GIRARD Louis, Vincent

Par Madeleine Singer

Né le 19 septembre 1921 à Mirebeau (Vienne), mort le 14 février 2016 à Poitiers (Vienne) ; agrégé de philosophie ; syndicaliste CFTC puis CFDT, militant Jeune République, PSU, FGDS puis PS, membre du comité national du Syndicat général de l’éducation nationale (SGEN) de 1955 à 1974, en qualité de secrétaire académique de Poitiers.

Louis Girard était le fils unique de Maurice Girard, artisan-menuisier dans une petite commune de la Vienne, à 28 kilomètres de Poitiers. Celui-ci avait épousé Marie Aguillon. Tous deux étaient chantre et sacristain de la paroisse et, comme la plupart des catholiques de l’époque, très marqués à droite. Après avoir fait ses études primaires à l’école publique de Mirebeau, la commune n’ayant pas d’école religieuse pour les garçons, Louis Girard fut reçu au concours des bourses en 1933 et fréquenta le cours complémentaire de Mirebeau où il obtint en 1937 le brevet élémentaire. Admis également à l’École normale, il n’y entra pas car il y eut à ce sujet un gros conflit avec la partie la plus cléricale de la famille. Il alla donc au collège Saint Stanislas de Poitiers : il suivait quelques cours tout en étant surveillant et passa en 1938 et en 1939 les deux parties du baccalauréat. Nommé instituteur suppléant à Monts-sur-Guesnes (Vienne) à la rentrée de 1939, il obtint à Poitiers en 1942 la licence de philosophie et prépara un certificat de sciences en vue de l’agrégation.
En 1942, avant donc de partir au STO, Louis Girard fit la connaissance d’un jeune étudiant en philosophie qui n’allait pas tarder à être reconnu : Michel Foucault. Pendant quelques mois, il fut son professeur particulier lui faisant notamment découvrir Kant.
Requis au STO (service du travail obligatoire) en août 1943, il fut affecté à l’usine AEG de Nuremberg et arrêté en avril 1944 pour activités anti-allemandes. Il fut interné au camp de concentration de Dachau, puis d’Allach où il fut libéré en avril 1945 par les Américains.

Maître auxiliaire de philosophie à la rentrée de 1945, il fut reçu au CAEC l’année suivante, enseigna tant à Poitiers qu’à Châtellerault. Agrégé en 1952, il fut nommé au lycée Henri IV à Poitiers transféré au lycée Camille Guérin à la fin des années 1960, où il devint en 1969 professeur de khâgne ; il y prit sa retraite en 1982. Dix ans plus tard, il soutint devant la faculté de Poitiers une thèse sur L’argument ontologique chez Saint-Anselme et chez Hegel. Il avait épousé en avril 1947 Jeanne Henry, agrégée des lettres, qui enseignait au lycée de jeunes filles de Poitiers et termina sa carrière en classes préparatoires au lycée Camille Guérin. Ils eurent quatre enfants, trois filles, l’une proviseur, les autres professeurs d’allemand ou d’anglais, un fils polytechnicien, ingénieur-chercheur à l’Énergie atomique.

Louis Girard avait fait du scoutisme au cours complémentaire de Mirebeau et fut pendant deux ans au collège Saint Stanislas un adhérent de base très occasionnel de la JEC. Abonné dès l’âge de quinze ans à Sept, il le fut à Temps présent quand cet hebdomadaire prit en 1937 la relève de Sept dont les Dominicains avaient dû sur ordre suspendre la parution. Il reçut ensuite La Quinzaine qui naquit en 1950, c’est-à-dire trois ans après la fin de Temps présent dont elle avait le même siège social. Quand l’interdiction romaine frappa en mars 1955 La Quinzaine, puis en janvier 1957 Le Bulletin qui lui avait succédé, il reçut alors La Lettre dont l’objectif était, d’après le titre de l’éditorial du premier numéro, d’instaurer « un dialogue de chrétiens hors chrétienté ». Après guerre il fut également lecteur d’Esprit et membre de la Paroisse universitaire.

