ESPALIEU Victor, Pierre

Par Madeleine Singer

Né le 10 septembre 1930 à Denain (Nord) ; électricien dans la sidérurgie, permanent syndical ; membre de la commission administrative de l’UD-CFDT du Nord (1966-1970) ; maire adjoint de Denain (1977-1989).

Victor Espalieu était l’unique enfant de Frédéric Espalieu, soudeur dans la sidérurgie, adhérent de la CGT. Ce dernier avait épousé Fernande Colmar, sans profession. Les parents de Victor étaient catholiques, mais seule la mère pratiquait occasionnellement sa religion. Victor Espalieu fréquenta à Denain une école primaire publique, fit sa communion solennelle et passa avec succès le certificat d’études primaires. Il prépara alors en trois ans le CAP (certificat d’aptitude professionnelle) d’électricien en travaillant comme apprenti chez USINOR (Union sidérurgique du Nord de la France), usine sidérurgique qui fabriquait à Denain des produits plats, c’est-à-dire des tôles, et comptait 9000 salariés. Ayant obtenu son CAP en 1946, Victor Espalieu devint dans l’usine ouvrier professionnel de deuxième catégorie, qualification qu’il garda jusqu’à son départ le 31 décembre 1961 ; il avait fait auparavant son service militaire d’octobre 1950 à avril 1952. Le 1er janvier 1962 il fut nommé permanent CFTC pour l’Union d’arrondissement de Valenciennes (Nord) et l’Union Nord métaux qui couvrait le Nord et le Pas-de-Calais : c’était l’une des subdivisions de la Fédération CFTC de la métallurgie. Le 31 janvier 1975 il quitta ce poste et fut recruté comme employé de bureau par l’Assedic de Valenciennes. Il y devint chef de service, puis en 1985 directeur adjoint. Il prit sa retraite en 1991, ayant fait quelques mois supplémentaires à la demande du nouveau directeur qui souhaitait être épaulé pour ses débuts.

Victor Espalieu avait épousé en septembre 1955 Cécile, Marguerite, Georgette Bétrancourt qui était employée de bureau à la Caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) de Douai (Nord). Elle adhérait à la CFTC et était jociste. Elle se consacra à son foyer après son mariage. Ils firent alors tous deux partie de l’ACO (Action catholique ouvrière) où elle demeura sa vie durant tandis que son mari s’en éloigna vers 1992 car les objectifs de ce mouvement ne correspondaient plus aux siens. Elle milita également au Mouvement de libération ouvrière (MLO) dès son arrivée à Denain. Lorsque le MLO disparut en 1969, elle continua à faire partie de sa branche familiale, les Associations populaires familiales (APF) qui prirent en 1976 le titre de Confédération syndicale du cadre de vie (CSCV). Cécile Espalieu s’y trouvait toujours en 2003, la CSCV s’appelant depuis trois ans CLCV (Consommation, logement, cadre de vie). En outre elle adhérait depuis 1979 au Parti socialiste (PS). Le couple eut six enfants ; quatre garçons qui furent cadre à l’Assedic, cadre chez Coca-Cola, cameraman à Fr3 ou intermittent du spectacle ; deux filles : l’une directrice d’école maternelle publique, l’autre directrice adjointe d’une crèche. Le couple vécut sa vie durant à Denain dans une maison en accession à la propriété.

Victor Espalieu avait fait partie des Cœurs vaillants pendant ses cinq années d’école primaire ; il devint jociste quand il entra en apprentissage et le resta jusqu’à son mariage. Il avait en même temps adhéré à la CFTC ; dix ans plus tard il prit la tête de la section syndicale d’Usinor à la suite du départ précipité du secrétaire en place. Peu après, vers 1956, il fut élu membre du comité d’entreprise (CE) et garda ces fonctions jusqu’à son départ de l’usine. Or vu l’étendue de celle-ci, ce n’était pas une sinécure car il disposait seulement d’une décharge de service de 20 heures en qualité de membre du CE. Il animait un bureau syndical de quinze membres où figuraient deux autres membres du CE et huit délégués du personnel (DP) ; ils étaient aidés par 40 à 45 collecteurs de cotisations.

Quand Victor Espalieu exerça la fonction de permanent, son travail fut tout différent. Dans l’arrondissement de Valenciennes, il s’occupait de l’animation de l’interprofessionnel et de certains secteurs, notamment la sidérurgie, la santé, le personnel des organismes sociaux ; en outre il représentait la CFDT dans différentes instances : Sécurité sociale, Assedic. Comme permanent de l’Union Nord métaux, il était particulièrement chargé de la trésorerie et de l’animation du secteur de la sidérurgie.

