LHUILLIER René, Félicien [écrit parfois L’HUILLIER]

Par Louis Botella, Jean-Michel Brabant, Gilles Morin, Claude Pennetier

Né le 30 juillet 1909 à Crépy-en-Valois (Oise), mort le 4 novembre 1968 à Versailles (Yvelines) ; ouvrier coiffeur ; militant syndicaliste CGT puis FO ; trotskiste ; secrétaire général de l’organisation française du Mouvement européen.

Fils d’un journalier, René Lhuillier aurait adhéré aux Jeunesses communistes dès 1923 et au Parti communiste en 1928. Ouvrier coiffeur à Montreuil-sous-Bois (Seine, Seine-Saint-Denis), il fut appréhendé, le 6 mars 1930, lors d’une manifestation de la CGTU. Le 4 janvier 1931, la police l’interpella alors qu’il distribuait des tracts du syndicat unitaire des ouvriers coiffeurs.

Il milita vraisemblablement dès 1931 à la Ligue communiste qui regroupait les partisans de Trotsky. À partir de novembre 1933, il assura de nombreuses réunions au nom de son organisation. Membre du comité régional parisien, il intervint dans le débat interne de la Ligue, pendant l’été 1934, pour s’opposer à l’adhésion au Parti SFIO. L’assimilant à une capitulation, il lança, avec un petit groupe de camarades, en octobre 1934, le journal le Prolétaire d’avant-garde. Lhuillier se rapprocha de l’Union communiste de Jean Lastérade* et Gaston Davoust* puis, cette tentative ne donnant rien, s’engagea en 1935 dans la création d’un Comité pour la IVe Internationale. Dans une lettre à Trotsky datée du 3 février 1936, Biline* évoqua sans aménité une rencontre avec Lhuillier : « Rien à faire avec des gens-là. Du reste (...) ils doivent être quatre à l’Action léniniste » (Arch. Trotsky).

Lhuillier adhéra finalement au Parti SFIO à l’automne 1935 dans le XVe arrondissement, et rejoignit alors la Gauche révolutionnaire de Marceau Pivert*. En 1938, il anima à Boulogne-Billancourt un noyau de militants favorables à la revue Que faire ?

Durant l’Occupation, Lhuillier collabora à la Charte du Travail, il fut secrétaire général du syndicat unique des coiffeurs de Paris. Membre de la commission provisoire d’organisation de la famille professionnelle de l’hygiène, nommé en janvier 1944. Mais, il avait dans le même temps des activités résistantes. Pendant la guerre, Lhuillier participa avec Pierre Rimbert* et Marcel Fourrier* à l’activité du groupe qui publia Libertés (il deviendra, après la guerre, membre de son comité de rédaction). Il fut arrêté le 11 août 1942 par la Feldgendarmerie pour détention illicite d’armes. À la Libération, il fut exclu par commission de reconstitution du mouvement syndical départementale de la Seine ; la sanction fut annulée par la commission nationale qui considéra ses titres de résistants et confirma ses fonctions à la tête du syndicat des coiffeurs qui prenait sa défense.

À la Libération, René Lhuillier fut membre de la commission d’administration de la Fédération nationale des syndicats CGT d’ouvriers coiffeurs dont il devint président, puis secrétaire en 1946. Lors du dernier congrès de cette fédération sous l’étiquette CGT, tenu les 3 et 4 mars 1947, René Lhuillier présenta le rapport d’activité qui fut approuvé par 100 voix contre 73. Emile Machelon fut alors élu secrétaire général et René Lhuillier devint l’un des quatre adjoints.

Lors du premier congrès de la Fédération nationale des syndicats d’ouvriers coiffeurs de France et d’Outre-mer sous l’étiquette Force Ouvrière eut lieu les 4 et 5 juillet 1948 au Palais de la Mutualité à Paris. René Lhuillier fut réélu secrétaire ; le secrétaire général étant toujours Émile Machelon. Par la suite, René Lhuillier ne fut plus que membre du bureau de cette fédération.

Au cours du congrès constitutif, en avril 1948, de la confédération, un certain nombre d’intervenants à la tribune réclamèrent une autre appellation que celle de Force Ouvrière pour cette confédération naissante. Parmi eux figura René Lhuillier, qui réclama également une indépendance absolue par rapport aux partis politiques. Ce qui lui valut, ainsi qu’à André Lafond, une vive réaction à la tribune de Gérard Ouradou qui rappela à René Lhuillier et à André Lafond que le premier était rémunéré par le Parti socialiste au titre des GSE (Groupes socialistes d’entreprise) et que le second était secrétaire général de ces GSE.