Louis Girard avait adhéré au SGEN dès 1946, son engagement syndical ayant été, dit-il, préparé par ses lectures. D’origine paysanne, il était alors assez peu sensible au caractère confédéré du SGEN, d’autant plus qu’à Poitiers, on ne trouvait guère d’ouvriers à la CFTC. Mais le SGEN était le seul syndicat possible pour des catholiques qui ne voulaient pas se sentir engagés par le langage laïciste de la FEN. Louis Girard fut secrétaire de son établissement quand il eut passé l’agrégation. Il devint en 1954 membre du bureau académique et, l’année suivante, secrétaire académique, fonction qu’il allait occuper pendant de longues années et qui le fit entrer au comité national où les secrétaires académiques siégeaient ès qualités. Il participa donc à l’élaboration des décisions majeures qui, à cette époque, commandaient la vie du SGEN. Il organisa à Poitiers en 1956 le congrès national où il y eut une ultime confrontation entre le secrétaire général et quelques irréductibles qui contestaient les positions laïques du SGEN. Au cours des débats, Louis Girard apporta au bureau national 85 % des mandats de son académie, l’opposition d’un petit nombre de collègues s’expliquant notamment par « le caractère passionnel et quasi sacré donné dans certains départements comme la Vendée au problème scolaire ». Mais, ajoutait-il, « les positions du bureau national apparaîtront à tout esprit raisonnable comme les positions minima à partir desquelles une action syndicale est possible dans l’Université ».

À ce congrès de Poitiers la guerre d’Algérie avait fait son apparition par une motion dans laquelle les délégués demandaient qu’on restaurât l’autorité de l’État pour parvenir, par la libre expression des suffrages, à une situation plus égalitaire. Louis Girard dès lors se soucia constamment de cette question. Au comité national de décembre 1956, il se préoccupa des nominations d’office en Algérie, estimant que le gouvernement agissait de façon arbitraire, mais aussi « honteuse », en faisant de ces nominations « une sorte de sanction pour les moins bien reçus » : c’étaient en effet les derniers candidats admis au CAPES qui étaient envoyés dans les trois départements algériens. Au comité national de juin 1957, il défendit le droit des collègues d’Algérie à disposer de leurs vacances, alors que ceux-ci ne pouvaient quitter leur résidence que pendant un mois. Mais bien entendu le véritable remède à tous ces « expédients », c’était, disait-il, la fin de la guerre. Aussi le congrès académique de Poitiers vota en 1957 une motion qui réclamait « l’ouverture rapide de négociations préalables en vue d’un cessez-le-feu […] ; la discussion, après le cessez-le-feu, d’un statut de l’Algérie dans lequel des institutions politiques et sociales nouvelles assureraient de façon définitive le respect de l’originalité algérienne, l’égalité de tous les habitants d’Algérie et leur liberté effective ». L’année suivante, la motion de Poitiers reprit cet objectif, mais ajouta que « l’aspiration des peuples autrefois colonisés à la souveraineté politique est la caractéristique du monde moderne et qu’il est vain de vouloir s’y opposer par la force ». Au cours d’un entretien ultérieur, en août 1981, Louis Girard me confia qu’il avait préparé cette motion avec un maître d’internat de Poitiers, Ben Bakki, qui appartenait probablement, dit-il, au Front de libération nationale (FLN). À la tribune du congrès de 1958, Louis Girard put se féliciter de voir les termes essentiels de la motion de Poitiers repris par le projet de résolution presenté par le bureau national ; toutefois le mot « indépendance » ne sera utilisé au plan national que l’année suivante. Comme on lui avait opposé l’état de l’opinion, Louis Girard avait ajouté dans son intervention : « C’est à nous de faire comprendre la nécessité de transformer ce qui a été l’Empire français, de faire prendre conscience de la naissance de réalités collectives indigènes et de leurs aspirations à la liberté ».

Bientôt avec les menaces qui émanaient d’une Algérie où, malgré l’arrivée de De Gaulle au pouvoir, des barricades se dressèrent à Alger le 24 janvier 1960, la préoccupation du SGEN fut de maintenir le front syndical qui s’était formé pour déclencher le 1er février 1960 un arrêt de travail de 11 heures à midi. Le congrès d’avril 1960 appela « à la reprise des contacts entre les centrales syndicales et à la mise en place dans les départements de comités de liaison intersyndicaux en vue d’opposer à une tentative factieuse la grève générale ». Au comité national de mai 1960, Louis Girard fut un des plus véhéments à dénoncer « le décalage entre la prise de conscience des étudiants et des enseignants d’une part, l’apathie des autres milieux d’autre part ». Aussi après le putsch des quatre généraux, le 22 avril 1961, il ne se contenta pas de l’arrêt de travail intersyndical du 24 avril, il s’éleva au comité national de décembre contre l’attitude des dirigeants CFTC qui étaient alors engagés dans la constitution d’un front commun des organisations non communistes : « En refusant le Front syndical sans exclusive », ces dirigeants « ont pris une responsabilité écrasante. Parler de « désengagement » à l’égard de la CGT, traitée par ailleurs de « force d’appoint », c’est à l’heure actuelle faire le jeu du fascisme menaçant ». Il fut suivi par le comité national qui lança une mise en garde à l’égard de la confédération.

