci devint l’adjointe de son mari à l’école communale d’Err.

À Err, Pierre Saury devint l’ami du maire socialiste Barthélemy Lledos. Ce dernier était un notable connu : grand propriétaire terrien, il avait épousé une fille de la grande bourgeoisie de l’industrie textile de Sabadell, dans les environs de Barcelone. Négociant « légal », Barthélemy Lledos qui pratiquait également la contrebande, avait des relations, non seulement à Barcelone mais aussi à Paris, où il connaissait quelques-uns des politiciens les plus en vue de la IIIe République (des dirigeants de la SFIO, mais aussi des radicaux, comme les frères Sarraut et Édouard Daladier). On peut penser que Lledos a pu être à l’origine d’une probable initiation de Pierre Saury à la franc-maçonnerie. En tout cas, tout au long de sa carrière, il ne cessera de côtoyer assidûment des francs-maçons. Pierre Saury devint secrétaire de mairie et aida B. Lledos dans son travail d’implantation de la SFIO en Cerdagne et en Capcir. Notons qu’il fut également le « secrétaire » personnel du maire, gérant ses affaires à Err lorsque celui-ci résidait à Barcelone puis, à partir de 1936, à Paris. Pierre Saury contribua également, à la mise en route, à partir de 1934, de la Coopérative laitière d’Err que le maire appuyait avec conviction. À Err, Pierre Saury s’impliqua dans les activités péri-scolaires : cours du soir, ski scolaire dont il fut l’un des pionniers dans le département, grâce aussi à l’aide et au mécénat de B. Lledos. Ami du curé du village, l’abbé Josep Maria Castellà Roger, originaire des environs de Tarragone et écrivain de langue catalane, Pierre Saury s’intéressa aux « choses catalanes ». En 1935, il aida, en lui procurant des faux papiers, l’universitaire et nationaliste catalan, Josep Maria Batista i Roca qui trouva refuge à Err après l’échec de l’insurrection du 6 octobre 1934 à Barcelone. Batista i Roca demeura environ un an à Err, avant de regagner Barcelone après la victoire du Front populaire aux élections législatives de 1936. Batista i Roca, un des pionniers de l’ethnographie universitaire à Barcelone dans les années 1920, initia, en 1935, Pierre Saury à cette discipline, sur le terrain, à Err. À Err, Pierre Saury connut également le poète perpignanais de langue catalane Joan Narach qui possédait une résidence secondaire dans ce village. Cette double influence, celle de Batista i Roca et celle de Joan Narach explique qu’il s’abonna à la revue nationaliste catalane de Perpignan Nostra Terra, organe du mouvement du même nom.

Militant de la SFIO à Err, Pierre Saury fut secrétaire de la section socialiste communale. Nous ignorons quand il avait adhéré à ce parti. Il avait, en tout cas, eu l’occasion de le connaître et, peut-être d’y adhérer, lors de son séjour à Saint-Laurent-de Cerdans, bastion singulier d’une SFIO très prolétarienne. En tout cas, Barthélémy Lledos, son premier « patron » et ami, maire socialiste d’Err en 1929 et président du conseil d’arrondissement de Prades en 1931 était un personnage influent aux multiples facettes et activités. Pierre Saury soutint les initiatives de B. Lledos lorsque ce dernier, en 1935, prétendit briguer –en vain- un siège de sénateur avec l’investiture de la SFIO. On reconnaît sa prose dans les colonnes de La Revue de la Cerdagne que le maire d’Err avait fondée afin de soutenir son ambition électorale. On retrouve aussi Pierre Saury dans d’autres combats internes de la SFIO, en 1937, lorsqu’il fallut lutter pour préserver les positions électorales menacées d’un Barthélemy Lledos, contraint de résider à Paris après avoir dû abandonner Barcelone, à la suite des événements révolutionnaires de juillet 1936. Tout comme Barthélémy Lledos, Pierre Saury soutint la majorité fédérale –et donc le député-maire de Perpignan, Jean Payra- au lieu d’appuyer Joseph Rous, le député de Prades, « dissident » de la SFIO en 1935, mais influent dans la circonscription et brillamment réélu, avec le désistement du candidat communiste en 1936. Après la réunification des socialistes des Pyrénées-Orientales en 1937, il demeurait des traces de ce conflit. Le 13 septembre 1937, au congrès cantonal de la SFIO de Bourg-Madame qui devait désigner les candidats du parti à l’élection au conseil d’arrondissement de Prades et qu’il présidait, Pierre Saury défendit en vain la candidature du maire d’Err qui résidait à ce moment-là à Paris où ses activités d’« homme d’affaires » le retenaient. Mais les délégués choisirent Jean Salvat, hôtelier à Bourg-Madame et Jean Ribot, contrôleur principal des contributions indirectes.

