BABEUF Gracchus [BABEUF François-Noël, dit Camille et, à partir de l’automne 1794, BABEUF Gracchus ou GRACCHUS BABEUF]

Par Jean Dautry, Claude Mazauric

Né le 23 novembre 1760 à Saint-Quentin (Aisne), guillotiné le 8 prairial an V (27 mai 1797) à Vendôme (Loir-et-Cher) ; théoricien communiste et dirigeant révolutionnaire.

Biographie mise à la Une à l’occasion de 220 ans de la mort de Gracchus Babeuf. Les notices des babouvistes et néo-babouvistes ont été également mises en libre accès.

Gracchus Babeuf
Gracchus Babeuf

Venu au monde « sans fortune, ou plutôt au sein d’une pauvreté absolue » (c’est ce qu’il dit lui-même), François-Noël Babeuf était Picard. Son père, Claude Babeuf, avait vu le jour en 1712 à Monchy-Lagache (Somme). Claude Babeuf avait été soldat au régiment Dauphin-Étranger Cavalerie sous le nom de l’Épine et avait déserté. Cela lui avait donné l’occasion d’apprendre l’allemand et de se pourvoir d’assez de connaissances pour être ultérieurement l’excellent, le très sévère et l’unique maître de François-Noël (l’un de ses fils). Rentré en France en 1755, à la faveur d’une amnistie royale, il avait épousé une jeune Picarde, Marie-Catherine Anceret, née vers 1742 à Cerisy-Gailly (Somme). Pour subsister, Claude Babeuf était employé dans l’administration des Fermes, c’est-à-dire dans l’administration des impôts indirects, gérée par les adjudicataires connus sous le nom de Fermiers généraux. Il était en fait garde des gabelles. Selon l’acte de baptême de François-Noël du 24 novembre 1760 dans la paroisse Saint-Nicaise de Saint-Quentin, il est désigné sous le nom de « Babu », demeurant au faubourg Saint-Martin, à l’ouest de la ville. Claude Babeuf perdit sa place vers 1775, et mourut en 1781. Catherine Babeuf en 1819.

François-Noël commença à gagner sa vie, âgé d’une douzaine d’années, comme terrassier au Canal de Picardie en construction jusqu’en 1776. Ce fut une période difficile dont il garda le souvenir de n’avoir pu ni lire ni écrire, ce qu’il savait déjà parfaitement faire auparavant. Vraisemblablement vers 1777, il inaugura une série de travaux fort variés qu’il est assez difficile de suivre, les dates variant beaucoup selon les sources. Il entra d’abord comme apprenti feudiste chez un commissaire à terrier, Hullin, à Flixecourt (Somme), entrepreneur dont le métier consistait à refaire ou à retrouver les titres en vertu desquels les seigneurs pouvaient prétendre percevoir sur les paysans des droits tombés en désuétude.

Il s’agissait pour les propriétaires de seigneuries ou les tenants-fiefs de se créer des ressources en capital en réactivant l’exploitation féodo-seigneuriale. Réaction nobiliaire, ou féodale, ou seigneuriale, de quelque dénomination que l’on affuble ce mouvement qui n’est pas propre à la Picardie mais qui eut beaucoup de force en Picardie, c’est en y prenant sa modeste part que Babeuf fit son apprentissage. « Ce fut dans la poussière des archives seigneuriales que je découvris les mystères des usurpations de la caste noble » écrira-t-il en 1794. C’est ainsi que le jeune Babeuf put connaître et comprendre la réalité sociale des campagnes picardes. Il la vit dominée par un quadruple phénomène, désormais bien connu des historiens après les travaux de Florence Gauthier et Guy Ikni : la forte persistance des pratiques collectives de terroir, consolidées par la vigueur de la communauté villageoise, la tendance à la concentration des fermes contre laquelle par les luttes et par le « mauvais gré » réagissaient exploitants petits et moyens, l’effort constant de la noblesse propriétaire et des seigneurs laïcs et ecclésiastiques pour préserver la « propriété éminente » et les droits afférents en s’appuyant sur l’appareil judiciaire seigneurial, enfin la paupérisation croissante des paysans sans terre que le développement de la proto-industrialisation, la manufacture textile dispersée et les grands travaux comme la construction du canal de Picardie, transformaient en prolétaires ruraux. Le « mauvais gré » consistait d’abord à « tirer ressource maximale de l’exploitation » dont on était chassé, ensuite, pour le cas où le propriétaire découvrait un volontaire assez hardi pour reprendre la ferme, à s’acharner contre les biens et même contre la personne du téméraire appelé « dépointeur ». Il y avait là, de toute manière, une mise en cause du principe de la propriété au profit « du droit de l’exploitant jugé supérieur dans la mentalité paysanne ».

