FRISCHMANN Georges, Louis

Par Claude Willard

Né le 5 août 1919 à Paris (XIVe arr.), mort le 21 mai 2006 à Paris (XVe arr.) ; postier ; résistant, membre de « Libération nationale PTT » ; secrétaire général de la Fédération postale CGT (1950-1979), membre de la CE de la CGT (1951-1978) ; membre du comité central (1950-1985) et du bureau politique du PCF (1954-1976) ; membre du Conseil économique (1951-1955) ; député européen (1979-1984).

Le père de Georges Frischmann, Georges Benjamin Frischmann (1882-1920), peintre en bâtiment, d’ascendance alsacienne, fut gazé durant la guerre et mourut quand son fils avait un peu plus d’un an. Pupille de la nation, il fut placé par sa mère, Germaine Favry, chez une vieille femme et fit à Gentilly ses études primaires. À l’issue d’études primaires supérieures dans le XVe arr. où il se montra un très bon élève il fut reçu en 1935 au brevet d’enseignement primaire supérieur. Avec, déjà, une passion débridée pour la lecture. Il entra alors aux PTT comme auxiliaire au bureau de Paris 15 fut ensuite manipulant au bureau de Paris 7. En janvier 1938, il travaillait à Bordeaux comme surnuméraire et en mai 1938, il était commis au bureau Paris 18

Au lendemain des grèves victorieuses de 1936, le 31 août, Georges Frischmann entra aux PTT comme « manipulant », d’abord auxiliaire, puis stagiaire. Reçu au concours du surnumérariat, il devint, après un stage de formation, commis stagiaire (mai 1938). Il adhéra alors à la CGT et fut titularisé en juillet 1939. En janvier 1939, il demanda à suivre les cours pré-militaires techniques d’observateur météorologiste militaire, précédant son incorporation au service militaire en octobre 1939, ce qui lui fut accordé. Le 17 juillet 1939, il fut nommé commis des PTT au bureau de Paris XVIIIe arr. À la fin d’octobre 1939, il épousa Jeanne Garnier (fille d’un cheminot révoqué après les grèves de 1920), et le couple eut une fille unique, Micheline (née en mai 1940).

Appelé le 17 avril 1940, affecté à l’armée de l’air, Georges Frischmann fut démobilisé en septembre 1942. Le 17 juillet 1941, il fut condamné par le tribunal militaire de la 17e division militaire à trois mois de prison avec sursis pour avoir franchi la ligne de démarcation dans la nuit du 10 au 11 avril 1941. L’autorité militaire ajoutait que depuis son entrée au service, Georges Frischmann avait toujours donné satisfaction à ses chefs de service. Il travailla ensuite au centre postal rue d’Alleray (XVe arr.), où il rencontra deux militants communistes, Louis Colombani et Gabriel Granjean, qui appartenaient à « Libération nationale PTT ». Sous leur direction, Georges Frischmann entra alors dans la Résistance, diffusant la presse clandestine, « piquant » le courrier destiné aux services allemands, participant surtout à la création des Milices patriotiques.

Le 16 août 1944, Georges Frischmann fut un des animateurs du comité de grève des chèques postaux et de Paris XVe arr. ; il combattit sur les barricades dans le XVe arr. La section syndicale du central Paris XVe arr., qui se reconstitua à partir des structures héritées des milices patriotiques, élit à son secrétariat Georges Frischmann.

Georges Frischmann adhéra au PCF en octobre 1944, lors de la réunion constitutive de la section communiste des PTT du XVe arr., avec Henri Gourdeaux*. Période de fort rapide montée des cadres : au début de 1945, il devint secrétaire à la propagande de la section communiste du XVe arr.. Il accomplit son apprentissage syndical sous la houlette d’Emmanuel Fleury*, fut délégué au congrès constitutif de la Fédération CGT des PTT, à Limoges, en septembre 1945. Il joua un rôle très actif dans la dure grève des PTT de novembre-décembre 1945. Cette grève et son activité syndicale valurent à Georges Frischmann deux sanctions et l’empêchèrent de passer inspecteur des PTT.

