MARTIN Marguerite, Marie, Louise, dite Daisy GEORGES-MARTIN alias Marthe, Emmanuelle

Par Annie Pennetier

Née le 1er mars 1898 à Lyon 3e arr. (Rhône, Métropole de Lyon), exécutée après jugement le 20 août 1944 à Saint-Genis-Laval (Rhône, Métropole de Lyon) ; assistante sociale ; militante chrétienne et féministe attachée à l’Union féminine civique et sociale ; résistante du mouvement Combat, secrétaire de l’état-major régional de l’Armée secrète, service régional Maquis, FFI.

Marguerite Martin, dite Daisy par ses frère et sœurs, était la fille de Georges Martin, avocat et industriel (gaz, électricité, construction de tramways), et de Thérèse Piaton qui donnait des cours d’enseignement ménager à la paroisse. La famille appartenait à une lignée de maîtres artisans vinaigriers, puis tonneliers du quartier des Terreaux à Lyon au XVIIe-XVIIIe siècle, et comptait parmi ses rangs Claude Martin, soldat de la Compagnie des Indes devenu Major Général de l’East India, à la tête d’une immense fortune. Le legs important qu’il laissa à la ville de Lyon permit la création de l’École de la Martinière. Marguerite Martin et sa famille résidaient à Irigny (Rhône, Métropole de Lyon), commune située à 10 km au sud de Lyon.
Elle fit ses études à Lyon au cours Pontet puis au cours Chevreul rue Sala et passa le bac philo. Elle fut artiste peintre. Pendant la Première guerre mondiale, elle travailla comme aide-infirmière bénévole, avec sa mère, à l’hôpital installé dans les locaux de l’École de santé militaire de Lyon, avenue Berthelot ; épuisée sa mère décéda à la fin de la guerre. Militante des syndicats chrétiens de Lyon, elle participa à la formation de jeunes ouvrières et employées.
En 1925, à Paris, Marguerite Martin suivit les cours de l’École normale sociale qui préparait au métier d’assistante sociale et obtint le diplôme. Après un essai de vie religieuse (suite à une peine de cœur), en 1930, elle rejoignit l’association catholique l’Union féminine civique et sociale (UFCS) dont l’objectif était d’aider au règlement des questions sociales, misère, alcoolisme, abandon (voir Andrée Butillard) ; elle devint en 1938, membre du Bureau national de direction de l’UFCS. Elle écrivait des articles dans La Femme dans la vie sociale, La mère au foyer, et rédigea un chapitre de la brochure La Femme au service du pays. Avec Ève Baudoin, elle créa puis anima le Service de regroupement familial. Elle prit une chambre dans le foyer « Ma demeure » construit rue de Daumesnil, à Paris (XIIe arr.).
Le 15 juin 1940, elle quitta Paris occupée, pour Roanne (Loire) où elle fonda et fit fonctionner en juin-juillet 1940 un centre d’accueil des évacués à la Bourse du travail. Elle reprit ses activités à l’UFCS à Lyon où elle participa à la mise en place d’un Service familial de la soierie. Par l’intermédiaire de Marcel Poimboeuf, vice-président du syndicat dissout la CFTC, et membre du comité directeur de Libération, elle entra en contact avec un ancien élève de l’École polytechnique et sa femme, en relation avec Londres qui aidaient à l’évacuation de Juifs vers l’étranger ; elle le seconda. Devenu agent du Mouvement de résistance Combat, elle fut recrutée par Henri Jaboulay au premier trimestre 1943 par l’entremise d’André et de Germaine Plaisantin et de Braun (Arbel). En novembre 1943, elle prit contact avec l’équipe de liaison du commandant Marcel Descour chef régional de l’ORA depuis juin 1943, puis chef d’état-major de Robert Ducasse. L’organisation venait d’être décimée par les arrestations du 27 octobre 1943. Au moment de la fusion de l’Armée secrète, de l’ORA et du Service régional Maquis, Jacques Pérol prit le commandement des Services de l’état-major de la 1ère région (10 départements), et choisit Daisy Georges-Martin comme secrétaire. La 1ère région R1 comprenait les départements suivants : l’Ain, le Jura, la Saône-et-Loire, la Loire, le Rhône, l’Ardèche, la Drôme, l’Isère, la Savoie, la Haute-Savoie, et les Hautes-Alpes.
Son rôle était notamment de maintenir les liaisons avec le Service régional des Mouvements unis de résistance (MUR créés en janvier 1943). Elle recueillait des réfractaires au STO, les hébergeait puis les acheminait aux Maquis, en liaison avec le Service Périclès. Anne-Marie Curtis l’assistait. Elle connaissait tout l’appareil militaire clandestin de la région.
« Sur dénonciation d’un agent double qui s’était introduit dans un mouvement voisin » d’après le témoignage de Jazoulay figurant dans son dossier d’homologation, elle fut arrêtée par un agent français de la Gestapo le 6 mars 1944 à son domicile-bureau 36 avenue Foch à Lyon. Une souricière à cette adresse permit d’arrêter d’autres membres. Interrogée et torturée dans les locaux de l’École de santé militaire avenue Berthelot, elle fut internée à la prison Montluc de Lyon et de nouveau torturée. Jugée, elle fut condamnée à mort puis fusillée le 20 août 1944 au lieu-dit Fort de Côte-Lorette, commune de Saint-Genis-Laval.

