LE LOUS Maurice

Par Madeleine Peytavin

Né le 16 septembre 1941 à Ergué-Armel (Finistère) ; cheminot, agent administratif ; syndicaliste CGT, élu du Comité local des activités sociales de Paris Saint-Lazare, élu du Comité d’établissement régional de Paris Saint-Lazare (1986-1996), administrateur CGT de l’Union artistique et intellectuelle des cheminots français.

Maurice le Lous naquit dans un foyer modeste. Son père, Pierre, était ébéniste, sa mère, Marie-Anne Jaouen, était femme au foyer. Maurice était l’aîné d’une fratrie de deux enfants. Dans le cercle familial, la corporation cheminote était représentée par son grand-père paternel qui fut conducteur de route pour la Compagnie du Paris-Orléans, affecté à Orléans (Loiret).

Maurice Le Lous effectua ses études à Quimper (Finistère) où il obtint son BEPC au collège Paul Bert. Au terme de sa scolarité, il fut embauché en qualité de magasinier chez un marchand de machines agricoles de la marque McCormik, établi à Quimper. Il y travailla jusqu’en 1960. Cette année-là, il présenta un concours de recrutement d’employé de bureau organisé par la région Ouest de la SNCF. Ayant réussi l’épreuve, il fut admis dans l’entreprise le 1er février 1960 en qualité de rédacteur stagiaire, échelle 5 à la Subdivision régionale de comptabilité Matériel et Traction Ouest. Situé au 20 rue de Rome à Paris, ce service était surnommé « le bagne » par certains agents administratifs, en raison de l’inadaptation des locaux et des méthodes autoritaires du chef de service. Maurice Le Lous effectua toute sa carrière dans l’administration de la SNCF. Il prit sa retraite en octobre 1996 avec le grade d’agent administratif spécialisé (AADSP), premier grade la maitrise.

Maurice Le Lous effectua son service national en Algérie, en 1961. Il conserva de cette expérience le souvenir de la violence coloniale et de sa prise de conscience politique. Le 1er novembre 1961, il participa à la répression d’une manifestation dans la banlieue d’Alger. Dans un camion militaire avec dix-neuf autres jeunes appelés, dotés chacun d’un fusil et de soixante cartouches, la hiérarchie militaire leur demanda de sauter du camion, crosses en avant, pour disperser les manifestants. Il vit l’un de ses camarades, pas plus méchant qu’un autre, attraper une femme âgée et la menacer de la crosse de son fusil. Il garda en mémoire le souvenir des yeux de la femme fixés sur le soldat et ses paroles prononcées d’une voix forte et calme : « vous pouvez frapper la vieille, vous le pouvez, mais l’Algérie sera algérienne, ça vous n’y pouvez rien ». Au moment de son arrivée en Algérie, il se considérait comme socialement et politiquement inculte à cette époque mais il apprit très vite dans ce contexte de guerre. Après cette journée de novembre 1961, il se rangea définitivement du côté des opprimés et de ceux que l’on méprise. Après son retour en France, il s’inscrivit aux cours du soir de philosophie matérialiste de l’Université nouvelle et il comprit qu’il pouvait agir.