En 1939, Pierre Saury changea de carrière professionnelle. Son protecteur cerdan, B. Lledos lui donna un sacré coup de pouce. Mettant à profit ses relations avec Albert Sarraut, le ministre radical de l’Intérieur, ce dernier facilita la réussite de son protégé à un concours (d’inspecteur de police, selon plusieurs témoignages provenant notamment de Cerdagne ; de commissaire de police, selon le témoignage plus crédible d’un proche parent de P. Saury, et comme le prouve de manière irréfutable une lettre qu’il envoya depuis Darnétal (Seine-Inférieure), le 15 août 1939, à l’homme d’affaires cerdan Ignace Fortuny, ami lui aussi de B. Lledos ).
En effet, Pierre Saury obtint, au printemps 1939, une nomination en Seine-Inférieure, sur un poste de commissaire, à Darnétal, dans la banlieue de Rouen. D’autres témoignages font également état d’un poste au cabinet du préfet de la Seine-Inférieure. Quoi qu’il en soit, Rouen, préfecture d’un département proche de la capitale, était un poste flatteur pour son titulaire, surtout lorsqu’il s’agissait d’une première affectation.

Mobilisé en septembre 1939 dans les services auxiliaires comme commissaire de police, Pierre Saury semble être resté à Rouen pendant la durée des hostilités (l’armistice fut signé le 22 juin 1940). C’est donc à tort que Mme Pascale Froment lui attribue (op. cit., p. 435-436) une « Croix de Guerre obtenue en récompense d’une conduite courageuse pendant la drôle de guerre ».

À la fin de 1940, Pierre Saury fut muté à Chalons-sur-Marne, préfecture du département de la Marne que le gouvernement de Vichy transforma en capitale régionale. C’est là qu’il fit la connaissance de la seconde personne - après B. Lledos - qui allait compter dans sa vie publique. En effet, René Bousquet venait d’être nommé dans la Marne et la région Champagne. Très rapidement, Pierre Saury devint un des hommes de confiance de René Bousquet. Il fut bientôt promu au poste de commissaire des renseignements généraux à Reims, sous-préfecture de la Marne, mais ville plus importante que Châlons, le chef-lieu. Discret et efficace, Pierre Saury assista le préfet dans ses tâches, fort délicates, on le devine, dans un département de la zone occupée. En tout cas, ni Saury, ni Bousquet ne manifestèrent à ce moment-là la moindre sympathie à l’égard des « ultra » de la collaboration, comme ceux du Rassemblement national populaire, fort actifs dans la zone occupée.

Tout changea lorsque, le 18 avril 1942, René Bousquet accepta d’entrer dans le gouvernement de Pierre Laval au poste de « secrétaire général à la police » (équivalent, quasiment, à celui d’un ministre). René Bousquet essaya d’amener avec lui, à Vichy, ceux de ses collaborateurs marnais qui étaient devenus ses amis. Pierre Saury débarqua à Vichy avec le titre de « chargé de mission ». Il ne resta pas longtemps dans la capitale de l’État français. René Bousquet lui confia une mission délicate à Paris. Le chef de la police de Vichy avait besoin de réorganiser ses services dans la capitale occupée. Chargé initialement de mettre, une délégation des RG en zone Nord, Pierre Saury ne put accomplir cette tâche qui ne reçut pas l’agrément des autorités allemandes.
Bousquet lui confia alors la charge de constituer à Paris un service officieux destiné à la surveillance des partis « ultra » de la collaboration : RNP, PPF,… Il accéda, à titre officieux, également, au grade d’intendant de police, équivalent, sous Vichy, à celui de préfet. On sait qu’à ce moment-là, Saury fut chargé par Bousquet d’établir des contacts, pour les contrôler, avec les milieux de la « Gestapo française », plus particulièrement avec les célèbres et sinistres Bonny et Lafont.

