CARON Françoise (née Françoise BOUNIN)

Par Mauricette Laprie

Née le 23 juillet 1848 à Bordeaux (Gironde) ; ouvrière cigarière ; présidente du syndicat des ouvriers et ouvrières de la Manufacture des tabacs de Bordeaux.

Fille de Jean Bounin, tonnelier, et de Catherine Groleau, Françoise Bounin se maria le 3 septembre 1868 à Bordeaux avec Xavier Léonce Wilfrid Caron, verrier, né à Lhosme (Eure) le 8 décembre 1846. De leur union naquirent à Bordeaux, Louise le 26 juillet 1869, Amélie le 5 décembre 1872 et François le 20 septembre 1874.
Mme Caron, déléguée du syndicat des ouvriers et ouvrières de la Manufacture des tabacs de Bordeaux, participa au congrès des ouvriers des Manufactures de l’Etat tenu à Paris du 25 au 31 décembre 1891, réunissant huit cents personnes, représentant quinze syndicats existants dans les vingt manufactures de tabacs. Elle décrivit les tracasseries de l’administration « un surveillant n’hésitant pas à fouiller dans son panier pour voir si elle avait un livret de syndiquée ». Elle rendit compte du congrès le 7 février 1892, lors d’une réunion présidée par Antoine Jourde, à l’Athénée de Bordeaux, devant trois cents ouvrières de la Manufacture, passant en revue les points adoptés par le congrès : 1. Reconnaissance par l’Administration des syndicats ; 2. Création de crèches, d’écoles maternelles, de réfectoires dans les manufactures ; 3. De la caisse des retraites ; 4. Accidents du travail ; 5. Unification et révision des salaires ; 6. Inventaire ; 7. Hygiène dans les ateliers ; 8. Suppression des préposées femmes.
Le 18 juin 1893, lors d’une réunion à l’Athénée de Bordeaux, devant deux cents participants, dont le principal sujet fut la question des retraites, elle engagea les ouvrières au calme et aux revendications pacifiques « Pas de grève, la lutte par le syndicat et les réclamations par la Fédération, voilà le vrai chemin par lequel aboutiront les revendications ouvrières ».
Lors des congrès de décembre de décembre 1892 et de juin 1894, tenus à la Bourse du travail de Paris de la Fédération nationale des ouvriers et ouvrières des manufactures des tabacs, Mme Caron, sa présidente, y représenta la section de Bordeaux.
Au congrès des ouvriers et ouvrières des tabacs à Paris le 9 juillet 1896, regroupant soixante-quinze délégués, elle s’éleva avec véhémence contre les agissements de l’administration « la direction avait offert une augmentation de salaire si dérisoire que les ouvriers se sont vue dans l’obligation de la refuser ».
Elle anima la grève du 24 au 26 octobre 1899, provoquée par l’arrivée de deux cigarières parisiennes venues pour faire marcher les moulinoirs Grouvel – les ouvrières bordelaises n’ayant obtenu depuis dix-huit mois qu’un rendement insuffisant. Mille deux cents personnes se réunirent devant la direction, place Rodesse, le mardi 24 à 6 h. 1/4, refusant d’entrer dans les ateliers pour prendre le travail. Mme Caron expliqua la situation, et mena la délégation des grévistes reçue par la direction qui refusa d’accepter leurs desiderata, à savoir le départ des ouvrières parisiennes. Il fallut plusieurs délégations auprès de la préfecture et de la direction pour obtenir enfin ce départ. Le travail repris le vendredi 27.
Le 3 juin 1902, les ouvrières cigarières des tabacs de Bordeaux réunies chez M. Chavaroche – épicier rue Belleville – votèrent la grève par 676 voix contre 30, par esprit de solidarité avec « les camarades » de la manufacture de Reuilly et de Paris en grève contre les renvois non motivés d’ouvrières. Mme Caron, présidente du syndicat, ayant à ses côtés Mme Berya vice-présidente, Thérèse Descas secrétaire et Biarnès trésorière, anima les réunions, tenues à l’Athénée, des grévistes – plus de sept cent cinquante ouvrières. Le 4 juin, dix-neuf manufactures sur vingt-et-une en France adhérèrent à la grève. Le 5, Les ouvrières de Tonneins les rejoignirent. Le 10 Juin, les ouvrières cigarières à nouveau réunies chez M. Chavaroche décidèrent la reprise du travail, le Ministre des Finances ayant reconnu le principe du droit à l’ancienneté pour les ouvrières de toutes les manufactures de France.
Médaille d’honneur du Ministère du commerce et de l’industrie (plus de 30 ans de services consécutifs), promotion 1907.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article245485, notice CARON Françoise (née Françoise BOUNIN) par Mauricette Laprie, version mise en ligne le 8 février 2022, dernière modification le 8 février 2022.

Par Mauricette Laprie

SOURCES : Arch. Dép. Gironde 1M646. — Arch. Jacques Faure, ancien secrétaire général de la Fédération FO des Tabacs et Allumettes, reversées au Centre d’histoire sociale des mondes contemporains par sa fille Claudie Faure en mars 2020 (consulté par Louis Botella). — La France de Bordeaux et du Sud-Ouest, 29 décembre 1891, 8 février 1892, 19 juin 1893, 10 juillet 1896, 25 au 27 octobre 1899. — Journal officiel, 20 janvier 1907. — État civil de Bordeaux (Gironde).

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