Tout en travaillant, Babeuf compléta son instruction, se familiarisa avec les auteurs de l’antiquité et avec les philosophes français du XVIIIe siècle. En 1780 il exerça plusieurs fonctions entre autres chez les Bracquemont à Damery-en-Santerre (Somme) où Marie-Anne Langlet (Voir Marie-Anne Babeuf) était domestique. Ils s’épousèrent en 1782. Puis il semble que Babeuf fut commis chez un arpenteur de Noyon (Oise), qu’il travailla ensuite à Grivilliers (Somme) où naquit leur fille aînée, Sophie (septembre 1783) et, vers la fin de 1784, qu’il s’établit à son compte commissaire à terrier à Roye (Somme). Il éleva ses enfants en s’inspirant de la pédagogie de Jean-Jacques Rousseau, qu’il avait lu, gagnant ainsi une culture théorique par des lectures multiples, parallèlement à sa vie professionnelle et que ses séjours ultérieurs en prison lui permirent de compléter. Jean-Jacques Rousseau était son auteur de référence. Il puisa dans les Discours et dans le Contrat social une philosophie politique de l’égalité. « Je réfléchis et je médite » écrivait-il en 1793 « autant qu’a pu le faire en son temps Jean-Jacques Rousseau. Comme lui, la recherche des moyens d’opérer le bonheur fut ma continuelle étude ». Il avait aussi lu Diderot et, particulièrement, le Code de la Nature de Morelly, que, comme tout le monde, il attribuait toujours à Diderot au procès de Vendôme, et où il avait pu lire entre autres, dans cette utopie radicale, que « rien n’appartiendra singulièrement ni en propriété à personne ». Il avait encore lu Mably et divers agronomes.

Dès 1785 sa pensée prit tournure. Cela se voit dans sa correspondance avec Dubois de Fosseux, secrétaire perpétuel de l’Académie des Belles-Lettres d’Arras (Pas-de-Calais), qui dura de novembre 1785 à mars 1788. Cette correspondance qui a été publiée est désormais bien connue. Babeuf ne fut pas le correspondant distingué de l’Académie d’Arras qu’il crut être, un temps du moins. Mais dans le fatras des informations et des questions reçues d’elle par circulaires manuscrites et périodiques auxquelles il répondait avec beaucoup de zèle, il trouva matière à nourrir ses propres interrogations. On le mesure aisément à la lecture du brouillon d’une longue réponse qu’il n’envoya pas à Dubois de Fosseux, peut-être par timidité, mais dont il nous reste à Moscou la copie faite par Henri Advielle. Contre l’idée d’un partage des « grandes fermes » et sans se prononcer encore sur le statut de la propriété des biens, il y préconise l’exploitation collective des terres, dans l’intérêt conjoint des « co-associés » et de la meilleure forme de mise en culture. Dans ce même texte, dressé contre toutes les formes d’oppression qu’il met en série, Babeuf proteste contre l’esclavage aux colonies, contre la soumission forcée des « serfs de la Moscovie » et contre la domination de genre subie par les femmes au profit de l’autre moitié de l’humanité ! Dans ce long texte de 48 pages, sorte de méditation intime, Babeuf prend résolument parti pour une refonte générale de la société et de l’État.

Dubois de Fosseux communiqua ensuite à Babeuf le 26 octobre 1786 le Prospectus d’un ouvrage à paraître de l’avocat Collignon qu’il avait reçu : L’Avant-Coureur du changement du monde entier par l’aisance, la bonne éducation et la prospérité générale de tous les hommes ou prospectus d’un mémoire patriotique sur les causes de la grande misère qui existe partout et sur les moyens de l’extirper radicalement. C’était le plan d’une société utopique fondée sur la propriété commune. Babeuf en fut ravi et conclut : « Il faudrait probablement pour tout cela que les rois déposassent leurs couronnes et toutes les personnes titrées et qualifiées leurs dignités, leurs emplois, leurs charges [...] Il faut, pour opérer une grande révolution, exécuter de grands changements. »

Babeuf se lança dans le mouvement politique de la convocation des États généraux et de la rédaction des cahiers de doléances. Il proposa sans succès des additions au cahier du tiers du bailliage de Roye. Il vint à Paris après la prise de la Bastille, se fit correspondant d’une gazette et attaqua Mirabeau dans une brochure, La nouvelle distinction des Ordres, par M. de Mirabeau, qui est non le premier de ses écrits qui ait été imprimé, mais le troisième, les deux premiers concernant son métier de commissaire à terrier, d’ » archiviste-terriste », selon son expression.

S’il était présent à Paris dans la seconde quinzaine de juillet 1789, c’est pour y veiller à l’édition de son livre, conçu avec le géomètre Audiffred, qui parut en octobre sous le titre Cadastre perpétuel. Il s’agit d’un ouvrage technique dont le projet remonte à 1787 et qui propose un mode unique, fondé sur la trigonométrie, de mesurage des terres, préalable nécessaire à l’enregistrement des mutations de biens et cela aux fins de rationaliser l’assiette de l’impôt foncier qu’on projetait d’établir. Mais écrit en « en faveur des opprimés » le texte de Babeuf préconise en même temps une réforme générale de l’impôt, fondée sur la proportionnalité des propriétés et, allant au delà, il suggère un partage des terres, une sorte de « loi agraire » que la préservation de la paix sociale rendra peut-être nécessaire. Il répondait aux objections : « Il faut respecter les propriétés ? Mais si, sur vingt-quatre millions d’hommes, il s’en trouve quinze qui n’aient aucune espèce de propriété parce que les neuf millions restants n’ont point assez respecté leurs droits pour leur assurer même les moyens de conserver l’existence, il faut donc que les quinze millions se décident à périr de faim pour l’amour des neuf ? Ils ne s’y décideront pas très volontiers sans doute et, probablement, il vaudrait mieux que la classe opulente s’exécute envers eux de bonne grâce que d’attendre leur désespoir. »

Mais les événements de juillet 1789 et des mois suivants ne le remplirent pas uniquement d’aise. Il balança, jusqu’en 1793, entre l’agitation politique locale et la fascination de l’histoire qui se fait dans la capitale. Malgré son adhésion enthousiaste au nouveau cours, il s’attristait des violences populaires, en des termes que Jaurès approuvera : « Les maîtres, au lieu de nous policer, nous ont rendus barbares parce qu’ils le sont eux-mêmes » confie-t-il, dans une lettre, à sa femme, « lls récoltent et récolteront ce qu’ils ont semé ». « J’étais » dira-t-il encore « à la fois satisfait et mécontent ».