Revenu au Parti socialiste SFIO, militant de la XIe section en 1946, (puis de la XVIIe en 1954), il fut l’un des signataires de la motion de « redressement » (conduite par Guy Mollet) en 1946, et l’un des six rédacteurs de la motion de la Seine pour le congrès de 1946. Un temps permanent au secrétariat administratif de la direction nationale, délégué de la commission nationale de propagande des Groupes socialistes d’entreprises en 1947, il appartint à la commission économique lors de la semaine d’études internationale de Saint-Brieuc (25 juillet-1er août 1948) et fut candidat au comité directeur du parti au congrès de 1948. Il occupa surtout des fonctions dans la fédération de la Seine, comme secrétaire général adjoint chargé de l’organisation en 1948-1949 et fut encore membre de la commission exécutive de la fédération de la Seine en 1949-1952, suppléant en 1954, puis réélu titulaire en 1955-1957. Il perdit ses fonctions lorsque les pivertistes furent écartés de la direction de la fédération de la Seine. Il était d’ailleurs partisan de la motion Depreux au congrès de Toulouse, en juin 1957. Avant cette date, Lhuillier était responsable des relations entre le bureau fédéral et le Mouvement Européen en 1952 et responsable de la commission internationale de la CEF en 1955. En effet, sous l’impulsion de Marceau Pivert dont il restait un proche, il participa au lancement de la revue Socialisme et liberté puis au Mouvement socialiste pour les États-Unis d’Europe.

Surtout, depuis 1948, et jusqu’en 1962 au moins, il était secrétaire général de l’organisation française du Mouvement européen, appointé par l’organisation française, dont il dirigeait le bulletin Courrier européen et la revue Cahiers européens. Il assuma également les fonctions de trésorier du Cercle d’informations internationales fondé en 1956 et du Centre européen d’observation par sondage. Dans cette période où les internationalistes travaillaient à développer les jumelages et échanges entre municipalités de différents pays, il était encore membre du comité directeur du Monde bilingue et collaborait par ailleurs aux Nouvelles européennes et mondiales.

Gravement malade depuis 1965, René Lhuillier mourut d’une crise cardiaque en novembre 1968 et fut inhumé à Tournon-Saint-Martin (Indre). Il s’était marié en 1938.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article24217, notice LHUILLIER René, Félicien [écrit parfois L'HUILLIER] par Louis Botella, Jean-Michel Brabant, Gilles Morin, Claude Pennetier, version mise en ligne le 10 janvier 2009, dernière modification le 20 janvier 2012.

Par Louis Botella, Jean-Michel Brabant, Gilles Morin, Claude Pennetier

SOURCES : Arch. Nat., F/22/2022. — Arch. PPo. carton 45 et 43.368. — Arch. Trotsky, Harvard, documents d’exil, n° 419. — Arch. Jean Maitron. — Arch. CGT, compte rendu de la commission de reconstitution du mouvement syndical du 20 novembre 1945. — Arch. PPo. — Bulletin Intérieur de la SFIO, n° 25, 35, 41, 92. — Archives de l’OURS, correspondance Loir-et-Cher, février 1947.— La Vérité, 24 novembre 1933, 27 avril, 6 et 25 mai 1934. — Le Combat social, juin 1957. — Fédération socialiste de la Seine, circulaire n° 2, 31/1/1949. — Force Ouvrière, hebdomadaire de la de la tendance éponyme puis de la CGT-FO, 13 mars 1947, 22 juillet 1948, 26 octobre 1950. — Comptes rendus des congrès confédéraux de FO de 1948 et de 1950. — J.-P. Joubert, A contre-courant : le pivertisme, Thèse de sciences politiques, Grenoble, 1972. — J. Pluet-Despatin, Les étapes du mouvement trotskyste de 1929 à 1944, Thèse de 3e cycle, Paris, 1975. — S. Ketz, De la naissance du GBL à la crise de la section française de la LCI, Mémoire de Maîtrise, Paris I, 1974. — Bernard Vayssière in "Vers une Europe fédérale ? Les espoirs et les actions au sortir de la Seconde guerre mondiale", Editions P. I. E. Peter Lang, Bruxelles, 2007. — Témoignage d’Yvan Craipeau. — Notes de Louis Bonnel. — État civil.

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