HUC Michel, Henri

Par Michel Dreyfus

Né le 3 novembre 1944 à Rayssac (Tarn) ; militant jociste du Tarn, syndicaliste Force ouvrière (FO) du Tarn puis des Bouches-du-Rhône ; secrétaire général de la Fédération FO de la Métallurgie (1982-2004).

Notices et portraits des membres du Conseil économique et social, février 1985.

Michel Huc grandit dans une famille de sensibilité catholique et socialiste. Son père cultivait le blé comme métayer tout en travaillant dans une petite mine de fluorine à Saint-Jean-de-Jeaumes. Sa mère s’occupait des cinq enfants. Atteint par la silicose, son père mourut en juin 1957. Ayant déjà perdu un frère quelques mois auparavant, Michel Huc, resté avec sa mère et ses trois sœurs, abandonna l’école à l’âge de treize ans, alors en cinquième.

Après avoir obtenu son certificat d’études primaires avec mention, il fut embauché comme apprenti-ajusteur à la Société d’industrie et de mécanique Puech où, sur la centaine de salariés, la moitié était des apprentis. Chargé de l’entretien des machines il put, à la différence des autres apprentis, circuler dans toute l’usine. Cette mobilité, combinée à ses fonctions de responsable local de la Jeunesse ouvrière chrétienne (JOC), explique sans doute le rôle qu’il joua dans l’animation d’une grève des jeunes salariés de l’usine. Les apprentis revendiquaient le droit de ne pas être affectés à la production les après-midi, de manière à apprendre la fabrication des pièces spécifiques pour l’examen du CAP. Après avoir déployé banderoles et sollicité l’Inspection du travail, la mairie et les syndicats, le patron céda. C’est alors, dans sa troisième et dernière année d’apprentissage, que Michel Huc situa sa « prise de conscience ».

Au retour du service militaire, suite à un conflit avec le fils du patron, Michel Huc quitta l’usine dont, comme adjoint au chef du montage, il était devenu un élément précieux. Il fut embauché au milieu des années 1960 aux usines Rhône-Poulenc de viscose à Saint-Juéry, près d’Albi. Ayant abandonné la JOC après son mariage, la CFTC n’existant pas dans l’usine, il adhéra à FO après avoir été approché par la CGT. C’est dans ce cadre qu’il commença à militer syndicalement, comme collecteur puis délégué du personnel. Devant quitter l’entreprise pour des raisons de santé, il fut embauché en 1967 aux Forges du Saut du Tarn, auprès du bureau des méthodes. Recommandé par les responsables de la Fédération FO du Textile, il fut alors sollicité par Antoine Laval*, secrétaire général de la Fédération FO des Métaux, pour relancer le syndicat de l’usine, dont il devint le secrétaire général. Il fut cependant licencié en mars 1968 pour avoir évoqué devant ses collègues un point abordé en comité d’entreprise : le dépôt de bilan des forges.

Au chômage en Mai 68, il anima le mouvement social à Albi et devint président du comité de grève de la ville. Pour faire face aux charges de famille, et notamment à l’arrivée d’un premier enfant, Michel Huc quitta la région d’Albi pour La Ciotat. Sur la proposition d’Antoine Laval, il se fit recruter aux chantiers navals de La Ciotat le 18 juin 1968, avec l’objectif de relancer le syndicat FO. Il devint délégué du personnel, collecteur puis secrétaire général du syndicat. Technicien au tuyautage, il fut à nouveau affecté dans un bureau de méthode. Dans ce complexe de plusieurs milliers de salariés, FO devint majoritaire et conquit le comité d’entreprise avant d’être devancée, au milieu des années 1970, par une alliance CGT-CFDT. Cette dernière organisation s’était créée à partir de transfuges FO.

Michel Huc se définit à l’époque comme un sympathisant de la SFIO, même s’il ne s’’y engagea jamais formellement. Soutenant Jean Graille, le maire socialiste de La Ciotat élu depuis 1949 par une majorité de troisième force, il s’opposa au tournant du PS vers l’union de la gauche. La défaite de Jean Graille, en 1977, le détourna d’une possible carrière municipale.

Devenu en parallèle responsable départemental de la Fédération des Métaux, Michel Huc milita avec Charles Chiron, syndicaliste FO de la SNIAS. Il participa à sa première négociation nationale en 1973, sous la direction de Paul Malnoë. La même année, Bernard Mourgues devint secrétaire général de la Fédération des Métaux, en remplacement d’Antoine Laval, appelé au bureau confédéral. Sollicité par Bernard Mourgues, Michel Huc fut élu à la commission administrative et au bureau fédéral des Métaux lors du congrès de novembre 1975. Il devint permanent au 1er janvier de l’année suivante et prit la responsabilité du secteur électrique-électronique et de l’organisation.

