Par Jacques Girault
Né le 30 juillet 1897 à Marseille (Bouches-du-Rhône), mort le 21 novembre 1980 à Toulon (Var) ; cultivateur ; coopérateur ; militant communiste du Var.
Ses parents, ouvrier cordonnier et lavandière à domicile, avaient six enfants, dont Étienne Victor. Son enfance laborieuse a été décrite d’après ses Mémoires par Bertrand Solet dans les Cahiers de Baptistin Étienne. Ses parents moururent en 1907 (selon l’ouvrage, 1908, selon les souvenirs de V. Étienne). À la différence de ses deux jeunes frères placés à l’Assistance publique, Étienne travailla dès lors régulièrement dans une savonnerie du quartier des Chartreux, comme garçon livreur, puis, chez un parent qui tenait un hôtel-restaurant à Saint-Cyr (Var). En juin 1907, il finit par être placé par l’Assistance publique chez des cultivateurs de Banon (Basses-Alpes) qui l’exploitèrent. Il était valet de ferme quand la guerre éclata. « Du fait de la guerre, je passe de l’état de valet de ferme à celui de gestionnaire d’un domaine de cent hectares » (p. 131).
Étienne fut mobilisé dans l’infanterie le 9 janvier 1916 à Chambéry. Envoyé dans les Vosges, il participa aux combats puis devint colporteur de journaux dans la zone du front. Il put lire et diffuser La Vague, journal pacifiste de Brizon. Il fut puni pour avoir participé à une manifestation jugée « antimilitariste » lors d’un séjour de son régiment en zone de repos. Hospitalisé en novembre 1918 à Nancy, Étienne y discuta beaucoup avec ses camarades de la Révolution russe.
Rentré dans le Var, marié à La Cadière (Var) en janvier 1919, métayer avec son frère au Brulat (commune du Castellet), Étienne adhéra à la section communiste de La Cadière en juillet 1921. Quelques mois plus tard, président du conseil d’administration de la boulangerie coopérative du hameau, il fit voter en assemblée générale un don de farine pour le peuple russe affamé. Il participa aussi à la création de la coopérative oléicole du Brulat.
En 1926, Étienne qui habitait maintenant La Cadière, devenait secrétaire de la cellule du village en remplacement de son frère. L’année suivante, conformément aux instructions du Parti, il poussait à la création d’une succursale des Coopérateurs du Midi qu’il présidait. Il participait dès lors aux assemblées générales départementales de cette organisation. En 1929, Étienne, lauréat du concours d’abonnements de l’Humanité, gagnait les œuvres de Lénine. En juin 1930, le maire de La Cadière signalait qu’il avait sifflé l’hymne national et tenté de provoquer des désordres. Il avait participé à la création de la coopérative vinicole « La Cadierenne » avec une majorité de communistes.
En 1931, son bail n’étant pas renouvelé par son propriétaire, Étienne achetait, avec l’aide du Crédit agricole, une petite propriété à Ollioules. Il devenait rapidement secrétaire de la cellule qu’il avait contribué à créer, puis fut, sous la présidence du maire socialiste rallié au Parti socialiste de France, secrétaire du comité local de Front populaire et du comité d’accueil aux réfugiés espagnols. À Ollioules aussi, Étienne accédait à la présidence de la succursale des Coopérateurs du Midi, au conseil d’administration de la caisse locale du Crédit agricole et au bureau du syndicat horticole. Il représenta le groupe des coopérateurs d’Ollioules aux assemblées générales des coopérateurs du Var en 1934, 1936 et 1937. Il avait ajouté aux faibles revenus de sa propriété un emploi de chef caviste à l’entrepôt des coopérateurs du Midi à La Seyne où son frère travaillait aussi. Il devait quitter cet emploi en 1937 pour créer un commerce de vins à Ollioules.
Étienne, lors de la réunion du comité de défense paysanne, le 30 juillet 1939, participa à la discussion sur le questionnaire de la Fédération communiste sur la paysannerie varoise. Il était membre du comité de la section communiste de La Seyne.
Père de deux enfants, mobilisé à l’hôpital militaire de Marseille à la déclaration de la guerre, inscrit au Carnet B, revenu à Ollioules en juin 1940, sur la demande de Seillon, il fit partie avec Hippolyte Lambert et Esprit Armando du trio clandestin chargé de reconstituer le Parti communiste dans la région. Il put pendant plusieurs mois entretenir des rapports avec les communistes sous le pseudonyme de « Maurel ».
Étienne était signalé comme propagandiste communiste en décembre 1940 et une perquisition à son domicile le 18 décembre 1940, n’avait donné aucun résultat.
Dans sa maison, selon son témoignage, furent tapés sur une machine à écrire, les stencils de tracts et de l’édition varoise de Rouge-Midi. Le tirage se faisait avec une ronéo cachée au hameau des Playes, à Six-Fours. Surveillé par la police, intriguée par la clientèle essentiellement communiste de ce marchand de vins, il fut arrêté le 12 avril 1942, interné le 28 avril dans le camp de Saint-Paul d’Eyjeaux (Haute-Vienne), transféré au centre de séjour surveillé de Saint-Sulpice-la-Pointe (Tarn), le 23 octobre, il fut libéré le 23 novembre 1943. Astreint à résider à Ollioules et à se présenter quotidiennement à la gendarmerie, il se rendit à Collobrières muni de faux papiers puis gagna en avril 1944 la région de Nérac (Lot-et-Garonne) où il possédait une petite propriété.
À la Libération, de retour à Ollioules, Étienne contribua à la reconstitution de la section communiste dont il assura le secrétariat jusqu’en 1950. Membre de la délégation municipale mis en place, il fut chargé des questions de ravitaillement. En tête de la liste d’union soutenue par le Parti communiste en 1945 qui fut battue par la liste socialiste, Étienne fut candidat « Union républicaine et résistance » aux élections cantonales, le 20 mars 1949. Il fut élu avec 1 546 voix sur 2 168 inscrits.
Étienne participa aux activités de la Fédération nationale des groupements d’achats jusqu’à sa dissolution en juillet 1948. Toutefois le groupe toulonnais continua jusqu’en mars 1951. Au début des années 1950, Étienne vendait ses productions sur le marché de Toulon et militant surtout au Secours populaire de France.
Vétéran du Parti communiste, Étienne écrivit en 1970 ses souvenirs sous le titre les cahiers de Baptistin Étienne, dont une partie fut publiée par les soins de la Fédération du Parti communiste français, avant de faire l’objet du livre de poche signalé.
Baptistin Étienne mourut à Toulon, le 21 novembre 1980.
Par Jacques Girault
SOURCES : Arch. Dép. Var, 4 M 59.4.4, 7 M 12.2, 3 Z 2.10, 3 Z 4.30. — Arch. Coop. Midi. — Archives de la fédération du Var du PCF. — 1920-1970 Souvenirs de vétérans varois du PCF, Toulon, 1970. — B. Solet, Les Cahiers de Baptistin Étienne (trois éditions, le première Éditions de l’Amitié, 1972. La dernière, Hachette-Jeunesse 2003).