Rentré à Roye, en octobre, il s’employa, selon une expression du moment, à « colérer le peuple » et il prit la tête de l’agitation massive pour la suppression des droits déclarés rachetables et des impôts indirects d’ancien régime (aides et gabelles). Il fit signer une pétition dans huit cents communes de la Somme et de l’Aisne, et lança un journal Le Correspondant picard, imprimé à Noyon et qui aura 40 numéros en 1790 jusqu’au début de 1791. On connaît aussi de lui une autre feuille, celle-là parisienne, et dont le numéro 2 et dernier porte la date du 3 juillet 1790, le Journal de la Confédération.

Pour son action à Roye, Babeuf fut emprisonné à Paris du 19 mai au 10 juillet 1790, libéré sous la pression de l’opinion publique, et sans doute était-il allé respirer un instant l’air de Paris, au moment de la fête de la Fédération, à un an de date de la prise de la Bastille. Il fut de nouveau emprisonné à Roye en avril 1791, provoquant à chaque fois une intense mobilisation populaire pour sa libération.

Sans qu’on sache exactement quels étaient ses moyens d’existence, Babeuf joua un rôle grandissant en 1791 dans toute l’ancienne Picardie. Il rédigeait doléances et réclamations, pour la commune de Méry-la-Bataille dans l’Oise, pour la commune de Davenescourt dans la Somme, etc., et sans doute ce métier d’écrivain patriote au service du public, en même temps que la vente de son journal, rapportaient-ils à sa famille de quoi vivre très médiocrement, parfois juste de quoi ne pas mourir de faim. Aux élections pour l’Assemblée législative, en septembre, il s’occupa dans l’Oise de l’élection du curé démocrate Coupé. Comme Maximilien Robespierre*, Jean-Paul Marat et d’autres, il avait pris position contre le système du cens électoral et de la distinction des citoyens « actifs » et « passifs » institués par la Constitution au profit des chefs de famille aisés.

Le développement de la Révolution en 1792 donnait à Babeuf des chances de succès politique. Il fut élu en septembre membre du Conseil général du département de la Somme et sera ultérieurement administrateur du district de Montdidier (Somme), mais réputé partisan de la « loi agraire », il n’a évidemment pas été élu à la Convention. Il s’agissait pourtant d’une erreur d’appréciation. Babeuf n’a jamais approuvé la « loi agraire » du moins dans son acception de l’époque. La « loi agraire », c’est-à-dire le partage égalitaire des terres, ne paraît pas à Babeuf — en dépit du caractère très mobilisateur de cette revendication — de nature à régler le problème dans le sens souhaité. Pour lui, conformément à son intuition de 1786-1788, ce qui compte c’est l’ » appropriation collective des terres », et la « communauté des biens et des travaux ». Il la dénonça à plusieurs reprises : « la loi agraire, cela n’a pas de sens commun », « la loi agraire est une "sottise", alors que le but de la conjuration est de "dépropriaiser" toute la France... » Dans l’esprit de Babeuf, ce n’était pas synonyme du partage des terres.

S’occupant en qualité d’administrateur du district de Montdidier de la vente des biens nationaux, il substitua, dans la vente d’une ferme, au nom de l’acquéreur, celui du fermier : pratique, semble-t-il assez banale. Il n’y aurait rien eu à dire s’il ne s’était agi de Babeuf, mais Babeuf était capable de tout puisqu’il était « partisan de la loi agraire » ! A-t-il cru aider le pauvre contre le riche, rédiger, si l’on peut dire, un « faux révolutionnaire » ? Pourtant le bénéficiaire de l’opération n’était pas précisément un petit exploitant. Une étude approfondie tendrait à dénoncer la machination. Mais cela montre aussi que pour Babeuf, le « droit » de l’exploitant, même aisé, était supérieur à celui du propriétaire. Il fut suspendu de ses fonctions, fit l’objet d’un mandat d’arrêt auquel il se déroba en se réfugiant à Paris (février 1793). En mars il aida Fournier l’Américain dans sa polémique contre Marat, puis il trouva un emploi de secrétaire à l’administration des Subsistances de la République. Il y étudia les problèmes de la répartition des produits indispensables à la vie en relation avec le négoce et la propriété, non plus du point de vue de la production agricole qui avait été le sien jusqu’ici, mais du point de vue de la consommation dans les villes et de la demande, notamment dans une mégapole comme Paris.

