ROUX Albert [Quatrième Internationale]

Par Jean-Paul Salles

Né le 7 novembre 1921 et mort le 31 mai 2002 à Paris, militant de la Jeunesses socialistes à seize ans ; après la guerre, militant du PCI et du PSU, de la Quatrième Internationale (PCI, LC/LCR) ; militant anticolonialiste, signataire du Manifeste des 121, il fit partie des Pieds rouges, expulsé d’Algérie après 1965 ; employé au Crédit Agricole, militant syndical.

Albert Roux était né à Hermonville (Marne), où son père Alphonse Roux, inspecteur de police, était en poste. Son père et sa mère Magdeleine Malirat étaient originaires du Midi de la France. Albert Roux était l’aîné de trois enfants. Il adhéra aux Jeunesses socialistes (JS) en 1936, à l’âge de 16 ans. Après la défaite de juin 1940 et l’Exode, il revint à Paris où il commença des études de Droit qu’il ne termina pas. Dans l’obligation de gagner sa vie, il passa le concours de rédacteur de la Caisse du Crédit Agricole où il fut embauché. Contraint de faire le Service du travail obligatoire (STO), son statut assimilé aux fonctionnaires lui permit de rester en région parisienne. Ayant « déserté » dans le désordre du débarquement et des combats de la Libération, il fut réintégré au Crédit Agricole. Et il adhéra de nouveau aux JS, une organisation dans laquelle, surtout en région parisienne, la gauche trotskyste était bien implantée. Mobilisés contre « l’union sacrée », ils commençaient à militer contre les guerres coloniales. En juin 1947, la direction de la SFIO décida de dissoudre les jeunesses socialistes et leur organe Le Drapeau rouge, accusés d’être gagnés au trotskysme.

Avec ses camarades de même sensibilité, parmi lesquels André Essel, il rejoignit le Parti communiste internationaliste (PCI), section française de la IVe Internationale, à laquelle il est resté fidèle jusqu’à ses derniers jours. À son huitième congrès (juillet 1952), le PCI se divisa entre les partisans de l’entrisme dans les organisations de gauche, en particulier le PCF en France, et ceux qui refusaient cette orientation. Ces derniers, dont les dirigeants principaux étaient Pierre Lambert et Marcel Bleibtreu, furent majoritaires. Albert Roux resta militant du PCI majoritaire qui conserva le journal du parti, La Vérité. Les minoritaires, dont Pierre Frank était le militant le plus connu, étaient regroupés dans un PCI minoritaire, publiant La Vérité des Travailleurs. Cependant, des divergences et des tensions se firent jour dans le PCI majoritaire, aboutissant à l’exclusion d’une dizaine de militants, parmi lesquels Marcel Bleibtreu, Michel Lequenne et Albert Roux. Ces militants exclus constituèrent un Groupe Bolchevik Léniniste (GBL) qui fut une des composantes de la Nouvelle Gauche à l’automne 1956. Très actif dans le Mouvement des jeunes contre l’envoi du contingent en Algérie, Albert Roux adhéra à l’Union de la gauche socialiste (UGS) puis au PSU dont l’UGS fut une de ses trois composantes à sa création en 1960. Parallèlement, en 1961 Albert Roux adhérait au PCI minoritaire, un parti très engagé dans le soutien au FLN algérien. Il donna sa signature au Manifeste des 121 (6 septembre 1960) pour le droit à l’insoumission pour les jeunes appelés contraints de faire leur service militaire en Algérie. Très actif dans le soutien aux prisonniers algériens incarcérés en métropole, il sortit indemne du plastiquage de son appartement par l’OAS. Une fois la Guerre d’Algérie terminée, il obtint du Crédit Agricole un détachement de coopération en Algérie. Passionné par la réforme agraire en cours en Algérie, il tenta de mettre ses compétences au service du nouvel État algérien. Après une période d’euphorie sous la direction de Ben Bella, la situation se dégrada très vite pour ceux qu’on allait appeler les Pieds Rouges. Une fois au pouvoir après son coup d’État, le Colonel Boumédienne prit des mesures très sévères contre Albert Roux, qui animait une cellule clandestine de la IV internationale à Alger. Un des premiers à être arrêté, il fut durement torturé. Une campagne menée en France par des intellectuels (Nathalie Sarraute, Michel Leiris etc…) permit leur libération et leur rapatriement en France.

Ayant repris son poste au Crédit Agricole, Albert Roux milita activement dans son syndicat CGT. Comme beaucoup, il fut surpris et émerveillé par le mouvement de Mai 68. Une nouvelle génération allait prendre la relève, pensa-t-il. A la LCR, il était avec son épouse Marie-Louise (professeur d’allemand, syndicaliste) à la cellule de Creil-Chantilly. L’Oise était alors le seul département où la Fédération de l’Education Nationale était dirigée par la tendance « révolutionnaire », l’Ecole Emancipée. Il fut candidat à l’élection législative de 1978 dans la 4e circonscription de l’Oise. Il participa aussi au travail antimilitariste. Ainsi il fut le référent de Pierre Vandevoorde par exemple, qui anima un comité de soldats au 58ème RCT de Compiègne en 1978-1979.

Retiré à partir de 1981 dans la Provence de ses racines, sans s’éloigner de la LCR, il participa aux batailles électorales et s’investit dans la politique associative locale. Atteint par un premier puis un second cancer, gravement handicapé, immobilisé, il parvint malgré tout à se servir d’un ordinateur, dans l’intention de rédiger ses Mémoires. Mais, malgré son transfert dans un hôpital parisien, un troisième cancer vint à bout de ses forces. On était au printemps 2002, et il eut la satisfaction d’avoir voté contre Jean-Marie Le Pen par procuration. Militant jusque dans la mort, il avait légué son corps à la science.

Albert Roux fut marié cinq fois. Tout d’abord à Pierrette Lasson le 20 novembre 1943 à Paris (XVe arr.) avec qui il eut deux filles, Françoise et Elisabeth. Il se maria ensuite à Léa Orbach le 31 juillet 1954 (divorcé le 7 novembre 1958), militante et ancienne fut la compagne de Roland Vacher. De cette union, naquit sa troisième fille Martine. Le 13 juin 1959 il se maria à Lydia Ilin-Hardinsky (divorcé le 21 mai 1964) et en naquit un fils, Ivan. Il fut ensuite marié à Marie-Louise Tristam le 27 février 1965 à Alger (divorcé le 13 décembre 1983), union dont naquit sa dernière fille, Hélène. Marie-Louise Tristam, professeur d’allemand, traductrice des mémoires du vétéran trotskiste Oskar Hippe et notre drapeau est rouge (La Brèche), militante de la tendance École émancipée de l’Oise. Enfin, à 63 ans, il épousa Eugénie Ilin-Hardinsky le 14 avril 1984 à Paris (XVIIe arr.)

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article240669, notice ROUX Albert [Quatrième Internationale] par Jean-Paul Salles, version mise en ligne le 31 mai 2021, dernière modification le 22 novembre 2023.

Par Jean-Paul Salles

SOURCES : Michel Lequenne, « Les Nôtres. Albert Roux (1921-2002) », Rouge hebdomadaire, 13 juin 2002. — Témoignage écrit de Pierre Vandevoorde. — Chronologie du mouvement trotskyste en France (1928-2009) par Christian Beuvain et Jean-Paul Salles. — État-civil et notes d’Ivan Roux (novembre 2023).

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