FOUCARD Antoine, Joseph

Par Jacques Girault

Né le 21 septembre 1903 à Valbonne (Alpes-Maritimes), mort le 5 août 1979 à Fréjus (Var) ; instituteur ; militant communiste du Var ; résistant dans la Creuse ; candidat aux élections législatives en 1936 et en 1945 ; conseiller général en 1945.

Antoine Foucard, fils d’un buraliste du Muy (Var), appartenait à une famille de « blancs », selon certains témoignages. Une affaire d’adduction d’eau aurait opposé sa famille au chef de file des « rouges », maire socialiste SFIO Sénès*.

Après trois années à l’École normale d’instituteurs de Draguignan, Antoine Foucard fut nommé instituteur adjoint aux Arcs. Il continuait d’habiter Le Muy. Il faisait les déplacements à motocyclette et plus tard dans sa voiture. Il aimait le théâtre et écrivit plusieurs pièces mélodramatiques jouées lors des fêtes des organisations « blanches » de la commune.

Antoine Foucard, dans l’Humanité à laquelle il était abonné, fut cité, le 4 février 1924 comme sympathisant du Parti communiste dont l’adhésion semblait souhaitable.

Ayant adhéré au Parti communiste au début de 1928, il devint secrétaire de la cellule du Muy. Il aurait alors dit à Georges Durando qui venait d’adhérer lui aussi : « pas d’argent, beaucoup de tâches et parfois la prison ». Lors de la campagne pour les élections législatives, il se signala en portant la contradiction à Reynaud*, le député sortant SFIO, lors d’une réunion au Muy. Il intervint à la conférence du rayon communiste à Carnoules, le 2 juin 1929, pour approuver le rapport de Victor Étienne après le congrès national. Lors de la conférence du rayon, à Carnoules, le 26 janvier 1930, le rapporteur parlait, selon le rapport de police, de sa « démission inexpliquée » par des causes politiques du secrétaire de la cellule du Muy. Il redevint secrétaire de la cellule à la fin de 1930.

Le 24 juillet 1932, il participa à toulon au congrès ouvrier et paysan contre la guerre et y fit une intervention « claire ». Aussi le commissaire spécial indiquait-il dans son rapport : « militant dangereux qui sera à identifier ».

Antoine Foucard était un des rares instituteurs communistes du département. Il adhéra à la Fédération de l’Enseignement constituée en 1929 dans le Var, sous l’impulsion du Parti communiste qui voulait renforcer ses positions au sein de cette organisation. Mais il continua à participer aux assemblées de la section départementale du Syndicat national des instituteurs. Le 11 avril 1932, il obtint 14 voix sur 348 inscrits aux élections du conseil départemental de l’Instruction publique.

Bon orateur (tous les témoignages convergent : il parlait sans papier), Antoine Foucard représentait le Parti communiste ou la CGTU, dans les réunions de l’arrondissement de Draguignan (contradictions à Berthon lors des élections législatives de 1932, à Montagnon par exemple en janvier 1934). Le 12 février 1934, il parla au nom de la CGTU dans les réunions communes de Saint-Raphaël et du Muy.

À partir de juillet 1934, Antoine Foucard participa à de nombreuses réunions communes avec la SFIO. Pour les élections cantonales de 1934, il fut désigné comme candidat communiste dans le canton de Fréjus. Le 7 octobre, il obtint 296 voix sur 6 041 inscrits.

Lors d’une réunion donnée par Marcel Cachin au Muy, le 3 janvier 1935, il présidait et le commissaire spécial notait : « Foucard poursuit le maire du Muy [il s’agit du conseiller général SFIO Sénès* qui avait été réélu dès le premier tour en octobre dernier] de toute sa haine dont les origines sont difficiles à saisir. » Ses démêlés avec Sénès ne cessèrent pas. Le 5 mai 1935, Antoine Foucard conduisait la liste du Bloc ouvrier et paysan aux élections municipales et arriva en tête de ses camarades avec 247 voix sur 667 inscrits.

Antoine Foucard devint secrétaire du rayon du Muy à sa création au milieu de 1935. Grand organisateur du jardin ouvrier du Muy, il animait notamment toutes les activités culturelles et municipales. Aussi alla-t-il saluer le congrès fédéral de la SFIO qui se tint aux Arcs le 1er septembre. Son activité était importante (nombreux meetings dont celui du 14 juillet 1935 à Draguignan). Au Puget-sur-Argens, le 29 juin 1935, il lança, selon le rapport de police, un « appel aux femmes à seconder l’action de leurs maris, à apprendre aux enfants à haïr la guerre ».