En juin 1946, il suivit l’École fédérale d’un mois du PCF. Outre ses lectures abondantes et variées, il fréquenta durant près de trois ans les cours du soir de l’Université nouvelle (histoire du mouvement ouvrier, économie politique, philosophie).

En février 1949, Georges Frischmann fut élu au comité et au bureau de la fédération communiste de la Seine, le 12 juin 1949, au bureau de l’UD des syndicats de la région parisienne (UDSRP). Déjà, « la double casquette ». En 1949 et 1950, il fut muté à Herblay, déplacé hors résidence par sanction disciplinaire.

En décembre 1950, le congrès national de la Fédération postale le promut secrétaire général. Détaché des PTT, il devint permanent. Ce qui n’empêcha point l’administration postale de le révoquer en février 1951 (il ne fut amnistié qu’en 1981). Secrétaire général, de décembre 1950 à janvier 1979, il anima les grandes grèves des PTT d’août 1953, de 1968 et 1974. Par ailleurs, malgré la complexité des statuts, il monta au créneau plusieurs fois pour assurer la montée de cadres féminins et jeunes au fil des congrès fédéraux.

De 1951 à 1978, Georges Frischmann siégea à la commission exécutive de la CGT. Entre autres tâches, il suivit de nombreux congrès d’UD. De 1951 à 1955, il représenta la CGT au Conseil économique et social, où il anima le groupe de travail sur le développement du téléphone en France. Avec l’aide notamment de Jean Duret, il y approfondit ses connaissances, qui lui facilitèrent la direction de la section économique du PCF.

À la FSM, de 1954 à 1974, il participa activement au groupe de travail PTT de l’Union internationale des travailleurs de la fonction publique.

Élu membre suppléant du comité central au XIIe congrès du PCF (avril 1950), premier congrès où il fut délégué, Georges Frischmann fut titularisé au XIIIe congrès (juin 1954) ; il suivit plusieurs fédérations, notamment, durant trois ans, celle de l’Yonne. Vingt-deux ans, de 1954 à 1976, il fut membre du BP. Il fut délégué à de nombreux congrès de partis communistes étrangers (Finlande, Grande-Bretagne, Pays-Bas, RDA, Roumanie, Tchécoslovaquie…), et, avec Jean Kanapa et Georges Gosnat, au congrès du parti communiste espagnol tenu secrètement à Prague, en décembre 1959 (avec Dolorès Ibarruri et Santiago Carrillo). De 1954 à 1960, Georges Frischmann fut plus spécialement chargé des problèmes de l’implantation communiste dans la fonction publique (l’enseignement mis à part) ; après 1960, il dirigea la section économique ; le 31 mai 1962, il présenta au comité central un important rapport sur l’essor des luttes revendicatives ; il présida la conférence internationale de Choisy-le-Roi sur le capitalisme monopoliste d’État (mai 1966). En janvier 1971, il conduisit une délégation (avec Jacques Denis*, Philippe Herzog* et Henri Jourdain*) à la conférence organisée par la section économique du PCF des partis communistes des pays capitalistes européens sur le thème : « La lutte de la classe ouvrière des pays capitalistes devant les développements des sociétés multinationales ». Mais – et Henri Jourdain, cheville ouvrière de la section économique en témoigne – Georges Frischmann lâchait volontairement la bride à ses collaborateurs : « Il participe à la plupart des réunions de la SE. Il parle fort peu, n’émet presque jamais d’opinion, pour ne pas gêner la discussion, en engageant la responsabilité du BP ».

Autre trait distinctif de Georges Frischmann, qui en fit un personnage totalement atypique du bureau politique : un véritable gavroche, aux accents faubouriens, le franc-parler, la gouaille.

Comme dirigeant politique et syndical, Georges Frischmann voyagea beaucoup en France et dans le monde ; durant plus de vingt ans, il n’eut pratiquement pas de week-end familial, volant de congrès d’UD en congrès fédéraux du PCF.