Le 1er janvier 1968, Maurice Le Lous adhéra à la CGT. Il perçut l’engagement syndical comme un moyen d’être utile aux autres. Maitrisant parfaitement la langue française et bénéficiant d’une aisance orale, ses interventions furent vite remarquées. Il prit des responsabilités dans le domaine social, la solidarité et la culture. En 1969, il fut élu au Comité local des activités sociales de Paris Saint-Lazare (CLAS) et au Comité régional des activités sociales de Paris Saint-Lazare. Il fut aussi élu délégué du personnel, élu du Comité mixte et du Comité d’hygiène sécurité et conditions de travail (CHSCT). A ses débuts, son activité syndicale se déploya sous la responsabilité du secrétaire de secteur de Paris Saint-Lazare, Émile Le Duff, militant d’une grande ouverture, tacticien et pédagogue. Après les grèves de mai-juin 1968, la direction régionale de Paris Saint-Lazare se trouva en grande difficulté pour organiser les convoyages et séjours des enfants en colonies de vacances. La délégation CGT, après consultation des autres organisations syndicales, proposa l’aide concrète des élus du social pour l’organisation du convoyage des enfants. Ils furent efficaces. Ce soutien fut renouvelé tous les ans. Par la suite, le secrétaire de secteur désigna un petit groupe de militants du social pour proposer des initiatives, en particulier dans le domaine culturel, au niveau du Comité régional des activités sociales. Après le rôle joué par les syndicats dans l’organisation des départs en vacances des enfants de cheminots, la direction régionale de Paris Saint-Lazare accepta que les élus du personnel participent à d’autres domaines, telle l’organisation des arbres de Noël ou encore des initiatives culturelles. L’arbre de Noël fut organisé par les élus du personnel aux activités sociales. Le paternalisme de l’entreprise s’en trouva affaibli mais le budget alloué à chaque enfant (5,75 francs en 1969) dénonçait toujours une politique sociale peu ambitieuse. Le choix du spectacle comme le choix des cadeaux reposèrent uniquement sur les élus. Suivirent, pendant cinq ans, à partir de 1972, une série d’initiatives culturelles tranchant avec celles de la direction. La délégation CGT s’entendait au préalable avec les autres organisations syndicales pour les présenter à la direction. La CGT proposa une semaine du livre, une exposition et de nombreux auteurs étaient invités. Ils furent aidés dans leur démarche par des auteurs comme Pierre Gamarra, Armand Lanoux et Pierre Seghers. Au cours de ces initiative, les élus syndicaux gagnèrent en expérience, en responsabilité et en moments de liberté comme, en 1975, où les ouvrières des ateliers SNCF de Nanterre La Folie (Hauts-de-Seine) furent autorisées à visiter, sur le temps de travail, l’exposition consacrée aux travailleuses. Certaines de ces femmes se virent pour la première fois en situation de travail et marquèrent leur étonnement : comment leur activité pouvait-elle intéresser les visiteurs ?

En 1986, au moment de la mise en place des CE, les militants avaient déjà acquis une certaine expérience en matière de politique social. Cette même année, Maurice Le Lous fut élu secrétaire-adjoint du Comité d’établissement régional de Paris Saint-Lazare et nommé président des activités sociales. Il conserva cette responsabilité durant trois mandats ce qui lui permit de mettre en œuvre une politique de développement des bibliothèques d’entreprise : la première fut créée aux ateliers de Nanterre La Folie, la deuxième aux ateliers de Clichy-Levallois (Hauts-de-Seine) puis la troisième aux ateliers d’Achères (Yvelines). Cette politique fut conçue en opposition à celle des bibliothèques paternalistes créées dans les cités cheminotes par la SNCF.

La CGT demanda à Maurice Le Lous de la représenter, au titre des représentants du personnel exécution, au conseil d’administration de l’Union artistique et intellectuelle des cheminots français (UAICF) au niveau du Comité central des activités sociales (CCAS). Après la mise en place du Comité central d’entreprise (CCE), il représenta le CCE à l’UAICF. Dès lors, il s’investit durablement dans cette association y assumant différentes responsabilités : au comité Ouest, à la direction de l’UAICF, au Cercle littéraire des écrivains cheminots (CLEC). Grand lecteur, il devint vice-président du CLEC où il aima défendre la langue française. Il partageait la préoccupation de la CGT qui défendait la langue française. Attentif aux travaux d’histoire sur la vie cheminote, il proposa que le Comité d’établissement régional de Paris Saint-Lazare se dote d’une commission sur le thème des mémoires du monde du travail dédiée au recueil des archives des cheminots et à leur versement aux Archives départementales.

En fin de carrière, il siégea au conseil d’administration de la Caisse de retraite de la SNCF. Par ailleurs, Maurice Le Lous fut désigné par la fédération CGT et un collectif de militants pour mettre sur pied une mutuelle plus proche des cheminots. Il fut, ainsi, membre du parrainage pour la constitution de la Mutuelle des cheminots de la région parisienne (devenue Mutuelle Entrain) en 1972. Il en fut secrétaire durant de nombreuses années.

Une fois venu l’âge de la retraite, il poursuivit son engagement à la section CGT des retraités de Paris Saint-Lazare.

Maurice Le Lous se maria avec Michelle Crochet, cheminote des services administratifs du service Voie et Bâtiments, syndiquée à la CGT. Ils eurent une fille.

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article252814, notice LE LOUS Maurice par Madeleine Peytavin, version mise en ligne le 15 mai 2023, dernière modification le 14 mai 2023.

Par Madeleine Peytavin

SOURCES : Arch. IHS-CGT des cheminots. — La Vie du Rail, 3 mars 2017. — Discours de départ à la retraite de Maurice Le Lous, octobre 1996. — Discours en hommage à Maurice Le Lous par Philippe Leclerc, octobre 1996.

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