AUSSOLEIL François

Par Jean Maitron, Antoine Perrier

Né le 15 octobre 1861 à Marsillac-la-Croisille (Corrèze), mort le 31 janvier 1928 à Marsillac : militant socialiste, puis communiste ; député de la Corrèze (1919-1924).

Député en 1921

Après de bonnes études secondaires au petit séminaire de Servières (Corrèze) et de Brive (Corrèze) où il reçut une excellente culture classique, François Aussoleil entra en 1881 dans l’Université comme répétiteur au collège du Puy (Haute-Loire) et au lycée de Bourges (Cher). Le 10 octobre 1885, il était licencié ès-lettres de la Faculté des Lettres de Lyon. Il fut alors nommé professeur de rhétorique dans divers collèges, à Commercy en 1904, Bédarieux, Lectoure, Saintes, Mende, Millau et enfin Brive où il termina sa carrière.

Son frère, radical-socialiste, maire de Marcillac-la-Croisille, fut candidat aux élections législatives du 15 septembre 1907 dans la circonscription de Tulle-Sud. Quant à François Aussoleil, il devint socialiste en 1903 puis adhéra au Parti socialiste SFIO dès sa création en 1905, et ne tarda pas à y jouer un rôle important.

Il fut tour à tour secrétaire de la section de Brive, secrétaire de la Fédération socialiste SFIO de la Corrèze en 1914, délégué de la Fédération au conseil national du Parti SFIO. Il fit des conférences et écrivit de nombreux articles contre la loi des trois ans. Signe de son ouverture, le 20 avril 1913, l’auditoire du théâtre de Brive le désigna comme président de bureau pour accueillir et présenter l’anarchiste Sébastien Faure. Il fut par ailleurs administrateur de la coopérative de consommation de Brive « L’Émancipation ».

Candidat du Parti socialiste dans la 1re circonscription de Tulle aux élections législatives de 1910, il recueillit 794 voix, puis, en 1914, 2 139 voix.

Aux élections législatives du 16 novembre 1919, au scrutin de liste départemental assorti de représentation proportionnelle, placé en tête de la liste socialiste, il fut élu député de la Corrèze avec 16 390 voix.

En décembre 1920, au congrès de Tours, il adhéra au Parti communiste avec la majorité de la Fédération de la Corrèze et fut élu à la commission administrative de l’Humanité. Il appartint à la direction régionale du Parti élue au congrès de Bugeat le 30 janvier 1921 — voir Vazeilles.

À la Chambre des députés, il appartint à diverses commissions, en particulier à celle de l’enseignement et des beaux-arts, à la commission d’Alsace-Lorraine, à celle des mines, à celle de législation civile et criminelle. Il participa à diverses discussions parlementaires, en particulier sur le budget général de l’exercice 1921 où il fut chargé d’expliquer le vote du groupe, sur la réforme de l’enseignement secondaire, sur la Bibliothèque nationale, sur la hausse des prix des baux à loyer, sur le double régime. Son adresse parisienne était à Boulogne-sur-Seine.

Candidat aux élections législatives de mai 1924 à la tête d’une liste du Bloc ouvrier et paysan, il ne fut pas réélu. Il se retira alors à Marcillac-la-Croisille où il mourut quatre ans plus tard. Son frère était maire de Marcillac-la-Croisille et François eut la délicatesse, délicatesse respectée par son fils après sa mort, de ne prendre aucune initiative sur le plan local qui eût paru désavouer le maire de Marcillac-la-Croisille. François Aussoleil avait un réel talent de journaliste. Excellent polémiste, il maniait l’ironie, parfois dure, jamais sarcastique ni méchante. Il donna au journal Le Travailleur de la Corrèze, devenu ensuite le Travailleur du Centre-Ouest, sous les titres « Panthéon corrézien », « Panthéon limousin », des portraits signés « Léon », habilement brossés, où les hommes politiques corréziens, les députés socialistes de la Haute-Vienne étaient quelque peu malmenés. En dernier lieu, il donna au Travailleur du Centre-Ouest, sous le titre « Bruits de partout » et sous la signature « Apricus », de charmants échos, pleins d’humour, parfois piquants (Apricus diminutif du mot aper, en latin : sanglier).