S’il s’était tenu coi, il aurait échappé à ses ennemis de Montdidier, mais il participa à l’agitation sectionnaire de l’automne, il publia des brochures. Condamné par le tribunal d’Amiens, il fut arrêté le 24 brumaire an II (14 novembre 1793) et, jugement cassé et renvoyé au tribunal de l’Aisne, il fut remis en liberté provisoire le 17 frimaire (7 décembre) sur l’intervention de Sylvain Maréchal* qui le fit alors travailler aux Révolutions de Paris dont il était l’un des rédacteurs. Mais Babeuf ne pouvait rester sur cette équivoque et il se constitua prisonnier pour tenter de se justifier. Il fut écroué à l’Abbaye le 11 nivôse (31 décembre), transféré à Sainte-Pélagie le 1er germinal (21 mars 1794), puis à Laon (Aisne) le 9 messidor (28 juin 1794). La chambre criminelle de Laon, sans juger au fond, le mit en liberté provisoire sous caution le 30 messidor (18 juillet), en pleine Terreur, neuf jours avant la chute de Robespierre. Un passeport lui fut délivré le 2 thermidor (20 juillet). Il n’y a pas la moindre trace dans les Archives de l’Aisne d’une mise hors de cause définitive, dont il aurait bénéficié le 30 thermidor an II (17 août 1794) devant le tribunal criminel de l’Aisne, vingt jours après la chute de Robespierre (Combier, G. Dumas). Peut-être s’agissait-il de mesures globales intervenues dans le cadre de la grande « libération » thermidorienne ?

Comme beaucoup d’autres révolutionnaires sans-culottes ou réformateurs sociaux, Babeuf avait sans doute supporté avec impatience la dictature du Comité de Salut public, les limitations qu’elle imposait au mouvement sectionnaire et l’emploi de la terreur également contre les militants populaires. Dès son retour à Paris, au début de thermidor, il avait préparé le Journal de la Liberté de la Presse, dont le premier numéro date du 17 fructidor (3 septembre 1794).

Dans le Journal de la Liberté de la Presse, c’est au nom de la démocratie et de la libre expression des opinions que Babeuf s’en prend à Robespierre et au Comité de Salut public d’avant le 9 thermidor, et qu’il louait les thermidoriens. Il faisait chorus avec les contre-révolutionnaires par des brochures aux titres tapageurs Du Système de dépopulation, ou la vie et les crimes de Carrier..., Les Battus payent l’amende ou les Jacobins jeannots..., Voyage des Jacobins dans les quatre parties du monde... Et pourtant s’il attribuait à la Terreur, à celle exercée par Carrier à Nantes (Loire-Inférieure) et en Vendée et à la Terreur en général, des plans pour faire mourir de faim le peuple de Paris, mieux encore s’il la concevait comme un système de régulation du rapport des hommes aux ressources disponibles, s’il justifiait la fermeture du club des Jacobins, c’est du côté du peuple de Paris qu’il se plaçait et non du côté de la bourgeoisie thermidorienne, c’est avec l’espoir qu’il y aura bientôt de vraies sociétés populaires dont les Jacobins n’étaient à ses yeux qu’une contrefaçon.

Le numéro 22 du Journal de la Liberté de la Presse parut le 10 vendémiaire an III (1er octobre 1794). Le n° 23 portait un nouveau titre : Le Tribun du Peuple ou le Défenseur des Droits de l’Homme (14 vendémiaire-4 octobre), et ce n’était plus C.(amille) Babeuf qui le rédigeait, mais Gracchus Babeuf. Désormais, Gracchus Babeuf et Tribun du Peuple s’identifièrent au point que l’on s’adressa à Babeuf en l’appelant par le nom du journal et qu’il faisait lui-même la confusion. Et la métamorphose s’acheva le 28 frimaire (18 décembre) au n° 28, où Babeuf s’écria : « Je ressaisis le foudre de la vérité. Cédant à des insinuations de ce qu’on appelle prudence, j’ai voulu dans quelques opuscules détachés, pour faire passer en contrebande le rappel des principes, essayer le stylet de l’astucieuse politique, et prendre un long circuit pour arriver à quelques mots de raison... Je redeviens moi. » Et il constatait que « la dénomination de sans-culottes est à peu près ce que la cour de Louis XVI et les aristocrates de son temps voulaient qu’elle devînt, une injure. » Et il demandait que le « bonheur commun » devienne la réalité de la République. Dans le n° 31, du 9 pluviôse (28 janvier 1795) alors qu’un mandat d’arrêt était lancé contre lui et qu’il se cachait, il développait ce qu’est le droit à l’insurrection.

Appréhendé le 17 pluviôse (5 février), incarcéré à Paris, puis à Arras, à la prison des Baudets, puis de nouveau à Paris, le 24 fructidor (10 septembre) Babeuf fut libéré le 27 vendémiaire an IV (18 octobre 1795). Il avait, aux Baudets, fait connaissance entre autres de Charles Germain*, Taffoureau*, puis à Paris de Philippe Buonarroti.

Libre, Babeuf se fixa à Paris ; il continua le Tribun du Peuple interrompu par sa captivité au n° 33. Le n° 34, du 15 brumaire an IV (6 novembre 1795), demandait que les républicains plébéiens se réunissent, que la République reprenne un contenu plébéien au lieu d’être, avec la Constitution de l’an III et le Directoire, une République des propriétaires, que l’on revienne au meilleur du sans-culottisme, si l’on voulait vraiment lutter contre l’influence grandissante du royalisme sur le peuple de plus en plus misérable du fait de l’inflation (15 brumaire an IV — 6 novembre 1795). La réunion des républicains plébéiens, Babeuf s’employait à la réaliser autour de lui en fréquentant d’anciens robespierristes et d’anciens hébertistes, en mettant en rapports des révolutionnaires démocrates de toutes nuances : Le robespierriste Buonarroti et le ci-devant marquis Antonelle* qui n’a été ni hébertiste ni robespierriste, Darthé*, auxiliaire du conventionnel Le Bon, partisan de la terreur extrême, et Sylvain Maréchal, l’athée et le poète, tous ces hommes et beaucoup d’autres fréquentaient la Société du Panthéon, exactement la « Réunion des Amis de la République », club politique qui rassembla jusqu’à 2 000 personnes, à partir du 15 novembre 1795. Les amis de Babeuf n’y étaient pas seuls, mais ils y acquirent vite une influence considérable notable sur l’aile marchante du groupe.