Antoine Foucard fut désigné pour représenter le Parti communiste aux élections législatives de 1936 dans la circonscription de Draguignan. Chargnioux*, militant communiste de Saint-Raphaël, fut témoin de sa rencontre avec Marcel Cachin au début de l’année 1936. Antoine Foucard ne prit aucune note ; le dirigeant national le remarqua. Sa campagne électorale fut très active ; Foucard, orateur proche de son auditoire, aux réparties vives, conduisit la propagande du parti, brillant surtout dans les contradictions. Le 26 avril 1936, sur 22 709 inscrits, il arrivait en deuxième position avec 5 220 voix, distancé seulement de 223 voix par le socialiste SFIO, pour lequel il se désista. Il ne s’était pas rendu à la préfecture pour le dépouillement et certains de ses camarades lui reprochèrent cette absence qui aurait, selon eux, permis une fraude en faveur du maire de Draguignan. Il fit plus tard allusion à cette « fraude » dans L’Aurore du Sud-Est le 31 octobre 1945.

Aussi Antoine Foucard fut-il candidat à l’élection complémentaire pour le conseil général dans le canton de Salernes où il avait obtenu ses meilleurs pourcentages. Mais le maire du chef-lieu, « socialiste indépendant » l’emporta, le 26 septembre 1936 ; Antoine Foucard obtint 311 voix sur 993 inscrits. Au renouvellement régulier, dans ce canton, le 10 octobre 1937, il ne retrouva que 301 suffrages sur 1 008 inscrits.

En 1938, Antoine Foucard fut maintenu au secrétariat de la nouvelle section communiste du Muy. Gréviste, le 30 novembre 1938, il subit une retenue du huit jours de traitement. Il s’était marié en août 1938 au Muy. Toute la famille de sa femme était communiste.

Mobilisé à Marseille, le 2 septembre 1939, « mis à l’index » (selon sa profession de foi en 1945), il fut réformé en janvier 1940 pour un ulcère à l’estomac. Il fut réintégré dans son poste d’instituteur aux Arcs, le 19 mars 1940, mais le commissaire spécial de Toulon demanda son internement. Déplacé à Cabasse puis à Carcès, il fut suspendu définitivement de l’enseignement le 1er décembre 1940.

Le 2 avril 1941, Antoine Foucard était interné au centre de séjour surveillé de Saint-Paul-d’Eyjeaux (Haute-Vienne). Toujours selon sa profession de foi, en 1945, son état de santé s’aggravant, il fut dirigé « pour lui “traiter” l’estomac », malgré ses protestations, sur le camp sanitaire de La Guiche où il resta quatre mois. Ramené à Saint-Paul-d’Eyjeaux, son état de santé était, toujours selon sa profession de foi en 1945, « jugé alarmant ». Il fut libéré et assigné à résidence forcée dans la Creuse en février 1943.

Toutefois, il semble que cette situation ait été différente. Selon de nombreuses sources orales, Antoine Foucard aurait signé une lettre d’allégeance au chef de l’État pour être libéré.

Quoi qu’il en soit, dès qu’il sortit du camp, Antoine Foucard entra en contact avec les maquis FTP. Détaché à l’organisation des Légaux, il fut appelé, au début de juillet 1944, auprès de l’état-major FTPF de la Creuse avec le grade de lieutenant. Adjoint aux effectifs et aux opérations militaires, il fut délégué auprès de l’Armée secrète, puis de la Mission interalliée parachutée. Il prépara alors, au nom des FTPF, la fusion des formations de maquisards dans les FFI.

À partir du 9 juillet, après les actions de la division Das Reich en juin et celle de la Brigade Jesser, il participa sous un pseudonyme à la fabrication du matériel de propagande appelant à la lutte libératrice. Il était alors installé dans un couvent de Monteil-au-Vicomte jusqu’à ce qu’il reçût l’ordre de repli. Il était alors lieutenant dans le premier bureau de l’état-major FFI.

