EVAIN Pierre, François, Jean, Marie

Par Éric Belouet

Né le 23 février 1925 à Nantes (Loire-Inférieure, Loire-Atlantique), mort le 30 avril 2009 ; serrurier de marine ; militant jociste de Loire-Inférieure, permanent de la JOC (1949-1952), syndicaliste CFTC puis CFDT, secrétaire de l’Union des syndicats des métaux de la région nantaise (1958-1961), permanent confédéral (1969-1983) aux travailleurs immigrés puis à l’organisation ; membre du secrétariat national de l’ACO (1961-1969).

Pierre Evain en 1960.

Fils de Francis Évain, manutentionnaire aux apéritifs Byrrh, et de Marie née Malnoë qui faisait des ménages et des lessives pour compléter le revenu familial, domiciliés 5 avenue des Loriots, à Nantes, tous deux profondément croyants, pratiquants réguliers, Pierre Évain avait une sœur cadette. Il fréquenta l’école primaire publique de la rue Noire et obtint le certificat d’études primaires. En 1938, ayant échoué à l’oral de l’examen des bourses, il commença à travailler comme « courantin » pendant environ un an puis dans une imprimerie-papeterie de Nantes qui ferma quelques mois plus tard. En janvier 1940, Pierre Évain intégra l’école d’apprentissage des Constructions mécaniques et navales, obtint un CAP de serrurier d’armement (également appelé « serrurier de marine ») en 1943 et fut embauché comme ouvrier P1 aux Ateliers et chantiers de Bretagne (ACB), le plus important chantier naval de Nantes. Il y milita à la CFTC.

Entre-temps, Pierre Évain découvrit la JOC grâce à des amis de son quartier des Hauts-Pavés. Il y adhéra, devint secrétaire de la section Saint-Pasquier, intégra rapidement l’équipe de la fédération de Nantes-Centre – la ville comptait alors trois fédérations – avec la responsabilité de l’« action au travail ». Sollicité par Jean Bourhis* pour devenir permanent, Pierre Évain quitta son emploi aux ACB et intégra en octobre 1949 la province jociste de l’Ouest qui, outre les régions bretonnantes, couvrait la zone allant de Tours à la Vendée et dont le siège était situé 69 rue d’Inkermann, à Rennes (Ille-et-Vilaine). Il y avait la responsabilité de la branche « jeunes » (17-21 ans). Les autres permanents de cette province étaient alors Jean Bourhis* (chef de province), Jean Éon, André Cavan, Jacques Le Cabellec* et André Guinfolleau*. Il quitta la JOC en mars 1952 et fut remplacé par René Youinou*.

Après son départ de la JOC, Pierre Évain reprit son emploi aux Ateliers et chantiers de Bretagne et y milita à la CFTC. Secrétaire de section, il fut délégué du personnel, puis membre du comité d’entreprise et représentant du personnel au conseil d’administration des chantiers. Il prit également part à la grève de cinquante jours de la métallurgie nantaise en 1955. Si ce conflit marqua fortement l’opinion nationale en raison de la détermination des grévistes et des heurts violents auquel il donna lieu, il eut également une grande influence sur la CFTC nantaise. En 1974, Pierre Évain déclarait ainsi : « C’est à travers les grèves de l’été 1955 que s’est précisée notre contestation radicale du capitalisme, son incapacité fondamentale à assurer le développement d’une société humaine, à répondre aux besoins et aux aspirations essentiels des hommes. » (in G. Declercq, op. cit., p. 62).

En février 1958, Pierre Évain quitta une nouvelle fois son emploi aux ACB pour devenir secrétaire de l’Union des syndicats des métaux de la région nantaise, succédant à Gilbert Declercq qui devenait secrétaire général de l’UD-CFTC de Loire-Atlantique. Il découvrit alors d’autres activités, comme les prud’hommes, et se familiarisa avec le droit syndical. Il assuma cette responsabilité jusqu’en avril 1961, date à laquelle il fut lui-même remplacé par Charles Forget. Dans son livre d’entretiens, Syndicaliste en liberté, Gilbert Declercq évoquant sa longue amitié avec Pierre Évain, le décrivait comme « le type même de militant qu’il fallait multiplier par centaines si on voulait construire un authentique syndicalisme de masse » (p. 62).

