BOURNET Charles, Marius

Par André Balent

Né le 27 mai 1920 à Saint-Julia-de-Bec (Aude), mort en action de combat le 17 août 1944 à Alet, aujourd’hui Alet-les-Bains (Aude) ; maître d’internat puis militaire d’active (armée d’armistice), employé de d’administration du cadastre de l’Aude ; résistant de l’ORA (Organisation de résistance de l’Armée) puis du maquis de Picaussel (Aude) de l’Armée secrète (AS)

Charles Bournet (1920-1944)
Source : Maury, op. cit., 1980, p. 330

Charles Bournet naquit à Saint-Julia-de-Bec (Aude), un modeste village de l’extrémité sud-ouest des Corbières, à proximité de Quillan, petite ville industrielle de la vallée de l’Aude, au carrefour de plusieurs petites régions du département, dans sa partie méridionale et pyrénéenne.

C’était le fils d’Albin, Étienne Bournet, fils de Daniel et de Pascaline Alquier, né le 1er février 1893 à Saint-Just-et-le-Bézu (Aude), autre commune proche de Quillan. En 1913, lors du conseil de révision du canton de Quillan, la profession déclarée d’Albin Bournet était celle de cultivateur. Il participa aux combats de la Première Guerre mondiale. Démobilisé, il intégra l’administration des Ponts-et-Chaussées et occupa un emploi de cantonnier. La nomination à cet emploi parut dans le Journal officiel de la République française du 16 janvier 1919. Il se fixa à Saint-Julia-de-Bec où il se maria le 4 juin 1919 avec Rose, Marguerite, Thérèse Jammet (Quillan, Aude, 2 mars 1893 – Castres, Tarn, 30 juillet 1981), fille d’Antonin Jammet (1860-1929) et d’Anne Canel (1860-1926). Le couple eut deux enfants, Charles et Gabrielle, Anne, Blanche (Saint-Julia-de-Bec, 7 juin 1925 – Carcassonne, Aude, 26 février 2016).

Charles Bournet fréquenta l’école primaire de Saint-Julia-de-Bec. Il poursuivit ses études à Limoux (Aude) au collège de garçons. Il fut ensuite maître d’internat au lycée technique de Narbonne (Aude). Lucien Maury (op.cit., 1980, p. 331) le présente comme un « athlète et rugbyman de classe ». Il fut en effet joueur de Union sportive quillanaise (rugby à 15).

Charles Bournet s’était engagé dans l’armée d’armistice au 31e régiment du Génie en garnison à Port-Lyautey, aujourd’hui Kénitra (Maroc). Il accéda au grade de sergent. Il fut rapatrié en France peu avant l’invasion de la zone Sud par les forces allemandes. Après la dissolution de l’armée d’armistice, il intégra l’administration départementale du cadastre à Carcassonne (Aude). En effet, il avait acquis, pendant ses études, des compétences qui lui permettaient d’exercer en tant que géomètre. Il se maria avec Adeline Audouy. Leur fille unique, Danielle, naquit en 1944, six mois avant la mort de Charles Bournet. Le couple se fixa au hameau des Sauzils (Fa, Aude, commune déléguée de la nouvelle commune du Val-de-Faby créée en 2019 dont elle est le chef-lieu), toujours à proximité de Quillan.

Il fut d’abord membre de l’ORA avant d’intégrer (officiellement le 1er juin 1944) le grand maquis audois de l’AS (Voir Carbou Jean) implanté dans la forêt de Picaussel (commune de Puivert).

Lors de l’affrontement des gorges de Cascabel, le 17 août 1944, deux maquis audois, celui de Picaussel et celui de Salvezines (FTPF : Voir Meyer Victor) intervinrent, lors d’embuscades, contre une colonne allemande. Charles Bournet commandait la section du maquis de Picaussel qui était chargée d’attaquer la colonne allemande d’un effectif d’environ 200 hommes qui, depuis Carcassonne (Aude), remontait la haute vallée de l’Aude afin de gagner Couiza (Aude), bourg à mi-chemin entre Limoux et Quillan. Obéissant aux ordres du général Johannes Blaskowitz, commandant du groupe d’armées G dont l’état-major était installé à Rouffiac-Tolosan (Haute-Garonne), au nord de Toulouse, les Allemands de l’Aude préparaient leur repli vers la vallée du Rhône. L’objectif de la colonne était de récupérer à Couiza l’important dépôt de vivres, gardé par 30 hommes, où se trouvaient environ 100 000 rations. Des civils, qui avaient été réquisitionnés afin d’assurer la manutention dans l’usine où étaient entreposés les denrées alimentaires, accompagnaient la colonne.

