FRASCH Jean

Par Françoise Olivier-Utard

Né le 4 novembre 1911 à Strasbourg (Basse-Alsace, Alsace-Lorraine), mort le 20 novembre 1968 à Strasbourg (Bas-Rhin) ; ouvrier du bâtiment ; syndicaliste et militant communiste du Bas-Rhin ; volontaire des Brigades internationales.

Jean Frasch était un enfant de la Krutenau, quartier très populaire de Strasbourg. Son père, Joseph Frasch, était un ouvrier du bâtiment et un militant socialiste qui avait participé à la création de la coopérative de consommation ouvrière, la Coopé. Protestant d’origine, il était devenu incroyant et demanda à être incinéré. Sa mère mourut jeune, en 1927. Jean Frasch avait deux frères ; l’un d’entre eux, incorporé de force dans l’armée allemande, fut porté disparu en Pologne pendant la Seconde Guerre mondiale. La famille habitait rue de la Krutenau, en plein cœur du quartier animé.

Jean Frasch fit son apprentissage d’ouvrier du bâtiment dans l’entreprise Urban, qui employait son père à Neudorf, et il se syndiqua à la CGTU. Comme beaucoup de ses camarades de quartier, il avait adhéré aux Jeunesses communistes. Il décida de s’engager dans les Brigades internationales. Le regroupement des volontaires s’effectua à Strasbourg au début du mois de novembre 1936. Deux cents jeunes gens, parmi lesquels beaucoup d’Allemands fuyant le régime nazi, furent incorporés dans le Bataillon Thaelmann, dans la XI° brigade. La proximité de la langue allemande et du dialecte alsacien explique cette incorporation. Mais de ce fait, les Alsaciens furent assimilés aux antifascistes allemands et ne furent pas comptabilisés dans l’histoire des volontaires français. Les combats du 23 novembre autour de la cité universitaire de Madrid furent éprouvants, ainsi que ceux de janvier 1937. Il ne restait plus que 200 hommes du bataillon Thaelmann, qui fut remanié et rebaptisé Wiener, du nom du poète. En avril 1938 Jean Frasch fut grièvement blessé d’une balle sous le cœur, devant Guadalajara. Il rentra en France dans les convois d’Espagnols qui tentaient de passer la frontière. Il fut décoré de la médaille des Volontaires.

Appelé sous les drapeaux à la fin de 1938, Jean Frasch fut démobilisé puis remobilisé en 1939. Fait prisonnier par les Allemands au Col du Hantz dans les Vosges, il fut dirigé sur une école de Haguenau (Bas-Rhin) transformée en prison, et y fut maintenu jusqu’en octobre 1940 car il était répertorié comme syndicaliste. Il fut expulsé de Strasbourg par les nazis aux alentours de Noël 1940, dans un groupe des 200 « indésirables ». Il travailla pendant un an dans le bâtiment à Lourdes (Hautes-Pyrénées), jusqu’au jour où il fut averti par un résistant de la préfecture qu’il allait être arrêté et qu’il lui fallait se cacher. Il rejoignit alors Lannemezan, et entra dans la Résistance. À partir de 1943, la Gestapo le rechercha vainement à Strasbourg et à Tarbes. À la Libération, il rallia les FFI en août 1944. Il fut blessé dans la bataille de la poche de Colmar en février 1945. On l’hospitalisa à Bordeaux, et son retour à Strasbourg ne fut possible qu’en avril 1946.

Jean Frasch retrouva son emploi chez Urban et reprit sa vie de militant de la cellule de la Krutenau, Il épousa le 8 mars 1948 Éliane Schalck, ouvrière à la chocolaterie Suchard et membre du Parti communiste depuis l’avant-guerre, à la suite de son frère aîné, ouvrier chez de Wendel en Moselle. La cellule, qui avait une très forte identité populaire de quartier, comptait alors entre cinquante et soixante-dix membres. Les militants, hommes et femmes, se croisaient tous les jours au café « Le Bas-Rhin ». Le dimanche, à Salm, dans la vallée de la Bruche, le couple fréquentait le chalet où se retrouvaient des communistes de toutes origines sociales, parmi lesquels Louis Fruhling*, professeur à la faculté de médecine de Strasbourg. La mixité sociale était vécue comme une conquête des militants ouvriers et resta un souvenir marquant chez les Frasch. L’engagement syndical de Frasch le poussa à participer activement à la création, en plein cœur de son quartier, d’une maison de retraite financée par la Caisse de retraite des ouvriers du bâtiment, mais il n’en vit pas l’inauguration, car il mourut subitement, foudroyé par une crise cardiaque, à vélo, sur le chemin du travail.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article24002, notice FRASCH Jean par Françoise Olivier-Utard, version mise en ligne le 27 décembre 2008, dernière modification le 16 octobre 2019.

Par Françoise Olivier-Utard

SOURCES : Épopée d’Espagne, Brigades internationales, 1936-1939, Amicale des Anciens volontaires français en Espagne républicaine. — Entretien avec Éliane Frasch, le 8 février 2006.

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