Par Denis Denisov
Né en 1893 à Sébastopol (Empire russe, de nos jours objet de litige frontalier entre la Russie et l’Ukraine, de facto sous le contrôle de la Russie depuis 2014) ; militant socialiste, puis bolchévique, immigré politique à Paris à partir de 1908 ; combattant sur le Front de l’Ouest de la Première Guerre mondiale, légionnaire de la légion étrangère, participant à la bataille de Verdun (1916) ; agitateur et propagandiste à Sébastopol sous l’occupation allemande à partir de 1918, puis sous l’intervention française.
Tailleur de profession, Alexandr Vapelnick commença à militer dans un groupe de jeunesse socialiste à Sébastopol appelé « La Vague du Sud » (« Youjnaya volna ») en 1907, puis vint en émigration à Paris à partir de 1908. Selon Victor Balakhonov (journaliste criméen, à Théodosie), Vapelnick s’engagea au début de la Première Guerre mondiale dans la légion étrangère sous l’influence du sentiment patriotique dans les milieux socialistes russes de Paris. On peut constater qu’un certain « légionnaire de 1er classe Vapelnick » du « 1er étranger » fut décoré de la médaille russe de Saint-Georges de 3e classe selon le Journal officiel de la République française du 13 avril 1915. Il fut gravement blessé à la jambe (d’où son surnom « Boiteux ») à la bataille de Verdun (1916) et, selon Balakhonov, décoré de l’ordre de la Légion d’honneur (c’était probablement la médaille militaire, « Légion d’honneur du sous-officier », car le nom de Vapelnick est absent de la base de données Léonore). Après sa blessure, il travailla probablement pour la maison de couture de luxe Jenny dans les Galeries Lafayette et participa à ce titre au mouvement de grève en 1917 (version de Balakhonov).
Il fut rapatrié en Russie en 1917 ou en 1918. Il participa activement au comité clandestin des bolchéviques à Sébastopol dès le début de l’occupation allemande (1er mai 1918). Il s’occupait de propagande et d’agitation parmi les soldats et marins allemands, puisqu’il maîtrisait assez bien l’allemand. Selon Balakhonov, il s’occupa du café situé à l’adresse 17, rue Yekatérininskaya, ouvert par les bolchéviques pour assurer un lieu légal pour les rendez-vous avec leurs sympathisants parmi les soldats et marins allemands. Dès le début de l’intervention de l’Entente (23 novembre 1918), il participa au travail du Collège étranger basé à Odessa. Sa mère assura une « planque » pour les clandestins de Sébastopol au cours de la même période.
Vapelnick joua de son statut de héros de guerre sur le front de l’Ouest pour établir des contacts avec les soldats et marins français. Il tenait la plupart des discussions au café de la rue Yekatérininskaya.
En janvier 1919, après la découverte d’une cache d’armes des bolchéviques faite par le service de contre-espionnage des Blancs, l’arrestation d’un de ses camarades et les fouilles dans l’appartement de sa mère (pourtant sans résultat), Vapelnick quitta Sébastopol et s’installa à Eupatoria (Nord-Ouest de la Crimée) pour à peu près un mois.
Il partit pour Odessa à la fin de mois de février ou au début de mois de mars 1919, ayant peur d’une arrestation. Dans la nuit du 7 au 8 mars il fut arrêté dans le jardin quant il sortait du théâtre (ou, plus probablement, de l’Opéra) d’Odessa par le service de contre-espionnage des Blancs et fusillé le 8 mars 1919.
Par Denis Denisov
SOURCES : KRESTYANNIKOV, Valeriy, « Vapel’nik, Alexandr Ilyitch », APOCHANSKAYA, Maya (dir.), Sevastopol’ : Èntsiklopeditcheskiy sprevotchnik [Sébastopol : répertoire encyclopédique], Sébastopol, Natsional’nyy mousey gueroitcheskoy oborony i osvobojdeniya Sevastopolya, pp. 147–148. — BALAKHONOV, Viktor, Kavaler ordena potchotnogo léguiona. Dokumental’naya povest’ [Chevalier de l’ordre de la Légion d’honneur. Roman documentaire], Simféropol, Krym, 1968, 336 p. — 13.04.1915. “Concession de décorations russes à des militaires ayant été cités à l’ordre de l’armée”, Journal officiel de la République française. Lois et décrets du 13 avril 1915, pp. 2171-2174. — Polyakov R., Vospominaniya « Podpolye v Sevastopole v 1918–1919 godou » [Mémoires « Les clandestins à Sébastopol en 1918–1919 »], Rossiiskii gosudarstvennyi arkhiv sotsial’nopoliticheskoi istorii [Archives d’État de l’histoire sociale et politique de Russie] (RGASPI), f. 70, op. 3, d. 499, pp. 1-5. — [Lettre du frère de Vapelnick à André Marty, 24 juin 1933], Archives départementales de la Seine-Saint-Denis , AM 281J B1 M1A B5.40A.