Le maquis de Picaussel avait donc décidé de bloquer la colonne avant qu’elle n’atteignît Couiza. Deux groupes de Picaussel, dont celui commandé par Charles Bournet, se postèrent en embuscade, en aval de Couiza, dans les gorges de Cascabel. Protégé par le fusil-mitrailleur du premier groupe installé en haut de la falaise, celui des artificiers, commandé par Bournet (Marino Soligo, Émile Jouillé, Jean Pérez, François Journet et Charles Biart) prit position, en bas, à proximité de la RN (aujourd’hui RD) 118 (reliant Mont-Louis, Pyrénées-Orientales à Mazamet, Tarn, via Carcassonne). Vers 9 heures, depuis la falaise, le fusil-mitrailleur arrosa la colonne allemande. Les soldats utilisèrent alors comme boucliers humains les civils requis qui les accompagnaient et qui faisaient des signes désespérés aux maquisards. Ces derniers cessèrent alors de tirer alors qu’un officier allemand se rendait à Alet afin de téléphoner à Carcassonne pour demander des renforts. Les Allemands de la queue de la colonne manœuvrèrent alors par un versant boisé pour prendre à revers le groupe de la falaise et son fusil-mitrailleur. Ces maquisards décrochèrent sans prévenir les artificiers en contre-bas. Bournet et ses hommes furent alors pris à revers. Si Journet et Biart purent échapper in extremis à cette manœuvre, Bournet, Soligo, Jouillé et Pérez furent tués. Les tirs du combat de Cascabel furent entendus par les maquisards (FTPF) de Salvezines accompagnés par un commando de militaires étatsuniens relevant de l’OSS (Office of strategic services) parachutés le 11 août, commandés par le First-lieutenant Paul Swank afin de prendre contact avec les maquis du secteur (initialement, c’était Picaussel qui devait les recevoir, mais, finalement, ils avaient abouti à Salvezines). Ils tendirent une seconde embuscade au convoi qui réussit à rebrousser chemin vers Carcassonne avec les civils désormais considérés comme otages. Paul Swank fut tué dans cet affrontement. Les Allemands ne purent récupérer les vivres convoités.

Il y a deux dossiers non consultés au Service historique de la Défense, à Vincennes (GR 16 P 83107) et à Caen (AVCC, AC 21 P 31173). Son nom ne figure pas sur le registre de l’état civil d’Alet-les-Bains. Charles Bournet fut homologué lieutenant des Forces françaises de l’Intérieur à titre posthume, avec prise de rang au 1er juin 1944 (Décret du 28 décembre 1945, paru au JORF du 12 février 1946, p. 1240) et obtint la mention « Mort pour la France ». Sur la stèle des gorges de Cascabel, il n’apparait qu’avec le grade de sergent.

Il a été inhumé dans la tombe familiale du cimetière de Quillan.
Une stèle a été érigée à sa mémoire sur le territoire de la commune d’Alet (Aude), à la limite de celle de Luc-sur-Aude, sur le lieu précis des gorges de Cascabel où il trouva la mort.

Son nom figure sur les monuments aux morts de Saint-Julia-de-Bec et de Fa, commune déléguée de la commune nouvelle de Val de Faby ; sur la plaque-mémorial du maquis de Picaussel, à Puivert ; sur la stèle érigée dans la commune d’Alet, à la limite de celle de Luc-sur-Aude, à la mémoire des quatre maquisards de Picaussel morts en action de combat le 17 août 1944 ; sur la plaque commémorative apposée en l’église Saint-Julien de Saint-Julia-de-Bec qui rend hommage aux morts de la paroisse lors des deux guerres mondiales. Il y a une rue Charles-Bournet à Quillan et une place Charles-Bournet à Fa.
Voir Alet, aujourd’hui Alet-les-Bains (Aude), 17 août 1944

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article249079, notice BOURNET Charles, Marius par André Balent, version mise en ligne le 22 juin 2022, dernière modification le 9 novembre 2022.

Par André Balent

Charles Bournet (1920-1944)
Source : Maury, op. cit., 1980, p. 330

.SOURCES : Service historique de la Défense (SHD), Vincennes (GR 16 P 83107), n. c. et Caen (AVCC, AC 21 P 31173), n. c. — SHD, Vincennes, GR 19 P 11/11, maquis (AS) de Picaussel. — Arch. dép. Aude, RW 620, registre matricule, bureau de recrutement de Narbonne, f° 849 (Albin Bournet). — Julien Allaux, La 2e guerre mondiale dans l’Aude, Épinal, Éditions du Sapin d’Or, 1986, 255 p. [p. 191-193]. — Lucien Maury (dir.), La résistance audoise (1940-1944), tome II, Carcassonne, comité d’Histoire de la Résistance du département de l’Aude, 1980, 439 p. [p. 223, 224, 329-333]. — Lucien Maury, Picaussel, 1944-1994, Puivert, Amicale des anciens du maquis de Picaussel, 1994, 35 p. [p. 29-30, p. 32]. — « Hommage au résistant Charles Bournet », La Dépêche, Toulouse, édition de l’Aude, 17 août 2018. — Sites Mémoire des hommes et MemorialGenWeb consultés le 19 juin 2022, Geneanet, le 21 juin 2022. — JORF, Gallica. — Relevé (13 août 2022) par André Balent des noms des victimes du combat du 17 août 1944 dans les gorges de Cascabel, gravés sur la stèle érigée à cet endroit. — Couririel de Maryline Gayda, secrétaire administrative de la mairie d’Alet-les-Bains, 8 novembre 2022.

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