Cela n’empêchait pas Louis Girard d’apporter son concours à ladite Confédération. Membre depuis 1957 du bureau de l’Union départementale CFTC-CFDT, il devint en 1959 secrétaire général de cette UD et le resta jusqu’à ce qu’en 1969, son travail de professeur de khâgne l’obligeât à quitter ce bureau. On comprend qu’au comité national de décembre 1957, il ait suscité une motion approuvant le bureau national d’avoir participé à la journée de protestation du 25 octobre, journée dont la CFTC avait pris l’initiative au cours d’une crise ministérielle particulièrement longue dont la classe ouvrière risquait d’être la victime. C’était la première fois que la CFTC réagissait ainsi à un contexte politique menaçant les intérêts des travailleurs.

Tout en se préoccupant des grands problèmes nationaux, Louis Girard ne négligeait pas la défense corporative des membres du second degré. Sans faire la liste de ses interventions lors de la commission administrative qui se réunissait à l’occasion de chaque comité national, rappelons qu’il se souciait du remboursement des frais de voyage pour les collègues exerçant dans deux établissements, du paiement des heures supplémentaires, des services de sécurité en cas de grève, des modalités d’action pour la défense des traitements, etc. Mais c’était surtout le sort des jeunes qui l’inquiétait. Au congrès de 1960 le bureau des maîtres d’internat et surveillants d’externat avait présenté une motion évoquant toutes les difficultés qu’ils rencontraient pour assumer avec leur service toutes leurs obligations d’étudiants. Ce bureau s’était ensuite désagrégé car dans cette catégorie éminemment volatile, il faut renouveler perpétuellement les militants. Le bureau Second degré chargea donc Louis Girard de reconstituer la section nationale des surveillants. Autour de Chauvet, maître d’internat (MI) à Poitiers, Louis Girard put réunir une dizaine de surveillants à Melun en septembre 1961, puis à Paris en novembre, à Bierville en décembre, de nouveau à Paris en février 1962. Au congrès d’avril 1962, un bureau de huit membres dont Chauvet était le secrétaire, fut élu. Mais Louis Girard dut continuer son parrainage : il allait en audience au ministère après le congrès exposer les revendications des surveillants qui réclamaient le moyen de suivre les cours en Faculté dont le nombre avait beaucoup augmenté depuis la rédaction de leur statut en 1937. Chauvet partit au service militaire en janvier 1963. Il fut remplacé par un MI de Mulhouse, aidé d’un secrétaire adjoint, Joël Jalladeau, surveillant à Poitiers. En novembre 1964, Georges Joumas, MI à Orléans, prit en charge de façon efficace la section, réunissant tous les deux mois le bureau des surveillants. Louis Girard put alors s’effacer.

Depuis la réunion du 10 janvier 1963, il était d’ailleurs délégué par le bureau Second degré auprès de la section des adjoints d’enseignement et maîtres auxiliaires (AE-MA) : ceux-ci, par une circulaire d’octobre 1962, pouvaient être intégrés dans la catégorie des certifiés. Aussi en février 1963, dans un article véhément de Syndicalisme universitaire, il s’indigna de la manière dont cette circulaire était appliquée : on avait appris en effet lors de l’ouverture des commissions administratives paritaires nationales (CAPN), que seuls les candidats ayant demandé une des quatre Académies déficitaires verraient leur délégation rectorale transformée en une délégation ministérielle permettant la titularisation ; les autres avaient donc rejoint en pure perte des postes souvent très éloignés de leur domicile. Louis Girard organisa alors un bureau AE-MA et prépara pour le comité national un rapport sur leurs problèmes.

