VANHAEREN Lucien, Alphonse

Par Annie Pennetier

Né le 12 février 1910 à Paris (XIe arr.), mort des suites de tortures le 22 juin 1944 à Bourges (Cher) ; ouvrier agricole ; victime civile.

Lucien Vanhaëren était le fils de Élise Charlotte Luyten, 31 ans ménagère, domiciliée 91 rue de la Réunion à Paris XXe arrondissement. Reconnu par sa mère le 26 mars 1910 puis légitimé par le mariage de ses parents le 1er avril 1911, son père Alphonse Jacques Verhaeren était ébéniste. Il se maria le 15 octobre 1932 avec Augustine Rigal à Paris XXe.
En 1944, Lucien Vanhaëren, journalier, était domicilié à Aubigny-sur-Nère dans le nord du Cher. Sous l’occupation, Pierre Paoli originaire de cette commune devint interprète de la Gestapo à Bourges, puis très vite cet auxiliaire zélé intégra la SS avec le grade de sergent-chef (Scharführer) en janvier 1944. Le SD (Sicherheitsdienst) est le service de renseignement, issu de celui de la SS. Associé à la SIPO (Sicherheilspolizei), ce service était couramment appelé Gestapo à Bourges (Cher).
Portant l’uniforme allemand, ce tortionnaire impitoyable était surnommé « le monstre ».
Fin juin 1944, alors que Lucien Vanhaëren se promenait dans les rues d’Aubigny, il fut ceinturé par deux Allemands de la Sipo-SD police de renseignement et Paoli venus de Bourges, désigné par une indicatrice Mme Gressy dite Mme Chapeau présente dans la voiture Citröen. Interné à la prison du Bordiot à Bourges, le chef de la Gestapo de Bourges Eric Hasse donna l’ordre de le relâcher, car des rafles de résistants étaient prévues pour le lendemain dans la région d’Aubigny. De nouveau arrêté ce jour-là par la Feldgendarmerie d’Aubigny avec d’autres résistants, il fut conduit au Bordiot puis dans les locaux de la Gestapo 12 rue Michel-de-Bourges et atrocement torturé par Paoli qui accusa Eric Hasse et le gestapiste de Dun-sur-Auron (Cher), Picault, lors de son procès. Quelques jours après sa réincarcération dans le quartier allemand de la prison, il mourut des sévices subis sans avoir reçu de soins. Paoli aidé du gestapiste de Dun-sur-Auron, Roger Picault sortirent de nuit clandestinement le cadavre de Vanhaëren enroulé dans une couverture, l’emmenèrent dans la campagne et l’abandonnèrent au bord d’une petite route sur la commune de Saint-Denis-de-Palin (Cher) à une dizaine de kilomètres de Bourges. Le cadavre portait les marques des liens aux poignets et aux chevilles qui l’avaient solidement attaché à une échelle la tête en bas ; il était dépouillé de ses vêtements et criblé de balles pour éviter son identification par la gendarmerie française et faire croire à une exaction de la Résistance et ainsi éviter des découvertes gênantes pour Paoli et la Gestapo.René Hay des Nétumières et le jeune Michel Perry étaient morts des suites de tortures dans les locaux de la Gestapo les 15 et 16 juin 1944, le cadavre de ce dernier jeté dans l’Yèvre. La femme de Lucien Verhaëren reconnut cependant son mari. Le 30 juin 1944, une information contre X fut ouverte au Parquet du Tribunal de Saint-Amand-Montrond, du chef d’assassinat. Les circonstances de la mort restèrent mystérieuses malgré l’implication des membres du Comité Berrichon du Souvenir présidé par M. Lucotte pour retrouver les auteurs du crime.
Paoli avec Roger Picault dit Rissler, partirent avec les troupes allemandes qui évacuèrent Bourges le 6 août 1944, pour Fontainebleau (Seine-et-Marne). Puis, devant l’avancée de l’armée américaine, Nancy (Meurthe-et-Moselle) devint le point de ralliement des groupes d’action du SD Sicheirheitsdienst (police de sécurité). L’ancien chef du SD de Bourges, Eric Hasse, replié à Sedan (Ardennes), chargea Paoli et Picault de constituer un faux-maquis avec l’aide de francistes et de membres du PPF. Après avoir gagné la confiance de jeunes résistants, à Illy-Olly et Floing (Ardennes), les 28 et 29 août 1944, ils les abattirent faisant 19 victimes.
Paoli fut arrêté par les forces britanniques à Flensburg près du Danemark le 16 mai 1945 puis remis aux autorités françaises en janvier 1946.
À Bourges, le 8 février 1946, le juge d’instruction à la Cour de justice du Cher Jean Lyonnet chargé d’instruire « l’affaire Paoli » interrogea Paoli qui reconnut partiellement les faits quant aux sévices subis par Lucien Vanhaëren.
Condamné à mort le 4 mai 1946 à Bourges, il le fut de nouveau par la cour de justice des Ardennes à Nancy le 7 juin 1946 avec ses six complices. Paoli fut passé par les armes le 15 juin 1946 au polygone de Bourges, lieu où avaient été fusillés pendant la guerre 41 personnes arrêtées par la Gestapo.
Seuls quatre des vingt-trois personnes arrêtées par Paoli dans sa commune natale d’Aubigny-sur-Nère, revinrent des camps de concentration nazis, d’autre part il avait commis en personne plusieurs centaines de d’arrestations accompagnées de vols et participé au massacre de 36 Juifs réfugiés à Saint-Amand-Montrond, jetés vivants dans les puits de Guerry les 24 juillet et 8 août 1944.

Lucien Vanhaëren obtint la mention « Mort pour la France ».
Son nom est gravé sur la plaque commémorative 1939-1945 apposée sur le mur de la mairie d’Aubigny-sur-Nère.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article252213, notice VANHAEREN Lucien, Alphonse par Annie Pennetier, version mise en ligne le 1er décembre 2022, dernière modification le 1er décembre 2022.

Par Annie Pennetier

SOURCES : AVCC, Caen, AC 21P 546475 (nc). — Mémoire des hommes, base des morts en déportation. — Jean Lyonnet, L’affaire Paoli éditions Chassaing, Nevers, 1965.— MémorialGenweb consulté le 11 novembre 2022 indique par erreur mort en déportation. — État civil de Paris, 11N 357,3/31.

rebonds ?
Les rebonds proposent trois biographies choisies aléatoirement en fonction de similarités thématiques (dictionnaires), chronologiques (périodes), géographiques (département) et socioprofessionnelles.
Version imprimable