LACARRA Jean

Par Bernard Masséra

Né le 23 juillet 1937 à Saint-Jean-de-Luz (Pyrénées-Atlantiques) ; ouvrier joaillier ; militant jociste, militant CFDT, animateur de la section des adhérents isolés du syndicat des travailleurs de la métallurgie de Paris (STRAMP-CFDT).

Fils de François Lacarra, peintre en bâtiment et de Marie-Jeanne Colombet, mère au foyer travaillant occasionnellement dans une usine de conserverie de poissons, Jean Lacarra était le cinquième enfant d’une fratrie de trois garçons et trois filles. Ses parents, comme beaucoup dans la région et à l’époque, étaient des catholiques pratiquants.
Du cours préparatoire à la troisième, il suivit sa scolarité dans une école catholique où il obtint le BEPC en juin 1952. Il entra en apprentissage de bijouterie chez un artisan de Saint-Jean-de-Luz le 1er octobre de la même année. Il devint « premier apprenti » puis, dans la même entreprise, « premier ouvrier » après l’obtention de son certificat de fin d’apprentissage en 1956.
Assez vite après son entrée en apprentissage, il adhéra à la JOC et fit partie de la fédération de Bayonne. En août 1957, Jean Lacarra participa au premier rassemblement mondial de la JOC à Rome. Au retour, la fédération JOC de Bayonne accueillit, pendant quelque temps, de jeunes africain(e)s réparti(e)s dans diverses familles.
Appelé sous les drapeaux en mars 1959, Jean Lacarra fit un service militaire de vingt-sept mois. Incorporé à Bar-le-Duc (Meuse), au centre d’instruction interrégional du service de santé des armées (CIISS), il fut envoyé au bout de deux mois à Toul (Meurthe-et-Moselle) pour une formation d’infirmier avant de revenir à Bar-le-Duc. En juin 1960, il partit en Algérie, à Djidjelli (Jijel depuis l’autonomie), dans le Constantinois, comme infirmier. Les populations locales l’appelèrent communément "caporal-chef toubib".
Le 21 avril 1961, Jean Lacarra fut confronté au putsch des généraux dit "putsch d’Alger", tentative de coup d’Etat, fomenté par une partie des militaires de carrière de l’armée française en Algérie, conduite par quatre généraux cinq étoiles : Maurice Challe, Edmond Jouhaud, Raoul Salan et André Zeller en réaction à la politique choisie par le président de la République, Charles de Gaulle et son gouvernement, qu’ils considéraient comme une politique d’abandon de l’Algérie française.
Avec d’autres militaires, dont un appelé membre du Parti communiste français, Jean Laccara essaya d’informer les appelés de son camp sur les enjeux de ce qui se déroulait sous leurs yeux. Cet événement le marqua profondément et fut déterminant pour sa vie militante.
Pendant toute cette période algérienne, Jean Lacarra eut la douloureuse mission de mettre en bière très exactement cent militaires victimes de la guerre.
Libéré des obligations militaires, il retrouva son travail à la bijouterie en juillet 1961. Prétextant qu’il avait perdu la main, son employeur le reprit avec un salaire diminué de moitié par rapport à celui qu’il avait avant de partir à l’armée.
Ne voyant aucun avenir professionnel dans son entreprise comme dans la région, Jean Lacarra décida de « monter » à Paris en octobre 1962. Il trouva un emploi de joaillier chez Boucheron où il resta jusqu’à sa retraite en 1996. Il n’y avait ni syndicat ni représentation du personnel dans cette entreprise, et si les évènements de mai 68 furent l’occasion de discussions parmi le personnel de Boucheron, il ne s’y passa rien de marquant pour autant.
Instruit par la JOC de l’importance des syndicats et de l’action collective, et au vu de ses conditions de travail, Jean Lacarra décida d’adhérer à la CFDT en juin 1974. Il rejoignit le syndicat des travailleurs de la métallurgie de Paris (STRAMP-CFDT), membre de l’Union parisienne des syndicats de la métallurgie (UPSM-CFDT) qui avait accueilli en son sein un syndicat de la bijouterie, joaillerie, orfèvrerie (BJO) avant la transformation des syndicats professionnels de la métallurgie parisienne en syndicats territoriaux.
Créé en 1907, le "syndicat de la BJO" avait été le plus ancien syndicat de l’UPSM. Après la mise en sommeil puis la dissolution de ce syndicat et le rattachement des sections syndicales de la BJO aux syndicats généraux de la métallurgie CFDT, une activité de la branche professionnelle fut néanmoins maintenue. Jean Lacarra s’y impliqua et rejoignit les militants des autres sections de la BJO parisienne tels Francois Batt, de la société Arthus Bertrand et Elie Bobroff de Cartier. Il participa également à la vie de la branche nationale BJO, animée par Marcel Simonin de la Fédération générale de la Métallurgie (FGM-CFDT). Il y retrouva des militants venant de Strasbourg, Saumur et Annecy. Devant les autres branches professionnelles de la métallurgie, Jean Laccara témoignait des conditions de travail et des spécificités de sa branche. Il s’impliqua dans les négociations paritaires de la BJO qui faisait l’objet d’une convention collective nationale étendue.
En 1982, les lois Auroux rendirent le dialogue plus facile dans l’entreprise. Jean Lacarra décida de se présenter aux élections de délégué du personnel. Sur les conseils de son syndicat, le STRAMP, qui avait l’expérience des problèmes auxquels étaient confrontés les syndicalistes délégués isolés, Jean Lacarra se présenta sans étiquette syndicale et fut élu.
Souhaitant néanmoins avoir un engagement dans son organisation, Jean Lacarra participa à la création d’une section syndicale regroupant, au sein du STRAMP, les adhérents isolés de la métallurgie de Paris.
En 1984 il participa à la mise en place d’une permanence de renseignements et de soutiens aux travailleurs isolés des petites entreprises de la métallurgie parisienne. Il anima fidèlement et très régulièrement cette permanence avec Daniel Sérus et le soutien de François Bon, secrétaire général du Stramp.
L’arrêt de sa vie professionnelle en 1996, ne mit pas fin à l’action militante de Jean Lacarra. Il rejoignit la section syndicale des retraités du STRAMP et continua à tenir les permanences pour les salariés isolés de la métallurgie parisienne jusqu’en 2004.
Membre de l’Action catholique ouvrière (ACO), Jean Lacarra participa au Comité régional de l’ACO en Ile de France, contribuant régulièrement à l’éditorial d’une feuille d’information régionale. Soucieux d’éveiller de jeunes militants, il s’engagea également comme accompagnateur fédéral de la JOC du secteur Paris Nord de 1996 à 2018.
Attentif à la vie de son quartier, la Goutte d’Or, (Paris XVIIIe.), Jean Lacarra s’impliqua comme bénévole dans diverses manifestations associatives dont la "Fête de la Goutte d’or."
Jean Lacarra se maria avec Marie-André Poupart, employée au ministère de l’Agriculture, comme lui ancienne jociste. Entre 1964 et 1972 le couple eut un garçon, décédé à la naissance, et trois filles

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article240487, notice LACARRA Jean par Bernard Masséra, version mise en ligne le 19 mai 2021, dernière modification le 16 mai 2021.

Par Bernard Masséra

SOURCES : Arch. STRAMP. — Arch. UPSM CFDT. — Entretiens avec Jean Lacarra en février et mars 2012, janvier 2021.

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