FRÉSIL Paul

Par Alain Prigent

Né le 24 mai 1926 à Brest (Finistère) ; salarié EDF ; militant jociste des Côtes-du-Nord [Côtes-d’Armor], membre du bureau fédéral de la JOC des Côtes-du-Nord (1947-1949) ; syndicaliste CFTC puis CGT, trésorier adjoint de l’UD-CFTC des Côtes-du-Nord (1949-1951), puis secrétaire de l’UD-CGT des Côtes-du-Nord (1952-1960) ; militant communiste.

Paul Frésil est le fils d’un cheminot originaire de Saint-Malo et d’une ménagère née à Brest. Ses parents, qui se rencontrèrent à Caen en 1919, s’installèrent d’abord dans le Finistère, puis à Saint-Brieuc (Côtes-du-Nord). Paul Frésil fit, comme son frère, ses études primaires à l’école des Frères de l’enseignement catholiques de cette ville. Il entra à la Compagnie Le Bon en mars 1945, où il travailla au service laboratoire électricité. Il adhéra à la CFTC, seul syndicat représenté dans ce service avant la nationalisation de 1946.

Militant de la JOC, il fut élu au bureau fédéral à Saint-Brieuc. Il siégea dans cette instance avec Michel Lagoutte, Jean Gauvin, André Cavan et Michel Allain*. Il milita également au Mouvement populaire des familles (MPF) où il côtoya Pierre Dupoirier, Saintblanca* et Jean Hamon*, militants catholiques qui furent marqués par la personnalité du chanoine Guinard, curé au Légué. Il ne connut l’abbé Jean Cottin, professeur de mathématiques au lycée Notre-Dame à Guingamp, futur prêtre ouvrier, qu’en 1951.

Paul Frésil devint trésorier adjoint de l’Union départementale CFTC à l’issue du congrès des 11 et 12 décembre 1949 qui vit d’importants changements s’opérer dans la direction départementale avec l’arrivée d’un groupe de jeunes ouvriers progressistes liés à la JOC et au MPF. Paul Frésil en fit partie et c’est comme « progressiste » qu’il fut remarqué par le délégué central, Robert Duvivier, au congrès de l’UD-CFTC les 9 et 10 décembre 1950. Mais le fossé entre ce syndicalisme trop lié à la hiérarchie catholique comme au MRP et les aspirations de changements sociaux importants, fut considéré par Paul Frésil comme trop profond pour pouvoir être comblé.

En 1950, il soutint l’appel de Stockholm, participa au mouvement des combattants de la Paix contre l’utilisation de la bombe atomique, et milita contre la guerre en Indochine. S’il resta adhérent à la confédération chrétienne jusqu’en mars 1951 ce fut essentiellement pour pouvoir témoigner en faveur de ses camarades de travail d’EDF Francis Auffret, Pierre Delourme et une militante de l’UFF habitant son quartier, Madeleine Bardelli* dans le cadre de « l’affaire des 12 », mais aussi pour défendre les autres militants responsables pour la plupart de l’UD-CGT et de la fédération communiste des Côtes-du-Nord qui avaient été arrêtés le 11 mai 1950 à l’issue d’une manifestation en gare de Saint-Brieuc contre le passage d’un train en provenance de Brest et transportant des tourelles de canon à destination de Rochefort. Ces militants furent emprisonnés pendant sept mois à la prison de la Santé et Paul Frésil témoigna en leur faveur devant le tribunal militaire lors du procès qui se tint en janvier 1951 et qui vit la relaxe des prévenus.

Paul Frésil quitta la CFTC en mars 1951 et adhéra à la CGT en même temps que d’importants responsables de la JOC et du Mouvement de libération du peuple (MLP) comme les époux Léon (voir Paul Léon* et Jacqueline Poisnel*) et Pierre Dupoirier. Certains autres responsables de la CFTC, comme Jean Le Faucheur*, pourtant proches de cette mouvance, ne se décidèrent pas à franchir le pas. À la CGT, Paul Frésil se vit rapidement confier des responsabilités dans son syndicat et au sein de l’Union départementale, ce qui ne manqua pas d’inquiéter les autorités préfectorales. Membre du syndicat CGT d’EDF, il fut élu au comité d’entreprise mixte à la production (CMP) en 1951, en devint le secrétaire en 1952 et le resta jusqu’en 1962. Pendant cette période il eut à s’occuper du reclassement des cent vingt agents de l’usine à gaz et de la centrale du Légué dont la direction avait décidé le démantèlement.

En janvier 1951, il épousa Gisèle Geslin, ouvrière à Chaffoteaux, militante cégétiste elle aussi issue de la JOC. Leur rencontre se fit dans le cadre du développement des grandes luttes ouvrières dans le bassin de Saint-Brieuc en 1949 et 1950.