En juillet 1942, lorsque Bousquet organisa la rafle des Juifs étrangers, connue sous le nom de « rafle du Vel d’Hiv », Pierre Saury se trouvait à Paris : ses fonctions, cependant, permettent de croire qu’il n’y fut pas personnellement impliqué. Toutefois, il se garda bien de démissionner. Tout comme son « patron », Bousquet, il servait une politique, celle du président Laval, dont la tactique consistait à devancer les désirs allemands afin de préserver la fiction de la souveraineté française.

« Homme de l’ombre », dévoué à son « patron », Pierre Saury fut dans une situation bien délicate lorsque l’étoile de René Bousquet commença à décliner à Vichy. L’heure des « ultras » de la Milice avait sonné. Après l’occupation de la zone Sud, Pierre Saury ne rejoignit pas pour autant, en 1943, les rangs de la Résistance. Certes, au cours de son interrogatoire à la Haute Cour de Justice, le 21 juillet 1945, René Bousquet (propos rapportés par Mme Froment, op. cit., p. 434) affirma que son ami Saury était « membre de la Résistance depuis 1942 (…) en contact avec les services militaires de renseignements »… Aucun témoignage n’est venu, à notre connaissance, étayer cette affirmation d’un homme qui la formula en pensant, pour l’essentiel, à sa propre défense. Comme Bousquet, Saury demeura, malgré tout, fidèle à Vichy. En 1943, il revint en Cerdagne, pour un bref séjour. À Err, il proposa à certains de ses anciens élèves de les faire dispenser du STO. L’un d’entre eux, cependant, préféra franchir clandestinement la frontière franco-espagnole plutôt que de se compromettre en bénéficiant de l’appui de son ancien instituteur.

À la fin de 1943, Pierre Saury accepta un poste d’Intendant de police à Lyon. Mais, presque aussitôt il fut révoqué par Vichy. En décembre 1943, les « ultras » régnaient sans partage à Vichy. Joseph Darnand remplaçait René Bousquet comme responsable de l’ordre public. Pierre Saury alla donc en Haute-Savoie ainsi que le lui avait indiqué Bousquet. Il tâcha de s’y faire oublier et tenta de « rentrer en Résistance ». Mme Pascale Froment a bien montré que Pierre Saury ne devint résistant qu’en avril 1944 lorsqu’il se fit immatriculer au réseau « Mabro » du BCRA comme agent P1 sous le pseudonyme de « Paule ». C’était le prénom de celle qui allait devenir sa deuxième épouse. En effet, Paule Léger était la fille et la sœur d’authentiques résistants de Publier, près d’Evian. Son statut de Résistant de la onzième heure et sa liaison l’aidèrent sans doute à faire oublier son passé de fonctionnaire zélé de Vichy. À la Libération, Pierre Saury fut révoqué mais resta libre.

Il effectua une surprenante reconversion. « Contractuel dans l’Administration civile des Forces françaises d’occupation en Allemagne », d’après un de ses amis, Jean-Claude Cathala (fils de Pierre Cathala, ancien ministre des finances de Pétain), il semblerait plutôt (Froment, op.cit. p. 538) qu’il fut détaché au Ministère des Affaires étrangères. À ce titre, il occupa d’importantes fonctions dans l’administration civile française en Allemagne occupée : directeur des services de sécurité du Grand Berlin, inspecteur des services administratifs du gouvernement militaire français du land de Rhénanie-Palatinat. Délégué de la haute commission alliée du district de Koblenz (Coblence), il résida dans l’Eifel. Dans cette dernière résidence, il entretenait des relations mondaines avec certains de ses administrés, notamment, ainsi qu’il l’a pu écrire lui-même dans Tramontane (n° 383, 1955), une revue culturelle perpignanaise, avec un châtelain campagnard. Il recycla les connaissances sur les symboles qu’il avait acquises à Err (1935) auprès de l’ethnographe catalan Batista i Roca en manifestant un vif intérêt pour les Christs gothiques rhénans. Dans un article surprenant Tramontane, 378, Perpignan, 1955), il montra son intérêt pour la symbolique et le mysticisme franciscains. Ces publications montrent que Pierre Saury sut tirer parti, au plan culturel de son long séjour en Allemagne. La riche bibliographie de langue allemande (livres ou articles de revues scientifiques) qu’il livre dans les notes de bas de page de son second article montre qu’il maîtrisait l’allemand. Mais, ce qui est plus surprenant, ce sont ses références à des titres en anglais, italien et néerlandais. Vers 1957–1958, lors d’un séjour en Roussillon, Pierre Saury eut l’occasion de renouer des relations avec Josep Maria Batista i Roca, avec qui il entretint désormais des relations amicales. Ce dernier, réfugié politique en Angleterre, dès 1939, donnait des cours d’histoire au Trinity College de Cambridge, tout en poursuivant son combat antifranquiste et nationaliste catalan.

