FERRON Eric, Jan, Michel

Par Nicolas Simonpoli

Né le 13 octobre 1953 à Pembury (Angleterre) ; cheminot, aiguilleur ; syndicaliste CGT, secrétaire adjoint du syndicat CGT des cheminots de Creil (1976-1987), secrétaire du CTN Exploitation de la Fédération CGT des cheminots (1988-1993), membre de la commission exécutive (1990-2007) et du bureau (1992-2007) de la Fédération CGT des cheminots ; militant communiste.

Portrait d’Eric Ferron paru dans le journal du 39ème congrès de la Fédération CGT des Cheminots, n°6, 28 novembre 2003
Portrait d’Eric Ferron paru dans le journal du 39ème congrès de la Fédération CGT des Cheminots, n°6, 28 novembre 2003
[Droits réservés. Coll. IHS-CGT cheminots]

Les parents d’Éric Ferron se rencontrèrent à la fin de la Seconde guerre mondiale dans un hôpital britannique. Son père, dénommé lui-aussi Éric, et sa mère, Jacqueline Tramond, y exerçaient tous deux comme infirmiers. Le couple eut deux fils. Né en Jamaïque, son père avait quitté le pays pour ne plus subir le racisme et l’indigence de la colonisation. À 18 ans, il s’engagea dans l’armée de l’air britannique et participa, en 1944, au débarquement en Normandie. Après sa démobilisation, ne bénéficiant d’aucun soutien du gouvernement anglais, il reprit des études pour devenir infirmier puis, plus tard, psychothérapeute. Malgré son engagement en faveur des forces armées britanniques, il subit les nombreuses discriminations qui frappaient alors les citoyens noirs des anciennes colonies anglaises. Il raconta son histoire dans un ouvrage, Man you’ve mixed. A jamaican comes to Britain paru en 1995. Engagé syndicalement, le père d’Éric milita aussi pour les droits de l’Homme et dans diverses associations de lutte contre le racisme et l’apartheid. Divorcée de son père en 1957, la mère d’Éric revint vivre en France avec ses deux enfants. Elle travailla comme secrétaire de direction pour une entreprise multinationale de la métallurgie. Très jeune, Eric fut sensibilisé aux questions syndicales, sa mère étant secrétaire du syndicat CGT de l’entreprise métallurgique dans laquelle elle travaillait.

Éric Ferron effectua sa scolarité secondaire au lycée professionnel de Creil (Oise). En 1971, il y obtint un CAP de mouleur. L’année suivante, il fut embauché comme ouvrier professionnel dans une filiale de Matra située au Blanc-Mesnil (Seine-Saint-Denis). Il y travailla pendant un mois puis il devança l’appel pour le service national en avril 1972. À son retour, en mai 1973, il fut embauché à la SNCF. Engagé comme agent à l’Exploitation au service des bagages de la gare de Creil (Oise), il occupa ce poste jusqu’en 1976. Cette année-là, il obtint l’examen d’agent Mouvement. Il fut alors affecté comme aiguilleur au triage de Creil. Il y travailla jusqu’en 1987. En 1988, il fut placé en service libre afin d’assurer ses responsabilités à la Fédération CGT des cheminots. Il demeura permanent jusqu’en octobre 2008, année de son départ en retraite.

En 1974, Éric Ferron adhéra au syndicat CGT des cheminots de Creil (Oise). Très vite, il s’investit dans l’action militante, notamment celle en direction des jeunes cheminots. Lors de sa première année, responsable de la commission Jeunes du syndicat, il organisa une lutte avec les résidents du foyer des jeunes travailleurs de Creil (Oise). Leurs revendications portaient sur la limitation du coût du loyer et sur l’amélioration des conditions de logement (absence de salle de détente, réfectoire non équipé, cuisine vétuste, etc.). La mobilisation fut largement soutenue par les résidents, ce qui permit d’instaurer un rapport de force avec la direction de l’établissement. In fine, celle-ci accéda aux revendications, rénovant les locaux, aménageant des chambres individuelles sans augmentation de loyer et remplaçant l’électroménager du foyer. Au terme du conflit, Éric bénéficia d’une première expérience de la lutte et la CGT compta dix nouveaux jeunes syndiqués dans ses rangs.

En 1976, Éric Ferron fut élu secrétaire général adjoint du syndicat CGT des cheminots de Creil (Oise), responsabilité qu’il occupa jusqu’en 1987. Tout au long de cette période, il exerça aussi bien des responsabilités au niveau de son établissement que de son secteur. Délégué du personnel et élu du CHSCT, il s’investit également dans l’activité du collectif technique Exploitation du secteur de Paris Nord dont il devint le secrétaire de 1982 à 1987. En parallèle, de 1985 à 1987, il exerça les responsabilités de trésorier du Comité d’établissement régional (CER) de Paris Nord et d’élu du Comité central d’entreprise (CCE).

Par la suite, sa connaissance de l’Exploitation le conduisit à exercer des mandats nationaux. En 1988, il prit la tête du comité technique fédéral pour cette filière. À ce titre, il s’impliqua sur diverses revendications spécifiques à ce domaine d’activité. En 1987, il alerta sur la mise en place de la réforme dite de « la R.A.T. » qui mettait en péril la sécurité du transport des marchandises et des voyageurs. Au début des années 1990, lors de la mise en place de l’outil de réservation SOCRATE, il opposa à la direction une conception des nouvelles technologies qui servent les intérêts des voyageurs et des cheminots et non la seule rentabilité. Il anima le CTN Exploitation jusqu’en 1993.