L’engagement de Paul Frésil à la CGT fut rapidement mis à l’épreuve lors de l’une des plus dures manifestations de l’histoire ouvrière briochine. Quelques jours après la manifestation parisienne du 28 mai 1952, le vendredi 6 juin au soir, près de 600 manifestants répondant à l’appel de la CGT, du PCF, du MLP, de l’UFF et du Mouvement de la paix se rassemblèrent et défilèrent dans les rues de Saint-Brieuc. La moitié du cortège, essentiellement des paysans et des carriers, était venue en car de tout le département. Paul Frésil dut faire face à un copain d’enfance CRS. Frappé puis arrêté, il fut incarcéré en même temps, entre autres, qu’Auguste Le Coënt*, conseiller général de Saint-Nicolas-du-Pélem, et qu’Étiennette Prigent, épouse d’un adjoint au maire communiste de Saint-Brieuc.

Quelques semaines après ces graves incidents, il fut élu secrétaire de l’Union départementale CGT des Côtes-du-Nord à l’issue du congrès du 30 juin 1952, avec un autre chrétien progressiste, Jean Prual*, futur maire adjoint de Saint-Brieuc. Il signa, avec un certain nombre de militants chrétiens, une adresse à l’évêque du diocèse de Saint-Brieuc le 4 mars 1954 condamnant la prise de position de la hiérarchie catholique à l’égard des prêtres-ouvriers. Chargé de revitaliser l’Union locale CGT de Saint-Brieuc en 1952, il en devint le secrétaire en 1954. Après 1960, son activité militante départementale se réduisit : il fut élu trésorier adjoint en 1959, puis simple membre de la commission administrative de l’UD-CGT des Côtes-du-Nord en 1958 et 1960.

Dans le même temps, ses responsabilités syndicales et d’élu du personnel au sein d’EDF le mobilisèrent jusqu’à la fin des années 1960. Sans être permanent syndical, il fut souvent dégagé de ses responsabilités professionnelles pour assumer son mandat syndical. Pendant la guerre d’Algérie, il participa au comité départemental d’aide aux jeunes agents EDF incorporés. Avec Pierre Delourme, il lança le journal du syndicat CGT EDF La Vie syndicale en 1957 afin de dénoncer les pratiques de la direction en matière de gestion des ressources humaines.

Comme beaucoup de militants, il fut « freiné » dans son déroulement de carrière professionnelle. Devenu cependant technicien de laboratoire, il occupa des fonctions de secrétaire au titre de la CGT du sous-comité mixte des services techniques Électricité et Gaz du centre de Saint-Brieuc. De 1970 jusqu’en 2004, il fut président de la commission « Art et culture » de la caisse d’action sociale EDF, signant un certain nombre d’articles dans la revue La Spirale.

Paul Frésil compléta son engagement syndical par une adhésion au PCF en 1953. Il n’eut jamais de responsabilité majeure dans les instances locales ou départementales du PCF, le courant catholique progressiste étant symbolisé dans l’appareil communiste et dans les institutions locales par Jean Prual*.

Lorsqu’il prit sa retraite en 1981, Paul Frésil aida son épouse à gérer un camping à Trégastel sur la Côte de granit rose. Il représenta l’UD-CGT au centre d’action culturelle de Saint-Brieuc dont il fut membre du bureau et même secrétaire. Il siégea ensuite comme administrateur jusqu’en 2002. En 2008, il assumait toujours la responsabilité de vice-président de CODERPA-Géronto-22 au titre de l’UD-CGT. Il siégeait dans cette instance des personnes âgées avec d’autres militants de l’Union syndicale des retraités CGT des Côtes-d’Armor : Ghislaine Gicquel-Barzic*, Georges Piriou* et Gilbert Le Nabasque*. Il était également membre du conseil d’administration de l’association des amis de Louis Guilloux*, célèbre écrivain briochin.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article24524, notice FRÉSIL Paul par Alain Prigent, version mise en ligne le 12 février 2009, dernière modification le 11 septembre 2013.

Par Alain Prigent

SOURCES : Arch. Dép. Côtes-d’Armor, 1W13, 12W47, 1043W38. — Arch. de l’UD CFDT des Côtes d’Armor, 158J21. — Arch. de l’Evêché de Saint-Brieuc. — Arch. de l’UD-CGT des Côtes d’Armor. — Ouest-Matin, 9 juin 1952. — Une semaine dans les Côtes-du-Nord, supplément de l’Humanité Dimanche. — Entretien en janvier 2008 et note manuscrite en janvier 2009.

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