Peu après une nouvelle responsabilité lui échut, car Victor Tonnaire* qui représentait le SGEN à la CAPN des agrégés, prit sa retraite à la rentrée de 1963. Louis Girard qui, lors des élections précédentes, était en troisième position sur la liste des candidats, devint donc le suppléant de Jean Vurpas*, le nouveau titulaire. Or les suppléants siégeant avec les titulaires pour le mouvement, Louis Girard fut chargé des nominations en philosophie. Réélu suppléant en 1969, comme en décembre 1972, il s’acquitta jusqu’en 1976 de cette tâche souvent délicate. Certes il disait dans Syndicalisme universitaire « avoir souvent trouvé auprès de l’Inspection générale compréhension et sollicitude pour des cas humains douloureux ». Il y fit, me confiait-il, la connaissance d’inspecteurs généraux qui « devinrent ses amis malgré l’apparente incompatibilité des fonctions : Robert Tric, Étienne Borne, Jacques Muglioni notamment ». L’Inspection générale s’associa d’ailleurs aux représentants du personnel lorsque la CAPN du 3 mai 1971 adressa des voeux au directeur chargé des personnels enseignants : elle demandait « d’examiner dans les plus brefs délais les professeurs suspendus, en vue de leur réintégration dans leurs fonctions, en tenant compte de leurs voeux ». Quant aux professeurs déplacés dans l’intérêt du service, il fallait que « toute mesure de cette nature fut assortie des garanties statutaires du personnel enseignant ». Des décisions autoritaires avaient en effet été prises par l’administration à l’encontre de professeurs de philosophie, en général sur dénonciation des parents d’élèves. Dans un magistral article paru dans Syndicalisme universitaire, le 20 mai 1971, « Le philosophe, l’adolescent, la révolution et le pouvoir », Louis Girard montra que, contrairement aux apparences, le philosophe n’avait partie liée ni avec l’adolescent, ni avec la révolution : s’il est pour l’adolescent « l’homme de la rupture », son « discours cohérent » n’exprime pas « l’affirmation d’une subjectivité exacerbée dans le refus ». S’il désacralise l’autorité en la pensant, il désacralise et démythifie aussi la révolution. L’accord de l’Inspection générale avec la motion de la CAPN signifiait, ajoute Louis Girard, qu’il ne relève que des philosophes « de décider si, oui ou non, dans sa classe, un professeur de philosophie fait son métier de philosophe ».

Malgré toutes les responsabilités que Louis Girard assuma au plan national à partir de 1961, il continuait à suivre la politique générale du SGEN. Déjà le 25 octobre 1967, le bureau académique de Poitiers avait envoyé un avertissement au bureau national, refusant « d’avoir des relations privilégiées avec quelque parti que ce soit se réclamant du socialisme ». Dans une lettre du 4 septembre 1983, Louis Girard commenta ainsi ce texte : « Il s’agissait d’empêcher que le SGEN ne devienne une sorte de petit appendice de la Fédération de la gauche démocrate et socialiste (FGDS) […] Il me paraissait que l’essentiel pour le SGEN était d’exister et non d’être un pion sur l’échiquier de la gauche ».

Au cours du congrès national d’avril 1968, Louis Girard rédigea une motion avec deux collègues de Poitiers : considérant que le SGEN ne créait plus rien depuis la fin de la guerre d’Algérie, il demandait au syndicat « de réaffirmer ses buts, de repenser ses moyens, de dégager clairement son orientation ». Il voulait, comme il me l’écrira dix ans plus tard, « dénoncer l’impuissance du SGEN comme du syndicalisme français à simplement comprendre les malaises et les interrogations de la jeunesse ». Cette motion n’émanant pas d’un congrès académique ne put être discutée en séance, mais elle fut signée par une dizaine de personnes dont la plupart se retrouvèrent en Mai968 parmi les opposants au bureau national. On put donc y voir l’origine de la « minorité » qui apparut après les grèves au sein du SGEN.

En Mai 68 le lycée de Louis Girard était en grève, mais il n’y joua qu’un rôle mineur car il était aussi secrétaire de l’UD-CFDT, « très sollicité par des étudiants qui voyaient dans la CGT le lieu des « crapules staliniennes » ». Certes il était, dit-il, « bien déconcerté devant ces gosses naïfs, tout fiers de quelques lectures marxistes et qui cherchaient surtout à faire peur aux bourgeois ». Mais, ajoutait-il, « quelque chose se cherchait » : c’était « l’histoire des hommes qui essayaient d’aménager leur monde entre hommes, sans transcendance ». Aussi participa-t-il à des manifs et à d’interminables discussions avec les étudiants. Sur le plan académique, il essaya de « sauver les meubles » en préparant pour la rentrée un texte de huit pages, « Sur le mouvement de Mai », qui fut envoyé à tous les adhérents, même démissionnaires. Il y étudiait les causes du mouvement de Mai, la signification de la révolte étudiante et terminait par des « lignes sommaires pour une conduite syndicale », estimant qu’« entre la fureur du SNESup et les condamnations des syndicats installés, il y avait une voie moyenne, difficile à tenir. Jusque-là le SGEN ne l’a pas tenue ».