À compter de 1990, Éric Ferron fut élu à la commission exécutive de la Fédération CGT des cheminots. Deux ans plus tard, il entra au bureau fédéral. Son élection s’inscrivit dans un renforcement du bureau après les départs de Viviane Bonnet, Jean-Pierre Lecomte et Jean-Marc Moulinet. Éric connaissait déjà le fonctionnement de l’instance puisqu’il eut à suivre ses travaux à plusieurs reprises comme invité. Il intégra directement le secrétariat fédéral avec la charge de la Politique revendicative. Cette responsabilité impliquait : la coordination des luttes, la gestion de la délégation de la Commission mixte du Statut, ainsi que le suivi des dossiers revendicatifs relatifs aux salaires et aux libertés syndicales. De 1993 à 1998, il siégea également au conseil d’administration de la Mutuelle des cheminots. En 1997, il prit la responsabilité des collectifs nationaux, c’est-à-dire de la coordination de l’ensemble des instances de représentation des filières techniques de la fédération. La mission impliquait de faire remonter les revendications spécifiques ou encore d’assurer la gestion des cadres syndicaux des différents CTN. À ce titre, en 1999, il organisa au nom du Conseil national de la fédération « les Etats généraux des métiers cheminots » qui proposaient une réflexion sur les transformations contemporaines des postes de travail au sein de la SNCF. Cet évènement permit d’élaborer des pistes de réflexion pour que l’organisation puisse s’ajuster aux recompositions de l’emploi et du service public ferroviaire. En 2002, il prit en charge le secteur Économique de la fédération. Les deux mandats qu’il passa à cette responsabilité furent marqués par trois grands dossiers. D’abord, celui de la libéralisation du transport ferroviaire, principe édicté par l’Union européenne, qui provoqua un démantèlement des services du Fret face à laquelle la fédération des cheminots résista. Ensuite, les conséquences de l’éclatement progressif de l’entité SNCF, initiée en 1997, avec la division entre l’Infrastructure et l’Exploitation. Enfin, le dossier de la régionalisation des services ferroviaires.

Ce fut également à l’échelon fédéral qu’Éric Ferron participa au mouvement social de l’hiver 1995. Chargé du secteur revendicatif, fort des réseaux de correspondants régionaux de la politique revendicative, il coordonna la relation avec les différents secteurs régionaux de la CGT. Aux côtés de ses camarades, il participa ainsi à faire de cette grève un mouvement organisé où tous les territoires purent communiquer quotidiennement sur les actions à mener. Son travail de coordination fut aussi orienté vers les autres organisations syndicales au travers d’échanges réguliers qui visaient à entretenir le caractère unitaire de la mobilisation. Cette lutte fut un grand succès aussi bien pour les cheminots que pour l’ensemble de la population qui soutint largement les grévistes. Éric Ferron garda en mémoire ses interventions auprès d’autres corporations ou encore les messages de soutien – et parfois même les applaudissements lors des manifestations – reçus de la part la population.

Afin d’assurer au mieux l’ensemble de ses responsabilités, Éric Ferron suivit plusieurs stages de formation syndicale : élémentaire (1978), moyen (1986) et supérieur (1990). Par ailleurs, il fut lui-même formateur sur les questions économiques, de négociation collective ou de la structuration de l’entreprise SNCF.

En parallèle de son engagement syndical, Éric Ferron eut un engagement politique. En 1984, il adhéra au Parti communiste français. Il fut membre du comité de section PCF de Nogent-sur-Oise (1984-1994), du comité de la Fédération PCF de l’Oise (1990-1994) puis du comité de section des cheminots de Paris Nord (1994-2008).

En 2008, Éric Ferron se remaria avec Laure Naïdenov, médecin généraliste, présidente de la section CNL de Bagnolet (1999-2008). Il était le père de deux enfants, une fille née d’un premier mariage et un garçon né de sa seconde union.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article252799, notice FERRON Eric, Jan, Michel par Nicolas Simonpoli, version mise en ligne le 15 mai 2023, dernière modification le 15 mai 2023.

Par Nicolas Simonpoli

Portrait d'Eric Ferron paru dans le journal du 39ème congrès de la Fédération CGT des Cheminots, n°6, 28 novembre 2003
Portrait d’Eric Ferron paru dans le journal du 39ème congrès de la Fédération CGT des Cheminots, n°6, 28 novembre 2003
[Droits réservés. Coll. IHS-CGT cheminots]
Eric Ferron dans son bureau à la Fédération CGT des cheminots, [1988]
Eric Ferron dans son bureau à la Fédération CGT des cheminots, [1988]
[Droits réservés. Coll. IHS-CGT cheminots]
Eric Ferron
Eric Ferron
[Droits réservés. Coll. IHS-CGT cheminots]

SOURCES : Arch. IHS-CGT des Cheminots (27 FD , 30 FD 1-2). — La tribune des cheminots, 1987-1999, numéros : 650, 679, 696,759. — Entretien avec l’intéressé, janvier 2023.

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