Le n° 35 du Tribun du Peuple affichait à son sommaire : « Précis du grand Manifeste à proclamer pour rétablir l’égalité de fait. Nécessité pour tous les malheureux Français d’une retraite au Mont-Sacré ou de la formation d’une Vendée plébéienne » (9 frimaire — 30 novembre). Le manifeste, médité par Babeuf depuis les Baudets, affirmait que « des institutions plébéiennes doivent assurer le bonheur commun, l’aisance égale de tous les coassociés », que pour en finir avec la guerre des riches contre les pauvres, des patriciens contre les plébéiens, il faut que le peuple se soulève et établisse la seule société équitable, la société communiste.

Darthé ayant lu à la Société du Panthéon les violentes attaques de Babeuf contre le Directoire, dans son n° 40, et l’assistance ayant applaudi, le Directoire donna l’ordre à Bonaparte, commandant de l’armée de l’Intérieur, de fermer la Société du Panthéon, ce qu’il exécuta le 9 ventôse (28 février 1796).

Le Tribun du Peuple continua — il ira jusqu’au n° 43, du 5 floréal an IV (24 avril 1796). Un nouveau journal vit le jour : L’Éclaireur du Peuple, ou le Défenseur de vingt-quatre millions d’opprimés, signé La Lande, soldat de la Patrie, pseudonyme qui recouvre la collaboration de Babeuf, de Simon Duplay, ancien secrétaire de Robespierre, et de quelques autres.

Vers le milieu de mars 1796, Babeuf fonda le Comité insurrecteur qui comptait sept personnes ; le Comité insurrecteur s’occupa de préparer de nouvelles institutions en prenant la tête de la « Vendée plébéienne ». Cet organisme clandestin dirigea une propagande parmi les soldats et parmi les ouvriers parisiens, notamment avec des chansons qui restèrent célèbres, nomma des agents révolutionnaires, et poussa quelques ramifications en province. Un mois plus tard, au milieu d’avril, le Comité insurrecteur s’entendit avec un groupe de Conventionnels montagnards dont Amar et Vadier les plus actifs, qui désiraient constituer une opposition de gauche au Directoire avec l’objectif de transformer le régime, créant le Directoire secret exécutif qui se transforma en Comité insurrecteur de Salut public. On décida que les Conventionnels proscrits comme terroristes formeraient le noyau d’une assemblée que compléteraient des militants de l’époque de la sans-culotterie ou des amis proches de Babeuf (début mai 1796).

Le babouvisme avait ainsi des associés, et le complot risquait de devenir dangereux pour le Directoire. Babeuf et ses amis avaient conscience qu’il faudrait agir vite et ils préparèrent les décrets indispensables aussitôt après la prise du pouvoir : décret de police qui exclut de la vie politique les individus qui ne travaillent pas utilement pour la Patrie, c’est-à-dire ceux qui n’œuvrent ni manuellement ni intellectuellement ; décret économique qui supprime l’héritage et prévoit sinon l’exploitation collective des biens de la communauté, du moins une jouissance collective immédiate et réglementée de ses biens, etc.

Le Manifeste des Égaux, d’esprit libertaire et rigoureusement égalitariste que rédigea Sylvain Maréchal, ne pouvait pas passer pour exprimer les idées communes à tout le groupe babouviste et a fortiori les idées communes au groupe babouviste et à ses alliés de l’ancienne Montagne. Babeuf s’opposa à sa distribution.

Dénoncé à Carnot par un traître, le complot, où l’on en était à préparer l’acte d’insurrection sans très bien savoir ce qu’il devait être, avorta avec les arrestations du 10 mai (21 floréal an IV).

Babeuf, sous les verrous, écrivit au Directoire : « Regarderiez-vous au-dessous de vous, citoyens Directeurs, de traiter avec moi de puissance à puissance ! Vous avez vu de quelle vaste confiance je suis le centre. Vous avez vu que mon parti peut bien balancer le vôtre ! Vous avez vu quelles immenses ramifications y tiennent. J’en suis plus que convaincu, cet aperçu vous a fait trembler ! »

Cette lettre qui proposait une négociation au Directoire était pleine d’illusion mais Babeuf s’y montrait sensible à la nécessité de sauvegarder les institutions républicaines ; elle était en tout cas une courageuse revendication de la responsabilité essentielle dans une conjuration qui n’avait pas dépassé l’état de projet. La présence, parmi les prisonniers du Directoire, de Drouet qui était député aux Cinq-Cents obligeait constitutionnellement à juger les babouvistes et leurs alliés devant une Haute Cour qui n’était pas encore formée. Le procès ne commença à Vendôme que le 14 vendémiaire an V (5 octobre 1796). Le 7 prairial an V (26 mai 1797), Babeuf et Darthé — qui avait prévu, dans le plan insurrectionnel, l’exécution des membres du Directoire —, condamnés à mort, se poignardèrent, grâce à un petit couteau qui leur avait été remis discrètement par le fils de Babeuf, Robert dit Émile Babeuf, et n’en furent pas moins guillotinés le lendemain.

