LLOUBES Jean, Pierre, Christian LLOUBES alias LAFARGUE, JARLAN, DARTOIS

Par Daniel Grason, Nathalie Viet-Depaule

Né le 25 août 1909 à Palais (Morbihan), mort le 8 septembre 1994 à Paris ; syndicaliste CGT des PTT ; militant communiste de Paris ; interné, déporté à Buchenwald (Allemagne).

Jean Lloubes sa pièce d’identité au nom de Jarland
Jean Lloubes sa pièce d’identité au nom de Jarland

Fils de Justin et de Lucie, née Verpeau, son père instituteur était originaire des Pyrénées-Orientales. Jean Lloubes entra dans l’Administration des PTT le 26 août 1927 en qualité de surnuméraire au bureau n° 28 rue de Pontoise à Paris. Il fut nommé commis le 16 novembre 1928. De la classe 1929, du recrutement de Montpellier, il a été incorporé au 8ème régiment du Génie le 21 octobre 1930, démobilisé le 21 octobre 1931.
Il adhéra au syndicat autonome des agents PTT en 1931-1932, il constitua en 1934, avant la réunification syndicale, l’un des premiers syndicats uniques des agents PTT dont il devint le secrétaire général. En 1935, il fut élu à la commission exécutive du syndicat réunifié et de la Fédération des PTT mais en fut éliminé par les partisans de Syndicats en 1938 à cause de son appartenance au Parti communiste dont il était membre depuis 1936. En 1938, il fit partie d’une délégation ouvrière qui se rendit à Moscou. Rappelé en 1940, il a été démobilisé le 20 juillet 1940. Il fut jusqu’à la Seconde Guerre mondiale secrétaire de la section syndicale des agents PTT et membre de la cellule communiste de la Recette principale.
Mobilisé dans le génie puis réintégré à la Recette principale, Lloubes entra dans la clandestinité et fit partie du comité populaire PTT de la région parisienne. Il fut révoqué le 30 octobre 1940. Il fut interpellé le 4 novembre 1940 pour « apposition de tracts communistes ». Envoyé au Dépôt, il comparut le 13 janvier 1941 devant la Cour d’Appel de Paris qui le condamna à dix mois de prison pour infraction au Décret-Loi du 26 septembre 1939 qui interdisait « toute activité ayant directement ou indirectement pour objet de propager les mots d’ordre relevant de la Troisième Internationale communiste ou d’organismes contrôlés en fait par cette Troisième Internationale.
Interné à la Santé et à Fresnes, en attendant son transfert dans un camp d’internement, il a été gardé au Dépôt, il s’en évada dans la nuit du 7 au 8 juillet 1941 en compagnie d’une vingtaine de militants communistes. Il reprit ses fonctions dirigeantes clandestines au sein des PTT.
Le 23 mars 1942 il habita dans une pièce cuisine sous le nom de Jean-Pierre Jarland au 4ème étage du 7 rue Baudin à Saint-Mandé (Seine, Val-de-Marne). Des policiers l’arrêtèrent le 16 mai 1942 à 6 heures du matin. Les policiers saisissaient : un carnet de poche, quinze reçus signés, une feuille de compte au nom de Pierre, quatre feuilles où figuraient un système de rendez-vous et de repêchage, une feuille avec quatre adresses, une feuille où figurait un relevé de sommes remises à des militants, quinze mille francs, un feuillet sur l’état d’esprit de la population à la campagne, une feuille avec un texte « Pour Meunier », sur un bout de papier « tirage 1200 MF – 1200 MA », sur un cahier « une adresse à Maurice Thorez », un projet de tract « La Voix des Stalags », un opuscule « Gabriel Péri », des tracts « La voix des femmes », « Aux directions des Régions », « Lettre à un prisonnier », « Oui il faut aider l’artisanat », « Famine pour le peuple, bénéfices pour les trusts », « L’Humanité n° 84 et n° 159 », « Le Médecin français », « Musiciens d’aujourd’hui », « Bulletin d’information n° 20, n° 21 et n° 22 », un indicateur des Chemins de fer Région Ouest, quatre enveloppes où figuraient les adresses de particuliers, trois fausses cartes d’identité, deux au nom de Jarlan et l’une au nom de Dartois. Enfin, quatre enveloppes portant des adresses de personnes fictives : Jean-Pierre Platrier à Romorantin, Robert et Loiseau à Paris, et Catherine Durand à Blois.
Il fut interné à la Santé, Fresnes, Poissy, Melun, Châlons-sur-Marne et Compiègne puis déporté, le 12 mai 1944 à Buchenwald où il fit partie du triangle de direction avec Marcel Paul*. Il participa à la fondation du comité des intérêts français et fut délégué à l’organisation.
La libération du camp eut lieu le 11 avril 1945 dans l’après-midi, l’armée américaine conduite par le général Patton libérait Buchenwald. Un Comité militaire clandestin international l’accueillit. Le Comité des intérêts français était composé de : Frédéric-Henri Manhès, Albert Forcinal, Marcel Paul, Robert Darsonville et Jean Lloubes représentaient les français au sein de ce comité précisa Olivier Lalieu.
Dans son ouvrage 1945 La découverte, Annette Wieviorka soulignait : « c’est avec l’arrivée du résistant communiste Marcel Paul, en mai 1944, qui devient l’interlocuteur des dirigeants allemands, que le parti communiste français s’organise véritablement à Buchenwald et qu’il rassemble d’autres courants de la Résistance dans le Comité des intérêts français. Désormais, le Comité est à présent dans l’organisation de résistance du camp et peut protéger certains détenus. »
La libération du camp eut lieu le 11 avril 1945, les détenus organisés dans le Comité militaire clandestin arrêtaient cent vingt-cinq SS et prenaient possession du camp. L’après-midi, l’armée américaine conduite par le général Patton était à Buchenwald. Jean Lloubes matricule 51030 fut homologué comme membre de la Brigade française d’action libératrice de Buchenwald. Il a été homologué Déporté, interné, résistant (DIR), et au titre de la Résistance intérieure française (RIF).
À son retour, Lloubes entra au bureau de la Fédération CGT des PTT jusqu’à sa retraite en 1969. Il fut délégué à tous les congrès CGT. Il ne put jamais obtenir d’être permanent. Il termina sa carrière comme inspecteur central.
Il se maria en 1951 à Paris (VIe arr.) avec Madeleine Maheux, sa compagne qui avait organisé son évasion du Palais de Justice. Elle adhéra au Parti communiste pendant la clandestinité, fut arrêtée et internée à la Petite-Roquette. Elle mourut le 10 avril 1983 à Saint-Dié-sur-Loire.
En 1969, Jean Lloubes se consacra à l’association française de Buchenwald-Dora qu’il présidait jusqu’en 1991. Il resta toujours membre du Parti communiste.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article24778, notice LLOUBES Jean, Pierre, Christian LLOUBES alias LAFARGUE, JARLAN, DARTOIS par Daniel Grason, Nathalie Viet-Depaule, version mise en ligne le 8 avril 2020, dernière modification le 8 avril 2020.