Pierre Saury revint en France au début des années 1950. D’après le témoignage de l’un de ses proches, il conserva ses fonctions en Allemagne, jusqu’en 1953-1954 (cette date est confirmée par l’un des épisodes qu’il relata dans la revue Tramontane (op. cit.) en 1955. Toutefois, selon d’autres témoignages, il fut « chargé de mission » au ministère de la France d’Outremer, dont le titulaire fut, entre le 12 juillet 1950 et le 12 août 1951, François Mitterrand. En effet, en fréquentant, lorsqu’il était à Paris, les milieux parlementaires, Pierre Saury fit la connaissance du futur président de la République, sans doute grâce à l’entremise de Georges Dayan. En 1953, lorsque François Mitterrand manifesta son désaccord avec le gouvernement Laniel (dont il démissionna le 19 août 1953) sur les « affaires » d’Afrique du Nord, il chargea Pierre Saury de le représenter personnellement à une réunion du « Comité France-Maghreb », fondé le 8 juin 1953. Pierre Saury fut aussi « chargé de mission » et, peut-être, chef de cabinet de François Mitterrand lorsque celui-ci fut ministre de la Justice (5 février 1956-21 mai 1957). Dans les années 1950, Pierre Saury fut aussi en contact avec le Pradéen Jean Rous, collaborateur de Léon Trotsky à la fin des années 1930. Jean Rous était à l’époque rédacteur à Franc-Tireur et s’intéressait à l’émancipation du Tiers-Monde. Les contacts qu’avait noués Pierre Saury avec François Mitterrand pouvaient également lui permettre de procurer à son « compatriote » catalan Jean Rous d’utiles informations.

En 1959, l’instauration de la Ve République compromit la carrière politique de François Mitterrand. Jean-Claude Cathala que Pierre Saury avait connu pendant les « années noires » l’aida à trouver un emploi de secrétaire général de la Fédération nationale des promoteurs -constructeurs.

Dans les années 1960, Pierre Saury fit, dans le sillage de François Mitterrand, une nouvelle carrière politique dans la Nièvre. Sa nécrologie, parue dans le « Carnet » du journal Le Monde du 11 décembre 1973, signale que « M. Saury (…) s’occupait particulièrement de la circonscription de M. Mitterrand ». Ainsi Pierre Saury s’intégra à la vie politique et sociale du département de son nouveau « patron » et ami. Contrairement à ce que nous avons pu écrire à la suite de Pascale Froment, Pierre Saury ne fut pas le suppléant de François Mitterrand en 1961. Il fut le suppléant de François Mitterrand, réélu député de la Nièvre en mars 1967. Pierre Saury suivit, bien sûr, l’itinéraire politique du futur président de la République : de l’UDSR sous la IVe République au Parti socialiste « rénové » du congrès d’Épinay, en passant, dans les années 1960, par la Convention des institutions républicaines dont il s’occupa pendant plusieurs années des publications. Il fut administrateur du Journal du Centre. Le 8 mars 1970, il fut élu, au premier tour, conseiller général du canton de Châtillon-en-Bazois (Nièvre). Candidat de la CIR, il obtint au premier tour 2911 voix alors que Billoué, « modéré », et Legrain (PCF) recueillaient respectivement 799 et 322 suffrages.