Babeuf avait fait montre devant la Haute Cour d’un grand courage, niant, avec les autres inculpés (ils étaient soixante-cinq), la conspiration pour tenter de sauver les moins compromis ou les fugitifs en assumant toutes les responsabilités dans cette « société de démocrates » mais reconnaissant toutes les attaques contre le Directoire et disant : « La décision des jurés va résoudre ce problème... : la France restera-t-elle une République, ou redeviendra-t-elle une monarchie ? ». Sa défense souffrit de ce choix car le Tribun, auquel se rapportaient toutes les pièces de l’accusation, ne put revendiquer toute la logique de sa position, comme l’a démontré Maurice Dommanget.

S’agissant du projet de Babeuf et de l’idéologie babouviste, plusieurs débats se sont croisés depuis 1960. Babeuf est généralement tenu pour le fondateur du communisme moderne à son état embryonnaire. Pourtant les mots « communisme », « communiste », n’apparaissent pas dans la littérature babouviste même si le qualificatif a pu être prononcé au Club du Panthéon, au témoignage de Restif de la Bretonne* dans Monsieur Nicolas. Babeuf lui-même n’a jamais parlé que d’association, de « co-associés » et s’il a évoqué son « communautisme », il ne s’est jamais qualifié de « communiste ». Si l’idée communiste a cependant existé, c’est sous la forme d’un projet de « communauté des biens et des travaux », un collectivisme de principe en quelque sorte mais assorti de multiples aménagements fondés sur l’idée d’une propriété nationale des biens, fonds périodiquement redistribués, d’une administration économique et d’un projet culturel de transformation des citoyens en producteurs associés éduqués dans la renonciation à l’esprit de lucre.

Au cours de la Révolution, alors qu’il n’en parle plus guère, Babeuf est-il resté fidèle à son projet antérieurement formé que nous qualifions de « communiste » ? Victor Daline puis Galina Tcherkova le pensent mais le souci des luttes immédiates a conduit Babeuf à valoriser les objectifs proches et les étapes transitoires. Il ne faut pas sous-estimer en effet la part de flou ou d’inachevé que comporte la doctrine de Babeuf sur ce point central. Il semble avoir renoncé (provisoirement ?) après Thermidor à l’idée d’une exploitation en fermes collectives pour en venir à une forme familiale d’exploitation. Prudence ? Réalisme ? Notons aussi que Babeuf et ses amis raisonnaient principalement en fonction de l’agriculture, semblant ignorer l’apparition de grandes sociétés capitalistes (les mines d’Anzin, dans le Nord) ou de manufactures concentrées, telles que, pourtant ils pouvaient en voir à Paris. Plus étonnant, l’industrialisation rurale diffuse — que l’on nomme maintenant proto-industrie — si elle n’était pas ignorée, n’était pas réellement analysée alors même qu’elle constituait une des voies de la prolétarisation des campagnes. A partir de 1795, la bourgeoisie ayant réalisé son hégémonie, la question de la transformation sociale repasse au premier plan comme une question politique dont l’enjeu est le pouvoir : le communisme cesse alors d’être une anticipation utopique puisée dans la littérature philosophique et nourrie des aspirations populaires pour devenir un objectif révolutionnaire.

De ce fait, le communisme de Babeuf en 1796 présente trois caractères qui ont fructifié par la suite, notamment dans les années 1832-1844 : en premier lieu, l’idée que la transformation sociale suppose un changement économique imposé par décret et soutenu par le mouvement des producteurs-citoyens ; en second lieu, que cette transformation socio-économique imposée par l’État révolutionné, suppose probablement la construction d’une organisation politique capable de réaliser la prise du pouvoir et son contrôle dans la période suivante de transition ; en troisième lieu, que le nouveau système ne pourra survivre qu’en éduquant les générations nouvelles dans l’esprit des nouvelles institutions et en réprimant les tentatives de résistances des nantis d’autrefois, une minorité sociologique.

Cette idéologie traduisait-elle un « pessimisme économique » attentif à répondre aux attentes et doléances de petits producteurs et de gens démunis aspirant à une répartition égale plus qu’à favoriser la croissance économique ? Les avis sont partagés depuis longtemps et le demeurent.

Certains valorisent les propositions de Babeuf des années antérieures à 1788 puis reprises en 1795 dans ses lettres à Germain, favorables au progrès technique qu’il approuve et à la division du travail dont il perçoit l’utilité ; d’autres historiens montrent l’ignorance dans laquelle se trouvaient Babeuf et les babouvistes, de l’élan donné à la productivité du travail par le début de l’économie usinière et de la transformation des valeurs d’usage en valeurs marchandes qu’ils refusent au nom de leur condamnation du « luxe », dans l’esprit des philosophes moralistes du siècle.