Par Daniel Grason, Nathalie Viet-Depaule

Jean Lloubes sa pièce d'identité au nom de Jarland
Jean Lloubes sa pièce d’identité au nom de Jarland

SOURCES : AN Z/4/77 dossier 526, Z/4/144. – Arch. PPo. 89, BA 2056. – Bureau Résistance GR 16 P 374361. – Stéphane Courtois, La Politique du PCF et ses aspects syndicaux, Thèse, op. cit. — Emmanuel Fleury, La Participation des postiers parisiens à l’insurrection nationale, Paris, 1944. – Témoignage de Jean Lloubes, “Les communistes et la Résistance”, Le Monde, 17 septembre 1958. – Pierre Durand, Les Français à Buchenwald et à Dora, Éd. sociales, 1977. – L’Humanité, 12 avril 1983. – Colloque organisé le 17 octobre 1984 par la Fédération CGT des PTT et Libération nationale des PTT. – Interview de l’intéressé. – L’Humanité, 10 septembre 1994. – Livre-Mémorial, FMD, Éd. Tirésias, 2004. – Olivier Lalieu, La zone grise ? La Résistance Française à Buchenwald, préface de Jorge Semprun, Éd. Tallandier, 2005. – Pierre Durand, Les Français à Buchenwald et à Dora, Éd. Sociales, 1977. – État civil.

Photographie : AN Z/4/77 dossier 526

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