En octobre 1925, François Aussoleil, participant à la violente campagne antimilitariste menée par le Parti communiste à l’occasion de la guerre du Maroc, fut condamné à deux mois de prison et 100 F d’amende pour provocation de militaires à la désobéissance, en même temps que plusieurs autres militants. Au reçu de l’avertissement l’invitant à se rendre à la maison d’arrêt de Tulle, en date du 2 juillet 1926, pour l’exécution du jugement rendu contre lui, il adressa à Pierre Laval, alors ministre de la Justice, garde des Sceaux, le piquant billet suivant, publié par Le Travailleur du Centre-Ouest du 10 juillet 1926 :

« Écoute, Laval, pour ne pas ennuyer les gendarmes de la Roche-Canillac qui sont de braves gens et avec qui je désire rester en bons termes, je me suis rendu volontairement à la maison d’arrêt de Tulle. Mais ne pourrais-tu pas recommander à ton procureur d’en user moins familièrement avec les gens ? Comment : « le nommé Aussoleil ». — Est-ce que je ne suis pas aussi Monsieur que lui ? Après tout, nous n’avons pas gardé les… sceaux ensemble, ce jeune homme et moi.

« Toi, tu as le droit de me tutoyer. Nous avons mangé du bourgeois côte à côte et je me souviens que tu avais bon appétit… Ce droit, je ne le reconnais pas à ton procureur, à moins qu’il n’ait été socialiste en son jeune temps.

« Je ne t’en veux pas de m’avoir fait mettre en prison, mais je ne te pardonne pas de méconnaître les formules de la politesse bourgeoise que tu dois pratiquer plus scrupuleusement qu’aucun autre, puisque tu les as piétinées plus qu’un autre.

« … Je ne désespère pas, mon cher Laval, de te faire passer moi aussi en correctionnelle pour provocation de bourgeois à la désobéissance dans un but de propagande anarchiste et de t’envoyer quelques mois en prison, quand notre temps sera venu. Mais j’y mettrai des formes et je dirai à mon procureur de t’appeler camarade ».

Les articles de doctrine ou de propagande étaient fort bien composés et écrits en un style très châtié. Le dernier qu’il publia était consacré à Trotski. Aussoleil avait su très bien rendre la psychologie de Trotski, l’ancien chef de l’armée rouge, devenu l’adversaire de Staline.

Il mourut dans sa propriété de Nougein, commune de Marcillac-la-Croisille et se obsèques furent célébrées le 3 février 1928 en présence de nombreux militants communistes corréziens, limousins ou périgourdins

François Aussoleil était franc-maçon. Initié, le 8 juin 1894, à la R.°. L.°. Les Vrais Amis Réunis, à l’Orient de Bédarieux (GODF), il fut affilié à celle de Brive, La Fraternité, au gré de son parcours professionnel. Il en démissionna le 21 février 1920, quelques mois avant le Congrès de Tours, considérant que "la Maçonnerie passe aux yeux de tous pour suivre certaines directives qui [m]’avaient séduit il y a quelque 30 ans. [Je] vois que ces directives sont abandonnées".

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article2545, notice AUSSOLEIL François par Jean Maitron, Antoine Perrier, version mise en ligne le 18 octobre 2010, dernière modification le 15 octobre 2022.

Par Jean Maitron, Antoine Perrier

Député en 1921

SOURCES : Arch. Nat. F7/12992. — Le Travailleur du Centre-Ouest. — Jean-Michel Valade, Au fil de la Franc-Maçonnerie corrézienne, La Fraternité à l’Orient de Brive, éditions de L’Esperluette, Treignac, 2019, 82 p.

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