Il reste qu’en ce domaine comme dans celui de la révolution politique qu’ils conçoivent prioritairement comme une affaire d’État, le babouvisme porte la marque de son temps et reflète les aléas d’une conjoncture difficile et contradictoire. On peut cependant penser que la mémoire révolutionnaire n’aurait peut-être accordé à Babeuf que l’hommage au vaincu, celui que l’on rend, par exemple, aux « martyrs de Prairial », s’il n’y avait eu dans son aventure quelque chose de prophétique. Philippe Buonarroti , en soulignant la nouveauté radicale de la conspiration des Égaux a peut-être excédé le sens que les acteurs, sur le moment, lui ont donné. Mais il a eu l’intuition d’avoir assisté à une naissance, celle d’un dépassement de la révolution politique par la révolution sociale. Cette innovation idéologique nourrira au XlXe siècle à la fois la pratique et l’imaginaire du mouvement ouvrier. En même temps, l’enfermement forcé mais peut-être aussi l’élitisme voulu du premier babouvisme sera tour à tour revendiqué et dénoncé jusque dans son ultime avatar, le bolchevisme. Revendication abusive ? Généalogie polémique ? On peut au moins rejoindre le Marx de La Sainte Famille qui voyait en Babeuf un précurseur, porteur « des idées qui allaient au-delà de l’ordre ancien des choses ».

Philippe Buonarroti racontera en 1828 la Conspiration pour l’Égalité dite de Babeuf. Cet ouvrage lu en France après 1830 y fera éclore entre 1836 et 1840 parmi les ouvriers un mouvement communiste « néo-babouviste » d’une grande importance pour l’avenir en enracinant l’idée communiste parmi les ouvriers ou militants républicains puisque ce sont très probablement les néo-babouvistes de sociétés républicaines comme la Société des Amis du Peuple, la Société des Droits de l’Homme ou des sociétés secrètes comme celles des Familles et des Saisons, celles des Communistes matérialistes ou des Nouvelles Saisons, qui participèrent aux insurrections et tentatives parisiennes de 1832 à 1835 et en devinrent les principaux protagonistes de 1836 à 1841, qui encadrèrent les barricadiers du 23 février 1848 et parvinrent le lendemain à chasser Louis-Philippe.

Voir les compagnons de route de Babeuf : Antonelle Pierre, Drouet Jean-Baptiste, Félix Le Peletier.

Pour les néo-babouvistes : Phlippe Buonarroti

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article25532, notice BABEUF Gracchus [BABEUF François-Noël, dit Camille et, à partir de l'automne 1794, BABEUF Gracchus ou GRACCHUS BABEUF] par Jean Dautry, Claude Mazauric, version mise en ligne le 20 février 2009, dernière modification le 1er mars 2018.

Par Jean Dautry, Claude Mazauric

Gracchus Babeuf
Gracchus Babeuf

ŒUVRE : Bien que relativement accessibles, les Œuvres de Babeuf, brochures, articles et correspondance restent aujourd’hui encore très dispersées dans plusieurs dépôts d’archives, à Moscou (Institut du marxisme-léninisme) et en France, n’ayant pas encore donné lieu à une publication exhaustive. Néanmoins, à l’initiative de trois historiens de la Révolution française, V. Daline, A. Saitta, A. Soboul, on dispose d’un instrument de travail : Inventaire des manuscrits et imprimés de Babeuf, Paris, Commission d’histoire économique et sociale de la Révolution française (intégrée depuis 1983 au Comité des travaux historiques et scientifiques du Ministère de l’Éducation nationale) 1976. — Les mêmes éditeurs ont publié en russe, à partir des papiers déposés à Moscou, Œuvres I : 1779-1789 ; Œuvres II : 1790-1794 ; Œuvres III : 1794-1795 ; Œuvres IV : 1795-1797, Moscou, 1975-1982. Seul le premier tome est paru en français, Œuvres I, Babeuf avant la Révolution, Paris, Commission d’histoire économique et sociale de la Révolution française, 1977. L’édition des autres volumes prévus est en panne à la suite du décès des promoteurs du projet. — La Correspondance de Babeuf avec l’Académie d’Arras (1785-1788) avait été préalablement publiée sous la direction de M. Reinhard, Paris, PUF, 1961, Publications de la Faculté des Lettres de Paris, un vol. in-8°, 165 p. — Devenue introuvable, l’Histoire de Gracchus Babeuf et du babouvisme, d’après de nombreux documents inédits, 2 volumes, publiés à compte d’auteur en 1884 par Henri Advielle, ont été réédités en reprint dans la collection « Format » du CTHS en 1990 avec une présentation par Claude Mazauric : on y trouve entre autres la Défense générale de Babeuf au Procès de Vendôme. — Les pièces du Procès de Vendôme résultant des saisies opérées chez Babeuf lors de son arrestation ont été publiées par le Directoire et sont accessibles à la Bibliothèque Nationale. — Les imprimés de Babeuf sont en partie conservés et accessibles grâce aux Éditions d’histoire sociale (EDHIS) : C’est le cas du Journal de la Confédération (1790) ; Le correspondant Picard (1791) ; Le Tribun du Peuple et L’Éclaireur du Peuple (1796) sont d’accès aisé. — A. Saitta a publié plusieurs numéros du Tribun du Peuple en livre de poche dans Babeuf, Le Tribun du Peuple, textes choisis, Paris, 10/8, 1969. — Les brochures « thermidoriennes » de Babeuf se trouvent à la Bibliothèque Nationale ou à la Bibliothèque historique de la Ville de Paris : la référence précise en est donnée dans le volume de l’Inventaire signalé au début de cette notice. — S’agissant de recueils de textes, celui de Maurice Dommanget, Pages choisies de Babeuf, Paris, Armand Colin, 1935, s’impose comme un ouvrage de référence. Voir aussi G. et C. Willard, Babeuf. Textes choisis, Paris, 1950. — Le plus au fait des découvertes récentes est la dernière édition du recueil de Claude Mazauric, Babeuf, Écrits, Paris, Messidor, 1988, 330 p. (la première édition date de 1965.). — Enfin, la seconde partie du livre de Philippe Buonarroti , Conspiration pour l’Égalité dite de Babeuf, parue à Bruxelles en 1828, comporte des documents essentiels, toujours nécessaires (Voir ce nom et sources) .

