BÉASSE Jean-François (ou BÉAS)

Par Notice revue et complétée par Jean Risacher

Né vers 1819 à Paris ; serrurier en bâtiment à Paris, puis courtier en librairie à Tours. Militant socialiste et communiste, membre de sociétés républicaines secrètes à Paris comme à Tours.

Malgré son jeune âge, Jean-François Béasse était un animateur de la Société des Saisons, et il participa activement aux journées insurrectionnelles des 12 et 13 mai 1839. Il y fut blessé grièvement au bras et à la main gauche sur les barricades, le 12 mai. Inculpé au procès de la deuxième catégorie avec Auguste Blanqui*, il était l’un de ceux qui « attirent le regard par la douceur de leur physionomie ». Il fut condamné à cinq ans d’emprisonnement le 31 janvier 1840, fut envoyé à Doullens où il entra le 7 février, avec neuf autres condamnés et où il rencontra Pierre Béraud*. Il y est considéré, « tout jeune, paraît d’un caractère faible, se laisse facilement endoctriner et suit l’impulsion qu’on lui donne. Il n’est pas méchant. sa blessure à la main le rend inoffensif ». Il refusa de participer à l’évasion du 13 septembre 1840 mais signa la pétition pour la libération de Lombard*. Malade, il se vit refuser la demande de son père du 21 décembre 1840 de le transférer à l’hôpital Saint-Louis. Le ministère préférait qu’il soit soigné sur place. Après la découverte d’une tentative d’évasion fin janvier 1841, le directeur plaça les coupables dans des cellules d’isolement. Le quartier républicain se mutina et brisa tout se qui se trouvait dans le quartier. Béasse fut encellulé. Il y était encore avec sept de ses camarades le 26 avril 1841.
Libéré par remise de peine le 4 octobre 1844, quoique se disant « amnistié », expulsé de Paris par le préfet de police, espérant que ses relations avec Auguste Blanqui, pourtant toujours à l’hôpital, lui aplaniraient les difficultés du début, Béasse se fixa à Tours. Il ne pouvait plus exercer son ancienne profession et dut se convertir en courtier ou colporteur en librairie, plaçant à domicile des livraisons d’un ouvrage de Robert du Var* (Histoire de la classe ouvrière depuis l’esclavage jusqu’au prolétaire de nos jours). Il profitait de cette nouvelle occupation pour propager les ouvrages pro-communistes et favorables à la classe ouvrière, notamment Voyage en Icarie d’Étienne Cabet*. Perçu comme « généreux, actif, fougueux », Béasse voyait plus souvent Aloysius Huber* que Blanqui à l’hospice de Tours. Il assistait régulièrement aux réunions de la Société mutuelle de l’Union générale de Tours et, surnommé « Longs-Cheveux », il devint un membre actif de la Société lyrique des Fils du Diable, goguette créée par Vieillefond*. Malgré les revendications des membres de cette société d’appartenir au communisme icarien et le culte voué à son créateur, il est incontestable qu’il existait une incompatibilité totale avec Cabet. Pour celui-ci, la goguette avait été créée pour détourner les communistes de Tours de son influence et de celle de son correspondant, le docteur Desmoulins*. Béasse, avec d’autres dérangeait l’organisation et attaquait en particulier Le vrai christianisme. En novembre 1846, Cabet reçut une lettre signée de vingt-neuf communistes de Tours qui demandent le remplacement de Desmoulins par Béasse. Le 18, il signifie à ces signataires que leur appartenance aux Fils du Diable est incompatible avec leur adhésion au mouvement icarien. Trois jours plus tard, c’est l’émeute des grains à Tours. Voir Béraud*, Bouin Étienne*, Lebreton Auguste*
J.-F. Béasse fut arrêté le 27 novembre 1846 avec Blanqui et enfermé au pénitencier le 28. Prévenu d’association illégale, il fut transféré à la maison d’arrêt le 3 décembre 1846, puis de Tours à Blois le 21 avril 1847, comparut le 26 avril devant le tribunal et fut condamné à 6 mois le 29. A sa sortie de prison, comme Blanqui, il se fixa à Blois. Ne pouvant rien retenir contre lui, on ne put l’empêcher de voir Blanqui. Il put quitter Blois vers la mi-novembre 1847 sans encourir de poursuite judiciaire. On sait peu de choses sur lui pour la suite : dès le 25 février 1848, cependant, il rejoignit Blanqui et devint membre de la Société Républicaine Centrale.
Au printemps de la même année, il fut l’un des signataires de la protestation contre les accusations visant Blanqui contenues dans le document Taschereau.
Le Journal Officiel de la Commune signale un fédéré du nom de Béasse qui appartenait au 144e bataillon et qui fut élu, avec 61 voix, membre suppléant de la commission d’enquête du IIIe arr. de Paris « pour les pensions aux victimes des libertés communales », puis membre titulaire. Cette commission se réunit plusieurs fois en avril et mai 1871. Il pourrait parfaitement s’agir de Jean-François Béasse, dont nous n’avons pas d’autres traces. Voir Jacob Léon*

Pour citer cet article :
https://maitron.fr/spip.php?article26035, notice BÉASSE Jean-François (ou BÉAS) par Notice revue et complétée par Jean Risacher, version mise en ligne le 20 février 2009, dernière modification le 27 juillet 2022.

Par Notice revue et complétée par Jean Risacher

SOURCES : Arch. Nat., BB 18/1441, doss. 1992 a. — Arch. Dép. Somme, Registres d’écrou, série Yb15 (1839-1840). — Arch. Dép. Indre-et-Loire, Registres d’écrou, 2Y/161-522 ; 2Y/340-1048. — Les communistes de Tours. Persécutions de police à Blois (23 avril – 22 août), Blois, Impr. de F. Jahyer, 1847, 23 p (Extrait du Courrier de Loir-et-Cher). Réimpr. anastatique par Hachette BNF en 2013, collection Sciences politiques, EAN 9782013183529. — Étienne Cabet, Le voile soulevé sur le procès communiste à Tours et Blois, Paris, Bureau du Populaire, mai 1846. — Les communistes à Tours, réflexions sur leur procès. Persécution de police à Blois, Blois, imprimerie de Félix Jahyer, 1846. — Journal Officiel de la Commune, réimpression, Paris, V. Bunel, éditeur, 1872, 28 avril, 9 et 2 mai 1871. — Cour des Pairs. Procès politiques, 1835-1848, Inventaire dressé par J. Charon-Bordas, Paris, Archives Nationales, 1984 (CC 730 n° 482). — M. Dommanget, Auguste Blanqui. Des origines à la Révolution de 1848. Premiers combats et premières prisons, Paris, Mouton, 1969. — Jeanine Labussière, « La décennie décisive (1840-1851) », Histoire de Tours, Toulouse, Privat 1985. — L.-A. Blanqui, œuvres I. Des origines à la Révolution de 1848, textes présentés par D. Le Nuz, Nancy, Presses Universitaires, 1993. — Jean-Claude Vimont, La prison politique en France, Paris, Anthropos, 1993. — Précisions données par François Fourn (Thèse en cours). — La République, 16 avril 1848. — Note de J-C Vimont.

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