Le 20 au matin, 120 personnes, otages et résistants, furent tirées des cellules de la prison Montluc à Lyon. Entassées dans des bus, elles furent conduites par la Gestapo et quelques miliciens au Fort de Côte-Lorette, alors désaffecté. Toutes y ont été assassinées, exécutées à la mitraillette. Un homme échappa au massacre et témoigna de la sauvagerie des bourreaux qui incendièrent les lieux avant de fuir. Ce n’est qu’après deux jours d’efforts, durant lesquels les secours déblayèrent les ruines fumantes, que les restes des martyrs purent être portés en terre. Le caveau des martyrs les renferme.

Marguerite Martin obtint la mention « Morte pour la France » et fut homologuée au grade d’assimilation de sous-lieutenant, services reconnus de 1942 au 21 août 1944, Résistance intérieure française (RIF).
La Médaille de la résistance lui a été attribuée par décret du 11 mars 1947, et elle a été proposée au grade de chevalier de la Légion d’honneur. Elle a été décorée de la Croix de guerre avec citation : « Entrée dès la première heure au service de la résistance abandonnant un service social lui tenant à cœur, elle fut d’abord agent de liaison puis secrétaire du chef d’état major régional. Capturée sur dénonciation en possession de dossiers très compromettants elle a opposé aux pires tortures la ténacité d’une volonté ferme. S’est dévouée sans compter auprès de ses codétenus de Montluc malgré son propre état de santé. »
Marguerite Martin était célibataire. L’avocat et historien, Bruno Permezel, son petit-neveu était un ayant-droit.
Plaque sur le caveau : "DAISY GEORGES-MARTIN 1er Mars 1898 - 20 Août 1944. Dans la Résistance MARTHE Secrétaire de l’État-Major de la 1ère région des Forces Françaises Combattantes de l’Intérieur".
Son nom a été donné à une rue de Villeurbanne.
Une rue et un collège portent le nom Daisy Georges-Martin à Irigny où place de l’Abbé-Pierre (enfant d’Irigny) une fresque a été inaugurée, en 2009, représentant entre autres l’Abbé Pierre et Daisy-Georges Martin, martyre de la Résistance.
Un square dans le 3e arrondissement de Lyon lui est dédié : "Militante chrétienne et féministe de l’Union féminine civique et sociale".


Saint-Genis-Laval (Rhône), fort de Côte-Lorette, 20 août 1944

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article248960, notice MARTIN Marguerite, Marie, Louise, dite Daisy GEORGES-MARTIN alias Marthe, Emmanuelle par Annie Pennetier, version mise en ligne le 27 juin 2022, dernière modification le 27 juin 2022.

Par Annie Pennetier

Photo de famille, Bruno Permezel
Plaque au Mémorial de Côte Lorette, à Saint-Genis-Laval
Plaque au Mémorial de Côte Lorette, à Saint-Genis-Laval

SOURCES  : SHD, Vincennes, GR 16P 398472. — Arch. Dép. Rhône et Métropole, 3335 W 22, 3335 W 11. — Ass. des rescapés de Montluc, Les 15 derniers jours des internés à Montluc, 9-24 août 1944, août 2019. ---- Bruno Permezel, Résistants à Lyon, Villeurbanne et aux alentours 2824 engagements, Éditions BGA Permezel, 2003, p. 432, 433 (les illustrations de la couverture sont ses peintures des ponts de Lyon). — Bruno Permezel, Le major général Martin et sa famille : mémoire d’une lignée lyonnaise, XVII-XXe siècle, Lyon, 2000. — Germaine Mornand, La vie et la mort de Daisy Georges-Martin, martyre de la Résistance, Paris, 1946. — Site de l’ Association Louis Dunand pour le patrimoine d’Irigny (photos de ses peintures "Lyon, le pont de la Guillotière et l’Hôtel-Dieu", portrait . — MémorialGenweb : photo de plaque Lyon. — État civil, acte de naissance n°349, transcription n°407ter, 1946, Lyon, 6e arr. de l’acte de décès n°128, 1944, Saint-Genis-Laval.

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