Pierre Évain s’était marié à Nantes le 27 avril 1956 avec Anne Blanchard, travailleuse familiale à Couëron. Trois enfants (deux garçons et une fille) naquirent de cette union. Le couple participa à l’ACO dont Pierre Évain était déjà membre depuis sa création en janvier 1950. Membre de son comité national à partir de 1957, puis de son bureau national, il fut sollicité en 1961 par Maurice Montaclair* pour devenir permanent au secrétariat national de l’ACO et prit ses nouvelles fonctions fin avril. Pierre Évain y travailla notamment aux côtés de Jean Bonnet*, Jean Monnereau* et Jacques Courchelle, puis de Félix Lacambre* qu’il devait ensuite remplacer au secrétariat de la Mission ouvrière. Dans le cadre de ses fonctions qu’il conserva pendant huit ans, il fut également chargé de Documents ACO.

En 1969, Pierre Évain, tout en restant membre de l’ACO, quitta son secrétariat national. Il aurait alors souhaité retourner à Nantes mais dut y renoncer, « [s]on nom étant souligné à l’encre plutôt rouge » dans cette ville (témoignage de Pierre Évain). Eugène Descamps*, René Salanne* et Jean Monnier* le proposèrent alors au choix du bureau national confédéral de la CFDT pour prendre en charge le secrétariat national des travailleurs immigrés (rattaché au secteur international) qui était sans titulaire à l’époque. Dans le cadre de cette activité, Pierre Évain siégea au conseil d’administration du Fonds d’action sociale (FAS) des travailleurs migrants où il fut l’un des premiers syndicalistes admis à siéger (avec Marius Apostolo pour la CGT et Robert Degris pour FO). Après quelques années, il resta permanent confédéral mais fut affecté au secteur organisation. Il n’en continua pas moins à siéger au FAS. Il partit en préretraite le 31 mars 1983.

Sur le plan politique, Pierre Évain avait adhéré au Parti socialiste en 1981 sans y prendre de responsabilité. Peu attiré par les partis, il disait se satisfaire de la dimension politique de ses autres activités militantes, en particulier syndicales.

Retraité, Pierre Évain mit à profit sa connaissance du droit syndical pour se lancer dans l’activité bénévole de conseiller, venant en aide, face à leur employeur, à des salariés licenciés ou menacés de l’être. Il eut ainsi à défendre une centaine de personnes dans le Val-de-Marne. Domicilié dans ce département, à Fontenay-sous-Bois, il se consacra également à l’écriture de ses souvenirs et fit paraître deux livres en 1997 et 2000. Jusqu’à sa mort, il demeura adhérent de la CFDT et membre de l’ACO.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article24794, notice EVAIN Pierre, François, Jean, Marie par Éric Belouet, version mise en ligne le 2 mars 2009, dernière modification le 13 janvier 2021.

Par Éric Belouet

Pierre Evain en 1960.

ŒUVRE : Pour la défense des droits des travailleurs immigrés, CFDT, 1970, 65 p. — Participation au livre de Gilbert Declercq, Syndicaliste en liberté, entretiens avec Alain Besson et Jacques Julliard, Seuil, 1974, 186 p. — Nous étions des coques, Nantes, Éditions du Petit Véhicule, 1997, 310 p. — Le meilleur vient de plus loin, Nantes, Éditions du Petit Véhicule, 2000, 114 p.

SOURCES : Arch. JOC (SG), fichier des anciens permanents. — Témoignage (publication de l’ACO), mai 1969, n° 178. — Gilbert Declercq, Syndicaliste en liberté, op. cit. — Frank Georgi, Soufflons nous-mêmes notre forge. Une histoire de la fédération de la métallurgie CFTC-CFDT 1920-1974, Les Éditions ouvrières, 1991. — Pierre Évain, Nous étions des coques, op. cit. ; Le meilleur vient de plus loin, op. cit. — Témoignage de l’intéressé, 20 et 24 mars 2008, 3 et 5 avril 2008. — État civil de Nantes.

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