Louis Girard participa donc à la première réunion des « minoritaires » qui se tint le 16 juillet à Blois, sans doute sur l’initiative de Roger Lépiney et de Michel Armand. Ce dernier déclara que « la présence des anciens tels que Louis Girard les avait réconfortés ». Ils décidèrent de faire connaître leur point de vue au cours de la session de militants à Bierville en septembre. Ils y distribuèrent le texte de Louis Girard ainsi qu’un autre document émanant de Rouen, dû à Jacques George. Les participants de la réunion du 16 juillet se retrouvèrent au comité national de novembre 1968 et y soutinrent le texte critique élaboré par les représentants de l’académie de Poitiers. Celui-ci ne fut pas adopté et ne fut même pas mentionné dans le compte-rendu de ce comité national, paru dans Syndicalisme universitaire. Nouvelle réunion des « minoritaires » en mai 1969, à Chaingy, près d’Orléans ; Louis Girard s’y trouva également.

Mais ensuite il prit ses distances. Nommé en khâgne, il était de plus en plus absorbé par son travail personnel. En outre il était « excédé par la sottise et l’ignorance de la plupart des gauchistes » : il me citait par exemple un professeur qui croyait travailler à la construction du socialisme en prônant la liberté sexuelle. Il demeura toutefois secrétaire académique et membre du comité national, ayant à différentes reprises essayé, mais en vain, de se faire remplacer. Il garda donc ces deux fonctions jusqu’en 1974, tout en envoyant le plus souvent à Paris son suppléant. Deux ans après il quitta le SGEN. Mais en 1996, il adhéra à la CFDT retraités, à cause, me dit-il, « du courage et du réalisme de Nicole Notat ». Il avait été l’un des grands secrétaires académiques du SGEN : s’il avait pu après 1969 jouer encore un rôle au plan national, peut-être aurait-il su infléchir l’évolution du SGEN dans un sens unitaire.

Membre de la Jeune république après la guerre, Louis Girard adhéra ensuite au Parti socialiste unifié (PSU) en 1960 et le quitta pour la FGDS qui se constitua en septembre 1965. Il rejoignit avec celle-ci le Parti socialiste (PS) dont il se sépara en 1977, « estimant que le programme dit commun était devenu irréalisable dans l’état nouveau de l’économie mondiale ». Une fois à la retraite, il se consacra à la préparation de sa thèse sur Hegel qui lui semblait « le philosophe à partir duquel le christianisme pourra se reformuler après l’abandon des structures de chrétienté ». En 1998, il s’occupait de l’intégration des immigrés auxquels il donnait des cours d’alphabétisation, et était le tuteur de trois enfants d’origine cambodgienne, orphelins de mère. Il aidait également des étudiants étrangers dont le français était déficient, telle cette Coréenne qui présenta un mémoire de maîtrise sur « La conscience chez Bergson ». Il était officier des Palmes académiques.

 Mort le 14 février 2016 à 94 ans, ses obsèques religieuses eurent lieu le 18 février à Poitiers.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article24733, notice GIRARD Louis, Vincent par Madeleine Singer, version mise en ligne le 26 février 2009, dernière modification le 1er septembre 2022.

Par Madeleine Singer

ŒUVRE : La thèse de Louis Girard fut éditée en 1995 chez Rodopi, à Amsterdam.

SOURCES : Madeleine Singer, Le SGEN 1937-1970, thèse, Lille III, 1984, 3 vol. (Arch. Dép. Nord, J1471) ; Histoire du SGEN, Presses universitaires de Lille, 1987. — Syndicalisme universitaire (1955-1976). — Lettres de Louis Girard à Madeleine Singer, 19 octobre 1978, 17 août 1981, 8 avril 1983, 4 septembre 1983, 30 novembre 1983, 1er mars 1995, janvier 1998, 7 avril 1998, 29 avril 1998 (Arch. privées). —Le Monde, 17 février 2016. — Note de Yann Siezien, son arrière petit-fils.

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