Avançant des motivations d’âge, Georges Frischmann demanda à être progressivement déchargé de ses responsabilités : en février 1976, du bureau politique ; en novembre 1978, de la CA de la CGT ; en janvier 1979, du secrétariat général de la Fédération postale. Mais, sur demande instante de la direction du PCF, il fut élu député au Parlement européen (1979-1984), dont il fut un des vice-présidents de la commission des Affaires sociales. À l’Assemblée européenne, outre les revendications ouvrières, il se battit contre l’admission de la Turquie dont il avait pu, lors d’une délégation, mesurer à quel point y étaient bafoués les droits de l’Homme. En 1985, il abandonna sa place au CC du PCF à plus jeune que lui. Il fut également président de branche PTT de l’Union internationale syndicale de la Fonction publique à la Fédération syndicale mondiale

Après son départ à la retraite, Georges Frischmann se consacra surtout à l’histoire. Déjà, en 1967, il avait publié Histoire de la Fédération CGT des PTT, des origines à 1946. Il travailla par la suite à l’Institut CGT d’histoire sociale, écrivit une centaine d’articles historiques pour le mensuel La Fédération des postes et télécommunications, collabora à plusieurs ouvrages collectifs. Passionné par la Commune de Paris, il écrivit la biographie d’Albert Theisz, directeur des postes durant la Commune.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article24437, notice FRISCHMANN Georges, Louis par Claude Willard, version mise en ligne le 5 février 2009, dernière modification le 24 février 2022.

Par Claude Willard

Pendant la grève d’août 1953, conférence nationale des comités d’unité des PTT : 1er rang, [Henri Lafièvre-]24887] (autonome), Frischmann, Sevegrand (FO), X.
2e rang : Faivre (autonome), Mme Gaucherand (autonome), Raynal (Ind), Mlle Le Guilloux (Ind), Flament (CFTC), Courtal (FO).
Délégation CGT du 27 juin 1955 auprès d’Edgar Faure.
De gauche à droite : Georges Dubreuil (tabacs), Marius Bertou (UGFF) Paris), Léon Clair (finances), Léon Rouzaud (UCFE), Henri Lartigue (services publics Santé), Georges Frischmann (PTT).

ŒUVRE : Histoire de la Fédération CGT des origines à 1946, Paris, Éditions sociales, 1967. — Albert Theisz, Paris, Fédération CGT des PTT, 1993.
Contributions à des ouvrages collectifs : La CGT, approches historiques, Paris, CCEO et Institut CGT d’histoire sociale, 1988. — CGT, 1895-1995. Le premier siècle, Paris, Institut CGT d’histoire sociale et VO éditions, 1995. — Un siècle de luttes et de défis en Île-de-France, Paris, VO éditions, 1997.
Articles et études dans La Vie ouvrière, France Nouvelle, Les Cahiers du communisme, Les Cahiers de l’Institut CGT d’histoire sociale, La Fédération des postes et télécommunications.

SOURCES : Fonds Georges Frischmann, Arch. dép. de Seine-Saint-Denis (328 J), inventaire en ligne. — Arch. comité national du PCF. — Henri Jourdain, Comprendre pour accomplir, Éditions sociales, 1982. — Interview de Henri Claude en 1992. — L’Humanité, 23 mai 2006. — Déclaration du bureau confédéral de la CGT, 23 mai 2006. — Bernard Bouche, « Le XIIIe congrès de la Fédération postale CGT (1950) », in E. Bressol, M. Dreyfus, J. Hedde et M. Pigenet (dir.), La CGT dans les années 1950, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2005, pp. 245-254 — Archives de la Fédération PTT-CGT transmises par Cassandre Jouot. — Michel Noblecourt, « Un vétéran resté très orthodoxe », Le Monde, 30 mai 2006. — Supplément au n° 30 du Relais, Institut d’histoire sociale CGT-PTT, juin 2006. — Interview de Georges Frischmann en 1982 et 1997. — Notes de Michel Dreyfus. — État civil de Paris XIVe arr.

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