Promu capitaine, Antoine Foucard fut alors détaché en Haute-Vienne, puis dans toute la XIIe région militaire du Limousin où il resta jusqu’à sa démobilisation en avril 1945.

De retour dans le Var, renommé instituteur aux Arcs, Foucard fut candidat aux élections municipales du 13 mai 1945 au Muy sur une liste présentée par le Front national, mais il ne fut pas élu. En revanche, il battit le conseiller général sortant du canton de Fréjus, l’ancien sénateur SFIO Sénès*, le 23 septembre 1945 avec 3 983 voix sur 13 462 inscrits. Il figurait aussi en cinquième position sur la liste du Parti communiste pour l’élection de l’Assemblée nationale constituante. Le 21 octobre 1945, la liste obtint 61 523 voix (deux élus) sur 216 738 inscrits. Mais en 1946, Antoine Foucard n’était plus sur la liste communiste pour la deuxième Assemblée constituante.

Élu vice-président du conseil général, le 29 octobre 1945, Antoine Foucard faisait partie de la commission départementale (il n’en faisait plus partie en 1948), de la commission des finances, des commissions de l’agriculture et de l’instruction publique, de l’hydraulique (de la commission interdépartementale de l’hydraulique) et de diverses commissions à tendance sociale (surveillance de la maison de retraite du Luc, commission sanitaire pour l’arrondissement de Draguignan, orphelinat départemental de Boulouris, etc.) Il était aussi délégué au Syndicat des communes du littoral varois.

Responsable du groupe communiste, Antoine Foucard, dans la discussion sur le budget départemental, justifia l’abstention de son groupe, le 26 novembre 1945, dans un long discours, première manifestation officielle de la rupture entre communistes et socialistes de l’assemblée départementale :

« On ne fait rien sans argent, mais la mauvaise répartition d’un ensemble de dépenses qui demeure cependant trop faible pour permettre le relèvement de l’économie du département, nous contraint à dire que le vingtième à peine de ces dépenses est à caractère productif, et encore, il faudra veiller à leur conserver ce caractère […] Voilà quinze mois de perdus et il serait criminel d’attendre et de reconduire les décisions qui s’imposent. »

Son opposition avec Sénès*, le maire du Muy, fut aussi portée devant le conseil général le 31 juillet 1946. Sénès* avait refusé de participer aux cérémonies du 14 juillet organisées par le Comité local de Libération. Antoine Foucard protesta. Le préfet regretta que Sénès* n’ait pas donné à la célébration de la fête « l’ampleur désirable » mais refusa de le sanctionner. Il qualifia aussi, dans sa réponse enjouée, Antoine Foucard « d’espiègle ».

Le bureau fédéral dont il faisait partie et surtout la direction fédérale du Parti communiste furent alors avertis de l’attitude ambiguë qu’aurait eue Antoine Foucard au centre de séjour surveillé. La lettre où il aurait demandé sa libération serait alors parvenue entre les mains des dirigeants fédéraux. En dépit de son incontestable activité résistante par la suite, Antoine Foucard aurait nié avoir signé une telle lettre. Selon de nombreux témoignages, on lui aurait reproché de n’avoir pas fait état de cela dans sa « bio ». Il ne fut pas représenté à l’élection au conseil général en 1951. D’autres raisons d’ordre privé s’ajoutèrent pour expliquer son exclusion du Parti communiste en dépit de son rayonnement. Antoine Foucard fut déplacé à Toulon et nommé directeur de l’école de garçons Font-Pré. Quelque temps plus tard, arrêté, il demanda sa mise à la retraite anticipée et fut condamné à une peine de prison.

La valeur militante et la forte personnalité d’Antoine Foucard, instituteur communiste, avaient contribué à enraciner le Parti communiste dans la région dracénoise.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article24889, notice FOUCARD Antoine, Joseph par Jacques Girault, version mise en ligne le 7 mars 2009, dernière modification le 7 mars 2009.

Par Jacques Girault

SOURCES : Arch. Nat., F7/13118, 13749. — Arch. Dép. Var, 2 M 3.52, 2 M 5.28.6, 2 M 5.29.3, 2 M 7.35.3, 4 M 46, 4 M 47, 4 M 49, 4 M 59.4.4, 7 M 12.2, 3 Z 4.29. — Arch. J. Charlot (CRHMSS). — Conseil général. Procès-verbaux des délibérations. — Presse locale. — Sources orales.

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