Ses responsabilités l’amenèrent à militer pendant cette période sur le plan de l’Union départementale (UD) CFDT du Nord. Déjà présent à l’assemblée générale (AG) de l’UD du 31 octobre 1965, il fut élu membre de la commission administrative (CA) de l’UD lors du congrès d’octobre 1966 ; il était le suppléant de Robert Tonnoir*, permanent de Valenciennes, qui détenait l’un des deux sièges impartis à cette Union locale (UL). À ce congrès V. Espalieu était intervenu pour rappeler l’importance de la manifestation régionale du 22 mai 1965 ; il avait déclaré que les hommes du Nord devaient s’exprimer totalement pour se faire entendre du pouvoir. Le gouvernement venait en effet d’obtenir de l’Assemblée nationale le droit de prendre par ordonnances des mesures relatives entre autres à la « modernisation des entreprises ». On redoutait donc une restructuration de la sidérurgie. L’année suivante lors de l’AG de l’UD en octobre 1967, V. Espalieu travailla dans la commission « droits syndicaux sur les lieux de travail ». Il demeura membre de la CA jusqu’au 1er janvier 1971 : à cette date les UD furent intégrées dans les Unions régionales interprofessionnelles (URI) que la CFDT venait de créer et ne subsistèrent plus que comme interlocuteurs du préfet et du conseil général. Mais auparavant lors de l’AG régionale qui, le 19 avril 1970, prépara à Lens (Pas-de-Calais) le congrès confédéral, il avait été le rapporteur du groupe de travail qui étudia le rapport confédéral d’activité.

Quand Victor Espalieu travailla à l’Assedic de Valenciennes, il adhéra au Syndicat CFDT de cet établissement et fut quelque temps élu au CE dans le collège des cadres avant de devenir directeur adjoint. Lors de sa retraite, il fit partie de l’Association des retraités CFDT du Denaisis dont il devint aussitôt le secrétaire. Élu en 1992 conseiller prud’homme, il siégea cinq ans à Valenciennes dans la section « Encadrement » où la CFDT obtenait alors de 55 à 60 % des voix.

Victor Espalieu s’était également préoccupé de la politique. Il avait adhéré au PS en 1971, après le congrès d’Epinay (Seine-Saint-Denis) et fut un moment secrétaire de la section du Parti à Denain ; mais il ne le demeura pas car il était « rocardien ». Il quitta le PS en 2003 car il était en désaccord avec le retour des tendances ainsi qu’avec le nouveau combat des « chefs » qui faisaient des promesses impossibles à tenir. Il avait été le candidat du PS en 1976 lors des élections au conseil général dans le canton de Denain ; c’était un scrutin uninominal à deux tours dont l’élu fut le communiste. À nouveau candidat du PS lors des législatives de 1978, il obtint 22 % des voix au premier tour de ce scrutin également uninominal ; il se désista alors en faveur du candidat du Parti communiste (PC), Gustave Ansart, qui avait obtenu 48 % des voix.

Mais il fut élu au conseil municipal de Denain en 1977 ; il figurait sur la liste PS-PC qui, étant majoritaire, avait obtenu tous les sièges vu le mode de scrutin à cette époque. Numéro trois sur la même liste, il fut réélu en 1983 avec un mode de scrutin différent ; la liste qui arrivait en tête, obtenait d’abord 50 % des sièges, les autres sièges étant répartis à la proportionnelle entre toutes les listes. En 1989 V. Espalieu jugea bon de laisser la place à de plus jeunes ; pendant douze ans il avait été maire adjoint, chargé des travaux.

Victor Espalieu eut à trois reprises la médaille du travail : pour 25 ans, 35 ans et 43 ans de services. En 2004 il était toujours secrétaire de l’Association des retraités CFDT du Denaisis, poursuivant ainsi sa carrière de militant exemplaire dans la mesure où son âge le lui permettait.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article24650, notice ESPALIEU Victor, Pierre par Madeleine Singer, version mise en ligne le 20 février 2009, dernière modification le 17 juin 2009.

Par Madeleine Singer

SOURCES : Comptes rendus des congrès et AG de l’UD-CFTC-CFDT du Nord (1946-1970), Arch. du monde du travail, Roubaix (Nord). — Fiche biographique rédigée par V. Espalieu, décembre 2003. — Lettres de V. Espalieu à M. Singer, 22 décembre 2003, 6 janvier 2004 (Arch. Gilbert Ryon). — État civil de Denain, 10 décembre 2003.

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