Pierre Saury fonda à Châtillon-en-Bazois un « village d’enfants » qui porte aujourd’hui son nom. Entre-temps, il avait renoué avec René Bousquet qui, également, était devenu l’ami de François Mitterrand.

Pierre Saury mourut subitement d’une hémorragie cérébrale à Nevers, au Centre médico-psycho-pédagogique, pendant une réunion, le 8 décembre 1973 (9 décembre, dit l’avis mortuaire publié dans le « Carnet » du Monde). Dès le lendemain, François Mitterrand et René Bousquet (« l’ami de 30 ans », d’après Le Journal du Centre) étaient sur place pour lui rendre un dernier hommage. Trois jours plus tard, il fut enterré à Publier (Haute-Savoie), le village de sa seconde épouse. L’enterrement rassembla, outre sa famille, René Bousquet, François Mitterrand Jean-Claude Cathala, et des proches du premier secrétaire du PS, Charles Hernu et Georges Dayan*. Le futur président de la république prononça quelques paroles à la place de René Bousquet qui refusa : « Pierre Saury était un homme fidèle à son idéal et fidèle à ses amitiés … ». Il est vrai que Pierre Saury mourait socialiste : il était un adhérent en vue du nouveau Parti socialiste, lointain successeur de la vieille SFIO des années 1930 dans les rangs de laquelle il avait milité dans sa jeunesse. Peu avant de mourir, il avait été désigné pour être le candidat du PS dans la Nièvre aux élections sénatoriales de 1974. Ce siège de sénateur aurait pu être le couronnement d’une brillante (mais tortueuse) carrière. En 1973, François Mitterrand « oubliait » de mentionner, dans son hommage posthume, l’épisode des années 1940-1944, tout comme Le Monde qui faisait commencer cette carrière dans les années 1950.

Pierre Saury avait épousé Anna Aspero à Serdinya le 18 août 1928. Un fils unique, Robert, naquit de cette union en 1929. Après avoir fait des études de médecine, il fit une carrière de médecin légiste à Béziers (Hérault). Sa femme ne le suivit pas lorsqu’il intégra la police nationale en Seine-Maritime. Elle demeura institutrice dans les Pyrénées-Orientales. Elle mourut à Prades, des suites d’un accident d’automobile, le 5 novembre 1980. Le jugement du divorce entre Pierre Saury et Anna Aspero fut prononcé le 19 février 1953. Pierre Saury put alors épouser en secondes noces Paule Léger, de Publier, avec qui il avait eu une liaison dès 1944.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article23934, notice SAURY Pierre, Germain par André Balent, version mise en ligne le 17 décembre 2008, dernière modification le 22 avril 2022.

Par André Balent

Pierre Saury à la mairie de Nevers en 1973
Pierre Saury à la mairie de Nevers en 1973
À gauche Pierre Saury, lors d’un jumelage avec une ville allemande (La Montagne).
Elections législatives de mars 1967 dans la Nièvre.

SOURCES : André Balent, « Dans le sillage de René Bousquet et François Mitterrand : la carrière de Pierre Saury (1906-1973) », Bulletin de la Société agricole scientifique et littéraire des Pyrénées-Orientales, CV, Perpignan, 1997, p. 217-272 [On trouvera à la suite de cet article, et dans les notes infrapaginales, l’ensemble des sources écrites et orales]. — André Balent, « Frontière, contrebande, espionnage et politique : un notable cerdan de la première moitié du XXe siècle : Barthélémy Lledos (1884-1951) », Études Roussillonnaises, XIV, Canet, 1996, p. 129-150. — André Balent, « Uns episodis desconeguts de la vida de J.-M. Batista i Roca : la seva estada a Er (Cerdanya) del desembre de 1934 al març de 1936 », Muntanya, 812, Barcelone, 1997, p. 137-143. — André Balent, « Pierre Saury (1906-1973). Un Catalan collaborateur de René Bousquet puis de François Mitterrand » in Ramon Gual, Jean Larrieu, « Vichy, l’occupation nazie et la Résistance catalane », II B, revue Terra Nostra, n° 93-94-95-96, Prades, 1998, p. 1073-1078. — Pascale Froment, René Bousquet, Stock, 1994. — État civil.

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