Bernard Mourgues ayant été élu, en janvier 1982, secrétaire confédéral, Michel Huc le remplaça à la tête des Métaux le 22 octobre 1982, à l’issue du 13e congrès de la Fédération. Il avait déjà pris la relève de son prédécesseur au sein de la commission exécutive confédérale, dont il devait être membre de juin 1982 à janvier 1989, puis de 1992 à 2004. C’est son soutien résolu à Claude Pitous qui lui valut de n’être pas reconduit à la CE suite à la victoire de l’autre candidat à la succession d’André Bergeron*, Marc Blondel. Durant toute la durée de son mandat, Michel Huc se fit le chantre d’une politique conventionnelle parfois vivement contestée au sein même de la Confédération, des négociations sur la « flexibilité » de 1984 à la conclusion d’un accord de branche sur les « 35 heures » en 1998. Dans le cadre d’un colloque consacré au cinquantenaire de la fédération des Métaux, Michel Huc soulignait la capacité des métallurgistes FO à contrebalancer l’échec de la négociation de 1984 par la conclusion d’accords de branche, tout au long des années 1980-90. Il reconnaissait comme légitime la demande de « flexibilité » de ses interlocuteurs patronaux, induite par l’état du marché : « Flexibilité, cela veut dire quoi ? Cela veut dire adaptation de l’organisation et du temps de travail au marché donc aux commandes des entreprises. Je crois qu’en 1984 nous n’avions pas ressenti cette fluctuation comme nous la ressentons maintenant. En 1984, dans l’esprit des gens, c’était encore la possibilité d’un retour de plans de charge sur deux à trois ans, dans les entreprises. Maintenant, quand ceux-ci sont de six mois, tout le monde est content » (FO Métaux, 50 ans de politique conventionnelle dans l’industrie métallurgique, p. 40). En effet le syndicat n’est « pas là pour représenter l’entreprise, mais les salariés de l’entreprise. Les patrons, eux, se chargent de l’intérêt de l’entreprise » (idem, p. 58). Dans cette vision, le syndicat se décharge des orientations de politique économique pour se concentrer sur les contreparties juridiques qu’il peut obtenir par la négociation contractuelle. Dans cette perspective, l’intervention syndicale se situe en aval des décisions économiques, qui sont du ressort des patrons.

Michel Huc s’opposa au rapprochement, impulsé par Marc Blondel, de sa confédération avec la CGT. Suite aux manifestations du 14 novembre 1990 contre la Contribution sociale généralisée (CSG), qui avaient été marquées par la convergence entre des cortèges de FO et de la CGT, il écrivit à M. Blondel : « Ces faits remettent en cause à la fois nos principes et l’unité de l’organisation […] Ils relèvent de la manipulation interne à l’organisation, par ceux qui veulent nous faire perdre ce qui est une de nos valeurs fondamentales : l’indépendance syndicale. Si cette folle aventure devait se poursuivre, nul doute que nous arriverions à une rupture » (cité in Les métallos en leur siècle, p. 198). Marc Blondel s’était rendu devant le Bureau fédéral des Métaux pour assurer que « tant qu’il demeurera secrétaire général, “le problème de la réunification avec la CGT ne se posera pas” » (id). Son « meilleur ennemi » au sein de la Confédération, Alexandre Hébert, secrétaire général de l’UD FO de Loire-Atlantique, anarcho-syndicaliste et franc-maçon, accusait en 1988 ce catholique pratiquant revendiqué de « rouler » pour « la hiérarchie catholique dont l’expression syndicale demeure la CFDT ».

Michel Huc fut membre du bureau de la Fédération internationale des organisations de travailleurs de la Métallurgie et du bureau de la Fédération européenne des Métaux (FEM) de 1983 à 1993. Il fut vice-président de la FEM de juin 1982 à juillet 1995 et il siégea au Conseil économique et social dans le groupe FO. Michel Huc acheva son mandat de secrétaire général de la Fédération des Métaux, lors de son 19e congrès (juin 2004), pour prendre sa retraite.

Il se maria en novembre 1966 à Lescure de l’Albigeois avec Jeanne, Marie Fabries.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article24600, notice HUC Michel, Henri par Michel Dreyfus, version mise en ligne le 17 février 2009, dernière modification le 18 juin 2020.

Par Michel Dreyfus

Notices et portraits des membres du Conseil économique et social, février 1985.

SOURCES : Fédération confédérée Force ouvrière de la métallurgie, Les métallos en leur siècle : les militants de l’efficacité réformiste des premiers syndicats à l’aube de l’an 2000, Paris, Éd. de l’Air, 1996. — FO Métaux, 50 ans de politique conventionnelle dans l’industrie métallurgique. 1948-1998 : histoire et avenir, Actes du colloque organisé par la fédération FO de la Métallurgie, 23 septembre 1998, Paris. — Alexandre Hébert, « La politique de l’autruche ! Maintenir la CGT-FO », L’Anarcho-syndicaliste, 63, novembre/décembre 1988. — Michel Huc, J’y crois dur comme fer : une autre vision du syndicalisme (entretien avec Didier Husson), Paris, La Voûte, 2004.— Etat civil.

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