Par André Balent
Né le 10 octobre 1902 à Prats-Balaguer (commune de Fontpédrouse–Prats-Balaguer–Saint-Thomas-les-Bains, Pyrénées-Orientales), mort massacré le 17 juillet 1944 à Montirat (Aude) par un déserteur allemand, victime civile ; berger et/ou cultivateur à la Llagonne (Pyrénées-Orientales) au moins jusqu’en 1931
Jean Llagonne naquit à Prats-Balaguer, hameau (ancienne commune jusqu’en 1822) de la vaste commune montagnarde de Fontpédrouse dans le Conflent (Pyrénées-Orientales) où ses familles paternelle et maternelle étaient étabiles au moins depuis le XVIIIe siècle. Son père, prénommé aussi Jean, Pierre, fils d’Antoine (1823-1903), cultivateur et d’Anne Blanqué, y était né le 7 avril 1864. Il avait épousé, le 24 février 1900, Marguerite, Joséphine Moné, née le 2 juin 1882 à Prats-Balaguer, fille de Joseph, cultivateur et d’Anna Moné (patronyme écrit aussi « Moner » dans d’autres documents). Le couple eut deux autres fils : Joseph, Antoine, Jean (Prats-Balaguer, 14 octobre 1900 – Ille-sur-Têt, Pyrénées-Orientales, 25 décembre 1987, gendarme) ; Joseph, Isidore, Pierre, mort en bas âge, La Llagonne, Pyrénées-Orientales, 5 mai 1907 – La Llagonne, Pyrénées-Orientales, 16 mai 1907).
Son père est qualifié, selon les documents de « berger » ou de « cultivateur ». Le couple et leur premier fils furent recensés en 1901 à Prat-Balaguer. À cette date, une cousine (de Jean Llagonne, père ou de son épouse, Marguerite Moné ?), Eugénie Albert, 26 ans, institutrice, était recensée comme faisant partie du ménage. Par la suite, la famille s’installa dans la commune éponyme de La Llagonne (Pyrénées-Orientales, toujours dans le Haut Conflent, aux limites du Capcir et de la Cerdagne. Nous ignorons ce qui motiva ce déplacement de la famille quelques kilomètres en amont et les conditions de sa réinstallation.
La famille y fut recensée en 1921 et en 1931. Jean Llagonne fils, toujours « berger », parfois « cultivateur », célibataire, y vivait avec ses parents. Son père apparait dans ces documents comme « cultivateur ». Jean Llagonne père mourut à La Llagonne le 28 septembre 1931.
En 1932, Jean Llagonne avait quitté La Llagonne. Sa mère y fut encore recensée en 1936. Nous ignorons pourquoi, en 1944, il se trouvait à Montirat. Cette commune, limitrophe de Carcassonne et de Monze, se trouve à la pointe nord-ouest du quadrilatère formé par le massif pré-pyrénéen des Corbières.
Le 17 juin 1944, destin de Jean Llagonne rencontre celui de Marie-Paule Fabre et du déserteur allemand Friedrich Walter. La jeune femme et le berger catalan périrent assassinés. Ce jour-là l’Allemand venait de déserter et avait conçu le projet de franchir la frontière franco-espagnole. Il devait, à cet effet, se procurer des vêtements civils. Étant parvenu à Montirat, il s’introduisit dans la maison de la famille Ferrié. La jeune Mlle Ferrié, seule présente, refusa de lui donner des vêtements civils. Pris de rage, Walter saccagea la maison et partit en échangeant son portefeuille contre celui de M. Ferrié. Jean Llagonne, qui avait averti M. Ferrié que sa maison avait été pillée, fut abattu par l’Allemand. Sur la route de Monze, le village voisin, celui-ci prit en otage Marie-Paule Fabre qui se trouvait là par hasard. Poursuivi par la Gendarmerie française et la Feldgendarmerie, après avoir semé la terreur dans Monze, il partit avec la jeune Marie-Paule en direction de l’Alaric. Il abattit celle-ci lorsqu’elle tenta de s’enfuir. Rattrapé, Friedrich Walter fut arrêté. On ignore ce qu’il est devenu.
Son nom figure sur la plaque commémorative des morts des deux guerres mondiales apposée dans la mairie de La Llagonne. Il y a un dossier non consulté au Service historique de la Défense à Caen, cote AC 21 P 317193. Dans son ouvrage, Lucien Maury orthographie à tort son patronyme « Llagone ». Il donne une autre version de son assassinat, expliquant qu’il aurait « protégé une femme menacée de viol ». L’article publié sur le site Musique et patrimoine de Carcassonne. Histoire de Carcassonne et des alentours s’appuie sur des sources (UNWCC — United Nations War Crimes Commission ) rapport du 14 février 1946 ; SHD, Caen dossier consulté par l’auteur) qui ont permis de faire toute la lumière sur le déroulement des faits.
Par André Balent
SOURCES : Archives départementales des Pyrénées-Orientales, 2 E 1242, état civil de Fontpédrouse, acte de naissance de Jean Llagonne père ; 2 E 1343, état civil de Fontpédrouse, acte de naissance de Marguerite Moné ; 2 E 4457, état civil de Fontpédrouse, acte de mariage entre Jean Llagonne père et Marguerite Moné, acte de naissance de Joseph Llagonne, acte de naissance de Jean Llagonne fils ; 6 M 268/80, Fontpédrouse, recensement de la population, 1901 ; 6 M 292/198, La Llagonne, recensement, 1921 ; 6 M 303/98, La Llagonne, recensement, 1931 ; 6 M 316/98, La Llagonne, recensement, 1936. — SHD, Caen, AC 21 P 371193, (nc) — Lucien Maury (dir.), La résistance audoise (1940-1944), tome II, Carcassonne, comité d’Histoire de la Résistance du département de l’Aude, 1980, 439 p. [p. 394]. — « Marie-Paule Fabre assassinée par la barbarie nazie à Monze, le 17 juin 1944 », article mis en ligne le 22 avril 1920, site Musique et patrimoine de Carcassonne. Histoire de Carcassonne et des alentours, consulté le 6 novembre 2022. — Site Mémoire des Hommes, consulté le 7 novembre 2022. — Site MemorialGenWeb, entrée « Monze », consulté le 8 novembre 2022.