SOURCES : (Utilisées ou citées pour certains compléments de cette notice) Arch. Nat. F/1C/III Aisne 10. — Arch. Dép. de l’Aisne L 24/13, L 24/54. — BN 8° LG 42/338, 43/232, 42/278. — Combier,La justice criminelle à Laon pendant la Révolution, Paris 1882. — Une héritière de Babeuf, pp. 219-220 de : Le curieux. Deuxième volume / par Charles Nauroy.- Paris (6, rue de Seine) : [s.n.], 1885.- 378 p. ; in-8 (Nabu Public Domain Reprints 9 781271 528646). — Notes de G. Dumas, J. Risacher et D. Woronoff.
SOURCES GÉNÉRALES : La bibliographie est immense et récemment s’est considérablement renouvelée. On indiquera trois pistes essentielles pour s’y retrouver : la bibliographie ancienne proposée par Jean Dautry dans la réédition de la Conspiration pour l’Égalité dite de Babeuf, de Buonarroti, op. cit., 2 vol., Paris, Éd. sociales, 1957, col. « Les classiques du Peuple » ; la recension critique de Claude Mazauric dans Babeuf et les problèmes du babouvisme, Colloque de Stockholm (1960), Paris, Éditions sociales, 1963 ; mais surtout l’introduction historiographique de Victor Daline dans sa thèse, Babeuf avant et pendant la Révolution française, Moscou, 1963, édit. fr., 1976, 2e édition, 1987, avec un avant-propos de C. Mazauric, ouvrage de 673 p. qui est au surplus le travail le plus important consacré à Babeuf. — On lira aussi la notice de François Wartelle dans le Dictionnaire historique de la Révolution française, Paris, PUF, 1989, d’Albert Soboul et J.R. Suratteau, p. 63-66.
Plusieurs ouvrages parus depuis celui de Maurice Dommanget, Babeuf et la conjuration des Égaux, Paris, 1924, rééd. Paris, Spartacus, 1970 et surtout le recueil de Dommanget en 1935 dont les orientations sont actualisées dans Sur Babeuf et la conjuration des Égaux, Paris, Maspero, 1970, constituent des récits classiques et plus ou moins à jour de la vie de Babeuf et de la Conspiration : Gérard Walter, Babeuf et la conjuration des Égaux, Paris, 1937. — Georges Lefebvre Questions agraires au temps de la Terreur, La Roche-sur-Yon, 1954 (2eédition). — Georges Lefebvre, Études sur la Révolution française, Paris, 1954. — Alessandro Galante-Garrone, Buonarroti e Babeuf, Torino, 1948. — Claude Mazauric, Babeuf et la Conspiration pour l’Égalité, Paris, 1962. — R.B. Rose, Gracchus Babeuf, The First Revolutionnary Communist, Stanford U. Press, 1978. — Jean Bruhat, Gracchus Babeuf et les Égaux ou « le premier parti communiste agissant », Paris, 1978. — R. Legrand, Babeuf et ses compagnons de route, Paris, Société des Études robespierristes, 1981. — Kare Tönnesson, La défaite des sans-culottes : mouvement populaire et réaction bourgeoise en l’an III, Paris, rééd., 1985. — Ricerche storiografiche su Buonarroti e Babeuf, Rome, 1986. — François Furet, « Babeuf », Dictionnaire critique de la Révolution française, Paris, 1988, p. l99-205. — J. Grandjonc, Communisme/ Kommunismus/ Communism. Origine et développement international de la terminologie communautaire prémarxiste des utopistes aux néo-babouvistes, Trier, Karl Marx Haus, 1989, p. 360-370. — Jean-Marc Schiappa, auteur d’une thèse de l’Université de Paris I sur le mouvement babouviste en l’an V, a publié un récit alerte, Gracchus Babeuf avec les Égaux, Paris, Éditions Ouvrières, "La Part des hommes", 1991. — K. et M. Middell, F.N. Babeuf, Märtyrer der Gleichheit, Berlin, Verlag Neues Leben, 1988. — Philippe Riviale, La Conjuration. Essai sur la Conjuration dite de Babeuf, Paris, L’Harmattan, 1994.
— Près de trente ans après le colloque de Stockholm (1960), op. cit., un autre colloque international a été réuni à Amiens en décembre 1989 dont les Actes ont paru sous le titre Présence de Babeuf : Lumières, Révolution, Communisme, aux Publications de la Sorbonne, 1994, sous la direction d’Alain Maillard, Claude Mazauric et Éric Walter. En quatre parties et avec la collaboration d’une trentaine de spécialistes venus de partout, ce colloque fait le point de manière plurielle sur les connaissances et les nouvelles représentations que les historiens se font de la pensée et de l’action de Babeuf.

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